Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparution

M. B. (appelante)

Introduction

[1] La demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) de l’appelante a été estampillée par l’intimé le 8 avril 2013. L’intimé a rejeté la demande initialement et après révision. L’appelante a interjeté appel de la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Le présent appel devait initialement être instruit par vidéoconférence parce que l’appelante est la seule partie à assister à l’audience et qu’un service de vidéoconférence est disponible à une distance raisonnable de son lieu de résidence.

[3] Le 10 juin 2015, l’appelante a demandé que son audience par vidéoconférence soit remplacée par une audience par téléconférence parce qu’elle ne pouvait pas se déplacer. Le 26 août 2015, l’appelante a demandé que l’on devance d’une semaine son audience prévue le 22 octobre 2015. L’audience prévue le 22 octobre 2015 a par la suite été ajournée et remise au 15 octobre 2015. Elle s’est tenue par téléconférence comme l’avait demandé l’appelante.

Droit applicable

[4] L’article 44(1)(b) du RPC énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Pour être admissible à une telle pension, une partie appelante doit :

  1. ne pas avoir atteint l’âge de 65 ans;
  2. ne pas toucher de pension de retraite du RPC;
  3. être invalide;
  4. avoir versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[5] Le calcul de la PMA est important puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au plus tard à la fin de la PMA.

[6] L’article 42(2)(a) du RPC prévoit que pour être considérée comme étant invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité n’est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[7] Le litige ne concerne pas la PMA, car les parties conviennent qu’elle a pris fin le 31 décembre 2014, ce qu’a également conclu le Tribunal.

[8] En l’espèce, le Tribunal doit décider s’il est plus probable que le contraire que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au plus tard à la fin de sa PMA.

Preuve

Preuve orale

Antécédents professionnels, état de santé et traitements

[9] L’appelante était âgée de 37 ans le jour de l’audience. Elle a affirmé qu’elle n’avait aucune dextérité de la main gauche et qu’il s’agissait d’une affection préexistante. Elle a expliqué qu’elle s’était blessée au côté droit lors d’un accident en 2003.

[10] L’appelante a en outre indiqué qu’elle avait tenté de faire de la réadaptation. Elle avait commencé à travailler en 2007, mais avec beaucoup de difficulté. Après 2010, elle avait essayé d’effectuer un retour au travail en prenant du Tridural et du Celebrex, mais elle ne pouvait pas travailler en prenant du Tridural. Elle éprouvait une faiblesse prononcée dans son bras et ne pouvait pas travailler. Elle a déclaré que la douleur s’aggravait à ce moment-là.

[11] L’appelante a également affirmé qu’elle avait subi une blessure au dos et qu’elle avait depuis de la difficulté à rester assise. Elle a indiqué que son nom était sur une liste d’attente pour voir un chirurgien, mais que l’intervention était [traduction] « risquée ». Elle a dit qu’un médecin lui avait conseillé de prendre congé. Elle a ajouté qu’elle avait des troubles du sommeil et des problèmes d’anxiété.

[12] L’appelante a affirmé qu’elle avait fait des séances de physiothérapie de 2006 à 2010. Elle avait aussi fait des exercices de physiothérapie pour son bras de 2010 à 2013. Elle a dit qu’on lui avait diagnostiqué une [traduction] « déchirure du labrum ». Selon elle, le rapport du Dr Reesor était un rapport médical complet et le rapport de la Dre Senior était fondé sur des renseignements médicaux limités.

[13] L’appelante a expliqué qu’après la conclusion de son procès, elle ne pouvait plus utiliser son bras. Elle avait de la difficulté à rédiger des examens écrits. Elle ressentait de la douleur et était atteinte d’arthrose, d’anxiété et de dépression.

