Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparutions

Appelante : S. S.

Représentant : Howard Smith

Introduction

[1] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) de l’appelante le 19 juin 2013. Il a refusé la demande au stade initial ainsi qu’au terme d’un nouvel examen. L’appelante a interjeté appel de la décision en réexamen devant le Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal).

[2] L’audience dans le cadre de cet appel a été tenue par vidéoconférence pour les motifs suivants :

  1. L’appelante sera la seule partie à assister à l’audience.
  2. Ce mode d’audience offre les mesures d’adaptation requises par les parties ou les participants.
  3. Ce mode d’audience satisfait à l’obligation, énoncée dans le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, de procéder de façon aussi informelle et rapide que possible dans la mesure où les circonstances, l’équité et la justice naturelle le permettent.

[3] Initialement, l’audience devait être tenue le 6 janvier 2016, mais à la demande du représentant de l’appelante, elle a été remise au 8 mars 2016.

Droit applicable

[4] L’alinéa 44(1)b) du RPC établit les conditions d’admissibilité à la pension d’invalidité du RPC. Pour être admissible à une pension d’invalidité, un demandeur doit :

  1. a) avoir moins de soixante-cinq ans;
  2. b) ne pas recevoir de pension de retraite du RPC;
  3. c) être invalide;
  4. d) avoir versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[5] Le calcul de la PMA est important, puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date marquant la fin de sa PMA ou avant cette date.

[6] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du RPC, pour être considérée comme étant invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée comme ayant une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[7] La PMA n’est pas en litige, car les parties s’entendent à cet égard; le Tribunal conclut que la date qui marque la fin de la PMA est le 31 décembre 2018.

[8] Dans la présente affaire, puisque la PMA est postérieure à la date de l’audience, le Tribunal doit déterminer si l’appelante était vraisemblablement atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de l’audience, le 8 mars 2016, ou avant cette date.

Preuve

Documents liés à la demande

[9] L’appelante était âgée de 38 ans à la date de l’audience. Elle a une onzième année. Elle a travaillé dans le domaine du contrôle de la qualité pour une compagnie de menuiserie de 2009 au mois de février 2011, date à laquelle elle a arrêté de travailler en raison de blessures subies lors d’un accident de voiture. Elle n’a pas accompli un travail aux tâches allégées ni un type de travail différent, et elle ne planifie pas retourner au travail ni chercher du travail dans un proche avenir.

[10] Dans le questionnaire relatif aux prestations d’invalidité, l’appelante indique que les maladies ou déficiences qui l’empêchent de travailler tiennent en des douleurs aiguës au dos, à l’épaule gauche et au genou gauche. Elle indique qu’elle ne peut travailler parce qu’en raison de ces douleurs, il lui est très difficile de se tenir debout et de s’asseoir pendant une période, quelle qu’elle soit. Elle éprouve beaucoup de difficulté à se déplacer ou à soulever des objets. Elle affirme qu’elle doit rester à la maison presque toute la journée et qu’elle a besoin d’aide pour s’occuper de ses enfants. Au chapitre des difficultés et des limitations fonctionnelles, elle peut s’asseoir pendant 15 à 20 minutes et se tenir debout pendant une demi-heure seulement. Elle peut marcher sur une distance de deux pâtés de maisons environ, pendant 20 à 30 minutes. Elle a de la difficulté à soulever des objets. Elle peut soulever des objets de cinq livres environ et les transporter sur une distance de 10 à 15 pieds. Elle a aussi beaucoup de difficulté à allonger le bras gauche, et elle le protège. Elle ne peut plier les genoux sans ressentir une douleur et elle a très mal au dos lorsqu’elle se penche vers l’avant. Elle prend beaucoup plus de temps à s’habiller en raison des douleurs et elle a beaucoup de difficulté à se laver les cheveux et à les sécher. Elle a besoin d’aide pour faire la cuisine, le ménage et les courses. Ses douleurs au dos interrompent constamment son sommeil et elle ne peut conduire que sur de courtes distances. Elle n’a pas essayé d’utiliser le transport en commun. Elle n’indique pas éprouver quelque problème que ce soit au niveau des intestins et de la vessie, de la vue, de l’élocution, de la mémoire, de la concentration et de la respiration. Elle affirme qu’elle prenait du Advil toutes les six heures et du Tylenol au besoin. Elle a reçu un traitement de physiothérapie, et elle doit obtenir la date et l’heure d’un rendez-vous pour passer une imagerie par résonance magnétique (IRM) au dos.

Témoignage donné de vive voix

[11] L’appelante a témoigné qu’elle est venue au Canada en provenance de l’Iraq lorsqu’elle avait 16 ans. Elle a une onzième année et a fait ses quatre ou cinq dernières années d’études au Canada. Elle habite dans un appartement avec ses deux enfants de 15 ans et de cinq ans, cette dernière étant née en avril 2011. Dans le cadre du dernier emploi qu’elle a occupé, pendant une période de deux ans, elle a assuré le contrôle de la qualité et examiné et classé des placages pour une compagnie de placage. C’est un travail physique qui l’oblige à se tenir debout et à se pencher pendant son quart de travail de neuf heures, lequel est assorti d’une pause d’une demi-heure pour le diner. Elle avait auparavant accompli le même travail – contrôle de la qualité – pendant quatre ou cinq ans pour une autre compagnie. Et avant cela, soit en 1999, elle avait travaillé de façon sporadique dans le domaine de la réception et de l’expédition pour une compagnie d’enregistrement sur bande vidéo pendant deux ou trois ans environ.

