Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) refuse la demande de permission d’en appeler.

Introduction

[2] La demande de permission d'en appeler vise une demande de prestations d'invalidité aux termes du Régime de pensions du Canada (RPC). La demanderesse touchait une pension de retraite du Régime de pensions du Canada depuis le 1er mars 2006. À la suite de certains problèmes de santé, elle a présenté une demande de prestations d'invalidité aux termes du Régime de pensions du Canada. Le défendeur a rejeté sa demande présentée en avril 2011 au motif qu'elle touchait déjà une pension de retraite. En juin 2013, la demanderesse a de nouveau présenté une demande, qui s'est soldée par un résultat identique.

[3] La demanderesse a interjeté appel de la décision à la division générale du Tribunal. Cependant, son avis d'appel a été déposé en retard. Estimant que la demanderesse n'avait pas de cause défendable, la division générale a refusé de proroger le délai pour permettre le dépôt de l'avis d'appel. Cet élément l'a emporté sur tous les autres, à la faveur de la demanderesse.

‏[4] La demanderesse a demandé à la division d'appel la permission d’interjeter appel de la décision. Dans une décision rendue le 24 juin 2015, un membre de la division d'appel a accordé la permission d'en appeler en se fondant sur le fait que la division générale pouvait avoir commis une erreur en ne tenant pas compte des dispositions législatives du RPC portant sur l'invalidité lorsqu'elle a statué sur l'appel de la demanderesse.

[5] Le défendeur a présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision de la division d'appel qui accordait la permission. Le 1er février 206, le juge Mosley de la Cour fédérale a accordé la demande.

[6] Dans sa décision, le juge Mosley a soutenu que la division d'appel avait accordé la permission d'en appeler en s'appuyant sur des fondements purement théoriques, sans aucune preuve émanant du dossier. Il n'y avait pas lieu de se pencher sur les dispositions relatives à l'incapacité. Il a renvoyé l'affaire à la division d'appel pour un nouvel examen par un membre différent.

[7] Il s'agit d'un nouvel examen de la demande de permission d'en appeler de la demanderesse à l'encontre d'une décision de la division générale rendue le 21 avril 2015.

Motifs d’appel

[8] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler au motif qu’elle a été traitée injustement. Elle n'a pas mentionné d'erreur particulière de la part de la division générale. Elle n'a pas cité de disposition législative particulière de la Loi sur le Ministère de l'Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). La division d'appel déduit des déclarations de la demanderesse et des transcriptions de ses observations que le seul moyen d'appel possible qui pourrait être plaidé réside dans le manquement à un principe de justice naturelle.

Dispositions législatives applicables

Permission d’en appeler

[9] Les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS régissent la permission d’en appeler. Selon le paragraphe 56(1) de la Loi sur le MEDS, la permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal constitue une étape préliminaire d’un appel devant la division d’appel. Selon le paragraphe 56(1) : « Il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission ».  Le paragraphe 58(3) prévoit quant à lui que la « division d’appel accorde ou refuse cette permission ».

[10] Pour obtenir la permission d’en appeler aux termes du paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS le demandeur doit convaincre la division d’appel que son appel aurait une chance raisonnable de succès, sans quoi la division d’appel devra refuser la demande de permission d’en appeler. Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[11] Un demandeur convainc la division d’appel que son appel aurait une chance raisonnable de succès en soulevant une cause défendable dans sa demande de permission.  Dans l'affaire Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41 et dans Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 FCA 63, une cause défendable a été associée à une chance raisonnable de succès.

[12] En vertu de la Loi sur le MEDS, la division d'appel a le pouvoir de statuer sur des appels en se fondant sur les trois moyens d'appel suivants :

  1. la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Dans l’affaire Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300, le membre a conclu que lors de l’évaluation d’une demande de permission d’en appeler, la division d’appel doit d’abord déterminer si les motifs d’appel du demandeur correspondent à l’un des moyens d’appel énoncés.

[5] Le paragraphe 52(2) de la Loi sur le MEDS est également pertinent dans le contexte de la présente demande. Ce paragraphe aborde la question de la prorogation de délai. Il est libellé comme suit :

52(2) Délai supplémentaire – La division générale peut proroger d’au plus un an le délai pour interjeter appel.

Question en litige

[6] La division d’appel doit déterminer si l’appel aurait une chance raisonnable de succès.

Observations

[7] L'essentiel des observations de la demanderesse repose sur le fait qu'elle aurait présenté une demande de pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada avant avril 2011 si elle avait été informée d'une telle possibilité. Elle a attribué son manque d'information aux employés du gouvernement du Canada qui auraient dû lui signaler la possibilité qui s'ouvrait à elle d'obtenir des prestations d'invalidité (AD1-1). Elle a décrit sa situation à l'époque en y rapportant les effets secondaires des traitements contre le cancer du sein et contre la dépression.

[8] L’intimé n’a pas présenté d'observations concernant la demande de permission d’en appeler.

Analyse

La division générale a-t-elle commis une erreur en refusant de proroger le délai pour introduire l'appel ?

