Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada est refusée.

Introduction

[2] La demanderesse demande la permission d’en appeler de la décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal), rendue le 30 septembre 2015, (demande). La décision rejetait l’appel de la demanderesse à l’encontre d’une décision en révision qui concluait qu’elle n’était pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Motifs de la demande

[3] Dans sa demande initiale, le représentant de la demanderesse a plaidé que la division générale n’aurait pas dû tenir l’audience par téléconférence. Le représentant de la demanderesse a fait valoir qu’une audience par comparution en personne était requise pour que le membre de la division générale puisse évaluer et interroger la demanderesse. Le représentant a aussi soulevé que le mode d’audience empêchait la demanderesse de décrire en détail ses troubles médicaux. (AD1-2) Le représentant ne s’est pas référé à un article spécifique de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, (Loi sur le MEDS).

[4] La division d’appel interprète les observations comme étant une plainte sur le fait que la division générale a manqué au principe de justice naturelle.

[5] Dans un document supplémentaire inclus pour compléter la demande, le représentant de la demanderesse a mentionné un second motif pour la demande. Le représentant a affirmé que la demanderesse souffrait d’un trouble psychiatrique avant la fin de sa PMA, que son prochain rendez-vous chez le psychiatre était prévu pour le 2 novembre 2015, après quoi la demanderesse aurait transmis au Tribunal un rapport psychiatrique à jour.

Question en litige

[6] Dans cette demande, la question en litige est la suivante :

L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[7] La demande de permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal est une étape préliminaire au dépôt d’un appel devant la division d’appel.Note de bas de page 1 Dans Tracey c. Canada (Procureur général) 2015 CF 1300, la Cour fédérale a noté qu’il est indiqué sous le paragraphe 58(2) du présent régime législatif quel critère la division d’appel doit appliquer pour accorder ou refuser une permission d’en appeler. « La division d’appel refuse la demande de permission d’en appeler si la DA du TSS est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. » Dans le contexte du présent régime législatif, la division d’appel doit se pencher sur la question suivante : qu’est-ce qui constitue une chance raisonnable de succès?

[8] Nonobstant cette question complexe, le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS présente les seuls moyens d’appel possible pour qu’un appelant puisse interjeter appel, notamment que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence, qu’elle a commis une erreur de droit ou une erreur de fait.Note de bas de page 2

[9] Au terme de décisions antérieures, la division d’appel a établi que pour accorder la permission d’en appeler, la division d’appel doit d’abord conclure que, si une audience était tenue, au moins l’un des motifs de la demande correspond à l’un des moyens d’appel, et qu’il existe une chance raisonnable que l’appel fondé sur ce moyen soit accueilli. Dansl’affaire Tracey, la Cour fédérale n’a pas précisé comment la division d’appel se trouve convaincue qu’un appel n’a aucune chance raisonnable de succès, et il est noté au paragraphe 22 de cette décision qu’une telle détermination faisait partie du champ d’expertise de la division d’appel.

[10] Dans l’affaire Bossé c. Canada (Procureur général) 2015 CF 1142, la Cour fédérale a semblé accepter que [traduction] « évident et manifeste » constitue le critère à appliquer pour déterminer s’il y a ou non chance raisonnable de succès.Note de bas de page 3 Pour sa part, la division d’appel considère utile de souscrire au sens simple et courant du terme « chance raisonnable » et d’adopter la même approche que la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général) 2001 CAF 248.

