Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparutions

C. B. : Appelante

Allan Bayda : Représentant de l’appelante

Introduction

[1] La demande de l’appelante pour une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) a été estampillée par l’intimé le 21 septembre 2012. L’intimé a rejeté cette demande initialement et après révision. L’appelante a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal).

[2] L’audience relative à l’appel a été tenue en personne pour les raisons suivantes :

  1. plus d’une partie devait assister à l’audience.
  2. ce mode d’audience permet d’accommoder les parties ou les participants
  3. le mode d’audience est conforme à la disposition du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Droit applicable

[3] L’alinéa 44(1)b) du RPC énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne reçoit pas une pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[4] Le calcul de la PMA est important, car une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au moment où sa PMA a pris fin ou avant cette date.

[5] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du RPC, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité n’est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[6] Le litige ne concerne pas la PMA, car les parties conviennent que cette période prend fin le 31 décembre 2011, ce qu’a également conclu le Tribunal.

[7] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer s’il est probable que l’appelante avait une invalidité grave et prolongée à la date de la PMA ou avant celle-ci.

Preuve

[8] L’appelante avait 40 ans à la date de l’audience relative à l’appel. Elle a déclaré posséder une certification à titre d’aide aux soins spéciaux. L’appelante a décrit ses principaux troubles incapacitants comme étant ce qui suit : dépression; fibromyalgie; syndrome de fatigue chronique; ostéoporose migratoire; hypotension; migraines; syndrome des jambes sans repos; douleur chronique et constante; syndrome du côlon irritable; maladie cœliaque; syndrome de malabsorption. Elle a affirmé avoir été employée pour la dernière fois à titre d’aide aux soins à long terme du 23 juillet 1993 au 1er novembre 2011, date où elle a cessé de travailler en raison de la douleur, de la fatigue, de la nausée, de faiblesses, de crampes et de malaises. L’appelante a déclaré souffrir de douleurs 70 % du temps, être toujours fatiguée, passer des nuits sans sommeil ni repos, et être incapable de manger des aliments normaux en raison de douleurs à l’estomac et de diarrhées après avoir mangé. Elle a affirmé qu’elle ne pouvait plus travailler en septembre 2009.

[9] Le 13 mars 2008, le Dr Worobetz, gastroentérologue, a signalé que, même si l’appelante continuait d’être dénutrie, elle avait subi un examen approfondi dans le passé au moyen d’une gastroscopie et d’une coloscopie dont les résultats ont été normaux à plusieurs reprises. Le Dr Worobetz était incapable de désigner d’autres examens ou tests qui devraient être effectués de nouveau, et aucun nouveau symptôme ne donne à penser qu’elle souffre d’une nouvelle maladie. Il a recommandé un régime riche en calories.

[10] Le 19 octobre 2011, le Dr Changela a déclaré que l’appelante travaillait à temps plein à titre d’aide-ménagère dans une maison de soins. Le 2 novembre 2011, il a signalé qu’elle effectuait trois quarts de travail par semaine d’une durée de 8 heures par quart.

[11] Le 29 novembre 2011, le Dr Changela a signalé que l’appelant avait quitté son emploi parce qu’elle croyait que cela entraînerait une détérioration de son état. Cependant, selon le Dr Changela, elle croyait que, après le Nouvel An, elle effectuerait des tâches légères dans une autre maison de soins infirmiers.

[12] Dans un rapport daté du 4 septembre 2012, le Dr Changela, médecin de famille, a donné un diagnostic de syndrome du côlon irritable causé par une douleur abdominale chronique. Il a également rendu un diagnostic de syndrome de malabsorption dans le rapport.

[13] Le 15 novembre 2012, le Dr Changela a déclaré que le syndrome de douleur chronique de l’appelante comprenait des maux de dos, une douleur aux jambes et une douleur à la ceinture pelvienne. Elle souhaitait consulter un algologue. Cependant, le Dr Changela a déclaré qu’il préférait qu’elle essaie de prendre des timbres de fentanyl ou de Butran (analgésique narcotique) car elle était incapable de tolérer la gabapentine ou la prégabaline (traitement contre la douleur neuropathique).

[14] Le 7 mars 2013, le Dr Changela a déclaré que l’appelante se sentait mieux et qu’elle avait été capable de maintenir son poids à 120 livres. En avril 2013, le Dr Changela a souligné que l’appelante était censée subir des tests relativement à la maladie cœliaque. Il a prévu une consultation de suivi en mai 2013. Cependant, il n’y a aucune mention de résultats des tests relativement à la maladie cœliaque dans un rapport daté du 10 mai 2013 ou dans un rapport ultérieur.

[15] En septembre 2014, le Dr Changela a déclaré que la colonoscopie avait révélé l’existence de la maladie inflammatoire de l’intestin et que, au moment de produire le rapport, le syndrome du côlon irritable de l’appelante lié à une douleur abdominale était bien contrôlé.