[9] La décision découlant de la révision, à l'encontre de laquelle la demanderesse interjette appel, est datée du 2 mai 2014. Le 7 juillet 2014, le Tribunal a reçu l'avis d'appel de la demanderesse, mais ce dernier était incomplet. La demanderesse avait omis d'y joindre la décision découlant de la révision. Dans une lettre datée du 11 juillet 2014, le Tribunal a avisé la demanderesse de son oubli et lui a demandé de lui envoyer « sans délai » la lettre portant sur la révision. Au même moment, le Tribunal a mentionné à la demanderesse que s'il ne recevait pas le complément de l'avis d'appel dans les 90 jours prescrits, la demanderesse aurait à présenter une demande de prorogation du délai pour déposer l'avis d'appel. Le Tribunal a réitéré sa demande dans une lettre du 11 août 2014, date à laquelle le délai de 90 jours était manifestement expiré. Le Tribunal a reçu la décision découlant de la révision le 15 août 2014. Cependant, la demanderesse n'a pas, à ce moment, présenté de demande de prorogation du délai pour déposer l'avis d’appel. Cette demande a été présentée le 28 novembre 2014.

[10] Au moment d'examiner la question de savoir s’il convenait de proroger le délai applicable au dépôt de l’avis d’appel, la division générale a tenu compte des quatre facteurs énoncés dans la décision Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Gattellaro 2005 CF 883.  Elle a aussi pris en considération les exigences énoncées dans l'arrêt Canada (Procureur général) c. Larkman, touchant l'intérêt de la justice.

[11] La division générale a étudié les explications de la demanderesse dans le contexte des affaires Gattellaro et Larkman. On pourrait soutenir que la demanderesse a toujours eu l'intention persistante de poursuivre l’appel, qu'elle a une explication raisonnable pour justifier son retard et que ce retard n'a pas semblé occasionner de préjudice au défendeur.  Cependant, la division générale est d'avis que la demanderesse n'avait pas de cause défendable puisqu'au moment de présenter sa demande de prestations d'invalidité elle avait déjà 68 ans. L'alinéa 44(1)b) du RPC est clair à ce sujet : pour recevoir des prestations d'invalidité, un demandeur doit être âgé de moins de 65 ans. Selon la division générale, puisque les termes de l'alinéa 44(1)b) ne permettent pas d'écart, l'appel de la demanderesse était voué à l'échec. Ce facteur était donc largement défavorable à la prolongation du délai pour déposer l'avis d'appel. La division générale a refusé de proroger le délai, mettant ainsi un terme au processus d'appel.

[12] Reste à savoir si la division générale a commis une erreur en refusant de proroger le délai. Pour les raisons qui suivent, la division d'appel est d'avis que la division générale n'a pas commis d'erreur.

[13] Aucune des parties ne conteste le fait que l'avis d'appel ait été complété bien après l'expiration du délai de 90 jours. Un appel n'est pas complet tant que le Tribunal n'a pas reçu tous les renseignements requis par l'article 24 du Règlement sur la sécurité sociale, DORS/2013-60.

[14] À chaque étape du processus, le Tribunal a informé la demanderesse des manquements à son avis d'appel et lui a indiqué comment compléter le processus d'appel. La demanderesse allègue comme principal argument qu'aucun employé du gouvernement du Canada ne l'a informée qu'elle pouvait présenter une demande de pension d'invalidité. Selon la division d'appel, il était raisonnable de conclure que la demanderesse connaissait le programme d'invalidité du Régime de pensions du Canada puisqu'elle avait reçu des prestations d'invalidité en 1992 et en 1996 (GD7-8). La division d'appel estime que le fait qu'un employé du gouvernement du Canada n'ait pas informé la demanderesse de son admissibilité à une pension d'invalidité du RPC ne peut signifier que la division générale n'a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence. Les observations de la demanderesse ne sont donc pas des fondements sur lesquels la division d'appel peut s'appuyer pour accorder la permission d'en appeler.

[15] Pour ce qui est des possibles erreurs de droit, la division d'appel est d'avis que la division générale a énoncé les dispositions législatives appropriées relativement à la prorogation de délai et les a appliquées correctement aux faits en l'espèce. Aux termes de l'affaire Lavin c. Canada (Procureur général) 2011 CF 1387, les quatre critères énoncés dans l'affaire Gattellaro n'ont pas à être présents en même temps, à favoriser nécessairement le demandeur ou à se voir accorder la même importance entre eux. Dans le cas de la demanderesse, la division générale a conclu que le seul facteur qui jouait contre la demanderesse était l'absence de cause défendable. Cette conclusion était essentielle à toute décision possible, si bien que la division générale ne peut avoir commis une erreur en refusant de proroger le délai pour déposer l'avis d'appel.

[16] En outre, la division d’appel a conclu que la division générale n’avait pas mal compris et n’avait pas négligé de tenir compte des faits dans cette affaire. En expliquant les raisons du retard, la demanderesse a déclaré qu'elle souffrait à l’époque des effets d'un cancer du sein et d'une dépression. La division générale a estimé que ces éléments concernaient sa situation en 1989 (paragraphe 15), mais a reconnu que la demanderesse avait tenté de compléter l'avis d'appel. La division d’appel est convaincue que la division générale n’a pas commis d’erreur à cet égard.

Conclusion

[17] En regard de ce qui précède, la division d’appel conclut que la demanderesse n’a pas soulevé de moyens d’appel qui auraient une chance raisonnable de succès.

[18] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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