Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Introduction

[1] Le demandeur sollicite la permission d’en appeler de la décision de la division générale datée du 23 avril 2015. La division générale a tenu l’audience au moyen de questions et réponses écrites et déterminé que le demandeur n’était pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada, ayant conclu que l’invalidité du demandeur n’était pas « grave » à la date de fin de sa période minimale d’admissibilité du 31 décembre 2006. Le demandeur a déposé une demande de permission d’en appeler le 28 juillet 2015. Il a soulevé un certain nombre de moyens d’appel. Pour accéder à cette demande de permission, il me faut être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[2] L’appel a‑t‑il une chance raisonnable de succès?

Observations

[3] Le demandeur plaide que la permission devrait lui être accordée au motif que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence, qu’elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier, ou qu’elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Plus particulièrement, le demandeur allègue que la division générale a commis les erreurs suivantes :

  1. a) La division générale s’est concentrée sur l’âge du demandeur au moment de sa période minimale d’admissibilité et n’a pas tenu compte du fait qu’il avait travaillé pendant de nombreuses années avec des douleurs, et ce, jusqu’à ce qu’il n’en soit plus capable. Le demandeur explique qu’il a une instruction et des antécédents de travail limités.
  2. b) La division générale n’a pas tenu compte du fait que le demandeur a souffert de dépression et d’anxiété longtemps avant d’avoir vu un psychiatre et bien avant sa période minimale d’admissibilité. Le demandeur soutient que la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que, du fait qu’il n’avait pas vu de psychiatre avant l’expiration de sa période minimale d’admissibilité, sa dépression et son anxiété ne pouvaient pas avoir été graves.

[4] Le demandeur affirme que, lorsque l’on tient compte à la fois de ses limitations physiques et de sa dépression et de son anxiété, il répond à la définition d’une invalidité grave et prolongée aux termes du Régime de pensions du Canada.

[5] L’intimé n’a pas déposé d’observations écrites.

Analyse

[6] Avant qu’une permission d’en appeler puisse être accordée, il faut que la demande soulève un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel proposé : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines), [1999] ACF no 1252 (CF). La Cour d’appel fédérale a statué que la question de savoir si un demandeur a une cause défendable en droit revient à se demander si le demandeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

[7] En vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS »), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c)  elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[8] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs d’appel se rattachent à l’un ou l’autre des moyens d’appel admissibles et que l’appel a une chance raisonnable de succès.

a. Âge, considérations médicales et antécédents de travail

[9] Le demandeur plaide que la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a mis l’accent sur son âge au moment de sa période minimale d’admissibilité sans tenir compte de ses antécédents de travail. Le demandeur explique qu’il a commencé à travailler à l’âge de 16 ans et qu’il a continué de travailler jusqu’en 2004, quoique cela ne se reflète pas complètement dans l’historique de ses gains. Le demandeur plaide aussi qu’il a des antécédents scolaires limités et une expérience de travail liée aux travaux physiques.

[10] La division générale a tenu compte des antécédents de travail du demandeur lorsqu’elle a évalué ses caractéristiques personnelles dans un contexte réaliste, en appliquant les critères de Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248. Elle a noté que le demandeur avait une instruction limitée et que ses antécédents de travail consistaient seulement en des emplois liés à des travaux physiques. En faisant mention de l’âge du demandeur à la date de fin de sa période minimale d’admissibilité, la division générale a énoncé un facteur dont elle ne pouvait pas faire abstraction selon l’évaluation des caractéristiques personnelles qui est faite dans l’arrêt Villani. Selon Villani, il a fort bien pu être approprié, pour la division générale, de s’attarder à l’âge du demandeur, à supposer qu’elle l’ait fait, dans la mesure où cette considération, à l’instar de toute autre caractéristique personnelle, correspond à un facteur significatif pour ce qui est d’évaluer la gravité de l’invalidité d’une personne dans le « contexte réaliste ».

[11] Essentiellement, les observations du demandeur appellent une réappréciation de la preuve, mais, comme elles ne se rattachent pas à l’un ou l’autre des moyens d’appel admissibilités énumérés au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, je ne suis pas convaincue qu’elles soulèvent une cause défendable ou que l’appel a une chance raisonnable de succès sur ce moyen.

b. Début de la dépression et de l’anxiété

[12] Le demandeur affirme que la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que, puisqu’il n’avait consulté un psychiatre qu’après sa période minimale d’admissibilité, sa dépression et son anxiété ne pouvaient pas avoir été graves. En général, cela constituerait une erreur de droit, si le juge des faits devait systématiquement déterminer qu’un demandeur ne peut être considéré comme invalide s’il n’a pas cherché à obtenir un certain traitement médical, mais il faut qu’il y ait des éléments de preuve – documentaires ou autres – pour conclure à l’existence d’une invalidité avant la date de fin de la période minimale d’admissibilité. La division générale n’a pas indiqué, dans sa décision, si le demandeur avait manifesté de quelconques symptômes de dépression ou d’anxiété avant la fin de la période minimale d’admissibilité, ni l’impact qu’ils auraient pu avoir sur lui s’il avait manifesté de tels symptômes. Quant au demandeur, il n’a pas non plus cité d’éléments tirés de la preuve documentaire à l’appui de cette observation. Je ne suis pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès sur ce moyen.

c. Erreur de droit à la lecture du dossier

[13] Si je devais me limiter à cette demande de permission pour ne prendre en considération que les moyens d’appel allégués par le demandeur, je rejetterais d’emblée la demande, vu que le demandeur ne m’a pas convaincue que l’appel avait une chance raisonnable de succès sur les moyens qu’il a invoqués. Toutefois, cela ne tranche pas la question en ce que je pourrais conclure que la division générale a pu commettre une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier.

[14] En examinant la preuve médicale dont elle était saisie, la division générale a écrit que la preuve médicale au dossier [traduction] « laisse subsister un doute quant à la gravité de ses symptômes à la date de fin de sa PMA. » Cela porte à croire que la division générale a pu commettre une erreur et appliquer une norme de preuve plus stricte lorsqu’elle a indiqué qu’elle nourrissait « un doute » quant à la gravité des symptômes du demandeur. Pourtant, dans le même temps, la division générale a aussi écrit, au paragraphe 22 de sa décision, qu’il incombait au demandeur de prouver « selon la prépondérance des probabilités » qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée, puis, au paragraphe 39, a écrit ceci :

[Traduction]
[39] Ayant pris en considération la totalité de la preuve et l’effet cumulatif des troubles médicaux de l’appelant, le tribunal n’est pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant souffrait d’une invalidité grave à la date de fin de sa PMA. [C’est moi qui souligne.]

[15] Si la division générale n’avait pas énoncé la norme légale de preuve à laquelle le demandeur devait satisfaire et ne s’était pas non plus reportée à cette preuve lorsqu’elle a résumé ses conclusions de fait, j’aurais peut‑être été encline à conclure que l’affaire soulevait une cause défendable. Il semble que la division générale fût consciente de la norme de preuve à laquelle il incombait au demandeur de satisfaire et que son emploi de l’expression « un doute » était un regrettable lapsus.

[16] Vu que les motifs d’appel du demandeur ne soulèvent en fait aucun moyen d’appel que je puis prendre en considération et que le demandeur n’a pas précisé avec suffisamment de détails les éventuelles erreurs que la division générale aurait commises en rendant sa décision, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[17] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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