Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) refuse la permission d’en appeler.

Introduction

[2] Le demandeur touchait une pension de retraite aux termes du Régime de pensions du Canada, (RPC). Il a présenté une demande de prestations d’invalidité qui lui a été refusée au motif que sa demande d’annulation de pension de retraite avait été présentée en retard. Après une révision du dossier, l’intimé a maintenu son refus. (GD3-4). Le demandeur a porté en appel la décision de révision à la division générale du Tribunal. Le 29 décembre 2015, la division générale a rejeté l’appel pour les mêmes raisons que l’avait fait l’intimé. Le demandeur souhaite obtenir la permission de porter en appel la décision rendue par la division générale (demande).

Motifs de la demande

[3] Le demandeur soutient que la division générale avait contrevenu aux alinéas 58(1)a), b) et c) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). Il a soutenu que la division générale aurait dû appliquer le paragraphe 60(8) du Régime de pensions du Canada (RPC) à son dossier, à cause de son état de santé mentale entraîné par un accident de travail et son hospitalisation en octobre 2013. (AD1-2).

Question en litige

[4] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès ?

Les dispositions législatives applicables

Droit applicable

[5] Les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS régissent la permission d’en appeler. Selon le paragraphe 56(1) : « Il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission. » Ainsi, la demande de permission de porter en appel une décision de la division générale du Tribunal est une étape préliminaire au dépôt d’un appel devant la division d’appel.

[6] Le paragraphe 58(3) prévoit que « la division d’appel doit accorder ou refuser cette permission ». Pour obtenir l’autorisation d’interjeter appel, un demandeur doit convaincre la division d’appel que son appel aurait une chance raisonnable de succès; autrement, la division d’appel doit rejeter la demande de permission d’en appeler.Note de bas de page 1

[7] Un demandeur convainc la division d’appel que son appel a une chance raisonnable de succès en soulevant une cause défendable dans sa demande de permission d’en appelerNote de bas de page 2. Dans les arrêts Canada (ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, (2007) CAF 41, et Fancy c. Canada (Procureur général), (2010) CAF 63, il a été établi qu’une chance raisonnable de succès signifie qu’une cause est défendable.

[8] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) La division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) Elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) Elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] L’affaire Tracey c. Canada (Procureur général), (2015) CF 1300, confirme la conclusion que lors de l’évaluation d’une demande de permission d’en appeler, la division d’appel doit d’abord déterminer si les moyens d’appel du demandeur correspondent à l’un des moyens d’appel énoncés.

[10] Le RPC prévoit le cas où un demandeur n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation. Connues sous le nom de dispositions relatives à l’incapacité, elles sont énoncées à l’article 60 du RPC.

60. Demande de prestation – (1) Aucune prestation n’est payable à une personne sous le régime de la présente loi, sauf si demande en a été faite par elle ou en son nom et que le paiement en ait été approuvé selon la présente loi.

(8) Incapacité – Dans le cas où il est convaincu, sur preuve présentée par le demandeur ou en son nom, que celui-ci n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande le jour où celle-ci a été faite, le ministre peut réputer cette demande de prestation avoir été faite le mois qui précède celui au cours duquel la prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon le ministre, la dernière période pertinente d’incapacité du demandeur a commencé.

[11] Le demandeur fonde sa demande sur le paragraphe 60(8).

Analyse

La division générale a commis un manquement à la justice naturelle

[12] Le demandeur a fait valoir que l’audience avait été inéquitable à cause de la façon dont les questions lui ont été posées, parce qu’il n’avait pas pu expliquer la cause de son incapacité à travailler et que les faits pertinents étaient brouillés.

[13] Après avoir eu l’occasion d’écouter l’enregistrement de l’audience, la division d’appel conclut que la division générale n’a pas manqué à la justice naturelle. Le demandeur se représentait lui-même et il était la seule partie présente à l’audience. Il incombait donc à la division générale de poser les questions. Avant de poser ses questions, la division générale à donné l’occasion au demandeur de présenter sa cause, ce qu’il a fait.

[14] Il est clair que le membre de la division générale avait à l’esprit des questions précises en interrogeant le demandeur, toutefois, la division d’appel conclut que les questions du membre étaient admissibles puisqu’elles avaient pour but de clarifier certaines ambiguïtés. La division générale a été respectueuse du demandeur à tout moment. Par conséquent, la division d’appel conclut que les questions de la division générale n’ont pas entraîné de manquement à la justice naturelle. La permission d’en appeler ne sera pas accordée à cet égard.

La division générale a appliqué le mauvais critère juridique.