[11] Dans Villani Note de bas de page 4, le juge en chef Isaacs a approuvé l’approche adoptée par la Commission d’appel des pensions (CAP) dans la décision Barlow, où la CAP a appliqué la définition du dictionnaire aux mots [traduction] « régulièrement », « détenir », « véritablement », « rémunératrice » et « occupation » afin de se prononcer sur l’admissibilité de Mme Barlow à une pension d’invalidité du RPC. La division d’appel adopte une méthode similaire pour déterminer si l’appel aurait ou n’aurait pas une chance raisonnable de succès. Le dictionnaire OxfordNote de bas de page 5 définit de façon variable le terme [traduction] « raisonnable » comme étant « juste, sensé, assez bon ou moyen ». Ironiquement, la version en ligne du dictionnaire Oxford donne l’exemple d’usage suivant : [traduction] « Je ne suis pas convaincu que l’appelant a une chance raisonnable de succès si l’appel est instruit. »

[12] Dansles arrêts Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41 et Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63, la Cour d’appel fédérale a affirmé qu’une chance raisonnable de succès signifie qu’une cause est défendable. Par conséquent, la division d’appel estime que, pour accueillir la demande, elle doit être convaincue que l’appel a une chance plutôt bonne ou moyenne de succès ou que le demandeur ait soulevé un motif défendable. La division d’appel n’a pas à être convaincue que le succès est certain.

Analyse

[13] La division d’appel a examiné les arguments du représentant de la demanderesse en vue de déterminer si la division générale a manqué aux dispositions de l’alinéa 58(1)a) de la Loi sur le MEDS et si la demande devrait être accueillie.

[14] Le représentant de la demanderesse a soutenu que la demanderesse n’a pas eu la possibilité raisonnable de répondre à la preuve et de donner sa version des faits. Pour les raisons qui suivent, la division d’appel n’est pas convaincue de la position du représentant et n’est pas satisfaite qu’il s’agisse d’un moyen d’appel ayant une chance raisonnable de succès.

[15] Premièrement, l’instruction de l’appel a été menée par comparution en personne, ce qui signifie que la demanderesse était présente physiquement à l’audience. Deuxièmement, la demanderesse était accompagnée d’un représentant qui était aussi présent lors de l’audience, et qui a eu l’opportunité de faire des observations et d’interroger la demanderesse dans le but de présenter les éléments de preuve de cette dernière. En fait, non seulement la demanderesse était-elle présente par comparution, mais toutes les observations écrites ont été déposées en son nom (GT-2; GT GT-4; GT-5).

[16] Troisièmement, la demanderesse a livré un témoignage oral pendant l’audience. En livrant un témoignage oral, la demanderesse aurait eu l’opportunité de répondre à la preuve et de donner sa version des faits. Quatrièmement, bien que l’intimé n’était pas présent à l’audience, ses représentants ont transmis des observations en son nom avant la tenue de l’audience, lesquelles ont toutes été communiquées à la demanderesse bien avant la date de l’audience. La demanderesse a donc eu amplement l’opportunité d’être informée de la position de l’intimé et d’y répondre, tant par observations écrites qu’au moment de l’audience. La division d’appel estime que, à l’exception d’avoir soulevé des allégations, la demanderesse n’a pas démontré comment la division générale ne lui a pas permis de répondre à la preuve et de donner sa version des faits.

[17] Par ailleurs, ni la demanderesse ni son représentant ne se sont opposés au mode d’audience, avant l’audience ou même pendant la tenue de l’audience. Et, une audience par comparution en personne n’a pas été demandée. Donc, il ne sert pas au représentant de faire valoir maintenant a posteriori qu’un autre mode d’audience aurait été plus approprié. Malgré l’importance présumée d’une audience par comparution en personne, la division d’appel n’est pas convaincue que la demanderesse ou son représentant n’aurait pas soulevé la question plus tôt.

[18] Compte tenu des faits précédemment mentionnés, la division d’appel juge qu’il est raisonnable de douter de l’affirmation de la demanderesse, selon laquelle elle affirme ne pas avoir reçu l’opportunité raisonnable de répondre à la preuve et de donner sa version des faits, et donc de rejeter l’affirmation. Conséquemment, la division d’appel ne voit pas de manquement à la justice naturelle commis par la division générale.

