Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparutions

Appelante : S. N.

Représentante de l’appelante : Hadeel Kamal

Représentante de l’intimé : Christine Singh

Interprète : V. L.

Introduction

[1] L’appelante a affirmé être invalide puisqu’elle est atteinte de douleurs constantes à l’épaule droite, au cou et au haut du dos, de maux de tête, d’anxiété et de dépression des suites d’un accident de la route. L’appelante a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. L’intimé a rejeté sa demande au départ et après révision. L’appelante a porté en appel la décision de révision devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision et l’appel a été transféré à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) en avril 2013, aux termes de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable. La division générale a tenu une audience en personne et a rejeté l’appel le 21 mai 2015.

[2] Le 19 août 2015, la permission d’en appeler de cette décision devant la division d’appel du Tribunal a été accordée à l’appelante. La permission a été accordée au motif que la division générale n’aurait pas tenu compte de l’effet cumulatif des incapacités de l’appelante sur sa capacité à travailler et qu’elle n’aurait pas, dans sa décision, suffisamment expliqué pourquoi elle avait accordé davantage de poids à certains éléments de preuve médicale plutôt qu’à d’autres.

[3] Le présent appel a été instruit par vidéoconférence pour les raisons suivantes :

  1. La complexité des questions faisant l’objet de l’appel.
  2. Le fait que plusieurs personnes participent à l’audience à titre de témoins et/ou de parties mises en cause.
  3. Le fait qu’un interprète participe à l’audience.
  4. Le fait que l’appelante ou d’autres parties sont représentées.
  5. L’exigence, en vertu du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, de veiller à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Analyse

[4] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi) régit les activités du Tribunal. L’article 58 de la Loi prescrit les seuls moyens d’appel dont peut tenir compte la division d’appel du Tribunal et l’article 59 énonce les réparations qu’elle peut accorder en appel (voir l’annexe de la présente décision).

[5] Dansl’arrêt Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242, la Cour d’appel fédérale a semblé indiquer que la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale ne devrait pas appliquer aux appels dont elle est saisie une analyse fondée sur la norme de contrôle, mais qu’elle devrait plutôt déterminer si l’un des moyens d’appel énoncés à l’article 58 dela Loidevrait être retenu. Je dois donc déterminer si une telle erreur figure dans la décision de la division générale.

[6] D’abord, l’appelante a indiqué que l’appel devrait être accueilli puisque la division générale n’a pas tenu compte de l’interaction de ses affections lorsqu’elle a conclu qu’elle n’était pas invalide aux termes du Régime de pensions du Canada, et affirmé que l’appelante n’avait pas été traitée pour son trouble mental alors qu’elle l’avait été. En revanche, l’intimé a affirmé que la division générale avait tenu compte de toutes ses affections lorsqu’elle a rendu sa décision.

[7] L’appelante a affirmé être invalide en raison des blessures physiques et du trouble mental dont elle souffre des suites d'un accident de la route. Il n’est pas contesté que la division générale a résumé et analysé la preuve portant sur les blessures physiques et la douleur persistante de l’appelante. Dans l’arrêt Bungay c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 47, la Cour d’appel fédéral a indiqué que l’état d’une personne qui demande une pension d’invalidité doit être évalué dans son ensemble pour déterminer si elle est invalide. Je suis convaincue que la division générale a tenu compte des blessures physiques et du trouble mental de l’appelante lorsqu’elle a rendu sa décision. Dans sa décision, la division générale a résumé la preuve médicale. Elle a tenu compte de toute cette preuve, notamment du traitement subi par l’appelante pour ses affections physiques ainsi que du fait que l’appelante ne suivait pas activement une thérapie pour son trouble mental au moment où l’audience a été tenue. Je n’ai pas été convaincue que l’erreur commise par la division générale, qui a affirmé que l’appelante n’avait reçu aucun traitement pour son trouble mental, ait joué un rôle déterminant dans l’issue de la décision.

