Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Aperçu

[1] Le demandeur sollicite la permission d’en appeler de la décision de la division générale datée du 3 novembre 2015. La division générale a déterminé que le demandeur n’était pas admissible à une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (Loi) puisqu’elle a conclu qu’il n’était pas atteint d’une invalidité « grave » à la date à laquelle sa période minimale d’admissibilité (PMA) a pris fin, soit le 31 décembre 2012. Le 18 février 2016, le demandeur a présenté une demande de permission d’en appeler, y alléguant que la division générale avait commis une erreur de droit et avait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Le défendeur n’a toutefois pas remis d’observations. Pour accueillir cette demande, je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[2] Est-ce que l’appel a une chance raisonnable de succès?

Observations et analyse

[3] En vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs pour en appeler se rattachent à l’un des moyens d’appel admissibles et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale du Canada a confirmé cette approche dans la décision Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300.

(a) Villani

[5] La division générale ne s’est pas spécifiquement référée à l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248.Néanmoins, la division générale a tenu compte de ses caractéristiques personnelles, comme son intelligence, ses études et sa capacité de travail. Le demandeur soutient que c’est insuffisant pour répondre aux exigences de Villani; la division générale aurait dû tenir compte de ses [traduction] « qualifications par rapport à ses conditions ». Le demandeur soutient que la division générale a commis une erreur en suggérant qu’il pourrait accomplir des travaux théoriques pour s’adapter à son invalidité, sans tenir compte d’un contexte réaliste. Le demandeur s’appuie sur l’affaire M.B. c. Ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, (14 janvier 2013), 2013 LNCPEN 3 (QL) (CAP) à cet égard.

[6] Cependant, la Cour d’appel fédérale a déclaré ce qui suit au paragraphe 49 de l’arrêt Villani :

. . . tant et aussi longtemps que le décideur applique le critère juridique adéquat pour la gravité de l’invalidité – c’est-à-dire qu’il applique le sens ordinaire de chaque mot de la définition légale de la gravité donnée au sous-alinéa 42(2)a)(i), il sera en mesure de juger d’après les faits si, en pratique, un requérant est incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice. L’évaluation de la situation du requérant est une question de jugement sur laquelle la Cour hésite à intervenir. (Souligné par mes soins)

[7] Si la division générale tient compte de la situation personnelle d’un demandeur, il n’y a généralement pas à interférer avec cette évaluation, même si, à première vue, elle ne semble pas être détaillée. En l’espèce, la division générale semble avoir effectué l’analyse requise en application de l’arrêt Villani lorsqu’elle a évalué l’intelligence, la scolarité et les antécédents professionnels du demandeur. À titre de juge des faits, la division générale était la mieux placée pour « juger d’après les faits si, en pratique, un requérant est incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice ».

[8] Et puis, la division générale a clairement tenu compte des limitations du demandeur parce qu’elle a établi qu’il était capable d’occuper au moins un poste à temps partiel, à condition qu’il n’implique pas d’efforts physiques intenses ou d’être assis longtemps. Je ne suis donc pas convaincue qu’un appel fondé sur ce moyen d’appel a une chance raisonnable de succès.

(b) Conclusion de fait erronée

[9] Le demandeur allègue que la division générale a tiré une conclusion de fait erronée sans tenir compte de la preuve présentée dans son évaluation de la capacité du demandeur à s’adonner régulièrement à une occupation véritablement rémunératrice. Il soutient que la division générale a [traduction] « adopt[é] un raisonnement comportant des lacunes » dans son évaluation et a omis de considérer des facteurs essentiels. Plus particulièrement, le demandeur soutient que la division générale a mal interprété l’avis médical du Dr K. Adelman, mentionnant que le demandeur [traduction] « n’a pas trouvé ce qu’il peut faire sans aggraver sa douleur » comme fondement pour le trouver capable d’accomplir certaines tâches. Il soutient que la division générale a aussi commis une erreur en suggérant qu’il est acceptable de ressentir de la douleur, puisque le demandeur est physiquement capable de travailler.

[10] Le fardeau de la preuve et le critère de gravité sont quelque peu déformés par le demandeur.

[11] La division générale a évalué la question sur la gravité aux paragraphes 49 et 50 [traduction] :

[49] Beaucoup de poids doit donc être accordé au rapport médical de la Dre Adelman du 12 décembre 2012 puisqu’il s’agit du seul document médical ultérieur au 11 septembre 2012 qui est aussi antérieur à la date de fin de la PMA du 31 décembre 2012 du demandeur. Le rapport de la Dre Adelman a confirmé que l’appelant était incapable de poursuivre des activités soutenues. Elle laissait croire que l’appelant était motivé à s’améliorer, mais qu’il n’a pas trouvé de travail qui n’aggraverait pas ses symptômes de douleur. Cette motivation a aussi été mentionnée par Mme de Mora et Dr Murphy dans les documents subséquents. Néanmoins, pour complètement satisfaire au critère « grave », l’appelant devra montrer que son invalidité était grave et qu’elle est demeurée grave jusqu’à la date de l’audience. Pour l’évaluation de la gravité, il est aussi important de soulever que Dre Adelman a affirmé que l’appelant n’a pas trouvé [traduction] « ce qu’il peut faire sans aggraver sa douleur ». Cette affirmation n’équivaut pas à « incapapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice ».

