Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Comparutions

Représentant de l’appelante : Kevin Love (représentant)

Représentant de l’intimé : Hasan Junaid (représentant)

Aperçu

[1] Cet appel porte sur deux demandes d’annulation ou de modification d’une décision rendue par un tribunal de révision du Régime de pensions du Canada (tribunal de révision) le 22 novembre 2011. Déterminer si les deux demandes sont prescrites par l’application du paragraphe 66(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) constitue le but de cet appel.

[2] Le 26 novembre 2012, l’appelante a présenté une demande au Bureau du Commissaire des tribunaux de révision pour un réexamen de la décision du tribunal de révision, en application du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure au 1er avril 2013 (première demande). L’appelante a présenté une deuxième demande le 24 avril 2013, et comme le Tribunal de la sécurité sociale avait été instauré à ce moment, la demande a été considérée comme présentée au Tribunal de la sécurité sociale, en application du paragraphe 66(2) de la LMEDS (deuxième demande).

[3] Le 22 octobre 2014, la division générale a rejeté la première et la deuxième demande, parce qu’elles étaient prescrites en application du paragraphe 66(2) de la LMEDS, par l’application du paragraphe 261(1) de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable (LECPD). L’appelante a fait la demande de permission d’interjeter appel à l’encontre des deux décisions de la division générale. J’ai accordé la permission d’en appeler le 23 février 2015 au motif que la division générale n’aurait pas observé un principe de justice naturelle ou qu’elle aurait commis une erreur de droit en concluant que l’une ou les deux demandes d’annulation ou de modification étaient prescrites.

[4] En considération de la complexité des questions de droit concernées, et à la demande des parties, les appels ont été instruits en personne. Les deux appels ont été instruits ensemble.

Historique de l’instance

[5] L’appelante a présenté une demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada le 9 février 2010. L’intimé a rejeté la demande lors de sa présentation initiale puis après révision. L’appelante a interjeté appel de la décision de révision devant un tribunal de révision.

[6] Le tribunal de révision a conclu que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave, mais a rejeté l’appel puisque l’invalidité n’était pas considérée « prolongée » aux termes du Régime de pensions du Canada. La décision du tribunal de révision a été communiquée à l’appelante le 5 janvier 2012. L’appelante n’a pas interjeté appel de cette décision du tribunal de révision.

[7] Le 26 novembre 2012, l’appelante a présenté une demande au Bureau du Commissaire des tribunaux de révision pour un réexamen de la décision du tribunal de révision, en application du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure au 1er avril 2013. L’appelante a présenté un rapport médical de son médecin de famille daté du 21 août 2012. L’appelante a expliqué ne pas avoir pu remettre la lettre de son médecin de famille au tribunal de révision, parce qu’il ne pouvait pas se prononcer sur le caractère prolongé de son invalidité auparavant. Seulement récemment son médecin de famille a-t-il pu transmettre un avis concernant l’échec des options de traitement, et que sa condition était donc prolongée. L’appelante affirme que son l’amélioration de son état de santé a atteint un point culminant et que son invalidité est en fait « longue, continue et de durée indéfinie ».

[8] Comme un tribunal de révision n’a pas décidé de la première demande avant le 1er avril 2013, la demande a été transférée au Tribunal de la sécurité sociale, conformément au paragraphe 261(1) de la LECPD. En vertu de ce paragraphe, toute demande présentée au titre du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’article 229, et non tranchée avant le 1er avril 2013 est réputée être une demande présentée le 1er avril 2013 au titre de l’article 66 de la LMEDS et est réputée viser, dans le cas où elle porte sur une décision rendue par un tribunal de révision, une décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[9] Le 24 avril 2013, l’appelante a présenté une deuxième demande d’annulation ou de modification, cette fois, au Tribunal de la sécurité sociale. Elle y a inclus le même rapport médical de son médecin de famille du 21 août 2012.

[10] Le 30 juillet 2014, l’appelante a remis une copie de son dossier médical, provenant de son psychiatre, daté du 11 octobre 2012. Il y avait aussi une note de son travailleur social, indiquant qu’une mise à jour serait communiquée prochainement.

[11] Le 25 septembre 2014, l’appelant a remis une deuxième copie du dossier médical, provenant de son psychiatre, daté du 11 octobre 2012, ainsi que du rapport médical de son médecin de famille du 21 août 2012. L’appelante a aussi remis une copie d’un dossier médical daté du 14 août 2014 provenant de son médecin de famille, ainsi que d’une lettre datée du 25 août 2014 provenant du travailleur social. L’appelante a mentionné qu’elle transmettrait des documents supplémentaires de son psychiatre en octobre 2014. Elle a demandé au Tribunal de la sécurité sociale de l’information si [traduction] « cette information sera transmise trop tard pour soutenir sa cause ».

[12] Le 17 octobre 2014, l’appelante a remis une copie de son dossier médical, provenant de son psychiatre, daté du 16 octobre 2014.

[13] La division générale a instruit les deux demandes sur le dossier écrit, sans tenir d’audience.

Décision de la division générale

[14] En deux décisions différentes, la division générale a rejeté la première et la deuxième demande d’annulation ou de modification de la décision du tribunal de révision, les motifs étant que les demandes étaient prescrites en vertu de l’article 66 de la LMEDS et n’avaient donc pas été présentées dans le délai prévu. La division générale n’a pas déterminé si les éléments de preuve présentés au soutien des deux demandes représentaient des « faits nouveaux et essentiels » qui ne pouvaient être connus au moment de l’audience malgré l’exercice d’une diligence raisonnable, et si à ce moment, d’après l’ensemble de la preuve, l’appelante pouvait être réputée invalide en vertu du Régime de pensions du Canada à la date de fin de sa période minimale d’admissibilité, ou avant.

[15] La division générale a écrit ce qui suit en lien avec la première demande d’annulation ou de modification [traduction] :

[22] La combinaison du [paragraphe 261(1) de la LECPD et du paragraphe 66(2) de la LMEDS] a pour effet qu’une demande présentée au titre du paragraphe 84(2) du RPC non tranchée avant le 1er avril 2013 est réputée être une demande présentée le 1er avril 2013 au titre de l’article 66 de la LMEDS. Si la demande concerne une décision qui a été communiquée aux parties avant le 1er avril 2012, elle est alors prescrite en vertu du paragraphe 66(2) de la LMEDS parce qu’elle n’a pas été présentée en l’intérieur du délai d’une année.

[23] La décision du tribunal de révision a été communiquée à la demanderesse le 5 janvier 2012. Sa demande d’annulation ou de modification de cette décision faite le 26 novembre 2012 est donc prescrite.

[16] La division générale a cité Austria (alias Tabingo) c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CAF 191, et a conclu que le Parlement ne pouvait pas avoir eu l’intention que les dispositions transitoires aient un effet rétrospectif quelconque, ou bien il l’aurait clairement indiqué dans la loi.

[17] La division générale a aussi conclu que la deuxième demande était prescrite. L’appelante n’avait pas présenté la demande à l’intérieur du délai d’une année après que le tribunal de révision lui ait communiqué la décision de 2011. La division générale a reconnu que les dispositions déterminatives et l’empêchement prévus par le paragraphe 66(2) de la LMEDS peuvent sembler particulièrement inéquitables pour quelqu’un comme l’appelante qui ne pourra jamais s’y conformer. Toutefois, la division générale a conclu être limitée par la LMEDS et ne pas posséder la compétence en équité pour ignorer le délai prescrit sous le paragraphe 66(2) de la LMEDS.

Décision quant à la permission d’en appeler

[18] J’ai accordé la permission d’en appeler en fonction de deux moyens, à savoir que la division générale pourrait avoir :

  1. omis d’observer un principe de justice naturelle parce qu’elle n’a pas informé les parties de son intention de rejeter les deux demandes en vertu de la LECPD et de la LMEDS, lesquelles n’étaient pas entrées en vigueur quand l’appelante a présenté sa première demande;
  2. commis une erreur de droit parce qu’elle a conclu que les deux demandes étaient prescrites en vertu du paragraphe 66(2) de la LMEDS et du paragraphe 261(1) de la LECPD.

Questions en litige

[19] Comme question préliminaire, les parties acceptent que si la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle, c.-à-d. qu’elle n’a pas informé les parties de son intention de rejeter les deux demandes sur le fondement qu’elles étaient prescrites, sans inviter les parties à présenter des observations, la division d’appel peut dûment évaluer la question du délai prévu.

[20] Les deux parties acceptent que si je conclus que la division générale a commis une erreur de droit en concluant que l’une ou les deux demandes d’annulation ou de modification étaient prescrites, la décision appropriée serait de renvoyer l’affaire à la division générale pour une évaluation sur le fond pour déterminer si la preuve présentée au soutien des demandes se qualifie comme « faits nouveaux » au sens de la LMEDS, étant donné que la division générale est l’organe principal d’enquête factuelle.