[12] L’appelante était enceinte lorsqu’elle a subi un accident de voiture le 30 septembre 2010. Elle était alors en route pour le travail. Son véhicule a été frappé par l’arrière et a ensuite frappé l’autobus de la Commission de transport en commun de Toronto qui se trouvait devant lui. Elle a été amenée à l’hôpital en ambulance, et une échographie a indiqué que le bébé n’avait pas été blessé. Elle a été frappée au genou gauche, à l’épaule gauche, au bas du dos et au cou à partir de l’épaule en descendant. Elle avait vraiment mal au genou et au dos, mais les médecins n’ont pu prendre une radiographie parce qu’elle était enceinte. Elle est restée sans travailler pendant cinq jours. Elle a ensuite repris le travail, mais elle a été incapable d’accomplir ses tâches. Son employeur lui a permis de s’asseoir, mais il ne lui a offert aucune autre mesure d’adaptation. Elle avait vraiment mal au dos. Elle a fait valoir qu’elle planifiait commencer son congé de maternité le 29 mars 2011, mais elle a laissé son travail au mois de février 2011 parce qu’elle ne pouvait plus tolérer les douleurs. Sa fille est née le 5 avril 2011. Elle avait planifié rester en congé de maternité pendant un an et retourner au travail en mars ou en avril 2012.

[13] L’appelante a témoigné que sa blessure au dos était la pire et qu’en septembre 2011, elle avait le dos en très mauvais état. Il lui arrivait de s’asseoir et d’être ensuite incapable de se lever. Elle avait des problèmes à l’épaule et au genou, mais c’est le dos qui était le pire. Aucun de ses problèmes de santé ne s’est dissipé, et elle n’a eu aucun nouveau problème de santé depuis. Elle a eu un accident avant celui qui est en cause, mais il n’était pas aussi grave. Un an après l’accident, son état de santé s’était aggravé et elle ne pouvait alors accomplir aucun travail. Au mois de septembre 2012, aucun de ses problèmes de santé ne s’était amélioré, et ils s’étaient plutôt aggravés avec le temps. Elle n’aurait pu alors accomplir aucun travail. Dans l’année précédant le mois de septembre 2013, aucun de ses problèmes de santé ne s’est amélioré. Comme elle avait mal au dos, son état mental s’est détérioré, car elle était trop stressée. Entre le mois de septembre 2012 et 2013, son état de santé s’est détérioré. De l’avis de l’appelante, il n’y avait aucun travail qu’elle puisse accomplir lorsqu’elle ne pouvait pas se concentrer. Elle s’énerve sans raison. Au mois de septembre 2014, quatre ans après l’accident, aucun de ses problèmes de santé ne s’était amélioré. Ils s’étaient aggravés. L’hiver, elle ne peut sortir. Après l’accident, elle n’a essayé aucun autre type de travail et elle est en congé depuis ce temps-là. Il n’y avait aucun travail qu’elle puisse accomplir. L’appelante a témoigné que son employeur lui a demandé de retourner au travail si elle le souhaitait, mais il n’y a rien qu’elle puisse faire là. Au mois de septembre 2015, aucun de ses problèmes de santé ne s’était amélioré. Elle a fait valoir qu’il n’y avait aucun travail qu’elle puisse effectuer au mois de septembre 2015, et le Dr Scherer l’a évaluée et a déclaré qu’il n’y avait aucun travail qu’elle puisse effectuer.

[14] En ce qui concerne les traitements, l’appelante soutient que les médecins lui ont dit qu’ils ne peuvent rien faire et qu’elle doit vivre avec ses problèmes. Elle a suivi un traitement de physiothérapie pendant un an, mais cela n’a donné aucun résultat. Elle se sentait encore moins bien le lendemain du traitement. Elle a obtenu des traitements au laser, des massages, une thérapie par ultrasons, et elle n’a constaté aucun soulagement durable. Au niveau psychologique, elle ne sait pas ce qui se passe. Elle s’est fait diagnostiquer une dépression en raison d’un trop grand stress. Lorsqu’elle conduit, elle pense qu’elle va se faire frapper par l’arrière. Elle n’a pas encore consulté un psychologue. Son ancien médecin a pris sa retraite et elle a finalement trouvé un nouveau médecin de famille. Au cours des six derniers mois, elle a consulté son médecin de famille à quatre ou cinq reprises. Elle a passé une radiographie, elle a une bactérie dans l’estomac et elle manque de fer. Elle a acheté des crèmes pour les épaules. Elle prend du Motrin pour la douleur tous les jours – un ou deux comprimés lui procurent un soulagement temporaire, puis les effets se dissipent.

[15] Elle s’est fait diagnostiquer des douleurs chroniques. Ses douleurs sont très graves. Elle a mal lorsqu’elle marche, elle a mal lorsqu’elle reste assise, et elle a mal lorsqu’elle s’allonge. Elle est incapable de porter sa fille, même lorsqu’elle ne se sent pas bien. Son état de santé ne s’est pas amélioré à ce jour.

