Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contexte

[1] L’appelant a présenté une demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada. L’intimé a rejeté cette demande au stade initial puis, ultérieurement, lors du réexamen, le 15 novembre 2013. L’appelant a interjeté appel de la décision de réexamen en déposant un avis d’appel au Tribunal de la sécurité sociale le 7 mars 2014.

[2] La division générale a jugé que l’appelant devait avoir reçu la décision de réexamen de l’intimé le 25 novembre 2013, ce qui avait pour résultat que le délai de 90 jours pour déposer un avis d’appel avait expiré le 23 février 2015. La division générale en a conclu que l’appelant avait déposé tardivement son avis d’appel d’une décision de réexamen de l’intimé le 7 mars 2014, puisque c’était après l’expiration du délai de 90 jours.

[3] La division générale a refusé d’exercer son pouvoir discrétionnaire d’accorder à l’appelant une prorogation de délai pour lui permettre de déposer un avis d’appel car elle a jugé que l’appelant n’avait pas fourni à temps d’explication raisonnable de son retard à déposer l’avis d’appel. De façon plus significative, la division générale n’a pas considéré que l’appelant avait une cause défendable.

[4] L’appelant a sollicité une permission d’en appeler à la division d’appel. Il a joint à sa demande la copie d’une lettre datée du 16 juillet 2015 qu’il avait reçue de l’intimé. L’appelant a expliqué qu’il avait été en retard pour déposer l’avis d’appel de la décision  de réexamen de l’intimé car il n’avait reçu la décision de révision que le 7 février 2014.

[5] J’ai indiqué dans la décision relative à la permission d’en appeler qu’habituellement je ne prendrais pas en considération de nouveaux faits, comme la lettre datée du16 juillet 2015, aux fins de l’examen d’une demande de permission (à moins que cette lettre ne portât sur l’un ou l’autre des moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social), mais il se trouve que cette lettre non seulement émanait de la partie adverse, mais aussi était-elle étayée par l’allégation de l’appelant selon laquelle il n’avait reçu la décision de réexamen de l’intimé qu’en février 2014.

[6] La permission d’en appeler a été accordée le 27 août 2015 au motif que la division générale avait pu commettre une erreur en fondant sa décision sur une conclusion de fait erronée qu’elle aurait tirée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, ainsi qu’en exigeant de l’appelant qu’il présente une demande de prorogation de délai pour le dépôt d’un avis d’appel alors qu’il ressortait de la preuve que l’appelant avait pu ne pas avoir été en retard dans le dépôt de son avis d’appel.

[7] Le 8 octobre 2015, l’avocat de l’intimé a déposé au Tribunal de la sécurité sociale une lettre indiquant ceci :

[Traduction]
[...] le ministre de l’Emploi et du Développement social ne contestera pas la décision relative à la permission d’en appeler qu’a rendue la DA du TSS en accordant une prorogation de délai pour permettre le réexamen de la demande de [l’appelant].

[8] À la lumière de cette lettre datée du 8 octobre 2015, j’ai déterminé qu’il n’était pas nécessaire de tenir une nouvelle audience sur l’appel porté devant la division d’appel, et ce, en application de l’alinéa 37a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

Analyse

[9] La décision qui s’impose consiste à renvoyer cette affaire à la division générale pour qu’elle statue sur le fond de l’affaire. Toute analyse de la norme de contrôle applicable n’est pas nécessaire, compte tenu des circonstances, mais j’aborderai toutefois quelques-unes des questions qui ont été soulevées.

[10] Il semble que la division générale n’ait pas tenu compte de la preuve de l’appelant selon laquelle il n’avait reçu la décision de réexamen que début février 2014 (en raison d’un déménagement) et que, par conséquent, il avait pu ne pas avoir déposé tardivement son avis d’appel début mars 2014. À l’évidence, la division générale n’a pas mentionné la déclaration de l’appelant indiquée dans son avis d’appel ni la lettre de l’appelant datée du 22 avril 2014 dans laquelle il disait avoir déménagé et n’avoir donc reçu la décision de réexamen qu’en février 2014.

[11] La division générale ne s’est pas reportée à l’explication fournie par l’appelant pour expliquer la raison pour laquelle l’avis d’appel semblait avoir été déposé tardivement. La division générale n’a pas mentionné le fait que l’appelant avait déménagé à peu près au même moment où la décision de réexamen lui avait été envoyée par la poste et que l’appelant n’avait donc reçu la décision de réexamen que début février 2014, après que l’intimé en eût envoyé une copie à la nouvelle adresse de l’appelant.

[12] Nonobstant la preuve qui lui a été présentée et malgré le fait qu’il n’y a pas de dispositions législatives déterminatives applicables à la réception de décisions de réexamen, la division générale a entrepris de déterminer à quel moment l’appelant était susceptible d’avoir reçu la décision de réexamen en appliquant de facto l’alinéa 19(1)a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a présumé un délai raisonnable de mise à la poste de 10 jours après la date de la décision de réexamen et a jugé que l’appelant devait donc avoir reçu cette décision le 25 novembre 2013. La division générale a calculé que le délai de 90 jours prévu à l’alinéa 52(1)b) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prenait fin le 23 février 2015 et conclu que l’appelant avait donc 12 jours de retard. Je trouve que cette preuve évacue d’emblée toute présomption que l’appelant a reçu la décision de réexamen en novembre 2013.

[13] Je conclus que la division générale a commis une erreur en appliquant de facto l’alinéa 19(1)a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale ainsi qu’en jugeant que l’appelant devait avoir reçu la décision de réexamen en novembre 2013 à la lumière de la preuve dont elle était saisie. Je conclus aussi que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée qu’elle a tirée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[14] Compte tenu de la preuve, la décision de la division générale ne saurait tenir lorsque assujettie à une norme de contrôle de la raisonnabilité, puisque la décision n’appartient pas à l’éventail des issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[15] Comme l’appelant n’était pas en retard pour déposer l’avis d’appel, il était en droit d’obtenir – mais en a été privé – un examen complet de sa cause sur le fond.

Conclusion

[16] L’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée à la division générale pour un réexamen complet.

[17] L’appelant a indiqué, dans de récentes observations, qu’il avait besoin d’un délai supplémentaire pour rassembler d’autres preuves médicales avant de passer à l’audience. Les parties ont la permission de déposer tout dossier additionnel ainsi que des observations traitant du fond du litige sous réserve de toute directive ou prescription donnée par le membre de la division générale chargé d’instruire l’affaire.

[18] Pour éviter toute possibilité de crainte de partialité, l’affaire devrait être confiée à un membre différent de la division générale et la décision de la division générale devrait être retirée du dossier.

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