[21] Les questions dont je suis saisie sont donc les suivantes :

  1. Y a-t-il lieu d’effectuer une analyse relative à la norme de contrôle lors du contrôle de décisions de la division générale?
  2. La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle parce qu’elle n’a pas informé les parties de son intention de rejeter les deux demandes en vertu de la LECPD et de la LMEDS, lesquelles n’étaient pas entrées en vigueur quand l’appelante a présenté sa première demande?
  3. La division générale a-t-elle commis une erreur de droit parce qu’elle a conclu que les deux demandes étaient prescrites en vertu du paragraphe 66(2) de la LMEDS et du paragraphe 261(1) de la LECPD?

Première question en litige : Norme de contrôle

a) Observations de l’appelante

[22] Le représentant de l’appelante mentionne qu’il n’existe pas d’analyse relative à la norme de contrôle en common law dans un appel d’un tribunal administratif prévu par la loi. La division d’appel devrait donc simplement appliquer les moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) de la LMEDS. Le représentant mentionne qu’une analyse relative à la norme de contrôle est exercée quand une cour révise une décision rendue par un décideur dont les pouvoirs sont conférés par la loi. Il mentionne qu’une analyse relative à la norme de contrôle reconnaît qu’un tribunal soumis au contrôle possède généralement la compétence des cours et que le Parlement a spécifiquement chargé le Tribunal de la sécurité sociale, et non pas les cours, pour trancher certaines questions. Le représentant affirme que ces considérations de politique ne sont pas exercée où le Parlement a établi un droit légal d’en appeler à un tribunal spécialisé (bien que pour le cas en l’espèce, il n’y a pas de droit légal d’en appeler parce que l’appelante devait demander la permission).

[23] Le représentant de l’appelante affirme que le Parlement peut légiférer davantage de moyens d’appel, comme ce fut le cas en ce qui concerne les erreurs factuelles à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS. Le représentant mentionne toutefois que pour les questions non factuelles, il n’y a pas de raison pour la division d’appel de s’en remettre à la division générale ou au tribunal de révision. Le représentant affirme que la division d’appel constitue le tribunal spécialisé du système administratif régissant le Régime de pensions du Canada.Il affirme qu’il s’agit d’un tribunal spécialisé avec un mandat législatif précis d’interpréter et d’appliquer le Régime de pensions du Canada. Il affirme que la division d’appel joue un rôle essentiel pour veiller à ce que la division générale applique le droit de manière consistante et assurer des traitements semblables sous le Régime de pensions du Canada aux prestataires en des situations similaires dans tout le pays.

[24] Compte tenu de ces considérations, le représentant affirme qu’il n’est pas nécessaire pour la division d’appel d’exercer une quelconque analyse de la norme de contrôle. Nonobstant ces observations, l’appelante est en accord avec l’intimé et soutient que le critère à appliquer pour les questions de droit et de compétence soulevées dans cet appel est celui d’établir si la division générale a correctement déterminé les questions en litige.

b) Observations de l’intimé

[25] Le représentant affirme que le modèle de la division d’appel s’appuie sur celui des anciens juges-arbitres de l’assurance-emploi et que la jurisprudence antérieure avait établi le critère à appliquer par les juges-arbitres aux décisions des anciens conseils arbitraux. Le représentant affirme que, pour cette raison, la division d’appel devrait adopter la norme de contrôle précédemment employée par les juges-arbitres.

[26] Le représentant affirme qu’il est approprié pour la division d’appel d’établir la norme de contrôle applicable en menant ce qu’on appelle une analyse « modifiée » de la norme de contrôle, laquelle évalue ce qui suit :

  1. la compétence et le rôle respectifs de la division générale et de la division d’appel;
  2. l’intention du législateur;
  3. le degré de déférence à accorder à la division générale;
  4. la nature des questions en litige;
  5. l’application concrète de la norme de la décision correcte et de celle de la décision raisonnable dans la pratique.

[27] Le représentant soulève que les moyens d’appels énoncés au paragraphe 58(1) de la LMEDS sont identiques à ceux auxquels devaient s’en tenir les anciens juges-arbitres de l’assurance-emploi conformément au paragraphe 115(2) de la Loi sur l’assurance-emploi (abrogée depuis). Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Merrigan, 2004 CAF 253, au paragr. 9, la Cour d’appel fédérale a décrit l’appel d’une décision des conseils arbitraux devant les juges-arbitres de l’assurance-emploi comme étant un « contrôle circonscrit », parce que la compétence du juge-arbitre en appel était pour l’essentiel identique à celle conférée à la Cour d’appel fédérale en contrôle judiciaire.

[28] Le représentant soulève aussi que le pouvoir conféré à la division d’appel en vertu du paragraphe 59(1) de la LMEDS est pour l’essentiel identique à celui exercé par les juges-arbitres de l’assurance-emploi en vertu de l’ancien article 117 de la Loi sur l’assurance-emploi (abrogée depuis).

[29] Le représentant affirme que les similarités sous les articles applicables de la LMEDS et de la Loi sur l’assurance-emploi signalent l’intention du Parlement de reproduire la nature des appels entendus par les juges-arbitres et les pouvoirs des juges-arbitres.

[30] Le représentant soutient que, compte tenu de l’analyse modifiée de la norme de contrôle et de la jurisprudence établie par la Cour suprême du Canada et par la Cour d’appel fédérale, la division d’appel devrait appliquer la norme de la décision correcte aux décisions de la division générale relativement aux questions de droit, et la norme de la décision raisonnable aux questions de fait et aux questions mixtes de droit et de fait. Il fait valoir que la question pour déterminer si l’appel est prescrit représente une question de droit et devrait être révisée selon la norme de la décision correcte.

[31] Le représentant reconnaît que, en préparant ses observations, la Cour d’appel fédérale devait déjà à établir quelle norme de contrôle la division d’appel devrait appliquer pour réviser des décisions rendues par la division générale ou le niveau de déférence que la division d’appel devrait accorder aux décisions de la division générale qui touchent des questions de droit, les questions de fait et les questions mixtes de droit et de fait.

c) Norme de contrôle

[32] Il existe des similitudes dans le vocabulaire des anciens articles de la Loi sur l’assurance-emploi et de la LMEDS, lesquels prévoient les moyens d’appel et les pouvoirs du juge-arbitre et de la division d’appel, respectivement. Les similitudes suggèrent que la division d’appel devrait effectuer le même « contrôle circonscrit » que les juges-arbitres exécutaient. Toutefois, la Cour d’appel fédérale nous prévient de « se garder d’emprunter à la terminologie et au génie propre du contrôle judiciaire dans un contexte d’appel administratif ».

[33] Dans Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242, la Cour d’appel fédérale a suggéré qu’une analyse de la norme de contrôle n’est pas appropriée lorsque la division d’appel révise les appels de décisions rendues par la division générale. La Cour d’appel fédérale a approuvé cette approche dans la décision Maunder c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 274.

[34] Comme l’a indiqué la Cour d’appel fédérale dans la décision Jean, le mandat de la division d’appel lui est conféré par les articles 55 à 69 de la LMEDS, lesquels lui permettent d’entendre les appels conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS. Le paragraphe 58(1) de la LMEDS énonce les moyens d’appel, et le paragraphe 59(1) de la LMEDS énonce les pouvoirs de la division d’appel.

[35] La Cour d’appel fédérale a récemment précisé cette question. Dans la décision Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Huruglica, 2016 CAF 93, la Cour d’appel fédérale a indiqué que la détermination du rôle d’un organisme administratif spécialisé est « purement et essentiellement une question d’interprétation des lois » (au paragraphe 46). Bien que la décision a été rendue selon le contexte de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, chap. 27, d’entreprendre le même exercice nécessiterait une analyse des mots de la LMEDS dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la LMEDS et de son objet. J’évaluerai le but et l’objet de la LMEDS, ainsi que les articles applicables suivants, dans mon analyse pour déterminer si la division générale a commis une erreur en concluant que les demandes de faits nouveaux étaient prescrites par la LECPD et la LMEDS.

[36] Ultimement, la Cour d’appel fédérale a déterminé dans Huruglica que rien dans le vocabulaire de la LIPR, lue dans le contexte du régime législatif et de ses objectifs, ne soutient l’application d’une norme du caractère raisonnable ou d’une erreur manifeste et dominante à une quelconque conclusion de fait ou conclusion mixte de fait et de droit faite par la Section d’appel des réfugiés. Au paragraphe 78, la Cour d’appel fédérale a conclu à l’étape de son analyse que la Section d’appel des réfugiés doit intervenir quand la SPR a commis une erreur de droit, de fait, ou une erreur mixte de fait et de droit. Cette affirmation s’est traduite en l’application de la norme de contrôle de la décision correcte.

[37] Après avoir conduit son analyse législative, la Cour d’appel fédérale a conclu que la Section d’appel des réfugiés décide si les décisions de la SPR sont correctes en ce qui a trait aux conclusions de fait et aux conclusions mixtes de fait et de droit, lesquelles n’ont soulevé aucune question de crédibilité de la preuve orale. Après avoir examiné la décision de la SPR, la SAR conduit sa propre analyse du dossier pour déterminer si, comme l’appelant le suggère, la SPR a commis une erreur. Par la suite, la SAR rend sa conclusion finale et confirme la décision de la SPR ou casse la décision et y substitue sa propre décision sur le fond de la demande d’asile. Seulement quand la SAR est d’avis de ne pas pouvoir rendre une telle décision finale sans entendre le témoignage présenté à la SPR qu’elle renvoie l’affaire à la SPR pour un nouvel examen. La Cour d’appel fédérale a conclu qu’aucune autre interprétation des dispositions législatives pertinentes n’était raisonnable.