[16] L’appelante a indiqué qu’elle se lève habituellement à sept heures. L’aîné prend soin de lui-même, et sa sœur l’aide à s’occuper de sa fille. Lorsqu’elle les accompagne à pied jusqu’à l’arrêt de l’autobus scolaire, elle doit s’asseoir à son retour à la maison. Elle prend une douche dans une douche debout, mais elle n’a pas besoin de dispositifs d’assistance. Elle porte des vêtements amples pour que ce soit plus facile pour elle. Son médecin lui a dit de faire des exercices, ce qu’elle a essayé de faire, mais ses jambes l’empêchaient de marcher. Elle ne fait aucun exercice pendant la journée. Si elle soulève un poids, elle a mal à l’épaule et, si elle marche, elle a mal au dos. Elle peut conduire pendant 30 minutes, se tenir debout pendant 10 minutes, s’asseoir pendant 10 minutes et marcher pendant 10 minutes. Elle ne peut pas soulever un objet très lourd. L’objet le plus lourd qu’elle peut soulever est son sac à main, mais elle ne peut porter celui-ci à l’épaule. Elle a beaucoup de difficulté à se pencher. Elle peut difficilement se servir d’un ordinateur en raison de son épaule et de la douleur qui irradie jusqu’au cou. Elle peut s’asseoir devant l’ordinateur pendant 10 à 15 minutes.

[17] Elle avait l’habitude de cuisiner et de faire le ménage et la lessive, mais elle ne peut plus rien faire. Sa sœur et sa belle-sœur l’aident, surtout pour s’occupe de sa fille. Sa sœur l’aide à faire la lessive. Elle ne peut aller au parc avec ses enfants pour jouer et elle ne peut aller à Wonderland avec son fils parce que cela l’oblige à marcher. Elle ne peut aller nager. Elle aimait par le passé marcher à l’extérieur et elle ne peut le faire. Ses blessures affectent ses enfants, surtout son fils, avec qui elle avait l’habitude de faire beaucoup de choses, ce qu’elle ne peut plus faire aujourd’hui.

[18] L’appelante a témoigné qu’elle a consulté son médecin de famille et qu’elle a dit à ce dernier qu’elle ne pouvait s’asseoir ni se tenir debout. Il lui a fait passer une radiographie, et il lui a dit que son disque s’était déplacé; il lui a donc fait passer une IRM. Puis il l’a dirigée vers un médecin spécialiste des problèmes au dos, mais elle a dû attendre encore sept mois avant d’obtenir un rendez-vous avec un médecin de l’hôpital St. Michael. Il lui a dit lui aussi qu’elle avait un problème discal, et lui a dit qu’elle devait vivre avec la douleur. Il lui a recommandé des exercices et des analgésiques, et il lui a déconseillé une intervention chirurgicale. Son médecin de famille lui a donné du Tylenol 3, ce qui l’a rendue somnolente, et il lui a dit en bout de ligne d’arrêter d’en prendre après qu’elle a eu sa fille et après que le tomodensitogramme a permis de trouver le problème. Elle a fait valoir qu’il ne voulait pas qu’elle s’y habitue. Le Tylenol ne donnait aucun résultat, mais il lui donnait simplement envie de dormir et lui permettait d’oublier ses douleurs. Elle n’avait aucun effet secondaire lorsqu’elle prenait du Tylenol, sauf que cela la rendait somnolente. Le Motrin lui permettait de relaxer lorsqu’elle ne pouvait tolérer la douleur. Les jours où il fait froid, elle ne peut supporter la douleur et c’est très difficile.

[19] L’appelante a témoigné qu’elle veut retourner sur le marché du travail, mais qu’il n’y a aucun travail qu’elle puisse accomplir. Elle ne pourrait faire un travail aux tâches allégées dans un bureau, à temps partiel, parce qu’elle ne peut rentrer au travail un jour sur deux, et personne ne va lui offrir un tel emploi. Après le mois de février 2011, elle n’a essayé aucun autre type de travail, et elle n’a pas travaillé depuis cette date. Elle n’a pas cherché de travail. Elle n’a pas étudié la possibilité de se recycler ou de suivre des cours pour obtenir une formation et occuper un autre emploi parce qu’à l’école, il faut s’asseoir pendant deux ou trois heures. Elle n’a fait aucun travail bénévole rémunéré ou non. Elle ne peut s’imaginer accomplir quelque travail que ce soit. Ses douleurs et ses souffrances l’ont empêchée de chercher un autre travail.

Preuve médicale

[20] Une IRM de la colonne lombaire faite le 27 mars 2012 n’a permis de constater l’existence d’aucune anomalie importante aux niveaux T10-11 jusqu’aux niveaux L2-3, et la vertèbre L3-4 est normale. Au niveau L4-5, les médecins ont constaté une discopathie dégénérative assortie d’une perte du signal au niveau T2, dans le disque. Il y a une déchirure annulaire postérieure, associée à une hernie discale para centrale gauche assez large, ce qui produit un léger effet de masse sur le sac thécal ainsi qu’un léger effet de masse sur la racine nerveuse au niveau L5 gauche. Au niveau L5-S1, l’on constate une légère dégénérescence facettaire bilatérale, mais aucune autre anomalie.

