Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Introduction

[1] Lorsqu’il a présenté une demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada, le demandeur a affirmé qu’il était invalide en raison du syndrome post-commotion. L’intimé a rejeté sa demande initialement et après révision. Le demandeur a interjeté appel de la décision en révision devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision. L’appel a été transféré à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale le 1er avril 2013, en application de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable. La division générale a tenu audience par comparution en personne et, le 27 juillet 2015, a rejeté l’appel.

[2] Le demandeur a demandé la permission d’en appeler de la décision de la division générale à la division d’appel du Tribunal. Il a soutenu que la division générale n’avait pas observé les principes de justice naturelle, avait entaché sa décision d’erreurs de droit et s’était appuyée sur des conclusions de fait erronées, tirées sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[3] L’intimé n’a pas déposé d’observations concernant la demande de permission d’en appeler à la division d’appel.

Analyse

[4] Pour qu’une permission d’en appeler soit accordée, il faut que la demande soulève un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (CF). Par ailleurs, la Cour d’appel fédérale a statué que la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si le défendeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, et Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

[5] C’est la Loi sur le Ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi ») qui régit le fonctionnement du Tribunal. L’article 58 de cette loi énonce les seuls moyens d’appel qui peuvent être pris en considération pour que la permission d’en appeler d’une décision de la division générale puisse être accordée (cette disposition est reproduite en annexe de la présente décision). Il me faut donc déterminer si le demandeur a soulevé un moyen d’appel prévu à l’article 58 de la Loi pouvant conférer à l’appel une chance raisonnable de succès.

[6] Le demandeur a d’abord soutenu que la permission d’en appeler devrait lui être accordée au motif que la division générale n’a pas observé les principes de justice naturelle. Ces principes visent à assurer que les parties à une demande aient la possibilité raisonnable de défendre leur cause, de savoir ce qu’on entend faire valoir contre elles et d’obtenir d’un arbitre impartial une décision rendue au regard des faits et du droit. En l’espèce, le demandeur a soutenu qu’en raison de son syndrome post-commotion il a omis et mal communiqué des renseignements importants concernant sa demande de pension. Il n’a pas précisé de quels renseignements il s’agissait ni comment ces renseignements auraient pu influer sur le résultat de l’appel.

[7] L’argument du demandeur ne dit pas que le Tribunal aurait agi d’une quelconque façon qui aurait empêché le demandeur de plaider sa cause de façon pleine et entière à l’audience ou par écrit, avant la tenue de l’audience. C’est aux parties qu’il appartient de faire valoir leur thèse, pas au Tribunal. Qui plus est, en l’absence de quelque indication des renseignements qui ont été omis ou mal communiqués et de la façon dont ces renseignements auraient pu influer sur l’issue de l’affaire, je ne suis pas convaincue que les principes de justice naturelle n’aient pas été observés. Ce moyen d’appel ne présente pas de chance raisonnable de succès en appel.

[8] En deuxième lieu, le demandeur a allégué que la décision de la division générale renfermait des erreurs de droit. Sur ce front, il a commencé par affirmer que la division générale n’avait pas tenu compte de la totalité de la preuve en rendant sa décision, et il a cité des rapports médicaux précis qui n’ont pas été expressément mentionnés dans la décision. La division générale est présumée avoir tenu compte de l’ensemble de la preuve dont elle était saisie et n’est pas tenue de mentionner dans ses motifs chacun des éléments de preuve qui lui ont été présentés. En outre, c’est à la division générale, en tant que juge des faits, qu’il appartient d’entendre la preuve des parties et de la soupeser pour rendre sa décision. La division d’appel, lorsqu’elle est saisie d’une demande de permission d’en appeler, n’a pas à réapprécier la preuve pour en arriver à une conclusion différente (voir Simpson c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 82). Par conséquent, ce moyen d’appel ne confère pas de chance raisonnable de succès à l’appel.