[8] La permission d’en appeler a également été accordée à l’appelante au motif que la division générale n’a pas énoncé des motifs suffisants dans sa décision, puisqu’elle n’a pas expliqué le poids accordé à chacun des rapports médicaux pour déterminer si l’appelante était invalide ou non. L’appelante n’a déposé aucune observation touchant spécifiquement cette question.

[9] La représentante de l’intimé a concédé que, même si la division générale a soulevé les incohérences dans les diagnostics et les traitements recommandés, elle ne s’est pas penchée sur ces incohérences et n’a pas expliqué comment elle avait apprécié la preuve compte tenu de celles-ci. La représentante a cependant affirmé que, malgré cela, le raisonnement de la division générale est transparent si l’on examine la décision dans son ensemble. Elle a ajouté que les termes employés par la division générale laissaient entendre qu’elle n’était pas convaincue, en raison de ces incohérences et parce qu’aucun rapport médical ne s’est avéré devenir le [traduction] « rapport authentique » pour la demande de pension d’invalidité de l’appelante, que la preuve médicale était insuffisante pour conclure que l’invalidité de l’appelante était grave aux termes du Régime de pensions du Canada

[10] J’écarte l’argument de l’intimé selon lequel les termes employés dans la décision laissaient entendre que la preuve médicale était insuffisante. D’autres conclusions peuvent être tirées à la lecture de décision. Il est certain que la décision n’indiquait pas que la preuve médicale n’était pas suffisante pour statuer sur la demande de l’appelante.

[11] Dans l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses' Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, la Cour suprême du Canada a statué qu’il n’est pas nécessaire, dans une décision, de tirer une conclusion explicite sur chacun des éléments de preuve et des arguments présentés dans le cadre de l’audience. Les motifs doivent plutôt être examinés en corrélation avec le résultat et doivent permettre de déterminer si celui-ci fait partie des issues possibles acceptables. Je suis convaincue que le raisonnement de la décision rendue par la division générale ressort à l’examen des motifs de la décision dans leur ensemble. Dans sa décision, la division générale mentionne les nombreuses affections de l’appelante, les examens médicaux effectués s’y rapportant, le traitement administré et recommandé ainsi que l’incidence de ces affections sur la capacité fonctionnelle de l’appelante. Les motifs à l’appui de la décision mettaient l’accent sur les évaluations commentant la capacité de l’appelante à travailler. Quoique la division générale aurait pu traiter plus clairement du poids accordé à la preuve médicale dans ses motifs, un examen des motifs dans leur ensemble permet de constater que cette façon de procéder n’a pas été déterminante dans l’issue de la décision.

[12] De plus, l’intimé a raison de dire que des motifs insuffisants ne constituent pas, en soi, un moyen d’appel qui permettrait à une juridiction d’appel d’intervenir.

[13] Enfin, la représentante de l’appelante a plaidé que la division générale n’avait pas correctement apprécié la gravité des limitations et des restrictions, physiques et mentales, de l’appelante. Elle a présenté un résumé des affections de l’appelante et de leur incidence sur celle-ci. Bien que je sois sensible à la situation difficile dans laquelle se trouve l’appelante, la Cour d’appel fédérale a clairement statué, dans l’arrêt Simpson c. Canada (Procureur général) 2012 CAF 82, qu’il appartient au juge des faits, en l’occurrence la division générale, de soupeser la preuve. Le rôle de la division d’appel ne consiste pas à soupeser la preuve de nouveau, ou à substituer sa décision à celle déjà rendue par le juge de faits.

Conclusion

[14] Pour ces motifs, l’appel est rejeté. Je ne suis pas convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que la division générale ait commis un manquement en vertu de l’article 58 de la Loi.

Annexe

Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social

  1. 58. (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :
    1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
    2. b) la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier ;
    3. c) la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.
  2. 59. (1) La division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.
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