[21] À la demande de son représentant, l’appelante a été évaluée le 10 juillet 2012 par le Dr Ken Fern, chirurgien orthopédiste, qui a fourni un rapport médical indépendant. Le Dr Fern a examiné une IRM et un rapport de tomodensitogramme de la colonne lombaire de l’appelante. Après avoir pris en considération l’historique médical, dont deux accidents de voiture survenus le 25 octobre 2009 et le 30 septembre 2010, il a indiqué que l’appelante avait des problèmes au dos et que ceux-ci avaient été causés par le premier accident, et qu’elle avait fait de la physiothérapie environ une fois par mois jusqu’à la date du deuxième accident. Elle était alors enceinte de 14 semaines, et a donné naissance le 5 avril 2011. Elle a fait de la physiothérapie pendant un an environ, mais elle avait arrêté à la date à laquelle elle a consulté le Dr Fern. Elle ne prenait à l’époque que de l’Advil. Elle a arrêté de travailler au mois de février 2011, après avoir pris un congé de maternité. Elle devait retourner au travail au mois de février 2012, mais elle n’est pas retournée en raison de ses problèmes au dos. Ses deux enfants étaient âgés de 11 ans et de 15 mois à la date de l’évaluation.

[22] Sur examen physique, le Dr Fern a conclu que l’appelante était raisonnablement confortable en position assise, mais qu’elle pouvait difficilement passer d’une position à une autre, surtout de la position assise à la position allongée, puis ensuite à la position assise. Sa démarche était assez normale. Elle avait au dos un rythme vertébral plus lent et une sensibilité au niveau des muscles para vertébraux et une sensibilité dans le bas de la colonne lombaire. Elle avait une amplitude réduite du mouvement au niveau de la colonne thoraco-lombaire, et une rotation stimulée du pelvis ou une compression axiale stimulée ne provoquaient aucune douleur. Elle ne ressentait aucune faiblesse et ses sensations étaient intactes dans tous les myotomes et tous les dermatomes des membres inférieurs. Ses réflexes dans les membres inférieurs étaient intacts et symétriques. Le soulèvement de la jambe raide donnait des résultats normaux en position assise et en position allongée des deux côtés. Les mouvements des deux hanches ne provoquaient aucune douleur. Il n’y avait aucune enflure, chaleur ou érythème au genou droit. L’amplitude du mouvement allait de 0 à 140 degrés environ, sans crépitation. L’alignement global était normal, et il n’y avait ni épanchement ni sensibilité importante. La compression patellaire ne provoquait aucune douleur, et les ligaments du genou gauche étaient largement stables. Le reste de l’examen du système musculo-squelettique n’a révélé rien d’anormal.

[23] Le Dr Fern a conclu que les observations cliniques étaient compatibles avec les symptômes signalés par l’appelante. Ses blessures sont compatibles avec une entorse initiale et des blessures de type myofascial à la colonne lombaire. Le pronostic du médecin alors et à long terme était assez prudent. À son avis, la gravité et la persistance de ses problèmes au dos et ses symptômes font en sorte qu’il est peu probable que l’appelante se remette complètement. Il a considéré que ses déficiences au dos étaient graves, importantes et permanentes, et il a prévu qu’elle aurait une symptomatologie résiduelle qui diminuera son niveau de fonctionnement physique général et son niveau d’endurance, et qui entraînera des restrictions physiques permanentes.

[24] Après avoir examiné l’IRM du 27 mars 2012, le Dr Fern s’est dit d’avis que la déchirure et le bombement discal au niveau L4-5 étaient le résultat de l’accident de voiture, mais il n’a pas recommandé d’intervention chirurgicale, qu’il considérait extrêmement peu fiable étant donné les problèmes de douleurs chroniques de l’appelante. À son avis, sa symptomatologie de la jambe gauche témoigne davantage d’une douleur projetée que du résultat d’une radiculopathie active au niveau L5, du côté gauche. Le problème le plus important est un problème et un syndrome de douleurs chroniques, qui se sont développés dans le bas du dos de l’appelante et qui ont provoqué un cycle du sommeil perturbé et des conséquences psychologiques et émotionnelles vraisemblablement importantes – bien que le médecin ait concédé que la déficience psychologique ne relève pas de la portée de sa pratique et de son expertise. Il a suggéré que l’on poursuive les traitements traditionnels et que l’on dirige l’appelante vers un programme de traitement des douleurs chroniques.

[25] Le Dr Paul Muller, neurochirurgien, a reçu l’appelante en consultation ambulatoire neurochirurgienne à l’hôpital St. Michael’s le 23 avril 2013. Il a indiqué que l’appelante avait eu un accident de voiture le 30 septembre 2010, au cours duquel son véhicule avait été frappé par l’arrière et était ensuite entré en collision avec un véhicule de la Commission de transports en commun de Toronto (TTC), qui était devant elle. Elle a été conduite à l’hôpital. Elle était alors enceinte de trois mois, et une échographie a été prise pour confirmer que le bébé n’avait pas été affecté. Après l’accouchement, elle a passé une IRM, qui a révélé une discopathie dégénérative au niveau L4-5 de même qu’une déchirure annulaire et une protrusion discale associées, celle-ci étant légèrement excentrée vers la gauche, sans grande compression des structures neurales adjacentes. Le Dr Muller a indiqué que son examen de l’appelante tendait à le confirmer. Elle peut, en gardant la jambe droite, soulever celle-ci dans un angle de 90 degrés bilatéralement lorsqu’elle est assise. Ses réflexes sont physiologiques. Ses forces se situent dans les limites normales, et il n’y a aucune perte sensorielle. L’amplitude de mouvement du dos de l’appelante est un peu limitée, car elle ne peut que se toucher les genoux lorsqu’elle se penche vers l’avant, mais elle se sent par ailleurs tout à fait bien. Sa morphologie générale est probablement dans les limites normales. Il a recommandé non pas un traitement chirurgical, mais une physiothérapie dans le cadre de laquelle l’on mettrait l’accent sur la mobilisation lombaire et la perte de poids. L’appelante ne prenait alors aucun médicament.

