Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparutions

Appelant : S. T.

Interprète (tamil) : Placid Vimalarajan

Introduction

[1] L’appelant avait 49 ans à sa PMA. Il a terminé sa 10e année d’études, sa langue maternelle est le tamil, et il ne sait pas écrire en anglais. Il travaillait comme nettoyeur du 1er janvier 2009 au 21 juillet 2009, le moment où il a cessé de travailler en raison de son accident de voiture.

[2] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité présentée par l’appelant en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) le 30 avril 2013. L’intimé a rejeté cette demande initialement et après révision. L’appelant a interjeté appel de la décision relative au réexamen auprès du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal).

[3] L’audience dans le cadre de cet appel a été tenue par vidéoconférence pour les motifs suivants :

  1. l’appelant sera la seule partie à participer à l’audience;
  2. ce mode d’audience permet de prendre les mesures d’adaptation requises par les parties ou les participants;
  3. un service de vidéoconférence est situé à une distance raisonnable de la résidence de l’appelant;
  4. il manque de l’information au dossier ou il est nécessaire d’obtenir des clarifications;
  5. ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle le permettent.

Droit applicable

[4] L’alinéa 44(1)b) du RPC énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) doit avoir moins de 65 ans;
  2. b) ne doit pas toucher de pension de retraite du RPC;
  3. c) doit être invalide;
  4. d) doit avoir versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[5] Le calcul de la PMA est important puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date marquant la fin de sa PMA ou avant cette date.

[6] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du RPC, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité n’est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[7] Le litige ne concerne pas la PMA, car les parties conviennent que cette période prend fin le 31 décembre 2009, ce qu’a également conclu le Tribunal.

[8] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer s’il est plus probable qu’improbable que l’appelant ait été atteint d’une invalidité grave et prolongée à la date marquant la fin de sa PMA ou avant cette date.

Preuve

Documents relatifs à la demande

[9] Dans le questionnaire relatif aux prestations d'invalidité qui accompagnait sa demande, l’appelant a indiqué qu’en raison de son accident, il est incapable d’accomplir des tâches physiques. Sa cheville fracturée limite sa capacité à travailler adéquatement. Il indique que sa cheville fracturée l’empêche de travailler en raison de la douleur constante et de la difficulté qu’il éprouve à faire des manipulations. Il fait du diabète de type 2. Il indique que les blessures causées par son accident l’empêchent de s’adonner à ses passe-temps comme le jardinage, le vélo, le cricket et les longues marches. Ses blessures ont également limité ses activités sociales.

[10] Dans la partie sur les difficultés et les limitations fonctionnelles, l’appelant a indiqué qu’il ne pouvait pas rester debout durant de longues périodes et qu’il ne pouvait marcher que durant quelques minutes. Il n’est pas en mesure de transporter ou de soulever des charges lourdes en raison de problèmes d’équilibre. Sa portée est normale et il peut se plier seulement un peu. Il peut répondre à ses besoins personnels et n’éprouve aucune difficulté à parler, à se souvenir, à se concentrer et à respirer. Il a des problèmes de selles. Il peut aider sa femme à faire l’entretien ménager, mais avec certaines difficultés. Il a des troubles de la vue en raison du diabète. Son sommeil est parfois normal, mais d’autres fois il a de la difficulté à s’endormir et à demeurer endormi. Il est en mesure de conduire sa voiture dans la ville, sans trop s’éloigner. Il n’utilise pas les transports en commun en raison de sa blessure à la jambe. À ce moment, il prenait 109 unités de NovoRapid trois fois par jour, 100 unités de Lantus par jour, 10 mg de Crestor par jour, 500/125 mg d’Amoxicillin deux fois par jour, un demi-comprimé de 25 mg de Metoprolol deux fois par jour ainsi que 16/12,5 mg de Candesartan deux fois par jour. Une chirurgie était prévue le 15 novembre pour sa cheville et son talon gauches. Il utilisait un appareil orthopédique pour sa jambe gauche.