[50] Le sujet commun dans l’ensemble des documents et des témoignages porte sur la capacité de l’appelant à accomplir certaines tâches. Dre Adelman, Dr Murphy et Mme de Mora ont tous fait des déclarations à ce sujet. Un travail soutenu est problématique pour l’appelant. (Accentué par le soussigné)

[12] La division générale n’a clairement pas fondé sa conclusion seulement sur le rapport de la Dre Adelman. La division générale suggère la présence d’éléments de preuve provenant d’au moins trois médecins différents, incluant Dre Adelman, que le demandeur était capable d’accomplir [traduction] « au moins certaines tâches ». J’ai révisé les avis médicaux des médecins pour confirmer qu’ils pouvaient être l’appui aux conclusions de la division générale.

[13] Le rapport de la Dre Adelman du 12 décembre 2012 (GD4-35 à GD4-38) mentionne que [traduction] « tout travail soutenu, comme s’asseoir, conduire, travailler avec les bras, aggrave la douleur, et [le demandeur] ne peut pas poursuivre ces activités ». Le rapport indique également que l’ablation par radiofréquence soulage à 50 % pour environ quatre mois. Le rapport conclut qu’il a démontré vouloir s’améliorer et se recycler pour d’autres emplois, mais il « n’a pas trouvé ce qu’il peut faire sans aggraver sa douleur ».

[14] Mme de Mora, une ergothérapeute, a réalisé une évaluation à domicile. Dans son rapport du 22 janvier 2014 (GD6-16 à GD6-17). Elle a écrit, en termes de productivité que [traduction] :

[Le demandeur] a été un bon travailleur et fournit [sic] avant ce diagnostic. Il a tenté d’alléger le type de travail qu’il fait et a tenté de se recycler. Le temps qu’il peut être actif et engagé de façon productive avant de ne plus pouvoir tolérer la douleur est limité. Un jour de travail/de classe a plusieurs de [sic] répercussions.

[15] Le Dr Murphy a rédigé un rapport qui semble dater du 17 mai 2003 (GD6-12). Une grande partie du rapport est illisible. Le Dr Murphy a écrit que le demandeur souffre de limitations, surtout pour exécuter un travail qui implique de soulever, de se pencher, de se tourner, de transporter, d’être debout, d’être assis ou de se concentrer pour de longues périodes de temps. Il a aussi écrit croire que le demandeur désire travailler, mais que [traduction] « son état de douleur chronique est un élément dissuasif à cette fin ». Le Dr Murphy était aussi d’avis que le demandeur est capable de suivre des directives et de se concentrer sur des notions de base et de travailler de manière indépendante, [traduction] « sauf dans les situations où les tâches sont contraignantes; encore, la durée de la tâche devient insupportable ».

[16] Finalement, dans un rapport subséquent daté du 27 mars 2015, le Dr Murphy a écrit que le demandeur est incapable de demeurer assis pendant plus de 15 minutes à la fois, et il rapporte que le demandeur serait possiblement capable de travailler à temps partiel s’il était debout et s’il ne ressentait pas trop de douleur. Dr Murphy était d’avis que, puisque les niveaux de douleur du demandeur varient beaucoup, [traduction] « il pourrait être capable de travailler une journée par semaine ou quelques heures par jour, dépendamment de la douleur qu’il ressent [sic] à ce moment... La douleur du patient s’aggrave avec l’âge » (GD6-10 et GD8-11).

[17] Il existait un fondement probatoire sur lequel la division générale pouvait conclure que Dr Murphy, Dre Adelman et Mme de Mora ont indiqué que le demandeur était capable d’accomplir un travail d’un certain degré, même si cela impliquait ou aggravait la douleur. La division générale a ensuite tourné son attention vers le type de travail que le demandeur serait possiblement capable d’accomplir, comme envisagé par chaque médecin, et si ce travail pouvait représenter une occupation véritablement rémunératrice. La division générale a reconnu que le demandeur souffrirait de plusieurs limitations, mais a conclu qu’il était capable de travailler à temps partiel, à condition que cela n’implique pas d’efforts physiques intenses ou d’être assis longtemps.

[18] Compte tenu du fondement probatoire, je ne suis pas convaincue que ce moyen a une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[19] La demande de permission d’en appeler est refusée.

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