[38] En application des principes établis par la Cour d’appel fédérale, la division d’appel devrait alors se limiter à déterminer si la division générale a commis une erreur de droit en concluant que les appels étaient prescrits. Il s’agit de l’approche préconisée par le représentant de l’appelante.

Deuxième question en litige : Erreurs

a) La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle?

[39] Le représentant de l’appelante soutient que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle ou qu’elle a commis un manquement à l’encontre de l’équité procédurale, qu’elle aurait dû donner l’opportunité à l’appelante, qui n’était pas représentée à ce moment, d’aborder la question des restrictions avant de rejeter l’appel sur ce fondement. Le représentant soutient que l’appelante ne pouvait pas connaître le cas qu’elle devait rencontrer, compte tenu des circonstances. Elle avait présenté sa première demande avant l’existence d’une question de restrictions, et elle n’aurait pas pu anticiper à ce moment que son appel serait transféré à la division générale, et que son appel serait décidé sur le fondement d’une question de restrictions.

[40] Le représentant de l’intimé soutient qu’il n’y a pas eu de manquement à l’encontre du principe de justice naturelle, puisque la division générale possédait la compétence pour décider des questions qui lui sont présentées et elle avait le droit de rendre sa décision sur la foi du dossier. Le représentant de l’intimé soutient que [traduction] « comme il n’existe pas de doctrines d’équité ou de common law pour remplacer le langage clair de la loi, la [division générale] était correcte de ne pas avoir demandé davantage d’observations ».

[41] Le représentant de l’intimé soutient que, dans tous les cas, si je conclus qu’il y a eu un manquement au principe de justice naturelle, la réparation ne nécessite pas que l’affaire soit renvoyée à la division générale, parce que je devrai déterminer si les demandes étaient en effet prescrites. Le représentant soutient que ce moyen d’appel est étroitement lié à la question de la prescription de l’affaire. Le représentant affirme que si la division d’appel conclut qu’il n’y avait pas d’erreur dans la conclusion de la division générale sur la prescription de la demande, renvoyer l’affaire à la division générale sur une question de justice naturelle serait inutile.

[42] Dans l’affaire Bossé c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1142 au paragr. 30, la cour fédérale a écrit que « l’obligation d’équité procédurale est souple et variable et repose sur une appréciation du contexte de la loi et des droits visés. » La cour a établi une liste non exhaustive de critères à appliquer pour définir le contenu de l’obligation d’équité établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817. Ceux-ci incluent : (1) la nature de la décision recherchée et le processus suivi pour y parvenir; (2) la nature du régime législatif et les termes de la loi régissant l’organisme; (3) l’importance de la décision pour les personnes visées; (4) les attentes légitimes de la personne qui conteste la décision; (5) les choix de procédure que l’organisme fait lui-même.

[43] La cour fédérale a aussi écrit au paragraphe 33 qu’afin de cerner l’étendue des règles d’équité procédurale il faut par ailleurs tenir compte de l’objet de la LMEDS, de la nature des droits en cause, des contraintes opérationnelles du Tribunal, de la clientèle particulière de ce dernier et de tout autre facteur pertinent. La décision Bossé portait sur les procédures devant la division d’appel, et se préoccupait de l’accessibilité pour les clients qui désireraient en appeler d’une décision. Dans ce cas, le demandeur soutenait ne pas avoir eu l’opportunité d’expliquer au Tribunal pourquoi la permission d’en appeler de la décision de la division générale aurait dû lui être accordée par un membre de la division d’appel. Il avait rempli son avis d’appel sur le fondement d’erreurs de fait et de droit, mais il ne savait pas qu’il devait donner plus de détails sur ses motifs, puisqu’il croyait qu’on l’appellerait pour expliquer ses motifs ultérieurement. La cour fédérale a cité l’alinéa 41a) de la LMEDS, lequel confère un pouvoir discrétionnaire à la division d’appel pour demander des informations supplémentaires avant d’accorder ou de refuser une permission d’en appeler. Bien que l’alinéa confère un pouvoir discrétionnaire, la cour fédérale a établi que [traduction] « les droits d’un demandeur doivent tout de même être déterminés sur le fondement d’une procédure d’équité et l’application régulière de la loi ».

[44] La cour fédérale a aussi évalué la procédure du rejet sommaire en vertu du paragraphe 53(1) de la LMEDS, à titre d’analogie. Sous le paragraphe 53(1) de la LMEDS et l’article 22 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, la division générale doit aviser par écrit un appelant et lui accorder un délai raisonnable pour soumettre des observations.

[45] La cour fédérale a conclu que le membre de la division d’appel savait, en étudiant l’avis d’appel, qu’il y avait des « lacunes importantes », puisque le manque de détails supplémentaires à propos du moyen d’appel principal mènerait au rejet de l’appel du demandeur. La cour fédérale a déterminé que le membre de la division d’appel aurait dû suspendre l’évaluation de l’avis d’appel pour accorder plus de temps pour le dépôt de détails supplémentaires, conformément aux [traduction] « attentes légitimes du demandeur ».

[46] L’alinéa 28a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale confère à la division générale le pouvoir de rendre une décision en se fondant sur les documents et les observations déposés. Par conséquent, le représentant de l’intimé soutient qu’il ne peut pas y avoir un manquement au principe de justice naturelle parce que la division générale possédait la compétence pour rendre sa décision sur la foi du dossier sans en aviser l’appelante.

[47] Certes, en vertu de la LMEDS, la division générale avait la compétence de rendre sa décision sur la foi du dossier, mais au moment où l’appelante a présenté sa première demande, elle n’était pas sujette à des restrictions parce que la période de restriction n’existait pas encore. Les attentes légitimes de l’appelante étaient donc que son appel serait décidé sur le fond de sa demande. Elle ne pouvait pas savoir qu’elle serait possiblement sujette à une période de restriction, laquelle n’existait pas encore, au moment où elle a présenté sa première demande. Il s’agit d’une situation distincte à celle dans l’affaire Belo-Alves c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1100, où la cour fédérale a décidé que la division d’appel avait commis une erreur en évaluant la demande de permission d’en appeler de la demanderesse sur le fondement de ses attentes légitimes au moment où elle a présenté sa demande à la Commission d’appel des pensions.

[48] Dans Belo-Alves, la division d’appel a conclu que la demanderesse avait droit à un appel de novo pour sa demande, en vertu du paragraphe 84(1) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure précédant le 1er avril 2013. La cour fédérale a maintenu qu’il n’existe pas de discrétion à dévier de la LMEDS et appliquer l’ancien critère en ces circonstances, sans tenir compte du fait que la demanderesse dans cette affaire avait présenté sa permission d’en appeler avant l’introduction de la nouvelle législation régissant les permissions d’en appeler sous le Régime de pensions du Canada, et pouvait s’attendre à ce que sa demande de permission d’en appeler soit évaluée de la même manière qu’elle l’aurait été par la Commission d’appel des pensions.

[49] Les deux cas abordent les « attentes légitimes » des demandeurs. Dans Belo-Alves, la cour fédérale a abordé les attentes procédurales d’un demandeur, mais n’a pas limité les droits que le demandeur revendiquait comme il avait encore droit à une évaluation de sa demande de permission d’en appeler. Dans Bossé, par contre, la cour fédérale était saisie d’une question d’accessibilité et d’une procédure d’« équité et d’application régulière de la loi ». La cour fédérale a indiqué que le processus choisi par le Tribunal dans ce cas semblait permis par les dispositions du Règlement, dans la mesure où il ne cause pas de préjudice au demandeur et ne l’empêche pas d’expliquer pourquoi l’appel avait une chance raisonnable de succès. Je considère que l’instance dont je suis saisie s’inclue dans cette dernière catégorie, et que les « attentes légitimes » sont aussi touchées par une procédure d’équité et d’application régulière de la loi. En l’espèce, sans tenir compte du fait que la division générale possédait la compétence en vertu de la LMEDS de rendre sa décision sur la foi du dossier sans en aviser l’appelante, elle devait tout de même définir les droits de l’appelante selon une procédure d’équité et d’application régulière de la loi, puisque l’appelante pourrait être sujette à des restrictions qui n’existaient pas auparavant.

[50] La division générale savait qu’une interprétation de la LMEDS et de la LECPD mènerait au rejet de l’instance. Néanmoins, la division générale a instruit l’appel « sur la foi du dossier », quand elle aurait pu le faire par vidéoconférence, téléconférence, comparution des parties ou questions et réponses écrites. Pourtant, la division générale n’a pas invité l’appelante à présenter des observations en vertu de ses « attentes légitimes ». Avant d’instruire l’appel sur la foi du dossier, la division générale aurait dû déterminer s’il s’agissait d’une procédure qui satisfaisait les critères de procédure d’équité et d’application régulière de la loi.

