Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] La demanderesse demande la permission d’en appeler de la décision de la division générale datée du 9 février 2016. La division générale a conclu qu’une audience n’était pas nécessaire et elle a rendu sa décision sur la foi du dossier. Elle a conclu que la demanderesse n’avait pas établi qu’elle souffrait d’une invalidité grave au sens du Régime de pensions du Canada et que, par conséquent, elle n’avait pas droit à une pension d’invalidité. Le 6 mai 2016, la demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler à la division d’appel. Pour accueillir la demande de la demanderesse, je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Observations

‏[3] La demanderesse présente plusieurs moyens d’appel. Elle prétend que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence, qu’elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit et qu’elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Le Tribunal de la sécurité sociale fournit une copie des documents portant sur la demande de permission d’en appeler à l’intimé. Cependant, l’intimé n’a pas déposé d’observations écrites.

Analyse

[5] En vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), les moyens d’appel sont limités à ce qui suit :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[6] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs pour en appeler se rattachent au moins à l’un des moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale du Canada a confirmé cette approche dans la décision Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300.

a) Justice naturelle et erreurs de droit

[7] La demanderesse soutient qu’elle aurait dû avoir droit à une audience en personne en se fondant sur les observations de son représentant datées du 9 février 2016 et de son formulaire de renseignements en matière d’audience. Elle prétend que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle parce qu’elle a ignoré sa demande d’audience en personne et qu’elle a évalué sa demande en se fondant sur le dossier documentaire. Elle fait remarquer que la division générale avait conclu qu’un appel d’après le dossier était approprié parce que les questions en litige n’étaient pas complexes, qu’il n’ y avait aucune lacune dans les renseignements versés au dossier ni besoin de clarification, que la crédibilité n’était pas un problème et que les principes d’équité et de justice naturelle à l’égard de la demanderesse ont été respectés en procédant ainsi. La demanderesse précise que cette décision constitue une erreur au dossier.

[8] Le Tribunal de la sécurité sociale a envoyé une lettre datée du 30 décembre 2015 aux parties pour les inviter à remplir un formulaire de renseignements en matière d’audience qui était joint à cette lettre et de le retourner au Tribunal de la sécurité sociale dans les 10 jours suivant afin que le membre saisi de l’affaire puisse tenir compte des renseignements avant de rendre une décision sur la façon de procéder. Aucune des parties n’a présenté un formulaire de renseignements en matière d’audience ou toute réponse à cet égard dans les 10 jours suivant.

[9] Le 6 janvier 2016, le Tribunal de la sécurité sociale a envoyé une lettre aux parties pour les informer que le membre de la division générale qui avait été saisi de l’affaire avait l’intention de rendre une décision en se fondant sur les documents et les observations présentés. La lettre informait également les parties que, si elles souhaitaient soumettre des observations et des documents supplémentaires, le Tribunal devait les recevoir au plus tard le 10 février 2016 et que les réponses devaient être présentées au plus tard le 11 mars 2016. Voici un extrait de la lettre :

Période de dépôt

Les parties ont jusqu’au 10 février 2016 pour transmettre des documents ou observations supplémentaires au Tribunal. Une copie de chaque nouveau document reçu par le Tribunal sera fournie aux autres parties, et celles-ci auront la possibilité d’y répondre.

Pédiode de réponse

La période de réponse suivra la période de dépôt. Les parties qui souhaiteraient répondre à tout document déposé durant la période de réponse doivent s’assurer de communiquer leur réponse au Tribunal au plus tard le 11 mars 2016.

[10] Le représentant de la demanderesse a écrit au Tribunal de la sécurité sociale le 9 février 2016 pour demande la tenue d’une audience en personne au nom de la demanderesse. Il a expliqué qu’une audience en personne était nécessaire, car la demanderesse subirait autrement un préjudice grave. Il a déclaré que, bien que la demande et les documents à l’appui puissent être utiles, [traduction] « ceux-ci n’offrent aucun détail sur l’ampleur de l’invalidité grave et prolongée de la demanderesse ». Le représentant de la demanderesse a également fait valoir qu’une audience entièrement de vive voix au moyen d’une comparution en personne était requise pour entendre le témoignage de vive voix des témoins, y compris celui du médecin de famille de la demanderesse concernant son diagnostic de cancer. Le représentant de la demanderesse a proposé d’appeler cinq témoins, y compris la demanderesse. Finalement, le représentant a déclaré que, après la mise au rôle d’une date d’audience, il fournirait des observations écrites supplémentaires, mais il n’a pas précisé la ou les questions sur lesquelles porteraient ses observations. La raison pour laquelle le formulaire de renseignements en matière d’audience et la demande d’audience en personne n’ont pas été présentés avant le 9 février 2016, soit bien après la date limite établie par le Tribunal de la sécurité sociale dans sa lettre du 30 décembre 2015, n’est pas claire.

[11] La division générale a rendu sa décision le 9 février 2016. Rien ne précise dans la décision que le membre avait reçu et examiné la lettre et le formulaire de renseignements en matière d’audience du représentant de la demanderesse.