Déposition orale

[11] L’appelant a déclaré qu’il avait terminé sa 10e année d’études au Sri Lanka. Il a immigré au Canada en 1987, et il n’a pas poursuivi ses études ou suivi de cours d’ALS. Sa langue maternelle est le tamil. Il parle un peu anglais et comprends l’anglais simple, mais il ne sait pas écrire en anglais. Il n’a pas d’autres compétences dans d’autres langues.

[12] Il travaillait pour High Light Auto Collision en 1987. Deux ans plus tard, il a travaillé pour Lisbon. Après deux ou trois ans, il est allé chez A & K où il faisait le même travail. Il a ensuite travaillé pour Rexdale Auto Collision pendant deux ou trois ans. Il a lancé sa propre entreprise en 2002 et offrait des services de peinture de voitures et de mécanique. Il embauchait deux employés. Il faisait des tâches administratives, peinturait des voitures et faisait le débosselage. Il a fermé son entreprise en 2009. En 2009, il travaillait pour une compagnie de nettoyage et gérait son entreprise en parallèle.

[13] En 2009, il a eu un accident de voiture, a fracturé sa cheville gauche et a arrêté de travailler. Il ne peut maintenant plus marcher normalement. Il a subi une fracture en « T » qui n’a pas complètement guéri et qui influence sa capacité à marcher. L’articulation de la cheville est très importante pour le type de travail qu’il accomplissait étant donné qu’il devait s’agenouiller, se tenir debout et soulever des charges lourdes. Après avoir subi sa fracture, il avait des problèmes d’équilibre, ce qui rendait son travail difficile. Sa cheville a continué de nuire à sa capacité à travailler parce qu’il ne peut rester debout durant de longues périodes, transporter des charges ou marcher de longues distances. Il a aussi perdu l’équilibre et chuté. Après avoir subi sa blessure à la cheville, il a porté un plâtre pendant quelque temps, mais sa blessure n’a pas guéri complètement. Il n’a suivi aucun autre traitement. Il prenait Tylenol si nécessaire. Avant de cesser de travailler complètement, il s’absentait du travail et prenait congé lorsque nécessaire. Il a subi des chirurgies aux reins et a dû prendre congé pour se faire enlever des calculs rénaux en l’an 2000 à l’hôpital St Michael. Il travaillait à ce moment pour Rexdale Auto Collision.

[14] L’appelant a déclaré qu’à partir de 2002, il a eu des calculs rénaux et la pneumonie et a dû être hospitalisé. Il ne pouvait accomplir aucun travail et ne travaillait donc pas à ce moment. De 2002 à 2011, il exploitait son propre commerce. En 2009, il a eu un accident et ne pouvait plus s’occuper de son entreprise, qui a enregistré des pertes jusqu’à ce qu’elle ferme en 2011. Peu après l’accident, il ne pouvait pas aller travailler en raison de la douleur. Il a ensuite commencé à aller au travail, mais sans travailler. Il assurait la supervision et devait avoir recours à une béquille. L’accident a eu lieu en 2009, mais il gérait cette entreprise depuis 2002. Après l’accident en 2009, l’entreprise a commencé à générer des pertes, et il l’a fermée en 2011.

[15] L’appelant a des problèmes de diabète, de cholestérol et d’hypertension artérielle qui se sont manifestés il y a environ 12 à 15 ans. Ce sont ses problèmes de diabète qui ont entraîné son insuffisance rénale. Il consulte des spécialistes concernant ses problèmes de reins depuis environ trois ans. L’an dernier, ses reins fonctionnaient à environ 19 pour cent de leur capacité, puis ils ont complètement arrêté de fonctionner. Depuis les cinq derniers mois, il doit subir des dialyses trois fois par semaine. Les effets secondaires de la dialyse ne sont pas favorables au travail.

[16] L’appelant a affirmé être épuisé après les dialyses et donc ne pas être en mesure d’interagir avec des gens. Il a des problèmes de respiration et de sommeil et doit porter un masque. Il est incapable de marcher de longues distances en raison de la douleur à sa cheville.