[51] D’après les faits sous-jacents de cette affaire uniquement où la législation modifiée pourrait avoir imposé une période de restriction qui n’existait pas précédemment, j’accepte les observations suivantes de l’appelante : quand une instance sera rejetée sur la foi du dossier écrit quand les « attentes légitimes » indiquaient un appel sur le fond, la division générale, en de telles circonstances, devrait accorder à l’appelante l’opportunité de connaître la cause qu’elle doit défendre et de présenter des observations. Pour l’instance en l’espèce, les parties sont d’accord qu’il me serait inutile de renvoyer l’affaire à la division générale puisque je vais déterminer si les demandes étaient en effet prescrites.

b) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit parce qu’elle a conclu que les deux demandes de faits nouveaux étaient prescrites?

[52] Le représentant de l’intimé soutient que, faisant partie des changements législatifs et administratifs survenus pendant l’implantation du Tribunal de la sécurité sociale, une période de restriction a été imposée pour les demandes de faits nouveaux sous le nouveau paragraphe 66(2) de la LMEDS, où aucune n’existait sous le paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure précédant le 1er avril 2013.

[53] L’article 66 de la LMEDS a remplacé le paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure précédant le 1er avril 2013. Le représentant de l’intimé soutient que, contrairement au paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, le paragraphe 66(2) prévoit qu’une demande concernant des faits nouveaux doit être présentée au plus tard un an après la date où l’appelant reçoit communication de la décision.

[54] Le représentant de l’intimé soutient que même si l’appelante avait présenté la première demande dans l’année suivant la date à laquelle la décision du tribunal de révision lui avait été communiquée, la demande est prescrite, parce qu’elle est considérée comme ayant été faite plus d’un an après la date à laquelle la décision du tribunal de révision lui avait été communiquée, en application du paragraphe 261(1) de la LECPD. Ce paragraphe stipule qu’une demande de faits nouveaux présentée au titre du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, non tranchée avant le 1er avril 2013 est réputée être une demande présentée le 1er avril 2013 au titre de l’article 66 de la LMEDS.

[55] Le représentant de l’appelante soutient que la division générale a mal interprété le but des dispositions transitoires de la LECPD et a tiré une conclusion erronée en indiquant que les demandes de l’appelante pour la réouverture de la décision du tribunal de révision avaient été faites en dehors des délais. Le représentant soutient que le but fondamental des dispositions transitoires dans la LECPD est de transférer au Tribunal de la sécurité sociale la compétence pour les demandes non décidées présentées au tribunal de révision, à la Commission d’appel des pensions, aux conseils arbitraux de l’assurance-emploi et aux juges-arbitres en assurance-emploi (les « anciens tribunaux »), plutôt que d’abolir complètement les demandes.

[56] Le représentant de l’appelante soutient que l’interprétation de la division générale est contradictoire au régime législatif, à l’intention du législateur, et la présomption d’absence d’effet rétroactif et d’atteinte aux droits acquis. Le représentant fait aussi valoir que l’interprétation de la division générale mène à des résultats absurdes et inéquitables, précisément, que les prestataires ayant correctement présenté des demandes de réouverture de décisions perdent maintenant leur droit simplement parce que le tribunal de révision n’a pas instruit leurs appels avant le 1er avril 2013 pour des raisons dépassant le contrôle des demandeurs.

La première demande de réouverture

i. Règles d’interprétation des lois

  • Présomption d’absence d’effet rétroactif et d’atteinte aux droits acquis

    [57] Le représentant de l’appelante soutient que l’appelante avait droit à une décision sur le fond de la demande au moment où elle a présenté sa première demande. Le représentant de l’appelante maintient que l’interprétation du paragraphe 66(2) de la LMEDS par la division générale mène aux résultats suivants :

    1. a) juge de façon efficace que la première demande n’a jamais été faite;
    2. b) impose un délai rétroactif qui n’existait pas au moment où l’appelante a présenté sa première demande;
    3. c) abolit les droits acquis de l’appelante à une décision sur le fond de la première demande.

    [58] Le représentant de l’appelante soutient que la législation ne devrait pas être interprétée de façon rétroactive qui porte atteinte aux droits acquis à moins que le législateur indique clairement une telle intention. Dans Gustavson Drilling (1964) Ltd. c. Ministre du Revenu national, 1975 CanLII 4 (CSC), [1977] 1 R.C.S. 271, à la page 279, le juge Dickson (qu’il était à ce moment) pour la majorité de la Cour a tenu [traduction] :

    Selon la règle générale, les lois ne doivent pas être interprétées comme ayant une portée rétroactive à moins que le texte de la Loi ne le décrète expressément ou n’exige implicitement une telle interprétation.

    [59] Et à la page 282 :

    Selon la règle, une loi ne doit pas être interprétée de façon à porter atteinte aux droits existants... sauf si le texte de cette loi exige une telle interprétation : Spooner Oils Ltd. c. Turner Valley Cas Conserva­tion Board, 1933 CanLII 87 (SCC), [1933] R.C.S. 629, à la p. 638.

    [60] L’intimé soutient que l’interprétation de la division générale concorde avec Gustavson et avec Tabingo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2013 CF 377 aux paragraphes 17 à 37, confirmée dans Austria (alias Tabingo) c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CAF 191 aux paragraphes 75 à 81; demande de permission d’en appeler à la Cour suprême du Canada, rejetée le 30 avril 2015. L’intimé soutient qu’en fin de compte, la division générale a correctement interprété la loi. Le représentant de l’intimé m’invite à suivre la décision de la cour fédérale dans Tabingo, où le juge Rennie a exprimé l’avis que [traduction] « si le sens ordinaire et évident de la loi exige que la disposition soit rétrospective et qu’elle porte atteinte à des droits acquis, cela est valide, indépendamment de toute injustice perçue ».

    [61] Le représentant de l’intimé soutient que le libellé de l’article 261 de la LECPD et du paragraphe 66(2) de la LMEDS nécessitait l’interprétation faite par la division générale. En d’autres mots, il soutient que le libellé indique clairement l’intention du législateur de prescrire les demandes comme celles de l’appelante, même si fait de façon rétrospective.

    [62] Dans Austria, la Cour d’appel fédérale a reconnu que le législateur possède les pouvoirs pour appliquer des lois qui ont un effet rétrospectif, bien que [traduction] :

    [77]… sous réserve d’une présomption de non‑rétroactivité, qui ne pourra être écartée qu’en présence d’un libellé n’autorisant aucune autre possibilité; voir Gustavson Drilling (1964) Ltd. c. Canada (Ministre du Revenu national), 1975 CanLII 4 (CSC), [1977] 1 R.C.S. 271, pages 279 à 283; et Imperial Tobacco Canada Ltd., précité, paragraphes 69 à 72.

    [78] J’ai déjà conclu, pour les motifs exposés précédemment, que le paragraphe 87.4(1) de la [Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés] est libellé de manière suffisamment claire pour mettre fin rétroactivement aux demandes des appelants.

    [63] Il est instructif, en retour, de réviser le libellé du paragraphe 87.4(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Il est ainsi libellé :

    87.4 (1) Il est mis fin à toute demande de visa de résident permanent faite avant le 27 février 2008 au titre de la catégorie réglementaire des travailleurs qualifiés (fédéral) si, au 29 mars 2012, un agent n’a pas statué, conformément aux règlements, quant à la conformité de la demande aux critères de sélection et autres exigences applicables à cette catégorie. (Souligné par mes soins)

    [64] Comme je l’ai mentionné dans ma décision de permission, le représentant de l’appelante à ce moment avait soulevé que le paragraphe 87.4(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch. 27, utilisait le libellé « il est mis fin » pour révoquer les droits acquis de façon rétroactive. Le représentant a aussi soutenu que le paragraphe 87.4(1) [traduction] « établit clairement la catégorie de personnes, la période visée et les conditions amenant à mettre fin ». Le représentant de l’appelante a soutenu que dans le cas de la LECPD, la révocation de droits acquis est une question qui n’est soulevée que si l’on combine deux lois distinctes, dont aucune d’elles n’établit une date butoir ou n’énonce expressément une intention de révoquer un quelconque droit acquis d’un demandeur, quel qu’il soit.

    [65] Le paragraphe 261 de la LECPD prévoit que :

    1. (1) Toute demande présentée au titre du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’article 229, et non tranchée avant le 1 er avril 2013 est réputée être une demande présentée le 1 er avril 2013 au titre de l’article 66 de la Loi sur le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences et viser :
      1. a) dans le cas où elle porte sur une décision rendue par un tribunal de révision, une décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale;
      2. b) dans le cas où elle porte sur une décision rendue par la Commission d’appel des pensions, une décision rendue par la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale.
    2. (2) Toute demande présentée au titre de l’article 66 de la Loi sur le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences après le 31 mars 2013 est réputée viser :
      1. a) dans le cas où elle porte sur une décision rendue par un tribunal de révision, une décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale;
      2. b) dans le cas où elle porte sur une décision rendue par la Commission d’appel des pensions, une décision rendue par la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale.

    [66] Le paragraphe 66(2) de la LMEDS prévoit que :

    66.(2) La demande d’annulation ou de modification doit être présentée au plus tard un an après la date où l’appelant reçoit communication de la décision.