[9] Le demandeur a aussi argué que la division générale avait commis une erreur en n’appliquant pas aux faits de l’espèce les principes énoncés dans l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248. La décision de la division générale a correctement énoncé les principes tirés de cet arrêt. Au paragraphe 46 de la décision, la division générale a précisément abordé l’âge et le niveau d’instruction du demandeur lorsqu’elle a tiré sa conclusion sur la question de savoir si le demandeur avait une certaine capacité de travailler. En conséquence, je suis convaincue que la division générale n’a pas commis d’erreur à cet égard.

[10] En revanche, le demandeur a aussi suggéré que la division générale ne s’était pas penchée sur la question de savoir si le syndrome post-commotion l’aurait empêché de pouvoir suivre une formation de recyclage en vue de se trouver un autre emploi. Je ne sais pas trop si la division générale a tenu compte de cela. Il se peut qu’elle ait commis une erreur à cet égard, de sorte que la permission d’en appeler est accordée pour ce motif.

[11] L’allégation du demandeur selon laquelle la division générale aurait commis une erreur lorsqu’elle a dit qu’il pouvait être capable de travailler dans un autre domaine sans préciser d’emploi en particulier ne constitue pas un moyen d’appel pouvant conférer une chance raisonnable de succès à l’appel. C’est au demandeur qu’il incombe de prouver qu’il est invalide. Le Tribunal, à l’instar de toute autre partie, n’a pas à préciser quel travail le demandeur pourrait faire.

[12] Finalement, à ce chapitre, le demandeur a plaidé que la décision de la division générale était entachée d’une erreur de droit en ce qu’il était déraisonnable de s’attendre à ce qu’il se mette en quête d’un autre emploi (conformément à ce qu’exige l’arrêt Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117) alors que son médecin lui avait conseillé de ne pas travailler. Dans sa décision, la division générale a correctement énoncé le principe juridique tiré de l’arrêt Inclima. Toutefois, dans des arrêts ultérieurs, il a aussi été statué qu’un prestataire pouvait ne pas être tenu de tenter d’obtenir et conserver un autre emploi s’il avait des motifs raisonnables de ne pas faire cet effort. On ne sait pas exactement si la division générale a tenu compte de cela. Une erreur de droit a ainsi pu être commise, si bien que ce moyen d’appel peut présenter une chance raisonnable de succès en appel.

[13] Je note aussi que la décision de la division générale indique que la date de fin de la période minimale d’admissibilité du demandeur (la date à laquelle un demandeur doit avoir été déclaré invalide pour toucher une pension d’invalidité) était le 31 décembre 2017. Il est impossible de déterminer si un demandeur est invalide à une date située dans le futur. Il aurait fallu déterminer si le demandeur était invalide à la date de l’audience. Cela n’a pas été précisé ni pris en considération dans la décision de la division générale. Il s’agit d’une erreur de droit, et la permission d’en appeler est accordée sur ce motif.

[14] Le demandeur a de plus affirmé que, dans sa décision, la division générale s’était appuyée sur des conclusions de fait erronées, tirées sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Il a soutenu que la division générale avait tenu pour avérer le fait que le Dr Golisky n’avait pas abordé la question de savoir si le demandeur pouvait exercer un autre emploi, alors que le Dr Golisky a bel et bien abordé ce point dans ses rapports datés de juin 2014 et décembre 2011. La décision était fondée, en partie du moins, sur cette conclusion de fait. Il pourrait s’agir d’une conclusion de fait erronée que la division générale a tirée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Ce moyen d’appel peut aussi conférer une chance raisonnable de succès à l’appel.

[15] Le demandeur a également plaidé que la division générale avait commis une erreur lorsqu’elle a conclu que le demandeur pourrait être capable de travailler en suivant d’autres séances de counseling, alors que son médecin a déclaré que le counseling n’améliorerait pas l’état du demandeur et que la division générale avait aussi conclu qu’on ne savait pas exactement si d’autres séances de counseling seraient bénéfiques au demandeur. Il se peut que cette conclusion soit erronée au vu de la preuve qui a été présentée à la division générale. La permission d’en appeler est également accordée sur le fondement de ce moyen d’appel.

Conclusion

[16] La demande de permission d’en appeler est accueillie pour les motifs susmentionnés.

[17] Cette décision accordant la permission d’en appeler ne présume pas du résultat de l’appel sur le fond du litige.

Annexe

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

58. (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

58. (2) La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

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