[17] Avant décembre 2009, les problèmes de diabète, de cholestérol et d’hypertension artérielle de l’appelant ne lui imposaient aucune contrainte. Il prenait de l’insuline à ce moment. Il est en mesure de faire lui-même son hygiène personnelle. Il habite dans une maison, et à part les travaux difficiles, il peut accomplir d’autres tâches à la maison. Il ne peut déneiger, mais il peut arroser le jardin. En 2009, il dormait environ six heures par nuit, mais il arrivait à dormir sans médicaments.

[18] Depuis qu’il a fermé son entreprise en 2011, il n’a pas tenté de travailler à nouveau. Après 2011, il a aussi commencé à avoir des problèmes aux yeux (il y a environ trois ou quatre ans, environ au moment où il a présenté sa demande de RPC). En raison de la gravité de son diabète, il a été complètement aveugle pendant environ trois mois. Il a subi un traitement au laser et reçu des injections aux yeux, et il a lentement retrouvé la vue. Il était incapable de marcher pendant trois mois. Il a essayé de commencer à conduire, mais il était incapable en raison de sa vue. Il continue de prendre des médicaments et de recevoir des traitements pour ses yeux. Tous les quatre mois, il doit recevoir des injections pour ses yeux qui coûtent 15 000 $.

[19] Avant 2009, l’appelant tentait sans succès de maîtriser son diabète grâce à une diète et des comprimés de métformine. Lors d’une visite, son docteur lui a dit que sa situation se dégradait, et on l’a dirigé vers divers spécialistes en reins vers l’an 2009, selon l’appelant. Le docteur lui a conseillé de demander des prestations, et c’est alors que l’appelant a présenté une demande de RPC. L’appelant s’est rendu au centre communautaire, où il a reçu de l’aide pour présenter une demande de RPC et on lui a conseillé de demander des prestations de sécurité sociale.

Preuve médicale

[20] Le rapport médical daté du 13 avril 2012 rempli par le docteur Chanmugam Mahendira, le médecin de famille de l’appelant, accompagnait la demande. Le docteur y avait indiqué qu’il traitait l’appelant pour ses principaux troubles médicaux depuis juillet 2005. Les diagnostics sont le diabète insulinodépendant, des douleurs bilatérales à la cheville et au dos ainsi qu’une insuffisance rénale précoce avec protéinurie. Les antécédents indiquaient que l’appelant avait fracturé sa cheville gauche en 2003, puis qu’il avait subi une blessure à la cheville gauche lors d’un accident de voiture en 2009, ce qui avait intensifié la douleur et l’enflure à la cheville, et que l’appelant faisait du diabète. Les conclusions pertinentes étaient celles sur l’enflure et la douleur aux jambes, l’orthopnée et la difficulté à marcher. Il a été examiné par un urologue, un interniste, un endocrinologue et un cardiologue. Il prenait de l’insuline, Atacand 10/125 et 10 mg de Crestor une fois par jour. Le pronostic indiquait : « autres améliorations peu probables ». Dans la partie des renseignements additionnels, docteur Mahendira avait indiqué que l’appelant était inapte à tout travail physique et qu’il avait même de la difficulté à pratiquer ses activités quotidiennes.

[21] Le 1er avril 2013, un deuxième rapport médical a été envoyé par le docteur Mahendira indiquant que les troubles diagnostiqués étaient le diabète de type 2, l’hypertension artérielle, l’insuffisance cardiaque congestive, une fracture de la cheville gauche avec douleur chronique, l’obésité, un ancien accident vasculaire cérébral lacunaire, un ulcère gastroduodénal, des calculs microscopiques dans les reins, la constipation chronique et l’hypertrophie bénigne de la prostate. Les antécédents indiquaient plusieurs problèmes : œdème pédieux bilatéral, essoufflements, déficience principalement associée à une douleur chronique à la cheville. Les conclusions pertinentes étaient celles sur la dyspnée et l’allodynie, l’œdème pédieux bilatéral et la difficulté à marcher. Il faisait l’objet d’un suivi par un endocrinologue, un néphrologue, un cardiologue et un urologue. Il prenait Candesartan 16/125, 81 mg d’ECASA, 10 mg de Crestor, de l’insuline et 30 ml de lactulose. Le pronostic était incertain ou réservé. Dans les renseignements additionnels, il a indiqué « Inapte à tout travail physique. Éprouve de la difficulté à pratiquer ses activités quotidiennes ».