    [67] Si j’acceptais les observations de l’intimé et appliquais une interprétation stricte et littérale du paragraphe 261(1) de la LECPD et de l’article 66 de la LMEDS, les articles seraient suffisamment clairs pour mettre fin à toute demande présentée au titre du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure précédant le 1er avril 2013, et ne devraient pas laisser place à toute autre interprétation. Contrairement au paragraphe 87.4(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, toutefois, ni le paragraphe 261(1) de la LECPD ni l’article 66 de la LMEDS ne mettent spécifiquement fin aux demandes présentées avant le 1er avril 2013. Si le législateur avait eu l’intention de mettre fin aux demandes présentées au titre du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure précédant le 1er avril 2013, il en serait spécifiquement indiqué, plutôt que de mettre fin à des demandes rétrospectivement en vertu de la période de restriction établie au paragraphe 66(2) de la LMEDS. Le paragraphe 261(1) de la LECPD et l’article 66 de la LMEDS n’utilisent pas expressément le libellé « mettre fin aux demandes », ou des mots à cet effet, comme ce fut le cas dans Austria.

    [68] Les appelants dans Austria soutiennent qu’ils avaient, lorsqu’ils ont présenté leurs demandes de visa de résident permanent, acquis le droit de les voir traiter entièrement, ainsi que de les voir examiner sous le régime des dispositions législatives et réglementaires alors en vigueur. La Cour d’appel fédérale que cet argument n’était pas fondé. Bien que les appelants avaient le droit de demander des visas de résident permanent et, au moment où ils ont présenté leurs demandes, ils avaient le droit de les voir examiner conformément à la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, ils n’avaient pas acquis le droit au maintien en vigueur de toute disposition de cette Loi en vigueur au moment où ils ont présenté leurs demandes. La Cour d’appel fédérale est venue à cette conclusion parce que le paragraphe 87.4(1) de la Loi était libellé de manière suffisamment claire pour mettre fin rétroactivement aux demandes des appelants, tandis que dans l’arrêt Dikranian c. Québec (Procureur général), 2005 CSC 73 (CanLII), [2005] 3 R.C.S. 530, la Cour suprême du Canada a conclu que les modifications en cause de la législation provinciale n’étaient pas assez clairement formulées pour supprimer les droits contractuels des étudiants avant l’entrée en vigueur de ces modifications.

    [69] La Cour suprême du Canada a conclu dans Dikranian que la présomption d’atteinte aux droits acquis n’est pas limitée aux cas dans lesquels il y a des ambiguïtés, et que la première étape serait d’établir l’intention du législateur. Au paragraphe 36, le juge Bastarache, s’exprimant au nom de la majorité, a appuyé l’affirmation suivante de la Professeure Sullivan, dans Sullivan and Driedger on the Construction of Statutes (4e éd. 2002), p. 576) [traduction] :

    Les valeurs qui sous-tendent la présomption contre toute atteinte aux droits acquis, à savoir éviter l’arbitraire et affirmer la primauté du droit, inspirent l’interprétation qu’on peut en donner, et ce, dans tous les cas, non seulement dans les cas que le tribunal est censé trouver ambigus. La tâche du tribunal consiste d’abord et avant tout à percer les intentions du législateur et,... il faut, pour y parvenir, respecter les principes d’interprétation législative, y compris les présomptions.

    [70] Le représentant de l’appelante soutient que si le législateur souhaitait en arriver au résultat sévère et injuste qui découle d’une interprétation stricte et littérale, il aurait pu l’énoncer clairement et directement. Il soutient que le législateur a plutôt rédigé les dispositions transitoires pour veiller à ce que les appels et les demandes non tranchés soient instruits par le Tribunal de la sécurité sociale. Il maintient que rien dans la LECPD, la LMEDS ou le Régime de pensions du Canada ne permet de réfuter la présomption d’absence d’effet rétroactif et d’atteinte aux droits acquis.

  • Intention du législateur

    [71] Le représentant de l’appelante soutient qu’en lien aux principes d’interprétation des lois, la première demande n’est pas prescrite. Le représentant de l’appelante soutient que, même si les articles 261 de la LECPD et 66 de la LMEDS pourraient être interprétés comme une prescription pour le cas de la première demande, les principes d’interprétation des lois nous demandent de dépasser une interprétation stricte et littérale de la loi. Il s’agit de l’approche formulée par Elmer Driedger dans Construction of Statutes (2e éd. 1983) [traduction] :

    Aujourd’hui il n’y a qu’un seul principe ou solution : il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

    [72] Le représentant de l’appelant mentionne que la Cour suprême du Canada a appuyé cette approche dans Rizzo & Rizzo Shoes Ltd, 1998 CanLII 837 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 27, au paragr. 21.

    [73] Le représentant de l’appelante s’appuie aussi sur la décision Dikranian au paragr. 32, où la Cour suprême du Canada a repris les mots de la Professeure Sullivan et prévient de se garder d’utiliser strictement une approche littérale pour interpréter la loi. La Cour suprême a établi qu’en s’efforçant de déterminer l’intention législative, les cours doivent s’appuyer sur tous les principes d’interprétation des lois, incluant toutes les présomptions (dont la présomption d’atteinte aux droits acquis).

    [74] Le représentant de l’appelante soutient que la division d’appel doit tenir compte du contexte en entier, de l’esprit et de l’objet de la loi et de l’intention du législateur. Le représentant de l’appelante soutient que, pour ce cas en particulier, le but fondamental des dispositions transitoires dans la LECPD est de transférer au nouveau Tribunal de la sécurité sociale tous les appels et toutes les demandes non décidées présentées aux anciens tribunaux, et que tout dans la LECPD vise à assurer que le Tribunal de la sécurité sociale a la compétence pour compléter le processus décisionnel entrepris par les anciens tribunaux. Le représentant soutient que, compte tenu du contexte en entier de l’esprit, il est clair que la disposition réputée sous le paragraphe 261(1) de la LECPD avait été implantée pour remettre au Tribunal de la sécurité sociale la compétence requise pour terminer les activités des anciens tribunaux en considérant les demandes non décidées comme présentées au Tribunal de la sécurité sociale. Il soutient que cette affirmation concorde avec les actions mêmes du Tribunal; quand il a invité les parties à présenter davantage de preuve, par exemple. Il soutient que la LECPD n’avait pas pour but de modifier la date de dépôt de la première demande pour qu’elle soit déterminée comme en retard et prescrite.

    [75] Si l’on évalue le contexte en entier, l’esprit et l’objet de la loi et de l’intention du législateur, il existe un certain fondement aux observations de l’appelante. Le représentant de l’intimé mentionne dans ses observations, au paragraphe 28, qu’à la deuxième lecture du projet de loi C-38, lequel contenait les propositions d’amendement à la Partie 5 de la Loi sur le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, la secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et de la ministre du Travail, a indiqué que le Tribunal de la sécurité sociale se devait d’être [traduction] « un guichet unique, qui est plus efficace et facilite aux Canadiens l’accès aux appels et au processus d’appel... »

    [76] De même, dans l’arrêt Atkinson c. Canada (Procureur général), 2014 CAF 187, la Cour d’appel fédérale a affirmé que le Tribunal de la sécurité sociale visait à offrir des mécanismes d’appel plus efficaces, plus simples et plus rationnels pour les décisions du Régime de pensions du Canada, de la Sécurité de la vieillesse et de l’assurance-emploi en « offrant un guichet unique où l’on peut interjeter appel ». Les changements n’étaient pas limités à la composition et à la structure du Tribunal de la sécurité sociale, mais aussi aux règles de procédure.

    [77] Le représentant de l’appelante soutient que l’interprétation stricte de la division générale va aussi à l’encontre de l’objet sous-jacent du Régime de pensions du Canada.Le Régime de pensions du Canada est un régime d’assurance sociale destiné aux Canadiens privés de gains en raison d’une retraite, d’une déficience ou du décès d’un conjoint ou d’un parent salarié. Il s’agit non pas d’un régime d’aide sociale, mais plutôt d’un régime contributif dans lequel le législateur a défini à la fois les avantages et les conditions d’admissibilité, y compris l’ampleur et la durée de la contribution financière d’un requérant : Granovsky c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) [2000] 1 R.C.S. 703. Il est inconcevable que le législateur puisse avoir prévu les conséquences d’une interprétation stricte et littérale, puisqu’il en serait à l’encontre du Régime de pensions du Canada.

    [78] Sans tenir compte de ces considérations, un argument rationnel peut être fait pour imposer une période de restriction comme celle du paragraphe 66(2) de la LMEDS. Une période de restriction pourrait servir de finalité et encourager les demandeurs à soumettre leurs demandes de « faits nouveaux » avec diligence. Je ne vois pas comment l’abolition des demandes faites en vertu du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure précédant le 1er avril 2013, pourrait toutefois servir l’objectif pour lequel le Tribunal de la sécurité sociale a été créé. En faire ainsi ne servirait pas à offrir des mécanismes d’appel plus efficaces, plus simples et plus rationnels pour les appels en cours.

