Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

[1] La division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») rejette la demande de permission d’en appeler.

Introduction

[2] La demanderesse interjette appel de la décision de la division générale rendue le 28 octobre 2015 selon laquelle elle n'est pas admissible aux prestations d'invalidité aux termes de l'alinéa 42(2)a) du Régime de pensions du Canada (RPC), (la demande).

Motifs de la demande

[3] Le représentant de la demanderesse a fait valoir que la division générale avait fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. La demanderesse a affirmé :

[traduction]
« Je suis, dans les faits, invalide aux termes de la définition prévue à la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social et je suis atteinte d'une invalidité grave et prolongée dont la durée est illimitée et qui m'empêche d'occuper n'importe quel type d'emploi, qu'il soit à temps plein, à temps partiel ou saisonnier. »

Question en litige

[4] La division d’appel doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Dispositions législatives applicables

[5] Les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) régissent l’obtention de la demande de permission d'appeler. Selon le paragraphe 56(1) de la Loi sur le MEDS, la permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal constitue une étape préliminaire d’un appel devant la division d’appel. Selon le paragraphe 56(1) : « Il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission ». Le paragraphe 58(3) prévoit que la « division d’appel accorde ou refuse cette permission ».

[6] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS énonce les trois seuls moyens d’appel sur lesquels peut se fonder un appel :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Analyse

[7] Pour obtenir la permission d’en appeler aux termes du paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS le demandeur doit convaincre la division d’appel que son appel aurait une chance raisonnable de succès, sans quoi la division d’appel devra refuser la demande de permission d’en appeler. Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[8] Un demandeur doit convaincre la division d’appel que son appel aurait une chance raisonnable de succès en soulevant une cause défendable dans sa demande de permissionNote de bas de page 1. Aux termes des arrêts Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41 et Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63, une chance raisonnable de succès signifie qu’une cause est défendable.

[9] Dans l’affaire Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300, le membre a conclu que lors de l’évaluation d’une demande de permission d’en appeler, la division d’appel doit d’abord déterminer si les motifs d’appel du demandeur correspondent à l’un des moyens d’appel énoncés.

La décision de la division générale se fonde sur une conclusion de fait erronée

[10] Le représentant de la demanderesse soutient que la conclusion de fait erronée résulte du fait que la division générale n'a pas tenu compte du témoignage de la demanderesse au sujet de l'étendue de sa dépression et ses effets sur l'aptitude au travail de la demanderesse ni du contexte de son congédiement, et du poids négligeable qu'elle a accordé au rapport médical du 13 décembre 2012 du Dr Warsi (AD1-7).

[11] On agit de manière abusive ou arbitraire en rendant une décision lorsque les éléments de preuve sont insuffisants pour étayer ses conclusions; tenir compte de facteurs non pertinents ou ne pas tenir compte de facteurs pertinents ou accorder suffisamment d'importance à des facteurs pertinents. D.R. c. Canada (Ministre de l'Emploi et du Développement social) DA-15-53; Robert Gravel c. Telus Communications Inc., 2011 CAF 1. La division d'appel n'est pas convaincue que la décision de la division générale remplit ces critères.

[12] Le représentant de la demanderesse a déclaré que cette dernière souffrait d'un trouble de dépression majeure au moins depuis décembre 2011. Il en est d'ailleurs question dans la réponse du 3 septembre 2013 du Dr Yakoub au représentant de la demanderesse (GD4-21). La division générale n'a pas contesté le diagnostic du Dr Warsi selon lequel la demanderesse souffre d'un trouble de dépression majeure. En fait, le Dr Warsi soulève, dans son rapport du 19 juin 2012, que les symptômes de la demanderesse se manifestent de façon continue depuis qu'elle a émigré de Bosnie. Cependant, la division générale a remarqué que le diagnostic avait été posé un an après la fin de la période minimale d'admissibilité (PMA) de la demanderesse et qu'avant juin 2012, les antécédents psychiatriques de la demanderesse se faisaient rares.

[13] La division générale a procédé à une analyse exhaustive des rapports médicaux qui abordaient la dépression de la demanderesse et a conclu qu'avant la fin de sa PMA ou à la fin de celle-ci, aucune preuve médicale de dépression n'était assez importante pour empêcher la demanderesse d'occuper un emploi convenable (Paragraphe 54).

[14] La division générale souligne que la demanderesse a d'abord été référée au Dr Warsi qu'elle a vu en juin 2012, plus de cinq mois après la fin de sa PMA. La division générale a expliqué pourquoi elle avait accordé aussi peu d'importance au rapport médical du 13 décembre 2012 du Dr Warsi. Elle donne des détails aux paragraphes 58 et 59 de sa décision, soulignant que la déclaration du Dr Warsi, selon laquelle la demanderesse ne pouvait retourner au travail dans un avenir rapproché, est loin de coïncider avec les espoirs de la demanderesse de retourner au travail à long terme. La division générale a soulevé une incohérence entre le rapport médical (notes cliniques) du 13 décembre 2012 et les notes cliniques précédentes du Dr Warsi dans lesquelles il avait indiqué que la demanderesse, d'humeur beaucoup plus stable, se sentait mieux et se portait mieux (GD4-2 à GD4-8). Le Dr Warsi a remarqué un changement dans l'humeur de la demanderesse après qu'on lui eut refusé les prestations du RPC. En réponse à ce changement, il a alors ajouté 0,5 mg de Lorazepam aux médicaments de la demanderesse (GD4-9 à GD4-10). Le Dr Warsi n'a enregistré aucun autre changement jusqu'au 13 décembre 2012, alors qu'il notait que la demanderesse se sentait toujours dépressive (GD4-14).

[15] Dans le contexte où la demanderesse a été en mesure de travailler pendant la plupart de ses 20 années au Canada jusqu'au moment où elle a reçu un diagnostic de trouble de dépression majeure, a reçu un traitement et s'est sentie beaucoup mieux, la division d'appel est convaincue que la division générale n'a pas tenu compte, dans sa décision, de facteurs non pertinents.

[16] La division d'appel est aussi convaincue que la division générale n'a pas omis de prendre en compte des facteurs importants ou de leur accorder suffisamment d'importance. En fait, pour parvenir à sa décision, la division générale a tenu compte de l'état de santé général de la demanderesse, pas seulement de sa dépression. La division d'appel estime que pour rendre sa décision la division générale aurait pu s'appuyer sur le fondement probatoire selon lequel à la fin de sa PMA, le 31 décembre 2012, ou avant cette date, la demanderesse ne souffrait d'aucun problème médical ou mental grave et prolongé qui l'aurait l'empêchée de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice.

[17] Le représentant de la demanderesse a exprimé le mécontentement de la demanderesse à l'égard de la façon dont la division générale a interprété les éléments de preuve qu'elle a présentés de même que le rapport médical du 13 décembre 2012 du Dr Warsi. Le représentant a souligné le souhait de la demanderesse d'obtenir une nouvelle audience devant la division générale. Cependant, selon Tracey c. Canada (Attorney General), 2015 CF 1300, le rôle de la division d'appel ne consiste pas à soupeser la preuve relative à une demande de permission, pas plus qu’à procéder à une audience de novo de façon à ce que la demanderesse bénéficie d'une seconde chance de présenter une telle preuve. De telles observations ne constituent pas des moyens sur lesquels on peut s'appuyer pour accorder une permission d'appeler.

Conclusion

[18] Compte tenu des motifs susmentionnés, la demande est refusée.

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