Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada est refusée.

Introduction

[2] Le 4 mai 2012, un tribunal de révision a rejeté l’appel de la demanderesse à l’encontre d’une décision en révision qui rejetait sa demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada(le « Régime »). Le 26 novembre 2014, la demanderesse a déposé une demande d’annulation ou de modification de la décision du tribunal de révision au motif qu’elle avait de nouveaux faits à produire au Tribunal, lesquels prenaient la forme d’un rapport médical. Le 10 juin 2015, une membre de la division générale du Tribunal a rendu une décision rejetant cette demande.

[3] La membre de la division générale a rejeté la demande au motif qu’elle avait été déposée en dehors du délai d’un an prescrit par le paragraphe 66(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS »). Subsidiairement, la demanderesse n’avait pas présenté un fait nouveau essentiel, comme l’exige l’alinéa 66(1)b) de la Loi sur le MEDSNote de bas de page 1. La demanderesse sollicite la permission d’en appeler de la décision de la division générale.

Moyens invoqués à l'appui de la demande

[4] La demanderesse affirme que la division générale n’a pas pris en considération un rapport médical déterminant qui la décrit comme étant incapable de travailler. Ce rapport a été produit par un neurologue, le Dr Leckey. La demanderesse n’a pas précisé le moyen d’appel, quoique la division d’appel ait été en mesure de déduire, à la lumière des observations faites par la demanderesse, que celle‑ci fonde son appel sur l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS, soit le moyen d’appel voulant que la décision de la division générale soit fondée sur une conclusion de fait erronée.

[5] La demanderesse n’a pas fait d’observations sur la question de savoir si sa demande d’annulation ou de modification de la décision du tribunal de révision avait été frappée de prescription.

Question en litige

[6] Le Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

Permission d’en appeler d’une décision de la division générale

[7] La demande de permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal est une étape préliminaire au dépôt d’un appel devant la division d’appel.Note de bas de page 2 Pour accorder cette permission, la division d’appel doit être convaincue que l’appel aurait une chance raisonnable de succès.Note de bas de page 3 Dans Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, ainsi que dans Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63, la Cour d’appel fédérale a assimilé une chance raisonnable de succès à une cause défendable.

[8] Il n’y a que trois moyens sur lesquels un appelant peut porter une décision en appel. Ces moyens, stipulés à l’article 58 de la Loi sur le MEDS, sont que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle a commis une erreur de droit et qu’elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.Note de bas de page 4

Annulation ou modification

[9] Le droit applicable à la capacité du Tribunal d’annuler ou de modifier une décision est stipulé à l’article 66 de la Loi sur le MEDS, qui est ainsi libellé :

Modification de la décision

  1. 66. (1) Le Tribunal peut annuler ou modifier toute décision qu’il a rendue relativement à une demande particulière :
    1. a) dans le cas d’une décision visant la Loi sur l’assurance-emploi, si des faits nouveaux lui sont présentés ou s’il est convaincu que la décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait;
    2. b) dans les autres cas, si des faits nouveaux et essentiels qui, au moment de l’audience, ne pouvaient être connus malgré l’exercice d’une diligence raisonnable lui sont présentés.
  2. (2) La demande d’annulation ou de modification doit être présentée au plus tard un an après la date où l’appelant reçoit communication de la décision.
  3. (3) Il ne peut être présenté plus d’une demande d’annulation ou de modification par toute partie visée par la décision.
  4. (4) La décision est annulée ou modifiée par la division qui l’a rendue.

Analyse

[10] La demanderesse plaide que la division générale a commis une erreur de fait. Elle affirme qu’il n’a pas été tenu compte, dans la décision de la division générale, de la lettre du Dr Leckey, laquelle constituait, comme le soutient la demanderesse, un fait nouveau et essentiel. Les observations de la demanderesse à cet égard soulèvent deux questions qui, de l’avis de la division d’appel, se conjuguent pour répondre à la question de savoir si l’appel aurait une chance raisonnable de succès. Ces questions sont les suivantes :

  1. a. La lettre constituait-elle un fait nouveau et essentiel?
  2. b. La division générale a-t-elle rendu sa décision sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance?
  3. c. La demande d’annulation ou de modification de la décision du tribunal de révision était-elle frappée de prescription?

Il est commode, pour la division d’appel, d’aborder ces questions dans cet ordre.