[14] L’appelante a affirmé qu’en septembre 2014 elle n’était plus en mesure de poursuivre ses études de droit en Angleterre. Elle était donc revenue au Canada et était retournée chez ses parents. Elle était retournée vivre à X en juillet 2015. L’appelante a déclaré qu’elle avait essayé la massothérapie. Elle avait reçu des prestations d’invalidité de longue durée de février 2012 à août 2014. Elle a dit que l’état de son bras s’était détérioré de juillet 2010 à février 2012. Elle a expliqué qu’elle n’avait pas fait d’études depuis septembre 2014.

[15] L’appelante a affirmé qu’elle prenait actuellement du Celebrex, du Tridural et de l’Ibuprofène. Elle prenait aussi des bains chauds et recevait des traitements de physiothérapie pour soulager sa douleur. L’appelante a expliqué qu’elle était très sensible aux médicaments et qu’elle avait cessé de prendre certains analgésiques. Elle ne s’était pas rendue dans une clinique antidouleur et gérait sa douleur en cessant ses activités.

[16] L’appelante a déclaré qu’elle avait vu le Dr Reesor pour la première fois en août 2012 et pour la dernière fois en novembre 2014.

Études

[17] L’appelante a décrit les difficultés qu’elle a éprouvées à la faculté de droit de X en Angleterre. Elle avait des difficultés à écrire et à taper à cause de sa paralysie cérébrale. Elle ne pouvait utiliser qu’un seul bras. La douleur dans son bras était de 8 sur une échelle de 0 à 10 et variait en fonction de l’activité.

[18] L’appelante a affirmé qu’elle avait terminé ses examens à la faculté de droit de X en Angleterre en août 2014. Elle n’avait réussi que trois cours, mais ceux-ci ne donnaient pas droit à des crédits au Canada. Elle avait obtenu une note inférieure à la note requise de 50 % dans trois cours. L’appelante a également déclaré qu’elle avait échoué à deux autres examens et qu’elle n’avait pas terminé deux cours. Elle était clouée au lit après avoir terminé ses examens.

Activités quotidiennes

[19] L’appelante a affirmé qu’elle ne conduisait pas. Elle avait des difficultés à s’habiller et à se laver. Elle ne pouvait marcher que sur de courtes distances en raison de ses problèmes de dos. Elle a ajouté qu’elle ne pouvait utiliser un ordinateur que de façon limitée et qu’elle ne voyageait pas.

Preuve documentaire

[20] Dans son questionnaire relatif aux prestations d’invalidité daté du 8 avril 2013, l’appelante a indiqué qu’elle avait obtenu un baccalauréat en criminologie et en droit avec mention. Elle avait travaillé comme greffière au « X » du 20 mars 2007 au 11 février 2012. Son état de santé s’était détérioré en juillet 2010 et les médecins avaient recommandé des mesures d’adaptation au travail, mais celles-ci n’avaient pas été mises en place. L’appelante a dit que son état de santé global s’affaiblissait. Elle recevait des prestations de « X ». Elle s’était blessée à l’épaule droite, au dos et au cou en chutant le 8 novembre 2003. Elle souffrait de douleurs chroniques dues à sa blessure auxquelles s’ajoutait une paralysie cérébrale. Elle ne pouvait pas rester assise pendant de longues périodes en raison des douleurs. Elle n’avait pas de motricité fine ou de dextérité de la main gauche. Elle prenait du Celebrex, du Tridural et de l’Ibuprofène. Elle avait fait de la massothérapie. L’appelante a également indiqué qu’elle avait réduit ses séances de physiothérapie en raison de contraintes financières.

[21] Dans un rapport médical du RPC estampillé le 12 avril 2013, le Dr Neil Rogers a diagnostiqué chez l’appelante des douleurs chroniques à l’épaule droite dues à un accident antérieur. Il a également déclaré que l’appelante était atteinte d’ostéoarthrite de la colonne cervicale et de paralysie cérébrale. Il a fait référence à la blessure chronique au bas du dos de l’appelante. Il a en outre indiqué que l’appelante avait fait de la physiothérapie et de la massothérapie. Il a écrit que l’appelante souffrait de douleurs chroniques à l’épaule droite et à la colonne cervicale.