    [79] Dans Belo-Alves, au paragr. 79, la cour fédérale semble avoir directement abordé la question du champ d’application des dispositions transitoires de la LECPD. La cour fédérale a déterminé que les dispositions transitoires du paragraphe 258(1) et de l’article 262 de la LECPD énoncent que le législateur prévoyait clairement que les questions dont le Tribunal de la sécurité sociale était saisi seraient assujetties à la nouvelle loi. La cour fédérale a écrit [traduction] :

    [79] En l’espèce, les dispositions transitoires de la LECPD prévoient que les dispositions du Régime qui ont été abrogées par cette loi continuent de s’appliquer aux questions dont la Commission d’appel des pensions demeure saisie, c’est-à-dire les appels déposés et entendus avant le 1er avril 2013; voir le paragraphe 258(1) et l’article 262 de la LECPD. Il ressort clairement de ces dispositions que le législateur prévoyait que les questions dont le [Tribunal de la sécurité sociale] était saisi seraient assujetties à la nouvelle loi. Pendant la période de transition, la Commission d’appel des pensions est demeurée assujettie à l’ancienne loi.

    [80] Je signale que l’alinéa 44c) de la Loi d’interprétation, LRC 1985 c I‑21, prévoit que, lorsqu’un texte antérieur est abrogé et remplacé par un nouveau texte, les procédures engagées sous le régime du texte antérieur se poursuivent conformément au nouveau texte, dans la mesure de leur compatibilité avec celui-ci.

    (Souligné par mes soins)

    [80] Comme je l’ai précédemment indiqué, la cour fédérale a abordé la question pour déterminer si un demandeur peut s’appuyer sur des « attentes légitimes ». En décidant si la demande de permission du demandeur avait une chance raisonnable de succès, la cour fédérale a déterminé si l’appel devait être instruit à nouveau, en vertu du paragraphe 84(1) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure précédant le 1er avril 2013. La cour fédérale a établi que la demande de permission d’un demandeur ne devrait pas être évaluée sur le fondement de ses attentes au moment où la demande de permission d’en appeler a été présentée, parce que la division d’appel devait appliquer le critère énoncé dans l’article 58 de la LMEDS.

    [81] Conformément à l’article 260 de la LECPD, la demande d’autorisation d’interjeter appel dans Belo-Alves a été traitée comme si elle avait été déposée auprès du Tribunal de la sécurité sociale le 1er avril 2013. La cour fédérale a établi que le paragraphe 58(2) de la LMEDS gouverne les appels devant le Tribunal de la sécurité sociale et que, par conséquent, la division d’appel devait appliquer le critère de l’article 58 de la LMEDS. La cour fédérale a aussi établi que le membre de la division d’appel ne possédait pas la discrétion pour dévier de ce régime législatif et appliquer l’ancien critère, nonobstant le fait que le demandeur avait présenté une demande de permission d’en appeler avant l’introduction de la nouvelle loi gouvernant les demandes de permission d’en appeler sous le Régime de pensions du Canada.

    [82] Le paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version en vigueur avant le 1er avril 2013, précisait ce qui suit :

    84 (2) Annulation ou modification de la décision - Indépendamment du paragraphe (1), le ministre, un tribunal de révision ou la Commission d’appel des pensions peut, en se fondant sur des faits nouveaux, annuler ou modifier une décision qu’il a lui-même rendue ou qu’elle a elle-même rendue conformément à la présente loi.

    [83] L’article 66 de la LMEDS restreint significativement le champ du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure avant le 1er avril 2013, comme il ajoute une restriction de temps pour présenter les demandes et restreint le nombre de demandes qu’une personne peut faire.

    [84] La cour fédérale n’avait qu’à tenir compte du paragraphe 258(1) et de l’article 262 de la LECPD dans Belo-Alves quand elle a déterminé que les dispositions énonçaient clairement que le législateur prévoyait que les questions dont le Tribunal de la sécurité sociale était saisi seraient assujetties à la nouvelle loi. La cour fédérale n’a pas tenu compte de l’article 261 de la LECPD et du paragraphe 66(2) de la LMEDS. Quand elle a écrit « Il ressort clairement de ces dispositions que le législateur prévoyait que les questions dont le [Tribunal de la sécurité sociale] était saisi seraient assujetties à la nouvelle loi », elle pourrait aussi avoir songé à l’article 261 de la LECPD et du paragraphe 66(2) de la LMEDS.

    [85] Dans Belo-Alves, la cour fédérale n’a pas décidé si les demandes faites en vertu du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure avant le 1er avril 2013, étaient aussi sujettes en totalité à la nouvelle loi, et en particulier, au paragraphe 66(2) de la LMEDS. Vu l’éloignement de l’interprétation législative stricte et littérale, les règles et principes de l’interprétation des lois, et prenant en considération le contexte de la visée du législateur, comme établi dans Atkinson, que les mécanismes d’appel soient plus efficaces, plus simples et plus rationnels, il semble que la cour fédérale dans Belo-Alves ne peut pas avoir visé que le paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure avant le 1er avril 2013, soit aussi sujet au paragraphe 66(2) de la LMEDS s’il en résultait de mettre fin aux demandes adéquatement présentées, sinon d’exprimer l’intention semblable de la part du législateur.

    [86] Sous le paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure avant le 1er avril 2013, un demandeur pouvait vraisemblablement présenter un nombre illimité de demandes. Le paragraphe 66(3) de la LMEDS prévoit qu’il ne peut être présenté plus d’une demande d’annulation ou de modification par toute partie visée par la décision. Il est raisonnable pour une partie visée par une décision qui a été rendue avant le 1er avril 2013 qu’elle soit sujette aux dispositions du paragraphe 66(3) de la LMEDS et limitée à présenter une seule demande d’annulation ou de modification après le 1er avril 2013. Après tout, il ne serait pas justifié de voir deux catégories de demandeurs : ceux qui peuvent présenter un nombre illimité de demandes d’annulation ou de modification, parce qu’ils sont visés par une décision rendue avant le 1er avril 2013, et ceux qui sont limités à une seule demande, parce qu’ils sont visés par une décision rendue après le 1er avril 2013. (L’on pourrait débattre si, ayant présenté une demande avant le 1er avril 2013, un demandeur peut faire une autre demande après le 1er avril 2013, mais il s’agit d’une question que je n’ai pas à trancher.)

    [87] Il est moins équitable que le paragraphe 66(2) de la LMEDS s’applique aux demandeurs à qui l’on a communiqué une décision avant le 1er avril 2013, parce qu’il faudrait mettre fin à toutes les demandes semblables, même si elles avaient été présentées adéquatement avant le 1er avril 2013. Aucune logique ou raison particulière ne suggère qu’il faudrait mettre fin à une demande faite par un demandeur pour la réouverture d’une décision avant le 1er avril 2013. Pour le cas de l’appelante, elle avait présenté sa première demande le 26 novembre 2012, à l’intérieur d’une année après la date à laquelle la décision du tribunal de révision du Régime de pensions du Canada lui avait été communiquée. Aucune exigence législative n’était alors en place pour obliger la présentation de la demande à l’intérieur d’une période d’une année après la communication de la décision.

    [88] Sous le paragraphe 66(2) de la LMEDS, la demande de réouverture de l’appelante aurait été conservée, parce que la demande a été présentée à l’intérieur du délai d’un an après la date où elle a reçu communication de la décision, mais possiblement pour le fait que le paragraphe 261(1) de la LECPD considérait la demande comme ayant été faite le 1er avril 2013 en vertu de l’article 66 de la LMEDS. Apparemment, ce résultat est injuste pour un demandeur qui s’est autrement conformé aux dispositions du Régime de pensions du Canada, de mettre fin à sa demande pour des raisons qui semblent arbitraires, sans justification apparente, autre que le fait qu’un nouveau régime législatif a été adopté.

  • La [traduction] « règle d’or » et éviter des résultats absurdes

    [89] La règle d’or a été décrite comme suit [traduction] :

    La « règle d’or » prévoit qu’il « faut adhérer au sens grammatical et ordinaire des mots, à moins que cela n’entraîne quelque absurdité, contradiction ou incompatibilité eu égard au reste du texte; dans ce dernier cas, on peut modifier le sens grammatical et ordinaire des mots de façon à éviter cette absurdité ou incompatibilité, mais uniquement dans cette mesure ». (Statute Interpretation in a Nutshell, John Willis)

    [90] À cet égard, le représentant de l’appelante soutient que toute interprétation législative devrait éviter de produire des résultats absurdes, même s’il faut modifier le sens ordinaire des mots des lois. Par contre, la loi aurait alors le statut d’« interprétation exceptionnelle ». Le représentant suggère que la Cour suprême du Canada a appuyé cette approche, où une autre interprétation aurait entraîné un résultat absurde. Il s’appuie sur l’affaire Paul c. La Reine, [1982] 1 RCS 621 aux pages 662 à 663. Dans Paul, l’appelant a plaidé coupable devant le même juge à trois différentes occasions. La question dont la Cour suprême du Canada était saisie portait sur le sens de l’expression « devant la même cour pendant la même session ». À ce sujet, il semble que la Cour suprême du Canada n’a pas choisi d’avoir recours à des circonstances exceptionnelles pour aller à l’encontre de l’intention du Parlement parce que ce serait aller « au-delà de ce qui est nécessaire pour supprimer l’"absurdité" et [nous] usurperions ce faisant les privilèges du Parlement ». Néanmoins, il est clair que la Cour suprême du Canada avait l’intention d’éviter de produire des résultats absurdes, même s’il en résulte peu ou pas de signification à la loi quand elle a écrit :

    Ma suggestion, je le sais, suppose que l’on fasse quelque peu violence aux mots du législateur et je reconnais que peu ou pas de signification est donnée aux mots « à la même session »; mais toute réticence à le faire se résorbe, je pense, vu les résultats absurdes qu’amènerait la solution contraire.

