Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est accordée et l’appel est accueilli.

Introduction

[2] Le 11 mai 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») a rendu sa décision concluant que l’intimée était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au sens de l’article 42 du Régime de pensions du Canada (le « RPC »). En conséquence, elle était admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (le « Régime »). Le demandeur présente une demande de permission d’en appeler (la « Demande ») de la décision.

Moyens invoqués à l'appui de la demande de permission d'en appeler

[3] Le demandeur plaide que la division générale a commis, en fait et en droit, des erreurs qui justifient que la division d’appel accueille la Demande. Le demandeur soutient que la division générale a commis une erreur en appliquant la mauvaise date de début d’invalidité de juillet 2010 ainsi qu’une date incorrecte d’ouverture de la pension (date à laquelle la pension d’invalidité devient payable).

[4] Le demandeur demande à ce que la division d’appel accueille la Demande. En outre, le demandeur demande à ce que la division d’appel exerce le pouvoir que lui confère l’article 59 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS ») pour rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. L’intimée déclare que la décision que la division générale aurait dû rendre est celle qui, en application de l’alinéa 42(2)b) du RPC, répute l’intimée être devenue invalide en septembre 2010. En application de l’article 69 du RPC, le paiement de la pension d’invalidité commence quatre mois plus tard, soit en janvier 2011.

Observations

[5] Comme il s’agit d’une affaire dont l’issue pourrait avoir des effets négatifs sur l’intimée, la division d’appel a donné à l’intimée la possibilité de présenter des observations avant qu’elle tranche l’appel. Il a été demandé à l’intimée de présenter ces observations au plus tard le 6 octobre 2015. En date du jour où cette décision a été rendue, le Tribunal n’avait reçu aucune observation de la part de l’intimée.

Question en litige

[6] Le Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[7] La demande de permission d’en appeler d’une décision de la division générale constitue la première étape du processus d’appel.Note de bas de page 1 Le critère est moins rigoureux que celui qui doit être appliqué à l’audition de l’appel sur le fond. Toutefois, pour que le Tribunal accorde la permission d’en appeler, il faut que la division d’appel soit convaincue que l’appel aurait une chance raisonnable de succès.Note de bas de page 2

[8] Dans Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, ainsi que dans Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63, la Cour d’appel fédérale a assimilé une chance raisonnable de succès à une cause défendable. Dans Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (CF), la Cour fédérale a déclaré que, pour qu’une permission d’en appeler soit accordée, il faut que la demande soulève un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel. Déterminer si l’affaire révèle une cause défendable n’implique pas de déterminer le bien‑fondé de l’affaire. Cela implique toutefois de tenir compte du droit applicable et des éléments de preuve présentés.

[9] Il n’y a que trois moyens sur lesquels un appelant peut porter une décision en appel. Ces moyens, stipulés à l’article 58 de la Loi sur le MEDS, sont les suivants :

  1. 1) un manquement à la justice naturelle;
  2. 2) une erreur de droit commise par la division générale;
  3. 3) une décision que la division générale a fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.Note de bas de page 3

Analyse

[10] Pour accueillir la Demande, la division d’appel doit conclure, dans le cas où l’instruction de l’affaire commanderait la tenue d’une audience complète, qu’au moins l’un des moyens invoqués à l’appui de la Demande se rattache à un moyen d’appel admissible. La division d’appel doit aussi conclure que l’appel aurait une chance raisonnable de succès sur ce moyen. Pour les motifs exposés ci‑dessous, le Tribunal est convaincu que cet appel aurait une chance raisonnable de succès.

Erreurs alléguées

[11] Le demandeur affirme que la division générale a mal appliqué les dispositions régissant le versement d’une pension d’invalidité du Régime. Plus précisément, il déclare que la division générale a fait erreur sur la date réputée de déclaration d’invalidité et sur la date de prise d’effet du versement (c.‑à‑d. la date d’ouverture de la pension). L’intimée soutient aussi que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle n’a pas appliqué l’alinéa 42(2)b) du RPC (c.‑à‑d. la disposition relative à la rétroactivité maximale de quinze mois pour le paiement de prestations d’invalidité au titre du Régime).

[12] Le demandeur a fait valoir que, compte tenu de la date de dépôt de la demande de pension d’invalidité du Régime par l’intimée, septembre 2010 est la bonne date réputée de déclaration de l’invalidité. Par conséquent, le versement de la pension commencerait quatre mois plus tard, en janvier 2011.

[13] Les conclusions contestées se trouvent au paragraphe 30 de la décision de la division générale. La membre a tiré comme suit ses conclusions :

[Traduction]

[50] Le Tribunal conclut que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée en juillet 2010, lorsqu’elle a cessé de travailler en raison des symptômes de son affection, après avoir vu ses tâches au travail sensiblement modifiées dans le but de demeurer employée le plus longtemps possible. Aux termes de l’article 69 du RPC, les paiements commencent quatre mois après la date à laquelle le prestataire est devenu invalide. En l’espèce, les paiements commencent en novembre 2010.