[22] Le 14 mai 2013, le Dr M. S. Acharya, spécialiste en physiatrie et en réadaptation, a signalé que l’appelante éprouvait des douleurs persistantes aux tissus de soutien au niveau du bras droit, des structures cervicales et paracervicales ainsi que des structures pectorales et parascapulaires du côté droit (à la suite d’une chute accidentelle le 8 novembre 2003). Il a en outre expliqué que l’appelante avait été confrontée à un phénomène de surutilisation dans ses activités professionnelles et quotidiennes parce que son bras gauche n’était pas fonctionnel et qu’elle avait des antécédents de paralysie cérébrale. Il a en outre indiqué que le sommeil de l’appelante, sa tolérance aux activités et peut-être même son humeur avaient été perturbés par la conclusion récente d’un procès qu’elle attendait depuis plusieurs mois.

[23] Le 30 juillet 2013, le Dr Acharya a signalé que l’appelante souffrait de douleurs persistantes aux tissus de soutien au niveau de son bras droit et des structures cervicales et paracervicales, et qu’elle présentait des symptômes au niveau des structures pectorales et parascapulaires du côté droit. Il a indiqué que l’appelante avait fait une chute accidentelle le 8 novembre 2003. Il a également écrit que l’appelante avait été confrontée à un phénomène de surutilisation dans ses activités professionnelles et quotidiennes. Il a expliqué que le sommeil de l’appelante, sa tolérance aux activités et peut-être même son humeur avaient été perturbés, ce qui aggravait les douleurs qu’elle ressentait et limitait sa capacité à se présenter au travail et à effectuer ses activités quotidiennes. Il a de plus écrit que l’appelante était atteinte de restrictions physiques modérées et que sa déficience était partielle, et non complète.

[24] Dans un rapport du Centre d’évaluation X datée du 12 novembre 2013, il a été confirmé que l’appelante était inscrite dans un programme de droit de troisième cycle à temps plein à l’Université de X en Angleterre qui a commencé en septembre 2013.

[25] Le 2 juin 2014, la Dre Jackie Senior (médecin du travail à X, en Angleterre) a indiqué qu’en raison de la nature chronique de la blessure de l’appelante et de sa paralysie cérébrale sous-jacente, il était probable qu’elle aurait des difficultés à assister régulièrement à ses cours. Elle a déclaré que l’appelante aurait des difficultés à rester assise longtemps et à soulever de manière répétitive des objets de plus de deux kilogrammes. Elle a en outre expliqué que l’appelante aurait également des difficultés à travailler en maintenant son bras droit au-dessus de ses épaules pendant de longues périodes.

[26] Le 23 janvier 2015, le Dr K. Reesor, psychologue, a écrit qu’il avait diagnostiqué à l’appelante en se fondant sur le DSM-5 un trouble dépressif majeur, un trouble de l’adaptation avec anxiété et un trouble à symptomatologie somatique avec douleur prédominante (persistante). Il a écrit que les troubles de l’appelante étaient apparus dans le contexte d’une légère hémiparésie congénitale du côté gauche à la suite d’une blessure, et qu’ils incluaient une séparation de l’articulation acromio-claviculaire droite de stade 1, une élongation cervicale, des changements dans les disques, un dysfonctionnement des colonnes cervicale et thoracique, des problèmes chroniques aux tissus mous de l’épaule droite et un syndrome de douleur myofasciale. Il a indiqué que les déficiences de l’appelante l’avaient empêché à plusieurs reprises d’exercer avec succès des activités dans un contexte professionnel ou universitaire malgré des mesures d’adaptation et ses tentatives de participer à des activités productives. Il a écrit que l’appelante était atteinte de graves restrictions et limitations et qu’elle avait une faible tolérance aux activités qui malgré ses efforts l’empêchaient de faire son travail de greffière, de réussir ses études universitaires et d’exercer tout autre travail qu’elle serait apte à occuper en raison de ses études, de sa formation et de son expérience. Il a écrit qu’il ne pouvait envisager aucune mesure d’adaptation viable, applicable ou pratique qui pourrait être mise en place pour permettre à l’appelante de reprendre son travail de greffière ou ses études. Il a en outre écrit que les incapacités physiques ou fonctionnelles et psychologiques, les restrictions, les limitations et les déficiences de l’appelante étaient [traduction] « très clairement » de nature chronique et persistante.