L’état de santé mentale de la demanderesse

[19] Le représentant de la demanderesse a mentionné que la demanderesse souffre d’un trouble mental qui, au sens de l’article 42 du RPC, la rend souffrante d’une invalidité [traduction] « grave ». À cet égard, il a été proposé que la demanderesse enverrait une copie d’un rapport psychiatrique à jour au Tribunal après avoir visité son psychiatre le 2 novembre 2015. En effet, le représentant de la demanderesse a fourni certains rapports médicaux en addition aux documents qui ont été déposés en réponse à la lettre du Tribunal, où l’on demandait à la demanderesse de bien exposer le motif de sa demande. Parmi ces nouveaux rapports médicaux, l’on retrouve la note du Dr Spatmanidis, datée du 27 novembre 2015. (AD1A-7) Dans sa note, le Dr Spatmanidis indique que la demanderesse [traduction] « a été rencontrée pour une évaluation psychiatrique et qu’elle a été diagnostiquée d’anxiété ajoutée à un trouble de douleur chronique. » Dr Spatmanidis termine en disant que la demanderesse était [traduction] « incapable de travailler en quelque qualité que ce soit. »

[20] Deux éléments ressortent de la note du Dr Spatmanidis. En premier lieu, pour prouver que les troubles mentaux de la demanderesse sont antérieurs à la fin de la PMA et qu’ils satisfont au critère de gravité du RPC, la note ne mentionne pas s’il s’agit d’un rendez-vous régulier. En fait, l’utilisation de [traduction] « a été rencontrée pour une évaluation psychiatrique » sous-entend qu’il s’agissait d’une première visite, du moins avec le Dr Spatmanidis. Le médecin de famille de la demanderesse n’a pas mentionné de trouble mental dans son rapport de 2011, et le Dr Spatmanidis ne spécifie pas sur quoi il s’est basé pour diagnostiquer des troubles d’anxiété et de dépression ni comment il en est venu à la conclusion que la demanderesse était [traduction] « incapable d’exercer tout type de travail. » Donc, selon la division d’appel, il serait difficile d’évaluer l’état de santé mentale de la demanderesse en fonction de la PMA.

[21] En second lieu, tous les rapports médicaux ont été créés en 2015. Par conséquent, la note du Dr Spatmanidis, et de fait même, la plupart des rapports médicaux présentés au Tribunal dans le cadre de l’appel, semblent être de « nouveaux éléments de preuve », lesquels pourraient être plus justement pris en considération dans le cadre d’une demande fondée sur l’article 66 de la Loi sur le MEDS.

[22] La division d’appel, qu’elle évalue une demande de permission d’en appeler ou un appel, est orientée par les dispositions de la Loi sur le MEDS. Selon ces dispositions, un nouvel élément de preuve [traduction] « ne constitue plus un moyen d’appel isolé » (Tracey, paragr. 29). La division d’appel est alors incapable de considérer un nouvel élément de preuve qui constitue un élément de preuve qui n’a pas été présenté à la division générale pour l’évaluation d’une demande d’en appeler ou d’un appel. La demanderesse aurait donc intérêt à soumettre une demande sous l’article 66 de la Loi sur le MEDS pour annuler ou modifier la décision de la division générale. La demanderesse devrait aussi être avisée qu’une telle demande sera présentée à la division générale puisque les décisions sont annulées ou modifiées par la division qui les a rendues.

Conclusion

[23] À l’aide de son représentant, la demanderesse a soutenu que la division générale a commis une erreur dans son choix du mode d’audience, qu’elle a subi un préjudice parce qu’elle n’a pas pu plaider pleinement sa cause puisque l’audience a été tenue par téléconférence et non pas par comparution en personne. La demanderesse a aussi affirmé, qu’avant ou à la date de sa PMA du 31 décembre 2011, souffrir d’un trouble de santé mentale qui s’inscrivait dans la définition d’une invalidité grave du RPC. Après l’examen des observations faites par le représentant de la demanderesse, la division d’appel juge que la demanderesse n’a pas soulevé une cause défendable. Alors, la division d’appel n’est pas convaincue que l’appel aurait une chance raisonnable de succès. La demande est refusée.

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