[22] Docteur Xi Shan, néphrologue, a écrit au docteur Mahendira le 27 octobre 2015 pour lui dire qu’il avait évalué l’appelant concernant l’insuffisance rénale chronique avec une gamme néphrotique de protéinurie secondaire pour diffuser et glomérulosclérose nodulaire diabétique (prouvé par biopsie). À ce moment, l’appelant prenait 40 mg de furosémide deux fois par jour, 12,5 mg de métoprolol deux fois par jour, 5 mg d’amlodipine deux fois par jour, 81 mg d’ECASA une fois par jour, 5 mg de Crestor une fois par jour, 10 unités de NovoRapid trois fois par jour, 20 unités de Lantus à l’heure du coucher et 100 mg d’Allopurinol une fois par jour. L’appelant a eu un angiogramme le 15 octobre 2015, et sa créatinine avait augmenté de manière très importante à 440. Docteur Shan avait l’intention de vérifier le niveau de créatinine toutes les deux semaines, de diriger l’appelant vers la Kidney Care Clinic pour le préparer à un éventuel traitement de suppléance rénale, de demander des tests et de le rencontrer à la Kidney Care Clinic en décembre 2015.

[23] L’appelant avait un rendez-vous à une séance d’information organisée par son néphrologue le 8 janvier 2016 concernant les options associées à la maladie chronique avancée du rein.

[24] Le 23 janvier 2016, l’appelant a été admis à l’hôpital, et il a reçu son congé le 30 janvier 2016. Docteur Pieter Josef Jugovic a fourni un diagnostic d’insuffisance rénale aiguë à chronique à l’arrivée et au départ de l’appelant. Les antécédents médicaux de l’appelant étaient l’hypertension, le diabète de type 2 et une insuffisance rénale avancée de stade 5 consécutive à une néphropathie diabétique. Ses symptômes étaient un œdème bilatéral croissant de la jambe, une dyspnée d'effort et une orthopnée au cours des jours précédant son admission. Son médecin de famille l’a dirigé vers le service d'urgence, et à son admission, il avait un taux sérique de créatinine élevé de 686. À son admission, l’appelant présentait des symptômes qui correspondaient à une surcharge de volume consécutive à insuffisance rénale aiguë à chronique. Il a subi une diurèse importante pour améliorer le statut de ses fluides, et il se sentait mieux au moment où il a reçu son congé. Il a rencontré le docteur Shan de la néphrologie, qui l’a aidé par rapport à la diurèse. Ses doses de médicaments ont été ajustées et il a cessé de prendre les médicaments qu’il prenait avant son admission. Cela a élevé sa pression artérielle. Des rendez-vous de suivi ont été prévus afin de déterminer si l’appelant devait commencer des dialyses péritonéales. Ses médicaments au moment où il a reçu son congé de l’hôpital étaient : 81 mg d’Aspirin kératinisé par jour, 100 mg d’allopurinol par jour, 5 mg de Norvasc par voie orale deux fois par jour, 500 mg de carbonate de calcium par voie orale trois fois par jour, 100 mg de Colace par voie orale deux fois par jour, 300 mg de fumarate ferreux par voie orale à l’heure du coucher, 80 mg de Lasix deux fois par jour, 2,5 métolazone par voie orale deux fois par jour avant de prendre les doses de Lasix, 50 mg de métoprolol en après-midi à chaque douze heures, deux comprimés de Senokot 2 par voie orale au coucher, 1 g de carbonate de sodium par voie orale deux fois par jour, 5 mg de Crestor par voie orale au coucher, 17 g de Polyethylene Glycol 3350 par voie orale une fois par jour, et 10 unités d’insuline Lantus par voie sous-cutanée au coucher.