La lettre

[11] La lettre est en fait un rapport médical de deux pages (la « Lettre ») daté du 29 octobre 2013 (RA2 : 2‑3). Pour que la division générale conclut que la Lettre représentait un fait nouveau et essentiel, il faut que cette lettre satisfasse au critère à deux volets énoncé au paragraphe 66(1), c’est‑à‑dire que a) les faits présentés ne pouvaient être connus au moment de l’audience (possibilité de découvrir) et b) les faits doivent être essentiels pour la décision (caractère substantiel).

[12]  Selon la règle de la possibilité de découvrir, il faut que les faits nouveaux proposés constituent en fait des faits qui existaient au moment de l’audience initiale, mais qui ne pouvaient être connus avant ladite audience initiale malgré l’exercice d’une diligence raisonnable. Quant à l’aspect du caractère substantiel, il s’agit de savoir jusqu’à quel point les faits nouveaux proposés pouvaient être pertinents aux résultats de l’instance antérieure.

[13] La division générale a conclu que la Lettre ne pouvait pas constituer un fait nouveau et essentiel en ce que, bien qu’elle n’était pas disponible avant l’audience devant le tribunal de révision et, par conséquent, qu’elle ne pouvait être connue, elle ne dévoilait aucun fait nouveau et essentiel. La division d’appel souscrit à cette conclusion. À l’évidence, la date de la Lettre est très postérieure à la date de l’audience devant le tribunal de révision. Sur ce seul motif, il est possible que le critère de la possibilité de découvrir pouvait être satisfait. Toutefois, la Lettre ne satisfait pas au critère du caractère substantiel en ce qu’elle ne révèle aucun élément qui n’était pas connu du tribunal de révision lorsqu’il a rendu sa décision.

[14] Le Dr Leckey, qui s’est ensuite présenté comme témoin à l’audience tenue par le tribunal de révision, a répété le gros de la preuve qu’il a produite à l’audience dans la lettre. La principale différente entre son témoignage de vive voix et le rapport écrit était sa déclaration, dans le rapport, qu’aucun autre examen médical n’était prévu pour la demanderesse. La majeure partie, si ce n’est l’intégralité, de la preuve concernant les troubles médicaux de la demanderesse, soit ses antécédents de consultation ainsi que de traitement, a été présentée au tribunal de révision. La division générale a conclu que tout renseignement supplémentaire ne constituait pas un fait significatif et donc que la lettre ne renfermait pas d’éléments de preuve qui étaient essentiels au tribunal de révision pour rendre sa décision. La division d’appel ne relève pas d’erreur de la part de la division générale à cet égard.

[15] En tirant cette conclusion, la division générale répond aussi par la négative à la question de savoir si la division générale a rendu sa décision sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

La demande d’annulation ou de modification de la décision du tribunal de révision était‑elle frappée de prescription?

[16] Comme je l’ai mentionné plus haut, la demanderesse n’a pas présenté d’observations sur ce point. Quoi qu’il en soit, la division d’appel souhaite aborder cet aspect de la décision de rejet de l’appel rendue par la division générale. Le Tribunal a reçu la demande d’annulation ou de modification de la décision du tribunal de révision le 26 novembre 2014. À cette date, en vertu des dispositions transitoires, tous les dossiers ayant été transférés du tribunal de révision avaient été réputés avoir été déposés le 1er avril 2013. Si la demanderesse avait déposé une demande d’annulation ou de modification auprès du tribunal de révision avant le 1er avril 2013, elle aurait disposé d’un délai pouvant aller jusqu’à un an de plus pour déposer la Lettre. Toutefois, sa demande a été déposée près de sept mois après l’expiration du délai d’un an.

[17] La demanderesse déclare qu’elle ne savait pas trop comment s’y prendre pour déposer les « nouveaux » renseignements. La division générale a trouvé cela compréhensible, mais elle a fait valoir que l’explication fournie par la demanderesse n’était pas recevable aux termes de la Loi sur le MEDS, faisant la remarque suivante :

[Traduction]

[11] Bien que je comprenne que la demanderesse ait pu ne pas savoir comment déposer la Demande, la loi ne permet pas de prorogation de ce délai pour ce motif. Par conséquent, la Demande doit être rejetée.

La division d’appel souscrit à cette position sur le plan juridique énoncée par la division générale.

[18] Compte tenu de ce qui précède, la division d’appel conclut que la division générale n’a pas fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. En conséquence, la division d’appel n’est pas convaincue que l’appel aurait une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[19] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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