Témoignage de vive voix

[16] L’appelante a commencé son témoignage en déclarant avoir abandonné les études en neuvième année parce que sa mère était malade et qu’elle devait donc cesser de fréquenter l’école pour prendre soin d’elle. Elle a déclaré avoir commencé à travailler dans la maison de soins en 1993 et que son premier emploi était dans la buanderie. Elle a déclaré avoir travaillé dans cette maison jusqu’à ce qu’elle quitte son emploi en 2011. Elle a affirmé avoir subi une chirurgie au genou en 2009 et être ensuite retournée travailler.

[17] L’appelante a déclaré que son médecin lui a prescrit plusieurs médicaments différents afin de combattre la douleur. Elle a déclaré que le Tylenol n’avait aucun effet, alors que le Dilaudid l’assommait. Elle utilisait un timbre de fentanyl et il la rendait incohérente. Elle prend actuellement du Cymbalta (pour conserver son poids) et de l’amitriptyline (pour dormir).

[18] Le 1er novembre 2011, l’appelante a déclaré qu’elle se sentait si mal en raison des douleurs dans son corps qu’elle pleurait dans la chambre d’un patient et qu’elle a décidé de quitter son travail plus tôt ce jour-là. Elle a consulté le Dr Changela parce qu’elle était trop faible et trop fatiguée pour continuer de travailler. C’était la dernière qu’elle a travaillé à la maison de soin même si elle n’a pas démissionné.

[19] L’appelante a déclaré s’être séparée de son époux en septembre 2015 et qu’elle touche des prestations d’aide sociale depuis.

[20] Le Tribunal a été informé que l’appelante peut demeurer en position debout pendant 10 minutes et marcher pendant 10 minutes. Celle-ci a déclaré vivre avec une bouteille d’eau chaude pour atténuer les douleurs corporelles et trouver ses jambes très faibles. Elle a déclaré qu’elle reçoit des traitements de chiropractie et de massothérapie, mais elle ne reçoit pas de traitements d’acuponcture.

Observations

[21] L’appelante a soutenu qu’elle est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Étant donné le niveau de scolarité de l’appelante, ses difficultés d’apprentissage, l’absence de capacité ou d’expérience dans un autre domaine que les emplois physiques, ses difficultés physiques et ses médicaments l’empêchent de détenir une occupation véritablement rémunératrice.
  2. L’appelante est incapable de maintenir son poids et elle a déjà pesé aussi peu que 93 livres.

[22] L’intimé a fait valoir que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Bien qu’il soit reconnu que l’appelante ne serait pas capable de retourner occuper son ancien emploi physique à titre d’aide aux soins, les renseignements médicaux n’appuient pas le fait qu’elle est incapable de détenir un emploi plus adapté à ses limitations.
  2. Des options de traitement qui pourraient améliorer la gestion de la douleur demeurent à sa disposition.
  3. Les renseignements versés au dossier ne démontrent pas que l’appelant a déjà été évaluée par un neurochirurgien afin de déterminer la cause de ses douleurs dorsales ou qu’elle a été dirigée vers une clinique de gestion de la douleur pour subir une évaluation et un traitement.
  4. Aucune conclusion dans le cadre d’un examen ou d’une évaluation n’a été tirée pour appuyer le fait que l’appelante respecte les critères diagnostiques relativement à un diagnostic de fibromyalgie et de syndrome de fatigue chronique.

Analyse

[23] L’appelante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle avait une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2011 ou avant cette date.

Caractère grave

[24] La gravité de l’invalidité doit être évaluée dans un contexte réaliste (Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248). Cela signifie que pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau de scolarité, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[25] L’appelante avait 43 ans à la date de l’audience relative à l’appel. Elle a déclaré posséder une neuvième année et que ses antécédents professionnels étaient constitués d’emplois manuels. L’appelante a comparu devant le Tribunal et a fait preuve de bonnes aptitudes à communiquer. Même si elle était quelque peu incertaine d’incidents précis dans le passé, sa capacité à raconter son histoire était directe et utile. Ses antécédents professionnels étaient tels qu’elle avait perfectionné des compétences qui lui ont donné la capacité de développer des compétences transférables. Étant donné l’âge et les antécédents professionnels de l’appelante, le Tribunal estime qu’elle possède des compétences transférables qui l’aideraient à trouver un autre emploi.