[25] Au moment où il a reçu son congé le 30 janvier 2016, le niveau de créatinine de l’appelant avait baissé à 766, par rapport à un niveau de 833. Docteur Shan croyait nécessaire de trouver un équilibre entre l'œdème périphérique de l’appelant et son besoin d’une réserve rénale fonctionnelle s’il commençait les dialyses péritonéales, et il a planifié des rendez-vous de suivis avec l’appelant pour procéder à la prochaine étape.

Observations

[26] L'appelant soutient qu'il est admissible à une pension d'invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Il est invalide en raison de diabète de type 2, d’hypertension, d’insuffisance cardiaque congestive, de douleur chronique à la cheville et au dos, douleur chronique bilatérale d’œdème pédieux, d’obésité, d’un ulcère gastroduodénal, de maladie chronique avancée du rein et d’une insuffisance rénale aiguë à chronique qui nécessite des dialyses trois fois par semaine.
  2. L’appelant a déclaré qu’il devrait recevoir des prestations du TSS parce qu’il n’avait pas d’autre source de revenus et qu’il devait générer un revenu.
  3. Il avait travaillé pour diverses entreprises entre 1987 et 2000. Il avait toujours travaillé et payé des impôts depuis son arrivée au Canada. Il ne pouvait plus travailler en 2002 en raison d’une pneumonie et de calculs rénaux qui ont nécessité une chirurgie.
  4. De 2002 à 2011, il exploitait sa propre entreprise et générait un revenu. Il a été malade pendant cette période, mais il n’a pas documenté ces absences parce qu’il s’agissait de sa propre entreprise. En 2009, il a eu l’accident et a fracturé sa cheville, et il a éventuellement dû fermer son entreprise.

[27] L’intimé considère que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. La demande d’invalidité de l’appelant est fondée sur le fait qu’il a fracturé sa cheville et arrêté de travailler en juillet 2009 en raison de son accident de voiture, ainsi que sur de nombreux antécédents de diabète de type 2. Cependant, les preuves médicales n’indiquent pas de pathologie ou d’invalidité sérieuse qui l’aurait empêché d’accomplir un emploi convenable à la fin de la PMA ou avant cette date et de manière continue par la suite.
  2. Bien qu’il ait eu des complications par rapport à son diabète, incluant une rétinopathie et une néphropathie, rien n’indique que ces troubles médicaux étaient graves et l’aurait empêché d’accomplir tout type de travail à sa PMA du 31 décembre 2009.

Analyse

[28] L’appelant doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2009 ou avant cette date.

Caractère grave

[29] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du RPC, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité n’est « grave » que si la personne concernée est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une personne atteinte d’une invalidité grave doit non seulement être incapable d’occuper son emploi habituel, mais elle doit aussi être incapable de faire tout travail auquel il serait raisonnable de s’attendre qu’elle puisse s’adonner. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Principes directeurs

[30] Les principes énoncés dans les décisions suivantes ont guidé le Tribunal et l’ont aidé à trancher les questions soulevées dans le présent appel.

[31] La gravité de l’invalidité doit être évaluée dans un contexte réaliste. Cela signifie qu’au moment de déterminer la gravité de l’invalidité d’une personne, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie pour déterminer « l’employabilité » de la personne en fonction de son invalidité (Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248).

[32] Pour déterminer si une invalidité est « grave », il ne faut pas se demander si la personne souffre de graves déficiences, mais plutôt d'une invalidité qui l’empêche de gagner sa vie. La détermination de la gravité de l’invalidité d’une personne ne dépend pas de son incapacité d’occuper son emploi régulier, mais plutôt de son incapacité d’exécuter quelque travail que ce soit (Klabouch c. Canada (Développement social) 2008 CAF 33).