[12] La demanderesse s’attendait nécessairement à pouvoir déposer des documents et des observations supplémentaires jusqu’au 10 février 2016 étant donné que la lettre datée du 6 janvier 2016 du Tribunal de la sécurité sociale mentionnait qu’elle pouvait présenter des documents et des observations jusqu’à cette date au plus tard. La division générale aurait dû attendre jusqu’à ce que cette date soit passée avant de rendre sa décision. Cependant, cela pourrait n’être qu’une question théorique étant donné que la demanderesse n’a déposé aucun document ou observation supplémentaire sur le bien-fondé de sa demande de pension d’invalidité. Au plus, la lettre de son représentant du 9 février 2016 fait allusion à des observations écrites à venir. Toutefois, cela soulève la question de savoir s’il y a des circonstances, comme l’intérêt de la justice, qui justifie un examen des documents qui ont été présentés en retard. En l’espèce, par exemple, la division générale aurait pu tenir compte du caractère approprié du mode d’audience si elle avait été informée d’une liste de témoins proposés.

[13] Il pourrait y avoir une cause défendable selon laquelle la division générale aurait dû tenir compte d’au moins ce qui suit : (1) la lettre du 9 février 2016 et le formulaire de renseignements en matière d’audience du représentant de la demanderesse, malgré le fait qu’ils ont été présentés en retard; (2) si oui, la question de savoir s’il demeure approprié d’instruire l’appel d’après le dossier sur la foi des documents portés à sa connaissance; (3) la question de savoir si elle aurait dû proroger le délai pour la présentation d’observations. Je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès, au motif que la division générale pourrait ne pas avoir observé un principe de justice naturelle en ne veillant pas à ce que la demanderesse ait une possibilité équitable de présenter sa cause lorsqu’il semble qu’elle n’a pas tenu compte de la lettre datée du 9 février 2016 et du formulaire de renseignements en matière d’audience du représentant de la demanderesse.

(b) Erreur de droit

[14] Le représentant de la demanderesse fait valoir que la division générale a commis une erreur, car elle s’est fondée sur l’avis d’un hématologue pour conclure que la demanderesse pouvait travailler. Le représentant de la demanderesse précise que l’hématologue était très peu intervenu dans le traitement et les soins médicaux de la demanderesse, à un point tel qu’il a seulement interprété des tests sanguins. Le représentant de la demanderesse fait valoir que l’hématologue n’a jamais exprimé un avis sur la capacité de la demande à travailler, mais que la division générale s’est fondé sur les dossiers cliniques de l’hématologue pour conclure que la demanderesse pouvait travailler. Le représentant de la demanderesse fait valoir que la division générale aurait dû se fonder sur l’avis du médecin de famille de la demanderesse, car il s’agit de son médecin traitant principal qui veille à l’ensemble des soins.

[15] Les rapports de consultation de l’hématologue sont datés du 29 juillet 2009, du 3 novembre 2009 et du 3 novembre 2010 et ils figurent aux pages GD4-58, GD4-98 et GD4-97 du dossier d’audience. Selon ces rapports, l’intervention de l’hématologue était plus importante qu’une simple interprétation de tests sanguins. En effet, les rapports font état qu’il a posé un diagnostic, examiné l’état actuel de la demanderesse, examiné celle-ci et fourni un avis sur sa prise en charge. Essentiellement, la demanderesse demande une réévaluation et une réappréciation de la preuve. Comme la Cour fédérale l’a établi dans l’arrêt Tracey, ce n’est pas le rôle de la division d’appel d’apprécier de nouveau la preuve ou de soupeser de nouveau les facteurs pris en compte par la division générale lorsqu’elle se prononce sur la question de savoir si l’autorisation d’en appeler devrait être accordée ou refusée. Ni la permission ni l’appel n’autorise à intenter de nouveau un recours en justice. Je ne suis pas convaincue que la demanderesse ait une chance raisonnable de succès et réussisse à prouver qu’une réévaluation est appropriée.

(c) Conclusion de fait erronée

[16] Le représentant de la demanderesse n’a pas cerné de conclusions de fait erronées particulières selon lesquelles il prétend que la division générale a fondé sa décision de façon abusive ou arbitraire sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Par conséquent, je ne suis pas disposée à accorder la permission d’en appeler pour ce motif précis.

Conclusion

[17] La demande de permission d’en appeler est accueillie.

[18] J’invite les parties à présenter leurs observations sur la pertinence de tenir une audience, ou si l’appel peut être instruit sur la foi du dossier. Si elles préconisent la tenue d’une audience, les parties devraient présenter des observations sur le mode d’audience à privilégier (c.-à-d. par téléconférence, par vidéoconférence ou tout autre moyen de télécommunication, en personne ou par questions et réponses). Si l’une des parties souhaite demander une forme d’audience autre que par questions et réponses écrites, je la prierais de fournir une estimation du temps nécessaire pour présenter la plaidoirie. Toute observation, y compris celles portant sur le bien-fondé de l’appel, doit être présentée dans le délai prévu par la Loi sur le MEDS.

[19] La présente décision sur la demande de permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

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