Faits

[14] L’intimée a présenté une demande de pension d’invalidité au titre du Régime le 12 décembre 2011. Sa demande a été rejetée, et ce rejet a été maintenu en révision. L’intimée a fait appel de la décision en révision. Le 9 avril 2015, une membre de la division générale a entendu l’appel. La membre a rendu sa décision le 11 mai 2015.

[15] Les dispositions législatives suivantes régissent l’octroi d’une pension d’invalidité au titre du Régime.
L’alinéa 42(2)b) du RPC porte ce qui suit :

une personne est réputée être devenue ou avoir cessé d’être invalide à la date qui est déterminée, de la manière prescrite, être celle où elle est devenue ou a cessé d’être, selon le cas, invalide, mais en aucun cas une personne – notamment le cotisant visé au sous‑alinéa 44(1)b)(ii) –  n’est réputée être devenue invalide à une date antérieure de plus de quinze mois à la date de la présentation d’une demande à l’égard de laquelle la détermination a été faite.

L’article 69 du RPC traite du moment auquel une pension d’invalidité du Régime devient payable.

Ouverture de la pension

69. Sous réserve de l’article 62, lorsque le versement d’une pension d’invalidité est approuvé, la pension est payable pour chaque mois à compter du quatrième mois qui suit le mois où le requérant devient invalide sauf que lorsque le requérant a bénéficié d’une pension d’invalidité prévue par la présente loi ou par un régime provincial de pensions à un moment quelconque au cours des cinq années qui ont précédé le mois où a commencé l’invalidité au titre de laquelle le versement est approuvé :

  1. a) la pension est payable pour chaque mois commençant avec le mois qui suit le mois au cours duquel est survenue l’invalidité au titre de laquelle le versement est approuvé;
  2. b) la mention de « quinze mois » à l’alinéa 42(2)b) s’interprète comme une mention de « douze mois ».

[16] Les dispositions législatives sont claires. L’alinéa 42(2)b) du RPC prévoit une période maximale de rétroactivité de quinze mois à partir de la date de dépôt de la demande, qui, en l’espèce, est le 12 décembre 2011. La période de rétroactivité va donc de septembre 2010 à décembre 2011.

[17] L’article 69 du RPC prévoit que le versement de la pension d’invalidité du Régime commence quatre mois après la date à laquelle l’invalidité est réputée avoir commencé. Dans le cas d’intimée, cette date est janvier 2011.

[18] La division générale a réputé l’intimée être devenue invalide en date de [traduction] « juillet 2010, lorsqu’elle a cessé de travailler en raison des symptômes de son affection. » Il s’agit là d’une erreur de droit. La date correcte de référence n’est pas le jour où un demandeur de pension d’invalidité du Régime a cessé de travailler, mais plutôt la date à laquelle il a présenté sa demande de pension. Dans le cas qui nous occupe, la demande a été présentée le 10 décembre 2011, de sorte que c’est la date que la division générale aurait dû utiliser pour effectuer le calcul tant de la date réputée de déclaration d’invalidité que de la date d’ouverture de la pension.

[19] La division d’appel conclut que le demandeur a soulevé une cause défendable.

[20] En conséquence, le Tribunal accueille la Demande.

L'appel

[21] L’avocat du demandeur a demandé à ce que la division d’appel non seulement accueille la Demande, mais aussi accueille l’appel et exerce le pouvoir que lui confère l’article 59 de la Loi sur le MEDS pour rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, à savoir que l’intimée était invalide en date de septembre 2010, avec un versement de la pension commençant quatre mois plus tard, en janvier 2011.

[21] Compte tenu des circonstances qui suivent, la division d’appel est d’avis qu’il est indiqué, en l’espèce, de simultanément accueillir la demande de permission, accueillir l’appel et exercer la compétence que lui accorde l’article 59 de la Loi sur le MEDS en décidant ce qui suit, sans autre avis à l’intimée :

  1. 1) la division d’appel a donné à l’intimée la possibilité de déposer des observations au sujet de la Demande. Au moment du prononcé des présents motifs, l’intimée n’avait pas déposé d’observations;
  2. 2) la division d’appel est convaincue, sur le fondement du droit applicable, que le demandeur a soulevé une cause défendable;
  3. 3) le Tribunal a le mandat de diriger l’instance de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Conclusion

[23] Par conséquent, la Demande est accueillie et l’appel est accueilli.

Décision

[24] La division d’appel exerce la compétence que lui reconnaît l’article 59 de la Loi sur le MEDS pour rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Par conséquent, la décision que rend la division d’appel est que, puisque la demande de pension d’invalidité au titre du Régime présentée par l’intimée a été reçue en décembre 2011, l’intimée, en vertu de l’alinéa 42(2)b) du RPC, est réputée être devenue invalide en septembre 2010. En application de l’article 69 du RPC, le versement de la pension d’invalidité commence donc en janvier 2011, ce qui correspond à quatre mois après la date à laquelle l’intimée est réputée être devenue invalide.

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