Observations

[27] L’appelante a soutenu qu’elle est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. On devrait accorder plus d’importance au rapport du Dr Reesor, car il a eu accès à tous ses documents médicaux.
  2. Le rapport du Dr Reesor traitait de ses problèmes actuels.
  3. Le rapport de la Dre Senior était limité et elle n’était pas sa médecin traitante.
  4. Elle n’avait pas de motricité fine ou de dextérité de la main gauche.
  5. Elle était atteinte de douleurs chroniques et d’anxiété.
  6. Elle avait de la difficulté à rester assise.

[28] L’intimé a fait valoir que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Le Dr Acharya a jugé que la déficience à l’épaule droite de l’appelante est modérée, et non complète.
  2. L’appelante a soumis une évaluation approfondie de l’Université X en Angleterre où elle avait été acceptée dans un programme en droit à plein temps qui devait commencer à l’automne 2013. Non seulement l’appelante était capable de travailler d’après ses résultats cliniques, mais elle était également capable de fréquenter l’université à plein temps, ce qui en soi démontrait sa capacité à travailler et équivalait au niveau d’engagement requis par un travail à plein temps. Cette très jeune appelante bien instruite n’était pas invalide au sens du programme de prestations d’invalidité du RPC.
  3. C’est à l’appelante qu’il incombe de prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée avant la fin de sa PMA. Toutefois, elle n’a pas été en mesure de la faire, car sa capacité à fréquenter l’université à plein temps à X en Angleterre dans un programme d’études exigeant et autonome de la faculté de droit démontrait sa capacité à travailler.
  4. Une déficience partielle à la main ou à un membre n’empêche pas une personne par ailleurs apte physiquement de se chercher et d’obtenir un emploi, en particulier si l’on considère son âge, son éducation et ses compétences transférables.
  5. Il a été reconnu que le Dr Reesor appuyait l’appelante, mais les résultats d’examen n’ont pas permis d’établir qu’elle était atteinte d’un problème psychologique grave qui l’empêcherait d’exercer un emploi convenable.

Analyse

[29] L’appelante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2014.

Caractère grave

[30] Le volet du critère relatif à la gravité doit être évalué dans un contexte réaliste (Villani c Canada (PG), 2001 CAF 248). Cela signifie que pour décider si l’invalidité d’une personne est grave, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[31] Afin d’analyser la capacité de travailler de l’appelante, le Tribunal examinera la situation personnelle et l’état de santé de l’appelante. Le Tribunal souhaite souligner le fait que le volet du critère relatif à la gravité fait référence à la capacité de travailler et non au diagnostic de la maladie ou des problèmes de santé (Klabouch c Canada (MDS), 2008 CAF 33).

[32] Le Tribunal estime que l’appelante a travaillé comme greffière au « X » du 20 mars 2007 au 11 février 2012. Le Tribunal reconnaît que l’appelante a touché des prestations d’invalidité de longue durée à partir de février 2012. Le Tribunal constate que l’appelante était inscrite à la faculté de droit de X en Angleterre et qu’elle a commencé ses études en septembre 2013. Le Tribunal estime que l’appelante a passé ses examens écrits en août 2014 à la faculté de droit de X en Angleterre et est ensuite rentrée au Canada en septembre 2014. Le Tribunal constate que l’appelante n’a suivi avec succès que trois cours à la faculté de droit de X en Angleterre. Le Tribunal reconnaît en outre que l’appelante n’est pas retournée à la faculté de droit en Angleterre et n’a pas suivi de cours depuis septembre 2014. Le Tribunal note que l’appelante a fait valoir qu’elle ne peut pas travailler et qu’elle est atteinte de douleurs chroniques et d’anxiété.

