Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] Il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre d’une décision de rejet sommaire rendue par la division générale en vertu du paragraphe 53(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).L’appelant a présenté une demande de pension de retraite en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) et il s’est vu accorder cette pension en octobre 2011. Il a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC en octobre 2013. Il n’a pas présenté une demande de cessation pour sa pension de retraite dans les six mois suivant le début des versements. En se fondant sur ces faits non contestés, la division générale a conclu que le demandeur n’était pas admissible à une pension d’invalidité du RPC et a rejeté l’appel de façon sommaire.

Moyens de l’appel

[3] L’appelant a répété les observations présentées en réponse à l’avis du Tribunal selon lequel la division générale avait l’intention de rejeter l’appel de façon sommaire. Il a soutenu que, au moment où il a présenté une demande de pension de retraite du RPC, il ne savait pas qu’il deviendrait invalide de façon permanente. De plus, selon lui, il ne pouvait pas présenter une demande de prestations d’invalidité et de pension de retraite du RPC à la fois. Il croyait qu’il commettrait ainsi une fraude. Il a fait valoir que ces circonstances expliquent la présentation tardive d’une demande de pension d’invalidité.

[4] De plus, le demandeur a fait remarquer que, selon lui, il était puni pour avoir fait ce qu’il fallait. L’appelant soutient que son âge et son état de santé l’empêchent de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice.

[5] Étant donné qu’il s’agit d’un appel lié au rejet sommaire d’un appel, la demande de permission d’en appeler n’est pas nécessaire; l’appel peut être interjeté directement devant la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal).

Dispositions législatives applicables

[6]  Les dispositions législatives régissant la conversion d’une pension de retraite du RPC à une pension d’invalidité du RPC figurent à l’article 61.1 et au paragraphe 66.1(1.1) du RPC.

66.1 . Demande de cessation de prestation – (1) Un bénéficiaire peut demander la cessation d’une prestation s’il le fait de la manière prescrite et, après que le paiement de la prestation a commencé, durant la période de temps prescrite à cet égard.

(1.1) Exception – Toutefois, le bénéficiaire d’une prestation de retraite ne peut remplacer cette prestation par une prestation d’invalidité si le requérant est réputé être devenu invalide, en vertu de la présente loi ou aux termes d’un régime provincial de pensions, au cours du mois où il a commencé à toucher sa prestation de retraite ou par la suite.

[7] La demande est aussi régie par le paragraphe 46.2(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement), DORS/2013-60, version modifiée par L.C. 2013, ch. 40, art. 2.

  1. (1) Un bénéficiaire peut demander la cessation d’une prestation en présentant au ministre une demande écrite à cet effet dans les six mois suivant la date où le paiement de la prestation a commencé.

[8] Les autres dispositions législatives qui s’appliquent à l’appel comprennent l’alinéa 44(1)b) du RPC, dont le paragraphe énonce les exigences d’admissibilité pour recevoir une pension d’invalidité du RPC. Plus particulièrement, il est exigé qu’un demandeur ne doit pas toucher une pension de retraite du RPC afin d’être admissible à une pension d’invalidité du RPC.

[9] La division générale a souligné que cette exigence est également prévue au paragraphe 70.1(3) du RPC, à savoir que si un bénéficiaire commence à recevoir une pension de retraite du RPC, il ne peut en aucun cas demander ou redemander une pension d’invalidité. Cependant, la division générale a également fait remarquer que l’article 66.1 du RPC et l’article 46.2 du Règlement sur le Régime de pensions du Canada (Règlement sur le RPC) prévoient des exceptions à l’alinéa 44(1)b) et au paragraphe 70.1(3) du RPC.

[10] En l’espèce, l’alinéa 44(1)b) et le paragraphe 66.1(1) du RPC ainsi que l’article 46.2 du Règlement sur le RPC sont les dispositions importantes. L’article 66.1 du RPC autorise un bénéficiaire à demander la cessation d’une pension de retraite afin de la remplacer par une pension d’invalidité si l’appelant est réputé être devenu invalide au cours du mois où il a commencé à toucher sa prestation de retraite ou par la suite. Par conséquent, si l’appelant est devenu invalide avant de toucher une pension de retraite, celle-ci ne pourrait pas être cessée au profit d’une pension d’invalidité. De plus, l’appelant a seulement une courte période de six mois pour demander la cessation.