[26] L’intimé fait valoir qu’il existe de nombreuses mentions dans les rapports du médecin de famille de l’appelante qui font état d’un diagnostic de fibromyalgie et de syndrome de fatigue chronique. L’intimé souligne également qu’il n’existe aucune conclusion tirée dans le cadre d’un examen ou d’une évaluation dans les rapports du Dr Changela qui démontre que l’appelante respecte les critères diagnostiques relativement à ces diagnostics. Le Tribunal a examiné la preuve médicale et il est incapable de trouver une preuve démontrant que l’appelante a reçu un diagnostic d’un de ces troubles. Rien ne démontre que l’appelante a été dirigée vers un spécialiste de la fibromyalgie afin de déterminer si elle souffre bel et bien de fibromyalgie, et rien ne démontre que l’appelante a suivi un programme de traitement pour traiter les symptômes. Le Tribunal souligne que la preuve démontre que le médecin de l’appelante semblait traiter les symptômes de celle-ci par des moyens pharmacologiques et qu’il n’a pas tenté d’avoir recours à d’autres options de traitement.

[27] Le Tribunal se fonde sur la décision dans l’arrêt Gaudet c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 59, où il est déclaré ce qui suit :

En fin de compte, le fait de diagnostiquer une sarcoïdose ou une fibromyalgie ne pouvait en soi améliorer les chances de la demanderesse de recevoir une pension d’invalidité si elle ne soumettait pas des éléments de preuve convaincants démontrant qu’elle était invalide au sens du Régime à la date à laquelle la PMA avait pris fin.

[28] L’appelante a été dirigée vers un spécialiste pour son syndrome du côlon irritable. La gastroentérologue qui a examiné le dossier a constaté que l’appelante était dénutrie, mais, après examen de la gastroscopie ou de la colonoscopie, il ne pouvait rien constater qui sortait des résultats normaux. Bien que le Dr Worobetz ait compris la frustration de l’appelante parce qu’il ne pouvait pas expliquer son incapacité à maintenir son poids et la raison de ses douleurs, il était incapable d’expliquer la raison de ces problèmes sur le plan médical.

[29] Le Tribunal a également souligné que l’appelante s’était plainte de douleurs dorsales. Selon les dossiers, l’appelante a demandé à son médecin de famille d’être dirigée vers un spécialiste. Toutefois, elle a plutôt reçu un assortiment de médicaments à essayer pour traiter la douleur. Rien ne démontre un renvoi vers un neurochirurgien aux fins de traitement des douleurs dorsales de l’appelante.

[30] Lorsqu’il y a des preuves d’aptitude au travail, une personne doit montrer que les efforts qu’elle a déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été vains en raison de son état de santé (Inclima c. Canada (P.G.), 2003 CAF 117).

[31] L’appelante a déclaré au Tribunal qu’elle n’avait pas essayé d’occuper d’autres emplois après avoir quitté son emploi à temps plein en raison du fait qu’elle avait l’impression que personne n’allait l’embaucher. Elle a déclaré au Tribunal qu’elle ne pouvait même pas nettoyer sa maison, alors elle n’était pas certaine de savoir comment elle serait embauchée pour accomplir un travail qu’elle sait qu’elle ne pourra pas faire. Le Tribunal a souligné que le médecin de famille de l’appelante avait déclaré dans ses notes cliniques du 29 novembre 2011 que, même si l’appelant avait démissionné de son emploi, elle avait également déclaré qu’elle prévoyait chercher un emploi exigeant des travaux légers dans le domaine des soins à domicile après le Nouvel An. Cela était au moment de sa PMA.

[32] Le Tribunal souligne également que l’appelante avait fait modifier ses heures de travail afin de l’aider à faire face à ses symptômes. Bien que sa description de travail n’ait pas changé, son employeur a autorisé l’appelante à réduire son nombre d’heures de travail. Le Tribunal souligne que cette capacité à limiter ses heures de travail était utile pour l’appelante, mais que, en raison de la nature physique de ses symptômes, cela ne lui a pas permis de continuer à occuper son emploi.

[33] Le Tribunal souligne également que, même si l’appelante a tenté de constater si une modification des heures de travail lui permettrait de continuer à occuper son emploi, l’appelante n’a pas tenté de modifier ses tâches. L’appelante est une jeune femme qui possède des compétences transférables qui pourraient avoir des limitations, mais rien ne démontre qu’elle était incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice dans tous les domaines. Le Tribunal se fonde sur les notes cliniques du médecin de famille selon lesquelles l’appelante prenait soin de son petit-fils après avoir quitté son emploi en 2011.

[34] Bien que la preuve démontre que, en novembre 2011, l’appelante souffrait des effets d’un certain nombre de symptômes, rien ne démontre que, à ce moment-là, l’appelante respectait les critères requis pour établir que son état était grave et prolongé au sens du RPC et selon la jurisprudence susmentionnée.

Caractère prolongé

[35] Comme le Tribunal a conclu que l’invalidité n’était pas grave, il n’est pas nécessaire qu’il se prononce sur le critère de l’invalidité prolongée.

Conclusion

[36] L’appel est rejeté.

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