[33] Le Tribunal reconnaît qu’il y a plusieurs rapports clés dans le dossier d’appel sur l’état de santé de l’appelante. Premièrement, le 12 avril 2013, le Dr Rogers a diagnostiqué chez l’appelante des douleurs chroniques à l’épaule droite dues à un accident antérieur. Il a également déclaré que l’appelante était atteinte d’ostéoarthrite de la colonne cervicale et de paralysie cérébrale. Il a fait référence à la blessure chronique au bas du dos de l’appelante. Il a en outre indiqué que l’appelante avait fait de la physiothérapie et de la massothérapie. Il a écrit que l’appelante souffrait de douleurs chroniques à l’épaule droite et à la colonne cervicale.
Il a écrit que l’appelante souffrait de douleurs chroniques à l’épaule droite et à la colonne cervicale. Le Tribunal accorde un certain poids à ce rapport, car il fournit un diagnostic détaillé de l’état de santé de l’appelante environ 14 mois après qu’elle ait cessé de travailler comme greffière en février 2012.

[34] Ensuite, le 30 juillet 2013, le Dr Acharya a signalé que l’appelante éprouvait des douleurs persistantes aux tissus de soutien au niveau du bras droit et des structures cervicales et paracervicales et qu’elle présentait des symptômes au niveau des structures pectorales et parascapulaires du côté droit. Il a indiqué que l’appelante avait fait une chute accidentelle le 8 novembre 2003. Il a aussi écrit que l’appelante avait été confrontée à un phénomène de surutilisation dans ses activités professionnelles et quotidiennes. Il a expliqué que le sommeil de l’appelante, sa tolérance aux activités et peut-être même son humeur avaient été perturbés, ce qui aggravait les douleurs qu’elles ressentaient et limitait sa capacité à se présenter au travail et à effectuer ses activités quotidiennes. Il a de plus déclaré que l’appelante était atteinte de restrictions physiques modérées et que sa déficience était partielle, et non complète. Le Tribunal accorde un certain poids à ce rapport, car il contient des renseignements clairs et détaillés sur les limitations fonctionnelles de l’appelante.

[35] Troisièmement, le 23 janvier 2015, le Dr Reesor, psychologue, a écrit qu’il avait diagnostiqué à l’appelante en se fondant sur le DSM-5 un trouble dépressif majeur, un trouble de l’adaptation avec anxiété et un trouble à symptomatologie somatique avec douleur prédominante (persistante). Il a écrit que les troubles de l’appelante étaient apparus dans le contexte d’une légère hémiparésie congénitale du côté gauche à la suite d’une blessure, et qu’ils incluaient une séparation de l’articulation acromio-claviculaire droite de stade 1, une élongation cervicale, des changements dans les disques, un dysfonctionnement des colonnes cervicale et thoracique, des problèmes chroniques aux tissus mous de l’épaule droite et un syndrome de douleur myofasciale. Il a indiqué que les déficiences de l’appelante l’avaient empêché à plusieurs reprises d’exercer avec succès des activités dans un contexte professionnel ou universitaire malgré des mesures d’adaptation et ses tentatives de participer à des activités productives. Il a écrit que l’appelante était atteinte de graves restrictions et limitations et qu’elle avait une faible tolérance aux activités qui malgré ses efforts l’empêchaient de faire son travail de greffière, de réussir ses études universitaires et d’exercer tout autre travail qu’elle serait apte à occuper en raison de ses études, de sa formation et de son expérience. Il a écrit qu’il ne pouvait envisager aucune mesure d’adaptation viable, applicable ou pratique qui pourrait être mise en place pour permettre à l’appelante de reprendre son travail de greffière ou de réussir à reprendre ses études. Il a en outre écrit que les incapacités physiques ou fonctionnelles et psychologiques, les restrictions, les limitations et les déficiences de l’appelante étaient [traduction] « très clairement » de nature chronique et persistante. Le Tribunal reconnaît que ce rapport est daté de plusieurs semaines après la fin de la PMA de l’appelante. Néanmoins, le rapport reposait sur une évaluation de l’appelante datant de novembre 2014, c’est-à-dire avant la fin de sa PMA. Le Tribunal accorde un poids considérable à ce rapport, car il établit clairement que les incapacités physiques ou fonctionnelles et psychologiques, les restrictions, les limitations et les déficiences de l’appelante étaient de « nature chronique et persistante ».