[26] Le Dr James Peter Rowan, médecin de famille, a rempli le rapport médical accompagnant le demande le 7 juillet 2013. Il y indique qu’il connaît l’appelante depuis 13 ans et qu’il a commencé à la traiter pour des problèmes de santé principaux au mois d’octobre 2010. Il l’a reçue en consultation la dernière fois le 28 juin 2013. Il a posé les diagnostics suivants : blessures – lors d’un accident de voiture – à la colonne cervicale et à la colonne lombaire, hernie discale au niveau L4-5 d’après une IRM, avec pincement de la racine nerveuse au niveau L5. Les observations importantes tenaient en des douleurs persistantes au cou et au dos depuis l’accident de voiture. Comme elle était alors enceinte de 16 semaines, l’investigation a été reportée jusqu’après l’accouchement. Elle a été reçue en consultation par le Dr Muller, neurochirurgien, en avril 2013. Le médecin s’est dit d’avis qu’une intervention chirurgicale n’était pas une option et lui a recommandé de faire de la physiothérapie et une réadaptation. Dans les deux années qui ont précédé sa demande, l’appelante n’avait pas été admise à l’hôpital. Les observations physiques pertinentes et les limitations fonctionnelles signalées par le Dr Rowan étaient une raideur chronique au bas du dos, une sciatique dans la jambe gauche, avec réduction de l’amplitude du mouvement et de la capacité de soulever des objets ou de se plier; des douleurs constantes; aucun déficit neurologique comme tel; de la difficulté à s’occuper des enfants; et l’incapacité d’accomplir des tâches ménagères. Elle prenait du Tylenol no 2 et de l’Advil au besoin. Le traitement tenait en des médicaments antiinflammatoires non stéroïdiens (ANS), des exercices et une physiothérapie. Le pronostic du Dr Rowan était inconnu. Le médecin a indiqué que l’appelante avait eu des symptômes pendant trois ans depuis ses blessures, et aucun signe d’amélioration jusqu’à présent. Elle était en attente d’une deuxième IRM afin d’écarter un diagnostic de sténose spinale. Elle était alors inapte à travailler et avait eu besoin d’un an pour se remettre et pour que le pronostic soit établi. Elle a besoin d’un programme de réadaptation intensive pour le dos assorti d’exercices et du renforcement des muscles abdominaux. Il a indiqué qu’il croit qu’il existe une possibilité que cela devienne une invalidité chronique.

[27] Le 13 août 2013, à la demande du représentant de l’appelante, le Dr Fern a de nouveau évalué l’appelante afin de dresser un rapport médical et non pas à des fins de traitement. Il a passé en revue un rapport d’IRM daté du 7 juillet. Après avoir interrogé l’appelante sur ses antécédents, le Dr Fern a conclu sur examen que cette dernière ne ressentait qu’une certaine sensibilité dans la région trapézoïdale gauche et dans la musculature para dorsale, sans aucune autre observation. Elle ressentait une certaine sensibilité dans la région de l’épaule gauche ainsi que dans les aspects antérieurs et supérieurs, mais aucune instabilité n’a été relevée dans l’épaule. Il a signalé que l’IRM passée au mois de juillet 2013 ne révélait aucune modification importante par rapport à l’IRM précédente. Le Dr Fern a diagnostiqué des douleurs irradiant jusqu’à la jambe gauche, qui continuaient de témoigner d’un problème de douleurs projetées, et a indiqué que l’appelante n’était pas une candidate à une intervention chirurgicale. Elle avait développé un trouble et syndrome graves de douleurs chroniques au dos. Elle s’était rétablie dans une mesure maximale sur le plan médical. Ses symptômes au dos avaient paru s’aggraver, et l’appelante continuait de ressentir des douleurs constantes dans le cou et à l’épaule gauche, associées à une amplitude du mouvement réduite à l’épaule. Il a dit de son pronostic d’alors et à long terme qu’il était extrêmement sombre. Il a dit croire que l’appelante aurait à l’avenir des restrictions physiques permanentes pour ce qui est d’accomplir ses activités.

[28] Le Dr G. D. Gale, du Centre d’évaluation des douleurs et des invalidités, a procédé à une évaluation médico-légale de l’appelante le 2 novembre 2013. Elle prenait alors de l’Advil. Sur examen, sa posture lorsqu’elle était assise paraissait normale, et sa démarche était normale. Elle pouvait marcher en passant du talon aux orteils, elle pouvait se tenir sur une jambe, et les tests de Romberg et de Trendelenburg ont donné des résultats normaux. Après avoir examiné les documents médicaux, avoir pris en considération les antécédents dont l’appelante lui a fait part et avoir examiné cette dernière, le Dr Gale a posé les diagnostics suivants : entorse lombo-sacrale, entorse cervico-thoracique, entorse de la bandelette de Maissiat gauche, maux de tête posttraumatiques assortis de migraines; et trouble d’humeur et affection médicale générale (douleurs chroniques), dépression profonde et légère anxiété. Étant donné que l’appelante a ces déficiences depuis trois ans, elles sont probablement permanentes et elles devraient vraisemblablement peu s’améliorer dans un avenir proche. De l’avis du Dr Gale, ces blessures empêchaient l’appelante de retourner au travail parce qu’elle est incapable de rester assise et debout pendant une longue période, ou de parcourir une grande distance à pied, et parce qu’elle est incapable de se pencher et de soulever des objets principalement en raison de ses blessures au dos. Elle est par conséquent incapable de retourner sur le marché du travail à temps plein ou à temps partiel.