[15] Le demandeur a fait valoir que la division générale avait appliqué le mauvais critère juridique relatif à la notion d’incapacité. Dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Danielson, (2008) CA 7, la Cour d’appel fédérale (CAF) a évalué le critère juridique de l’article 60 du RPC. La CAF a qualifié l’article 60 de « précis et ciblé » en ce sens qu’il « n’exige pas de prendre en compte la capacité de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de prestations d’invalidité, mais seulement et simplement, la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande. »

[16] Dans l’affaire Morrison c. Canada (ministre du Développement des ressources humaines), CP04182 (7 mars 1997), la CAF a déclaré qu’il était nécessaire de prendre en compte à la fois la preuve médicale et les activités pertinentes du demandeur pour décider s’il satisfaisait au critère de l’article 60. C’est ainsi que la division générale a été appelée à examiner les activités pertinentes du demandeur entre la date prétendue de début de l’invalidité et la date de la demande afin de jeter la lumière sur sa capacité de former ou d’exprimer l’intention de déposer une demande de prestations d’invalidité au RPC pendant cette période.

[17] C’est précisément ce qu’a fait la division générale. Le membre a posé des questions visant à préciser quand le demandeur avait cessé de travailler quelles étaient ses raisons pour avoir arrêté de travailler, des questions sur sa période d’hospitalisation et sur ses activités depuis qu’il avait reçu son congé de l’hôpital. Les faits suivants ont fait surface à la suite des questions de la division générale :

  1. Le demandeur a reçu une pension de retraite à compter du mois d’avril 2012. (GD3-11).
  2. Il avait travaillé pour Nortel Networks jusqu’au 28 avril 2013. Il possédait également une entreprise de rénovation qu’il a fermée à la fin décembre 2011. Dans le questionnaire relatif aux prestations d’invalidité, le demandeur a déclaré qu’il avait cessé de travailler le 31 décembre 2011, au moment où son entreprise de rénovation avait fermé à cause de sa maladie mentale. Le membre de la division générale a cherché des précisions sur ce point. En réponse, le demandeur a affirmé que son entreprise avait fermé à cause du ralentissement économique en Alberta et non à cause de ses problèmes de santé mentale.
  3.  Après la fin de son emploi chez Nortel, le demandeur a trouvé un emploi dans une entreprise pétrolière. Pendant son emploi dans cette société, il a subi une blessure au travail. Les causes de sa blessure et de son hospitalisation subséquente ne sont pas claires. Un jour, en octobre 2013, après avoir quitté le travail, il s’est réveillé à l’hôpital plusieurs jours plus tard. Le questionnaire médical du RPC indique que le demandeur a commencé à recevoir des soins pour un trouble dépressif majeur, pour sa dépendance à l’alcool et pour l’hypertension en octobre 2013.
  4. C’est le personnel soignant de l’hôpital qui a rempli et déposé sa demande de pension d’invalidité.

[18] La division d’appel conclut que la division générale avait fait ce qui était requis d’elle selon l’affaire Morrison. Elle a examiné les activités du demandeur entre la date de son hospitalisation et de sa demande de prestations d’invalidité du RPC afin de déterminer s’il était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations. De plus, la division générale a examiné les activités du demandeur liées à son travail chez Nortel et à son entreprise de rénovation. Par conséquent, la division d’appel conclut que la division générale avait appliqué le bon critère juridique relatif à l’incapacité.

[19] La division d’appel conclut également que la division générale avait correctement précisé et appliqué les dispositions du paragraphe 61,1 (1,1) et de l’alinéa 42(2)b) du RPC. Ces dispositions prescrivent que le demandeur ait dû être réputé invalide au plus 15 mois avant la date du début de sa pension de retraite, pas plus.

[20] La division générale avait conclu qu’une période d’invalidité aurait eu lieu pendant l’hospitalisation du demandeur en octobre 2013. C’est là 18 mois après le début de sa pension de retraite et après sa période minimale d’admissibilité (PMA). Même si le cas du demandeur avait pu être déterminé au titre de l’exception à l’article 60, le paragraphe 61,1 (1,1) et l’alinéa 42(2)b) auraient joué pour empêcher l’annulation de sa pension de retraite au profit d’une pension d’invalidité. Par conséquent, il n’est soulevé aucune erreur de droit qui aurait pu constituer un motif d’appel.

La division générale n’a pas tenu compte de documents pertinents.

[21] Le demandeur a soutenu que la division générale avait tiré des conclusions de fait sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Nommément, les rapports d’ergothérapie et d’évaluation fonctionnelle. Il a soutenu que la division générale n’avait pas examiné de façon adéquate les rapports médicaux et qu’elle avait commis une erreur en concluant au manque de preuve médicale pour justifier une conclusion d’invalidité.

[22] À la lumière de sa conclusion qu’une invalidité se serait manifestée dès 2013, ce qui est au-delà de la fin de la période minimale d’admissibilité du demandeur, et vu que ces rapports ont été produits à la suite de l’hospitalisation du demandeur en 2013, il ne saurait être question de na pas avoir tenu compte de ces documents. Donc, il ne s’agit pas là d’un moyen d’appel ayant une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[23] Le demandeur a soutenu que la division générale avait eu un manquement eu égard aux trois moyens d’appel du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. Pour les motifs énoncés ci-dessus, la division d’appel n’est pas convaincue que ses arguments soulèvent un moyen d’appel qui aurait une chance raisonnable de succès.

[24] La demande est refusée.

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