[36] Le Tribunal note que l’appelante a longuement témoigné à propos de ses douleurs chroniques, de son anxiété et de ses limitations importantes. Le témoignage de l’appelante était-il crédible? Le Tribunal estime que oui, car il était très détaillé et franc. Sur ce point, le Tribunal s’appuie sur l’affaire Petit c MDRH (avril 1998), CP 4855 et PG 8711, où il a été expliqué que le témoignage d’une partie demanderesse peut, comme c’est souvent le cas, être essentiel au règlement d’une affaire. Dans cette décision, il a été expliqué que si le témoignage d’une partie demanderesse est jugé crédible, il doit être pris en considération sérieusement et à sa juste valeur. Le Tribunal s’appuie en outre sur l’affaire Chase c MDRH (5 novembre 1998), CP 6540, dans laquelle il a été expliqué que l’expérience subjective qu’a une partie demanderesse d’une pathologie et les conséquences qui en découlent sur sa capacité à détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice étaient des facteurs importants à prendre en considération.

[37] Le Tribunal accepte que l’appelante ne pouvait pas reprendre son travail de greffière. Le Tribunal accepte également que l’appelante ne pouvait plus poursuivre ses études à la faculté de droit en Angleterre. Cependant, il rester à décider si l’appelante était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice au plus tard à la fin de sa PMA, soit au 31 décembre 2014. Pour répondre à cette question, le Tribunal doit examiner la situation personnelle de l’appelante dans un « contexte réaliste » (Villani c Canada (PG), 2001 CAF 248).

[38] Le Tribunal constate que l’appelante n’avait que 37 ans à la fin de sa PMA et que l’appelante possède une bonne éducation. Néanmoins, l’expérience de vie de l’appelante, qui est aux prises avec une paralysie cérébrale, des douleurs chroniques, de l’anxiété et un trouble dépressif majeur, est un facteur important dont il faut tenir compte dans l’évaluation de sa capacité à travailler. L’appelante était-elle incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice à la fin de sa PMA ou avant celle-ci? Le Tribunal conclut, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice à la fin de sa PMA ou avant celle-ci en raison de ses échecs à la faculté de droit, de ses limitations physiques importantes, de ses douleurs chroniques, de son anxiété et de son trouble dépressif majeur.

[39] À ce stade, le Tribunal souhaite souligner les orientations énoncées par la Commission d’appel des pensions dans l’affaire MSBNS c McDonald (octobre 1988), CP 1527 CEB et PG 8564. Dans cette décision, il a été expliqué que la portée de l’article 42(2)(a) du RPC ne se limitait pas uniquement à l’invalidité mentale ou physique, mais qu’elle incluait aussi une invalidité résultant de la conjugaison d’aspects tant mentaux que physiques. Le Tribunal juge que l’appelante est atteinte d’une invalidité résultant d’une conjugaison d’aspects mentaux et physiques.

[40] Le Tribunal souligne que l’appelante a reçu un grand nombre de diagnostics, y compris un trouble dépressif majeur, un trouble de l’adaptation avec anxiété et un trouble à symptomatologie somatique avec douleur prédominante. De plus, le Dr Reesor a écrit que les troubles de l’appelante étaient apparus dans le contexte d’une légère hémiparésie congénitale du côté gauche à la suite d’une blessure, et qu’ils incluaient une séparation de l’articulation acromio-claviculaire droite de stade 1, une élongation cervicale, des changements dans les disques, un dysfonctionnement des colonnes cervicale et thoracique, des problèmes chroniques aux tissus mous de l’épaule droite et un syndrome de douleur myofasciale. Sur ce point, le Tribunal se fonde également sur l’affaire Bungay c Canada (PG), 2011 CAF 47, où il a été expliqué que l’état d’une partie demanderesse doit être évalué dans son ensemble. Dans cette décision, la CAF a écrit ce qui suit : « Toutes les détériorations de la partie demanderesse ayant une incidence sur son employabilité sont examinées, pas seulement les détériorations les plus importantes ou la détérioration principale. »