Question en litige

[11] La question en litige peut être la suivante : s’agissait-il d’une erreur de droit de la part de la division générale de rejeter de façon sommaire l’appel de l’appelant?

Observations

[12] Conformément à l’article 36 du RèglementFootnote 1, le Tribunal a invité les parties à présenter des observations. Elles devaient le faire au plus tard le 15 décembre 2015. Le Tribunal a reçu des observations de la part de l’intimé, mais pas de l’appelant. L’intimé était d’avis que la division générale n’avait pas commis d’erreur dans sa déclaration ou dans son application des dispositions législatives pertinentes. Par conséquent, la division d’appel n’avait aucun fondement pour infirmer la décision de la division générale, et l’appel devrait être rejeté.

[13] Le critère pour le rejet sommaire d’un appel est que l’« appel n’a aucune chance raisonnable de succès ». La disposition applicable est formulée en termes péremptoires : la division générale doit rejeter de façon sommaire un appel si elle est convaincue qu’il (l’appel) n’a aucune chance raisonnable de succès. La question, bien sûr, est donc : comment un décideur détermine-t-il ce qui représente une chance raisonnable de succès?

[14] Avant de rendre une décision sur cette question, la division d’appel doit décider la façon dont elle abordera les appels relatifs aux décisions de la division générale, et, habituellement, cette décision plus particulièrement. Selon les décisions récentes de la Cour d’appel fédérale et de la Cour fédérale, il n’est probablement pas requis que la division d’appel s’investisse dans une analyse relative à la norme de contrôle. La division d’appel doit plutôt limiter son enquête à une évaluation pour savoir si la division générale a contrevenu ou non à l’une des dispositions du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. Par conséquent, dans la décision Canada (Procureur général) c. Paradis; Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242, la Cour d’appel fédérale a fait une distinction entre les appels instruits selon les mesures transitoires de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable, L.C. 2012, ch. 19, art. 266 et 267, et les appels de décisions rendues par la division générale du Tribunal. La Cour d’appel fédérale prétend que, lorsque la division d’appel instruit des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, le pouvoir du Tribunal, la division d’appel doit se limiter au mandat qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi :

[19] [...] Lorsqu’elle entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la Division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi. Elle doit notamment déterminer si la Division générale a « rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier » (alinéa 58(1)b) de la Loi).Il n’est nul besoin de greffer à ce texte la jurisprudence qui s’est développée en matière de contrôle judiciaire.

[15] La Cour d’appel fédérale est retournée à la question dans la décision Maunder c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 274, qui confirme la position établie dans les décisions Jean et Paradis.Dans Tracey c. Canada (Procureur général),2015 CF 1300, la Cour fédérale a décidé de la question dans le contexte des demandes de permission d’interjeter appel des décisions de la division générale. Comme pour les précédentes décisions de la Cour d’appel fédérale, la Cour fédérale a souligné que le champ d’application de compétence de la division d’appel pour accorder ou refuser une permission d’en appeler a été défini et énoncé dans la Loi sur le MEDS. À ce sujet, le juge Roussel s’est ainsi exprimé :

Par contraste, sous l’ancien régime qui était ancré dans la common law par le biais de la jurisprudence, le critère que doit appliquer la DA-TSS lorsqu’elle se prononce sur la question de savoir si l’autorisation d’interjeter un appel doit être accordée ou refusée est maintenant énoncé au paragraphe 58(2) de la LMEDS. L’autorisation d’interjeter un appel est refusée si la DA-TSS est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[16] D’après Jean, Maunder et Tracey, la division d’appel doit déterminer si la décision de la division générale de rejeter de façon sommaire l’appel de l’appelante constitue une erreur qui pourrait être utilisée comme moyen d’appel tel qu’il est énoncé au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. Pour les raisons qui suivent, la division d’appel conclut qu’aucune erreur n’est révélée dans la décision de la division générale de rejeter l’appel de façon sommaire.