    [91] Que considère-t-on comme un « résultat absurde »? Comme le représentant de l’appelante l’indique, dans Rizzo Shoes, le juge Iacobucci a présenté ce qui suit au paragr. 27 [traduction] :

    Selon un principe bien établi en matière d’interprétation législative, le législateur ne peut avoir voulu des conséquences absurdes. D’après Côté, op. cit., on qualifiera d’absurde une interprétation qui mène à des conséquences ridicules ou futiles, si elle est extrêmement déraisonnable ou inéquitable, si elle est illogique ou incohérente, ou si elle est incompatible avec d’autres dispositions ou avec l’objet du texte législatif (aux pp. 430 à 432). Sullivan partage cet avis en faisant remarquer qu’on peut qualifier d’absurdes les interprétations qui vont à l’encontre de la fin d’une loi ou en rendent un aspect inutile ou futile (Sullivan, Construction of Statutes, op. cit., à la p. 88). (Souligné par mes soins)

    [92] Dans Butler c. Southam Inc. 2001 NSCA 121 (CanLII), la Nova Scotia Court of Appeal (cour d’appel de la Nouvelle-Écosse)a considéré ce qui était équitable. Le juge Cromwell (son titre alors) a dit au paragr. 139 [traduction] :

    [139] Dans l’évaluation de ce qui est équitable, il est fondamental de considérer si le résultat sévère pour le plaignant de perdre une cause d’action est disproportionné quant aux buts en donnant suite à la disposition de restriction en question, applicable au cas en l’espèce.

    [93] Comme je l’ai déjà mentionné, la période de restriction établie dans le paragraphe 66(2) de la LMEDS pourrait servir de finalité et encourager les demandeurs à soumettre leurs demandes de « faits nouveaux » avec diligence. Si l’un ou les deux servent aux fins du paragraphe 66(2), la perte d’une demande d’un demandeur est disproportionnée aux buts et à cet égard, une interprétation stricte et littérale mène à un résultat inéquitable.

    [94] Le représentant de l’appelante soutient qu’une interprétation stricte et littérale mène à un résultat absurde, puisque c’est déraisonnable, qu’un demandeur, qui respectait déjà les dispositions du Régime de pensions du Canada, verrait sa demande annulée pour des raisons qui semblent complètement arbitraires et hors de son contrôle.

    [95] Le représentant de l’appelante soutient que cette absurdité est mieux illustrée en appliquant d’autres dispositions de la LECPD et de la LMEDS. Il soutient que cette même interprétation stricte engendrerait la conséquence absurde suivante pour la grande majorité des dossiers transitoires transmis des anciens tribunaux à la division générale : ils seraient dépassés, sans faute commise par les demandeurs. Il en serait ainsi parce que l’article 257 de la LECPD considère tout appel présenté au tribunal de révision avant le 1er avril 2013 comme ayant été présenté à la division générale, et parce que l’alinéa 52(1)b) de la LMEDS nécessite que les appels d’une décision soient présentés à la division générale dans les 90 jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision, sous réserve d’une prorogation du délai accordée par la division générale. Le représentant de l’appelante soulève que tout appel correctement présenté concernant la décision d’un tribunal de révision rendue avant le 1er janvier 2013 serait considéré comme présenté à la division générale le 1er avril 2013, après le délai d’appel prévu de 90 jours. Le représentant de l’appelante soutient qu’il est absurde que le Parlement ait eu l’intention que la grande majorité des dossiers transitoires provenant des anciens tribunaux seraient à l’extérieur du délai d’appel prévu de 90 jours, alors que sa visée était d’assurer une transition ordonnée et sans heurts des appels vers le Tribunal de la sécurité sociale.

    [96] Je ne suis pas au courant d’un appel présenté à temps au tribunal de révision avant le 1er avril 2013 qui aurait été considéré comme présenté à la division générale le 1er avril 2013, après le délai d’appel prévu de 90 jours. L’intimé n’a pas expliqué pourquoi l’article 257 de la LECPD et l’alinéa 52(1)b) de la LMEDS ne devraient pas être sujets à une interprétation stricte et littérale, alors que le paragraphe 261(1) de la LECPD et le paragraphe 66(2) de la LMEDS devraient l’être. Il serait incohérent que, d’un côté, certaines dispositions de la LECPD et de la LMEDS soient interprétées de manière stricte et littérale, et que d’un autre côté, d’autres dispositions de la LECPD et de la LMEDS soient interprétées de manière plus large et plus libérale. Dans l’esprit global, et pour l’intérêt de la cohérence, je ne peux pas envisager que le Parlement avait eu l’intention d’un tel résultat. Je considère les arguments de l’appelante à cet égard très persuasifs.

  • Interprétation de l’ambiguïté dans la loi conférant des avantages en faveur du prestataire

    [97] Le représentant de l’appelante soutient que, où il y a ambiguïté ou manque dans la loi, ou s’il y a plus d’une interprétation raisonnable de la loi, toutes incertitudes devraient être résolues en faveur de l’appelante. Il affirme que l’autorité existe pour le faire, dans Villani c. Canada (Procureur général) 2001 CAF 248 au paragraphe 27, où la Cour d’appel fédérale a déterminé que la loi conférant des avantages comme le Régime de pensions du Canada devait être interprétée [traduction] « de façon libérale et généreuse, et que tout doute découlant de l’ambiguïté des textes devait se résoudre en faveur du demandeur ». Le représentant de l’appelante soutient que la loi en question pour le cas en l’espèce devrait alors être interprétée de façon à préserver les droits qu’un appelant possédait au moment que la décision a été rendue par le tribunal de révision.

    [98] L’intimé reconnaît le fait bien établi que l’ambiguïté dans la loi conférant des avantages devrait se résoudre en faveur du demandeur, mais soutient qu’il [traduction] « ne saurait être utilisé comme une autorisation de modifier le texte de loi adopté par le législateur » (Wilson c. Énergie atomique du Canada limitée, 2015 CAF 17 au paragr. 86). En s’appuyant aussi sur Bell Canada c. Bell Aliant Communications régionales, 2009 CSC 40, aux paragr. 49 à 50, le représentant de l’intimé soutient qu’ [traduction] « on ne saurait substituer à l’analyse textuelle et contextuelle une interprétation libérale et téléologique dans le seul but de donner effet à une autre décision de principe que celle prise par le législateur. » L’intimé est d’avis que l’article 66 de la LMEDS et que l’article 261 de la LECPD énoncent clairement que toute demande de faits nouveaux en attente concernant une décision communiquée avant le 1er avril 2012 est maintenant prescrite.

    [99] Lus séparément, ni l’article 261 de la LECPD ni le paragraphe 66(2) de la LMEDS n’imposent une limite aux demandes faites dans l’année suivant la décision, incluant celles faites avant le 1er avril 2013. Par exemple, si l’on applique le paragraphe 66(2) de la LMEDS à la première demande, elle ne serait pas considérée « hors délai », puisqu’elle a été présentée à l’intérieur de la période d’une année suivant la date de communication de la décision du tribunal de révision à l’appelante.

    [100] Toutefois, le paragraphe 66 doit nécessairement être lu avec l’article 261 de la LECPD, sinon la division d’appel n’aurait pas la compétence de décider des demandes présentées au titre du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure précédant le 1er avril 2013. Seulement après avoir considéré l’effet cumulé potentiel des deux articles relativement aux décisions communiquées à une personne avant le 1er avril 2012 que l’ambiguïté devient apparente, et que des questions sont soulevées pour décider si une loi conférant des avantages doit être interprétée d’une manière stricte et littérale, de sorte que la première demande soit prescrite.

    [101] Les jurisprudences citées par le représentant de l’intimé sont factuellement différentes. Dans Wilson, la Cour d’appel fédérale a évalué la partie III du Code canadien du travail, L.R.C. 1985, ch. L-2 et a tenu que le principe relatif aux lois conférant des avantages n’éclaire pas sur la nature précise des avantages que le législateur a concrètement accordés aux employés. Ce principe ne peut pas être utilisé pour donner au libellé du Code un sens plus large que celui qu’autorise « une interprétation véritable...– un examen de son texte, de son contexte et de son objet. » Dans Bell Canada, la Cour suprême du Canada a établi que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes était tenu d’exercer les pouvoirs et fonctions [traduction] « de manière à réaliser les objectifs de la politique canadienne de télécommunication ».