[33] La question principale dans ce type d’appel n’est pas de déterminer la nature ou le nom du trouble médical, mais plutôt son effet fonctionnel sur la capacité de travailler du prestataire (Ferreira c. Canada (P.G.), 2013 CAF 81).

[34] La rentabilité d’une entreprise commerciale n’est pas nécessairement un indicateur de capacité (Kiriakidis c. Canada (P.G.), 2011 CAF 316).

[35] Si l’appelant ne souffrait pas d’une invalidité grave à la fin de sa PMA, il n’est pas pertinent de déterminer si son état s’est détérioré après sa PMA (Gilroy c. Canada (P.G.), 2008 CAF 116).

Application des principes directeurs

[36] L’appelant a témoigné de manière crédible et franche en ce qui concerne ses nombreux problèmes invalidants et la manière dont ceux-ci ont influencé sa vie et sa capacité de travailler. Aucune preuve médicale ne suggère qu’il feint d'être malade ou qu’il exagère par rapport à ses symptômes. Au contraire, les preuves médicales appuient ses attestations.

[37] En évaluant le critère d’invalidité dans un contexte réaliste conformément aux principes établis dans l’arrêt Villani, le Tribunal tient compte du fait que, au moment où sa PMA a pris fin en décembre 2009, l’appelant avait 49 ans. Il a terminé sa 10e année d’études au Sri Lanka et ses compétences en anglais sont faibles. Depuis qu’il a immigré au Canada en 1987, il a accompli du travail physique dans les secteurs de la réparation d’automobiles et du nettoyage.

[38] L’intimé affirme que, bien que l’appelant fonde sa demande d’invalidité sur sa cheville fracturée et ses nombreux antécédents de diabète de type 2, la preuve médicale n’indique pas de pathologie ou d’invalidité sérieuse qui l’aurait empêché d’accomplir un emploi convenable à la fin de la PMA ou avant cette date et de manière continue par la suite. La question principale pour le Tribunal dans ce type d’appel n’est pas de déterminer la nature ou le nom du trouble médical, mais plutôt son effet fonctionnel sur la capacité de travailler du prestataire (Ferreira). L’appelant déclare qu’il n’a pas été en mesure de travailler depuis juillet 2009 en raison d’une cheville fracturée qui lui cause une douleur constante et nuit à sa capacité à marcher. De plus, il a des antécédents de diabète insulinodépendant, d’hypertension, d’insuffisance cardiaque congestive et d’insuffisance rénale précoce avec protéinurie. Dans le rapport médical qui accompagnait la demande, le docteur Mahendira a indiqué que l’appelant avait fracturé sa cheville gauche en 2003. Il a fracturé cette même cheville à nouveau en 2009 dans un accident de voiture, ce qui a entraîné l’intensification de sa douleur à la cheville. Comme le docteur l’a indiqué dans son rapport, c’est principalement une douleur chronique à la cheville qui nuisait à l’appelant. Cela confirme l’attestation de l’appelant selon laquelle il avait dû quitter son travail de nettoyeur, bien qu’il ait tenté de continuer son travail de réparation d’automobiles, sa capacité à s’agenouiller, à se tenir debout, à soulever des charges lourdes, à rester en équilibre et à marcher après avoir subi sa fracture en « T » en juillet 2009. Il indique que cette fracture n’est pas guérie, qu’elle nuit à sa capacité à marcher, et qu’elle entraîne une douleur importante. Il a déclaré qu’en raison de sa cheville, il perdait l’équilibre et tombait, ce qui nuisait aussi à sa capacité à travailler.