[41] Le Tribunal doit également se pencher sur la question de savoir si l’appelante a tenté d’atténuer la gravité de ses problèmes de santé en suivant des traitements. Le Tribunal reconnaît que l’appelante a essayé la physiothérapie et a consulté de nombreux médecins. Le Tribunal note en outre que l’appelante a expliqué qu’elle avait réduit ses séances de physiothérapie en raison de contraintes financières. Le Tribunal reconnaît qu’il s’agit là d’une explication raisonnable. Compte tenu de sa situation, le Tribunal estime que l’appelante a tenté d’atténuer ses problèmes de santé en suivant des traitements.

[42] Le Tribunal est conscient que l’intimé a fait valoir que l’appelante faisait des études universitaires à plein temps à la faculté de droit de X en Angleterre, ce qui témoignait de sa capacité à travailler. Toutefois, le Tribunal a évalué la situation personnelle de l’appelante et a déterminé que sa fréquentation de la faculté de droit de X en Angleterre était une tentative d’études ratée. En outre, le Tribunal a évalué la capacité de l’appelante à travailler dans un contexte « réaliste » et a conclu que, selon la prépondérance des probabilités, l’appelante était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice à la fin de sa PMA ou avant celle-ci en raison de sa paralysie cérébrale, de ses douleurs chroniques, de dépression et de son anxiété.

[43] Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, le Tribunal conclut qu’il est plus probable que le contraire que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée en novembre 2014, soit avant la fin de sa PMA le 31 décembre 2014. Le Tribunal tire cette conclusion à la lumière du rapport du Dr Reesor selon lequel les invalidités physiques ou fonctionnelles et psychologiques de l’appelante étaient de nature chronique et persistante.

[44] En bref, le Tribunal conclut, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice en date de novembre 2014. Le Tribunal tire cette conclusion en se fondant sur le rapport médical du Dr Reesor. Le Tribunal tire également cette conclusion en se fondant sur le témoignage de l’appelante concernant ses limitations fonctionnelles et ses douleurs chroniques.

Caractère prolongé

[45] L’appelante doit prouver que son invalidité est prolongée. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. Le Tribunal a examiné tous les rapports médicaux figurant au dossier d’appel et accorde un poids considérable au rapport du Dr Reesor. Le Tribunal tient particulièrement à souligner que le Dr Reesor a écrit que les incapacités physiques ou fonctionnelles et psychologiques, les restrictions, les limitations et les déficiences de l’appelante étaient [traduction] « très clairement de nature chronique et persistante ». Le Tribunal accorde aussi une valeur importante au témoignage de l’appelante sur ses limitations fonctionnelles, son anxiété, sa dépression et ses douleurs chroniques. D’après le rapport susmentionné et le témoignage de l’appelante, le Tribunal conclut qu’il est plus probable que le contraire que l’invalidité de l’appelante est prolongée.

[46] En dernière analyse, le Tribunal convient qu’il est peu probable que l’état de l’appelante s’améliore et conclut que son invalidité durera pendant une période longue et continue.

Conclusion

[47] Le Tribunal conclut que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée en novembre 2014 lorsque le Dr Reesor a signalé que ses invalidités physiques ou fonctionnelles et psychologiques étaient de nature persistante et prolongée. Conformément à l’article 69 du RPC, le versement de la pension commence quatre mois après la date de l’invalidité, c’est-à-dire en mars 2015.

[48] L’appel est accueilli.

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