[29] Le Dr S. E. Scherer, psychologie en orientation professionnelle et réadaptation et spécialiste de l’employabilité, a indiqué dans un rapport rédigé le 18 décembre 2013 que l’appelante avait été reçue en consultation aux fins d’une évaluation psycho-professionnelle et de réadaptation le 23 septembre et le 1er octobre 2013. Il a conclu que l’appelante avait deux niveaux de littératie, mais qu’il était probable qu’avant l’accident, son fonctionnement cognitif et ses niveaux d’accomplissement aient été quelque peu plus élevés. Il a noté que l’appelante compose raisonnablement bien avec son évaluation des douleurs chroniques, aggravées par la dépression. Le Dr Scherer s’est dit d’avis que l’on constate que les gens qui ressentent des douleurs persistantes et une fatigue continue, ainsi que l’appelante en a fait mention, doivent réduire leurs horaire de travail au fil du temps et sont incapables de rester sur le marché du travail pendant aussi longtemps que leurs homologues qui sont en santé. Il leur arrive souvent de devoir prendre une retraite anticipée, habituellement plusieurs années, voire jusqu’à 10 ans plus tôt qu’à l’habitude. Il a noté qu’une activité réduite peut mener à des douleurs accrues et qu’un traitement continu pourrait entraîner le maintien ou l’amélioration de son niveau de fonctionnement physique. Le Dr Scherer a recommandé un examen pharmaco-thérapeutique, puisque l’appelante ne prenait aucun médicament pour traiter ses douleurs ou son humeur, et il a posé comme thèse que des injections tronculaires pourraient lui apporter un soulagement important et faciliter le traitement de ses limitations au chapitre de la mobilité, d’une activation et d’un reconditionnement. Il a en outre recommandé des exercices, un programme de traitement des douleurs cognitives comportementales, une étude du sommeil, et une médication et un counseling appropriés.

[30] Le Dr Fern a déposé un ajout à son rapport daté du 25 août 2014 concernant des études d’imagerie du dos de l’appelante. Après avoir examiné les dossiers, il a conclu que ceux-ci ne l’avaient pas amené à modifier l’opinion qu’il avait exposée dans ses rapports précédents.

Observations

[31] L’appelante a fait valoir qu’elle est admissible à une pension d’invalidité pour les motifs suivants :

  1. Elle a été continuellement incapable d’accomplir un travail, quel qu’il soit, depuis le mois de février 2011 en raison de symptômes de douleurs chroniques, qui ont pris naissance lorsqu’elle s’est blessée au dos dans un accident de voiture survenu en septembre 2010. Ces douleurs sont aggravées par une dépression.
  2. La preuve médicale indique que ses blessures sont permanentes et le pronostic est extrêmement sombre. Le rétablissement complet est peu probable, et l’on ne s’attend à aucune amélioration sensible à l’avenir.
  3. Elle n’a pas gradué de l’école secondaire, et une évaluation par le Dr Scherer indique qu’elle obtient des résultats inférieurs à la moyenne à presque tous égards. Il ne lui reste donc que des emplois de journalière mais, en raison de son incapacité de se tenir debout ou de s’asseoir pendant de longues périodes, elle n’est pas employable.

[32] L’intimé fait valoir que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les motifs suivants :

  1. L’appelante n’a pas établi l’existence d’une invalidité grave et prolongée au sens du RPC à la date marquant la fin de sa PMA, le 31 décembre 2018 ou avant cette date, et continuellement par la suite.
  2. L’appelante fonde son allégation selon laquelle elle est atteinte d’une invalidité sur des douleurs graves au dos, à l’épaule gauche et au genou gauche, mais la preuve ne fait état d’aucune pathologie ou déficience grave l’empêchant de trouver un travail lui convenant compte tenu de ses limitations.
  3. Après un accident de voiture au cours duquel elle a été frappée par l’arrière, une IRM a révélé l’existence d’une déchirure annulaire et d’une discopathie dégénérative, sans grande compression des structures neurales adjacentes. Un examen physique n’a pas relevé l’existence de déficits neurologiques importants, et un traitement traditionnel de physiothérapie et de perte de poids a été recommandé.
  4. Son médecin de famille, le Dr Rowan, a indiqué que l’appelante a subi des blessures à la colonne cervicale au cours de l’accident de voiture, mais la preuve médicale ne révèle aucune pathologie ni aucun déficit grave l’empêchant d’occuper tous types de travail, notamment un emploi assorti de tâches allégées ou modifiées. Elle n’a pas été dirigée vers un programme multidisciplinaire de traitement de la douleur offrant les compétences, l’intervention médicale et la direction nécessaires pour lui permettre de vivre avec la douleur.
  5. La capacité de travailler, et non le diagnostic ou la description de la maladie, est le facteur qui détermine la gravité de l’invalidité. L’appelante a été impliquée dans un accident de voiture en septembre 2010, mais elle a été capable de retourner au travail après l’accident, jusqu’au mois de février 2011. Il n’y a aucune preuve d’une pathologie grave, et seul un traitement traditionnel a été recommandé.
  6. La gravité de l’invalidité ne repose pas sur l’incapacité de l’appelante d’accomplir son emploi régulier, mais plutôt sur son incapacité de détenir un emploi véritablement rémunérateur, quel qu’il soit.
  7. L’appelante était âgée de 35 ans à la date de la demande, et rien n’indique qu’elle a tenté de reprendre un emploi, quel qu’il soit, y compris un emploi aux tâches allégées ou modifiées. Le recyclage serait aussi considéré comme étant une option raisonnable pour une personne de son âge.