[39] L’appelant a déclaré qu’il n’avait pas officiellement fermé son entreprise jusqu’en 2011. Toutefois, cela ne change rien au fait qu’il n’était pas en mesure d’occuper un emploi véritablement rémunérateur après juillet 2009. Bien que la rentabilité d’une entreprise ne représente pas nécessairement un indicateur de capacité (Kiriakidis), la faillite d'une entreprise sous l’autorité de l’appelant pourrait être un indicateur d’une absence de capacité. Dans le cas présent, son registre des cotisations qui indique que sa dernière rémunération date de 2009 prête foi à son témoignage selon lequel il n’a pas été en mesure de continuer à travailler après juillet 2009. Le Tribunal conclut que la blessure à la cheville de l’appelant était grave à sa PMA en décembre 2009 et qu’elle l’empêchait régulièrement de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

[40] L’intimé affirme que, bien que l’appelant ait eu des complications liées au diabète, incluant une rétinopathie et une néphropathie, rien n’indique que ces troubles médicaux étaient graves et l’auraient empêché d’accomplir tout type de travail à sa PMA. Le Tribunal accepte cette observation. L’appelant a déclaré qu’à partir de janvier 2016, il était hospitalisé et avait reçu un diagnostic de maladie du rein avancée de stade 5 consécutive à une néphropathie diabétique. Cependant, les rapports médicaux n’indiquent pas que les problèmes de diabète et de reins de l’appelant étaient graves au moment de sa PMA. Comme il est indiqué dans Gilroy, il n’est donc pas pertinent de déterminer si ses problèmes de diabète et de reins s’étaient détériorés après sa PMA.

[41] Ayant pris en considération l’ensemble de la preuve à sa disposition, le Tribunal est convaincu que, selon la prépondérance des probabilités, l’appelant est atteint d’une invalidité grave qui satisfait aux critères du RPC.

Caractère prolongé

[42] Le Tribunal doit aussi déterminer si l’invalidité est prolongée au sens du RPC.

[43] Dans son témoignage oral, l’appelant a indiqué que la deuxième fracture à sa cheville avait eu lieu en juillet 2009. À ce moment, il travaillait comme nettoyeur et gérait sa propre entreprise dans le secteur automobile et n’était plus en mesure d’occuper ces emplois. Son entreprise de réparation d’automobiles a commencé à générer des pertes en 2009, et elle a dû être fermée en 2011 après qu’il ait tenté de superviser en béquilles et qu’il n’était plus en mesure de travailler lui-même. Lors de l’audience, l’appelant a déclaré que sa cheville n’avait pas bien guéri et qu’elle continuait à nuire à sa capacité à travailler et à ses activités quotidiennes étant donné qu’il ne pouvait plus se tenir debout durant de longues périodes, transporter des charges ou marcher de longues distances. Il a aussi perdu l’équilibre et il est tombé.

[44] En avril 2013, le docteur Mahendira a établi les antécédents des problèmes associés à la cheville de l’appelant et a indiqué que les contraintes de l’appelant étaient une douleur bilatérale à la cheville et au dos qui s’est d’abord manifestée lors d’une première fracture à la cheville en 2003 suivie d’une deuxième en 2009, ainsi qu’une intensification de la douleur à la cheville et une enflure. L’examen a permis de constater que les jambes de l’appelant étaient enflées et douloureuses à la pression, et que l’appelant avait de la difficulté à marcher. À ce moment, le docteur a affirmé que l’appelant n’était pas apte au travail physique et qu’il éprouvait même de la difficulté à accomplir ses activités quotidiennes.

[45] Compte tenu de l’ensemble des éléments de preuve, le Tribunal conclut que l’invalidité de l’appelant est prolongée, aux termes du RPC.

Conclusion

[46] Le Tribunal conclut que l’appelant était atteint d’une invalidité grave et prolongée en juillet 2009, au moment où il a quitté son travail en raison de l’accident de voiture qui a endommagé davantage sa cheville. Aux fins du paiement, une personne ne peut être réputée invalide plus de quinze mois avant que l’intimé n’ait reçu la demande de pension d’invalidité (alinéa 42(2)b) du RPC). La demande a été reçue en avril 2013. Par conséquent, l’appelant est réputé invalide depuis janvier 2012. Selon l’article 69 de la RPC, la pension d’invalidité est payable à compter du quatrième mois qui suit la date du début de l’invalidité réputée. Les paiements commenceront en mai 2012.

[47] L’appel est accueilli.

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