    [102] Les affaires Wilson et Bell Canada suggèrent que les paragraphes 66(2) de la LMEDS et 261(1) de la LECPD devraient être interprétés de manière cohérente avec les objectifs de la politique du législateur. En l’absence d’une quelconque expression de l’intention du législateur, un examen du texte de la loi, de son contexte et de son objectif est nécessaire. Comme je l’ai précédemment mentionné, à la deuxième lecture du projet de loi C-38, lequel contenait les propositions d’amendement à la Partie 5 de la Loi sur le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, la secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et de la ministre du Travail, a indiqué que le Tribunal de la sécurité sociale se devait d’être [traduction] « un guichet unique, qui est plus efficace et facilite aux Canadiens l’accès aux appels et au processus d’appel... »

    [103] Dans la mesure où il existe une ambiguïté, la loi doit être lue en vue de déterminer si elle répond aux objectifs mentionnés, qu’elle sert « un guichet unique, qui est plus efficace et facilite... l’accès aux appels et au processus d’appel... » L’interprétation stricte et littérale des paragraphes 261(1) de la LECPD et 66(2) de la LMEDS rendue par la division générale ne correspond pas à cet objectif mentionné.

    ii. Deuxième disposition déterminative

    [104] Ces considérations me mènent au point final soulevé par le représentant de l’appelante. Il soutient que la première demande présentée par l’appelante n’est pas hors délai en vertu du paragraphe 66(2) de la LMEDS parce que le paragraphe 261(1) de la LECPD contient une autre disposition déterminative, qu’une décision du tribunal de révision « est réputée viser une décision rendue... par la division générale ».

    [105] Le représentant de l’appelante soutient que, comme la division générale n’existait pas avant le 1er avril 2013, elle ne peut pas être réputée comme ayant rendu une décision avant le 1er avril 2013. Le représentant soutient que le plus tôt que la division générale puisse avoir rendu une décision est en date du 1er avril 2013, date à laquelle elle a été mise en place, et donc, la décision du tribunal de révision doit être réputée comme ayant été rendue par la division générale le 1er avril 2013. La première demande n’a donc pas été présentée en retard et est réputée présentée le 1er avril 2013, et vise une décision rendue par la division générale en cette même date.

    [106] Les mots de la première disposition déterminative de l’article sont « est réputée être une demande », tandis que les mots de la deuxième disposition déterminative sont « réputée viser une décision rendue... » (souligné par mes soins), plutôt que « réputée être une décision rendue... ». Je ne connais pas la signification, s’il y en a une, que les mots "viser une décision" devaient avoir. Ce qui est clair, c’est que l’article confère la compétence à la division générale ou à la division, dépendamment du cas, d’évaluer les demandes ou les requêtes visant toutes les décisions rendues par le tribunal de révision ou la Commission d’appel des pensions, dépendamment du cas.

    [107] Si le législateur avait l’intention de réputer les décisions rendues par un tribunal de révision comme ayant été faites par la division générale, et s’il avait aussi l’intention de limiter les demandes de réouverture, d’annulation ou de modification à une période d’une année débutant le 1er avril 2013, il pouvait l’avoir expressément indiqué. En d’autres mots, l’article aurait pu être écrit de manière à ce qu’une demande de réouverture soit réputée avoir été faite le 1er avril 2013, mais que la décision aussi soit réputée avoir été rendue le 1er avril 2013.

    [108] En dépit de quelques réserves non expressément mentionnées sous l’article que les décisions réputées sont aussi réputées comme ayant été rendues le 1er avril 2013, il existe une certaine logique à ce que les décisions soient en effet réputées avoir été rendues le 1er avril 2013. Certes, le représentant de l’appelant a raison de mentionner que la division générale n’existait pas avant le 1er avril 2013, et qu’elle ne peut donc pas avoir rendu de décisions avant ce moment, le résultat étant de réputer les décisions comme ayant été rendues le 1er avril 2013 dans le but de placer à égalité les appelants, puisque tous les appelants seraient limités par une période de restriction qui débute au plus tôt le 1er avril 2013. Cette approche préserverait ainsi les demandes des appelants, plutôt que de les abolir en entier.

    [109] L’on pourrait aussi dire que l’article crée une certaine ambiguïté, puisqu’il n’est pas clair si l’intention était que la division générale agisse comme le tribunal de révision et soit réputée comme ayant rendu la décision à la date que cette dernière a été rendue par le tribunal de révision, ou si l’intention était que la décision ait été rendue à la date de création de la division générale. Comme le représentant de l’appelante le soutient, où il y a ambiguïté ou manque dans la loi, ou s’il y a plus d’une interprétation raisonnable de la loi, toutes incertitudes devraient être résolues en faveur de l’appelante. Il existe un appui à cette interprétation aussi dans la règle contre la production de résultats absurdes.

    [110] Le paragraphe 261(1) de l’article de la LECPD invite une interprétation en faveur de l’appelante parce qu’elle renforcerait les objectifs de la loi. Il serait bien plus efficace, plus simple et plus rationnel si les décisions rendues par un tribunal de révision avant le 1er avril 2013 étaient réputées avoir été rendues le 1er avril 2013, aux fins des demandes présentées en vertu du paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada.

    La deuxième demande de réouverture

    [111] L’appelante a présenté sa deuxième demande le 24 avril 2013, quinze mois après avoir reçu la communication de la décision du tribunal de révision le 5 janvier 2012. L’intimé soutient que cette deuxième demande est prescrite par le paragraphe 66(2) de la LMEDS parce qu’elle a été présentée plus d’une année après la date où la décision du tribunal de révision a été communiquée à l’appelante. Le représentant de l’intimé soutient que la deuxième demande est réputée, et a en effet été présentée plus d’une année après que la décision originale soit communiquée à l’appelante, et que la décision est par conséquent prescrite.

    [112] Le représentant de l’appelante affirme que la division générale a omis de tenir compte du paragraphe 261(2) de la LECPD en évaluant la deuxième demande. Le paragraphe répute une décision du tribunal de révision avoir été rendue par la division générale. Le représentant de l’appelante soutient que la division générale ne peut pas être réputée d’avoir rendu ou communiqué une décision avant même son existence. La division générale peut seulement être réputée avoir rendu une décision lors de sa création, le 1er avril 2013. Cela étant, il soutient que la deuxième demande, faite le 23 avril 2013, avait été présentée à l’intérieur de la limite d’une année imposée par le paragraphe 66(2) de la LMEDS.

    [113] Le représentant de l’appelante soutient que cette interprétation est évidente lors d’une lecture ordinaire de la loi à la lumière de l’esprit, de l’objet et du contexte de la loi, et qu’elle concorde aussi avec la présomption que le législateur n’eût pas l’intention d’abolir rétroactivement les droits des gens ou de rédiger une loi absurde et injuste. Il soutient qu’au moment où le tribunal de révision a rendu sa décision, l’appelante avait le droit de faire une demande de réouverture de cette décision à tout moment. L’interprétation du membre de la division générale aurait pour effet d’abolir rétroactivement ce droit en imposant une limite de temps qui n’a jamais existé quand la décision du tribunal de révision a été rendue. Le représentant de l’appelante soutient que toute ambiguïté ou incertitude doit être résolue en faveur de l’appelante.

    [114] Cette affirmation reflète les observations précédentes en lien avec la deuxième disposition déterminative sous le paragraphe 261(1) de la LECPD. De cette affirmation, je ne déduis pas que l’appelante signifie qu’un appelant qui cherche à interjeter appel à l’encontre d’une décision d’un tribunal de révision n’est jamais sujet à des périodes de restriction. Autrement, l’appelante, et d’autres en situations semblables, feraient partie d’une catégorie traitée plus favorablement que ceux qui présentent des demandes le 1er avril 2013 ou après. Je ne constate pas d’éléments de preuve en lien avec l’intention du législateur d’accorder à cette catégorie d’appelants des droits maintenus. Plutôt, je comprends que le représentant de l’appelante affirme qu’une restriction de temps d’une année en vertu du paragraphe 66(2) de la LMEDS devrait débuter en date du 1er avril 2013. Si ce n’était pas le cas, l’appelante se verrait imposer une période de restriction qui n’existait pas au moment où la décision du tribunal de révision lui a été communiquée, et serait traitée de façon inéquitable comparativement aux appelants qui présentent des demandes d’annulation ou de modification après le 1er avril 2013. Pour les raisons précédemment débattues, je suis en accord avec les arguments de l’appelante sur le point qu’il existe une deuxième disposition déterminative, que la période de restriction commence en date du 1er avril 2013.

Troisième question en litige : Réparation

[115] Les deux parties s’entendent que, si je conclus que la première et la deuxième demande ne sont pas prescrites par la LECPD et par la LMEDS, je devrais les renvoyer à la division générale pour une évaluation sur le fond, puisque la division générale, laquelle avait refusé de tirer des conclusions sur la preuve, est l’organe principal d’enquête factuelle. J’estime, d’après mon évaluation, qu’il s’agit de la réparation appropriée.

Conclusion

[116] Comme j’ai conclu que ni la première ni la deuxième demande ne sont prescrites, l’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée à un membre différent de la division générale pour une évaluation sur le fond.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.