Analyse

[33] Étant donné que sa date de PMA est le 31 décembre 2018, l’appelante doit démontrer selon la prépondérance des probabilités qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de la présente audience le 8 mars 2016, ou avant cette date.

Invalidité grave

Principes directeurs

[34] Le critère relatif à la gravité de l’invalidité doit être évalué dans un contexte réaliste (Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248). Ainsi, pour évaluer la gravité de l’invalidité d’une personne, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que son âge, son niveau de scolarité, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie.

[35] Bien que la preuve ait établi qu’elle souffrait de douleurs chroniques, l’appelante doit tout de même établir que ces douleurs l’ont empêchée de détenir régulièrement un emploi véritablement rémunérateur (Klabouch c. Canada (MDS), 2008 CAF 33).

[36] Il ne suffit pas que l’on établisse l’existence de douleurs chroniques; les douleurs doivent être telles qu’elles empêchent la personne affectée de détenir régulièrement un emploi véritablement rémunérateur. Il incombe également à l’auteur d’une demande de prestations de démontrer qu’il a tenté d’obtenir un traitement et qu’il a fait des efforts pour composer avec la douleur (MSNBS c. Densmore (2 juin 1993), CP 2389 (CAP).

[37] Pour établir l’existence d’une invalidité grave, l’appelant ne doit pas seulement démontrer qu’il a un grave problème de santé, mais lorsqu’il y a une preuve de la capacité de travail, il doit établir que ses efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé (Inclima c. Canada (P.G.), 2003 CAF 117).

Application des principes directeurs

[38] Aux fins d’évaluer le critère de l’invalidité grave dans la réalité ainsi que le prescrit l’affaire Villani, le Tribunal prend en considération qu’à la date de l’audience, l’appelante était âgée de 38 ans. Bien qu’elle soit née en Iraq et qu’elle ait immigré au Canada à l’âge de 16 ans, elle n’a paru avoir aucune difficulté avec l’anglais, et n’a pas eu besoin d’un interprète pour témoigner à l’audience. Elle a obtenu une formation en anglais comme langue seconde lorsqu’elle a immigré et elle a fait ses cinq dernières années d’études au Canada. Elle a quitté l’école pour commencer à travailler un mois avant de terminer sa douzième année. Elle a travaillé dans le secteur de l’expédition et de la réception ainsi que du contrôle de la qualité de 1999 au mois de février 2011. Elle a eu un accident de voiture le 30 septembre 2010, est restée sans travailler pendant cinq jours, et a continué de travailler jusqu’au mois de février 2011. À la date de l’accident, elle était enceinte, et sa fille est née au mois d’avril 2011. L’appelante a témoigné qu’elle avait l’intention de prendre un congé de maternité d’un an et de retourner au travail en mars ou en avril 2012. Elle n’a jamais repris quelque type de travail que ce soit, soutient-elle, en raison de douleurs au dos, à l’épaule gauche et au genou gauche, lesquelles ont limité sa capacité de s’asseoir, de se tenir debout, de soulever des objets et de les transporter, et de se pencher.

[39] Le témoignage de l’appelante selon lequel elle ressent des douleurs à l’épaule gauche et au genou gauche est appuyé par la preuve médicale. Bien qu’elle confirme une sensibilité dans la région de l’épaule gauche dans les aspects antérieurs et supérieurs, cette preuve ne fait état d’aucune pathologie ou déficience grave au genou et à l’épaule gauches. Le Dr Fern a indiqué qu’il n’y avait ni enflure, ni chaleur, ni érythème ou douleur lors d’une compression patellaire, et que les ligaments du genou gauche étaient largement stables. À son avis, sa symptomatologie à la jambe gauche témoignait davantage d’une douleur projetée que du résultat d’une radiculopathie active au niveau L5 gauche. Le Dr Rowan a indiqué en outre que l’appelante souffrait de douleurs persistantes au cou depuis l’accident et d’une sciatique à la jambe gauche, assortie d’une amplitude du mouvement réduite et d’une capacité réduite de soulever des objets ou de se pencher. Toutefois, rien n’indique que l’appelante a à quelque moment que ce soit reçu un traitement spécifique à l’épaule ou au genou gauches. Au cours de l’audience, lorsqu’elle s’est fait demander de parler de son problème au genou et à l’épaule, l’appelante s’est contentée de répondre que son épaule et son genou lui donnaient des problèmes, mais que ses problèmes au dos étaient pires. Compte tenu de la preuve, le Tribunal conclut que, bien qu’elle ait pu avoir des problèmes à l’épaule et au genou gauches, ces problèmes ne sont pas graves au sens du RPC.

