Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le demandeur souhaite obtenir la permission d’interjeter appel de la décision rendue par la division générale (DG) le 21 octobre 2015. La DG a tenu une audience par téléconférence le 1er septembre 2015 et a déterminé que le défendeur ne s’était pas, comme le demandeur le prétend, suffisamment rétabli de son invalidité pour justifier l’arrêt de ses prestations sous le Régime de pensions du Canada (RPC).

[2] Le 19 janvier 2016, dans le respect du délai prescrit, le représentant du demandeur a déposé une demande de permission d’en appeler à la division d’appel (DA).

Droit applicable

[3] Selon les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission », et « la division d’appel accorde ou refuse cette permission ».

[4] Le paragraphe 58(2) de la LMEDS prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[5] Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) La DG n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence.
  2. b) La DG a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier.
  3. c) La DG a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[6] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audition au fond de l’affaire. C’est un premier obstacle que le demandeur doit franchir, mais celui-ci est inférieur à celui auquel il devra faire face à l’audition de l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, le demandeur n’a pas à prouver ses arguments.

Question en litige

[7] Est-ce que l’appel a une chance raisonnable de succès?

Observations

[8] Le demandeur fait valoir que la DG a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive et arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] Plus particulièrement, le demandeur prétend que la DG a commis une erreur en omettant d’évaluer et d’analyser explicitement les revenus engendrés significatifs, et les activités effectuées pour gagner ces revenus entre 2007-11. Au contraire, il soumet que son revenu brut et ses activités commerciales démontrent qu’il n’est plus invalide au sens du sous-alinéa 42(2)a)(i) du RPC puisque l’on a démontré qu’il était capable d’occuper régulièrement une occupation véritablement rémunératrice.

[10] Le demandeur soulève que la DG a pris compte du témoignage du défendeur où il disait que conduire un camion lui donnait un but, et que le travail à son compte n’a jamais généré suffisamment de profits pour prendre un salaire; toutefois, la DG n’a pas explicitement abordé la preuve qui lui était présentée qui démontrait que les activités commerciales du défendeur généraient d’importants revenus commerciaux d’entreprise autonome. Bien que la DG a fait référence aux revenus, aux dépenses et aux bénéfices nets, la Commission d’appel des pensions (CAP) a plusieurs fois maintenu que la rentabilité d’une entreprise commerciale n’est pas un indicateur pertinent de la capacité de travailler d’un prestataire. Bien que les décisions de la CAP ne contraignent pas la DA, il a été présenté que ces décisions possèdent tout de même un caractère persuasif.

[11] Le demandeur fait valoir que le seul fait que le défendeur générait d’importants revenus avec son entreprise de camionnage suffisait pour justifier la détermination de la capacité de travail sans autres vérifications de sa condition médicale ou de ses capacités fonctionnelles. Dans l’arrêt Gill c. Canada (PG), 2010 CAF 182, la Cour d’appel fédérale a refusé une demande de contrôle judiciaire à la lumière des déclarations de revenus provenant d’un travail autonome gagnés en gardant des enfants, et maintenait la décision de la CAP selon laquelle son invalidité n’était pas grave parce qu’elle était capable de détenir une occupation régulière véritablement rémunératrice. La cour a aussi constaté dans sa conclusion qu’il n’était pas nécessaire de faire un examen détaillé de la preuve médicale.

Analyse

[12] La Cour d’appel fédérale a maintenu que de savoir si un appel a une chance raisonnable de succès revient à se demander si la cause est défendable sur le plan juridique : Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

[13] Le demandeur allègue que la DG a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance en mettant l’accent sur les éléments de preuve des pertes nettes du défendeur, plutôt que sur les importants revenus bruts de son entreprise de camionnage.

[14] Après avoir révisé la décision de la DG et la demande de permission d’en appeler, je conclus que les moyens d’appel soulevés par le demandeur sont plutôt qualifiés comme une erreur mixte de fait et de droit. Le demandeur allègue que la DG a essentiellement ignoré (ou « n’a pas tenu compte de ») l’ampleur des revenus du défendeur qui pour plusieurs années approchaient les six chiffres, mais il s’appuie aussi sur une jurisprudence qui considère la rentabilité d’une entreprise commerciale comme non pertinente pour déterminer si un prestataire a la capacité de travailler. Le demandeur soulève correctement que la jurisprudence citée représente des décisions de la CAP et ne contraigne donc pas ce tribunal, mais la question de droit avancée doit répondre à toute interrogation visant à savoir si la DG avait raison d’ignorer le revenu brut du défendeur.

[15] Il est vrai que la décision de la DG ne contenait pas une analyse détaillée des diverses activités que le défendeur doit avoir effectuées pour générer son relevé de revenus bruts pendant la période 2007-11. Elle était bien plus occupée à évaluer l’historique médical récent du défendeur et à expliquer pourquoi l’on ne peut pas considérer les revenus sans aussi prendre en considération les dépenses engagées pour les produire. Que la DG soit justifiée ou non d’avoir conclu que l’entreprise du défendeur était non profitable et que ses activités étaient non rémunératrices, je suis convaincu qu’il y a au moins une cause défendable qu’elle a tiré une conclusion de fait erronée sans tenir compte de la preuve qui lui était présentée.

Conclusion

[16] J’accorde la permission d’en appeler sur le fondement que la DG pourrait avoir tiré des conclusions de fait erronées en omettant de considérer l’ampleur des revenus du défendeur et l’étendue de ses activités commerciales.

[17] J’invite les parties à présenter des observations sur les questions suivantes : s’il est nécessaire d’entendre davantage les parties; si oui, quel mode d’audience est approprié.

[18] La présente décision qui accorde la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

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