Analyse

[17] L’article 53 de la Loi sur le MEDS exprime clairement le critère selon lequel la division générale doit décider si elle doit rejeter un appel de façon sommaire. La division générale doit rejeter un appel de façon sommaire si elle est convaincue que l’ « appel n’a aucune chance raisonnable de succès ». L’article 53 est rédigé dans des termes impératifs. Une fois que la division générale est convaincue qu’un appel n’a aucune chance de succès, elle ne possède pas le pouvoir discrétionnaire de faire autrement que de rejeter l’appel. La question, bien sûr, est donc la suivante : selon quel critère un décideur détermine-t-il ce qui représente une chance raisonnable de succès? Cela est également le cas si la division d’appel doit trancher l’appel d’une décision rendue par la division générale.

[18] Dans l’affaire Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, la Cour d’appel fédérale a assimilé une chance raisonnable de succès au fait d’avoir une cause défendable. Plus récemment, les membres de la division d’appel ont exprimé en ces termes le critère à appliquer aux cas de rejet sommaire : « Est-il évident et manifeste, sur la foi du dossier, que l’appel est voué à l’échec? » (M.C. c. Commission de l’emploi du Canada, 2015 TSSDA 237).

[19] Il est de l’avis de la division d’appel que pour les situations où les faits ne sont pas contestés, le droit applicable est clair, et que, sur ces faits non contestés, la loi établit qu’une décision claire n’est pas en faveur de l’appelant; alors c’est une situation où l’appel n’aurait aucune chance raisonnable de succès. Dans un tel cas, il serait approprié que la division générale rejette de façon sommaire l’appel. Il s’agit aussi de l’opinion demandée par le représentant de l’intimé à la division d’appel.

[20] La division d’appel estime que les faits de l’espèce ne sont pas gravement contestés. L’appelant a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC, et celle-ci lui a été accordée en octobre 2011. Il a subi plusieurs interventions chirurgicales, y compris une pour soigner ses épaules en avril 2012. Lorsque sa récupération a été prolongée et lorsque ses médecins l’ont informé qu’il serait invalide de façon permanente, l’appelant a présenté une demande de pension d’invalidité. Il l’a fait en octobre 2013, à savoir deux ans après qu’il a commencé à toucher une pension de retraite. Étant donné qu’il recevait sa pension de retraite du RPC à ce moment-là, l’appelant aurait pu cesser de toucher une pension de retraite afin de la remplacer par une pension d’invalidité seulement s’il pouvait être réputé être devenu invalide au cours du mois où il a commencé à toucher sa pension de retraite ou par la suite. Selon l’alinéa 44(1)b) du RPC, il est évident que l’appelant ne pouvait pas toucher une pension de retraite du RPC et une pension d’invalidité du RPC à la fois. De plus, il aurait dû présenter une demander de cessation de pension de retraite dans les six mois suivant le début des versements, à savoir avant mars 2012.

[21] Le RPC prévoit à l’alinéa 42(2)b) qu’un demandeur de pension d’invalidité ne peut être réputé être devenu invalide plus de 15 mois avant la date de réception de la demande. La division générale a correctement mentionné que la date en question était en juillet 2012. Bien que ce fait puisse avoir pour effet de respecter le paragraphe 66.1(1) du RPC, il est néanmoins visé par l’exigence selon laquelle la demande de cessation de pension de retraite doit avoir été présentée dans les six mois suivant la date à laquelle le demandeur a commencé à toucher la pension. Étant donné que cette période prévue a pris fin quatre mois avant la date de début de l’invalidité réputée, le demandeur ne peut pas se voir accorder une pension d’invalidité. Par conséquent, la décision de la division générale de rejeter l’appel de façon sommaire n’a causé aucune erreur donnant lieu à révision.

Conclusion

[22] L’appelant a interjeté appel de la décision de la division générale de rejeter de façon sommaire son appel. À la lumière des faits, de la preuve et du droit applicable présentés à la division générale, la division d’appel conclut que la division générale a conclu à juste titre que l’appel n’avait aucune chance raisonnable de succès.

[23] L’appel est rejeté.

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