[40] L’appelante a témoigné que ses douleurs au dos sont les pires des trois types de douleurs qu’elle ressent. Le Tribunal note que, bien que l’appelante fasse état de difficultés à se tenir debout, à s’asseoir et à marcher, le Dr Fern a signalé en 2012 qu’elle était raisonnablement confortable en position assise, mais que passer de la position assise à la position allongée, puis de nouveau à la position assise, lui causait de l’inconfort. Son unique traitement avait été une physiothérapie, ce qu’elle ne faisait plus, et elle prenait de l’Advil. Bien que, dans son pronostic, il ait conclu que ses problèmes au dos étaient graves, il n’a recommandé aucune intervention chirurgicale et il a recommandé le maintien d’un traitement traditionnel et son renvoi à un programme de traitement des douleurs chroniques. Au mois d’avril 2013, le Dr Muller a conclu que l’amplitude de mouvement de l’appelante au dos était un peu limitée, car elle ne pouvait que se toucher les genoux lorsqu’elle se penchait, mais qu’elle était par ailleurs tout à fait bien. Il n’a pas recommandé non plus un traitement chirurgical. Il a plutôt recommandé une physiothérapie, au cours de laquelle l’on mettrait l’accent sur une mobilisation de la région lombaire et une perte de poids. Au mois de juillet 2013, le Dr Rowan, son médecin de famille, a indiqué que l’appelante prenait du Tylenol no 2 et de l’Advil et qu’elle avait besoin d’un programme intensif de réadaptation pour le dos, assorti d’exercices et d’un renforcement des muscles abdominaux. Au mois de novembre 2013, le Dr Gale a indiqué que l’appelante prenait de l’Advil et que sa posture assise était normale, que sa démarche était normale et qu’elle pouvait marcher en passant du talon aux orteils et pouvait se tenir sur une jambe. Au mois de décembre 2013, le Dr Scherer a signalé qu’une activité réduite peut entraîner des douleurs accrues et qu’un traitement continu pourrait donner lieu à un maintien ou à une amélioration des fonctions physiques de l’appelante. Le Dr Scherer a lui aussi recommandé des exercices, un programme de traitement des douleurs et une médication et un counseling appropriés. Même compte tenu des recommandations faites par tous les médecins, l’appelante affirme que, depuis ses séances initiales en 2012, elle n’a pas fait de physiothérapie parce que cela n’aide pas et parce que ses douleurs son pires le lendemain. Le fait que l’appelante a témoigné que le Motrin lui procure un soulagement temporaire est important. Le Tribunal conclut que le traitement très traditionnel des douleurs de l’appelante au dos ne témoigne pas d’une pathologie grave qui l’empêche de régulièrement détenir un emploi véritablement rémunérateur.

[41] L’appelante souffre peut-être de douleurs chroniques, mais, dans sa demande de prestations d’invalidité, il lui incombe de démontrer qu’elle a obtenu un traitement et qu’elle a fait des efforts pour atténuer les douleurs. Dans le présent appel, le Tribunal conclut que l’appelante n’a fait aucun effort pour atténuer ses douleurs et qu’elle n’a pas donné suite aux traitements raisonnables recommandés par tous les médecins, notamment par son médecin de famille, dont elle a produit les rapports à l’appui de sa demande.

[42] L’appelante a indiqué qu’elle s’est fait diagnostiquer une dépression causée par le stress. Or, aucune mention n’en est faite dans sa demande de prestations d’invalidité ou dans le rapport médical du Dr Rowan qui a été joint à la demande, ce qui est important. L’unique mention d’une dépression figure dans les rapports médicaux du Dr Scherer, qui a indiqué qu’elle était d’humeur déprimée, bien qu’il ait ajouté en toute franchise que cette question ne relevait pas de son domaine d’expertise. L’appelante a témoigné en outre qu’elle n’a pas consulté de psychologue ni n’a recherché un autre traitement pour la dépression. Si sa dépression avait été une invalidité grave, l’appelante aurait cherché à se faire traiter en santé mentale. Or, elle n’en a rien fait. Le Tribunal conclut que la dépression de l’appelante n’est pas grave au sens des critères énoncés dans le RPC.

[43] L’appelante soutient que, compte tenu de ses déficiences et de ses limitations, elle n’est pas employable parce qu’elle ne peut rester debout ou assise pendant de longues périodes. Elle affirme que son dernier emploi était physique et qu’elle avait dû se tenir debout et se pencher. Elle a témoigné que son ancien employeur lui avait demandé de retourner au travail, mais elle ne croit pas qu’il puisse lui offrir un travail qu’elle pourrait accomplir. Elle a témoigné qu’elle ne peut travailler à l’ordinateur en raison de son épaule; elle ne pourrait faire du travail de bureau à temps partiel parce qu’elle ne pourrait pas s’y présenter un jour sur deux; et parce que personne ne va lui offrir un emploi. En bout de ligne, l’appelante a témoigné qu’elle n’a pas essayé de trouver un autre type de travail, qu’elle n’a pas cherché de travail et qu’elle n’a pas envisagé la possibilité de se recycler. Elle ne peut s’imaginer accomplir quelque travail que ce soit.

[44] Une invalidité n’est « grave » que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Il ne suffit pas que l’appelante ne soit pas capable d’exécuter son travail habituel; elle doit être incapable de faire tout travail qu’elle devrait raisonnablement être en mesure d’exécuter. Dans la présente affaire, le Tribunal conclut que l’appelante n’a tenté ni de reprendre son travail habituel, ni de trouver un autre travail convenant aux limitations qu’elle pourrait avoir.

[45] Examen fait de l’ensemble de la preuve et compte tenu de l’effet cumulatif des problèmes de santé de l’appelante, le Tribunal n’est pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante est atteinte d’une invalidité grave au sens des critères énoncés dans le RPC.

Invalidité prolongée

[46] Étant donné qu’il a conclu que l’invalidité n’est pas grave, le Tribunal n’a pas à se prononcer sur le critère de l’invalidité prolongée.

Conclusion

[47] L’appel est rejeté.

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