Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

[1] La division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) refuse la permission d’en appeler.

Introduction

[2] Le 10 novembre 2015, la division générale du Tribunal a rejeté l’appel de la demanderesse à l’encontre d’une décision découlant d’une révision. La division générale a conclu que la demanderesse ne s’était pas acquittée du fardeau qui lui incombait d’établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au sens de l’alinéa 42(2)a) du Régime de pensions du Canada (RPC). La demanderesse présente une demande de permission d’en appeler de la décision de la division générale (demande).

Motifs de la demande

[3] Au nom de la demanderesse, son représentant a présenté les éléments suivants comme fondements de la demande :

  1. La division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, car elle n’a pas tenu compte de tous les rapports au dossier et [des] observations écrites et des observations présentées au cours [de] l’audience.
  2. La division générale a également commis une erreur de droit et a rendu sa décision [traduction] « sans tenir compte des problèmes d’invalidité grave et prolongée en vertu de l’alinéa 42(2)a) du RPC ». La division générale a commis une erreur lorsqu’elle a tiré la conclusion selon laquelle l’invalidité de la demanderesse n’était pas grave, et elle n’a pas tenté de déterminer si celle-ci était prolongée.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée et a omis de [traduction] « tenir compte des faits dans [leur] juste signification ». La division générale a commis une erreur lorsqu’elle a tiré la conclusion selon laquelle une chirurgie règlerait le problème alors que la demanderesse a expliqué qu’en raison de son diabète, une chirurgie n’était pas une option.

Question en litige

[4] La division d’appel doit déterminer si l’appel aurait une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[5] Les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Lois sur le MEDS) régissent l’autorisation d’interjeter appel. Selon le paragraphe 56(1) : « Il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission. » Ainsi, la demande de permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal est une étape préliminaire au dépôt d’un appel devant la division d’appel.

[6] Le paragraphe 58(3) prévoit que « la division d’appel doit accorder ou refuser cette permission ». Pour obtenir la permission d’en appeler, un demandeur doit convaincre la division d’appel que l’appel aurait une chance raisonnable de succès ; autrement, la division d’appel doit refuser la permission d’en appelerNote de bas de page 1.

[7] Un demandeur convainc la division générale que son appel aurait une chance raisonnable de succès en soulevant une cause défendable dans sa demande de permission d’en appelerNote de bas de page 2. Dans l’affaire Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41 et dans l’affaire Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 FCA 63, une cause défendable a été associée à une chance raisonnable de succès.

[8] Les moyens d’appel et les compétences de la division d’appel sont énoncés à l’article 58 de la Loi sur le MEDS.

  1. 58. (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :
    1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence ;
    2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier ;
    3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] Dans l’affaire Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300, le membre a conclu que lors de l’évaluation d’une demande de permission d’en appeler, la division d’appel doit d’abord déterminer si les moyens d’appel du demandeur correspondent à l’un des moyens d’appel énoncés.

Analyse

[10] Pour les raisons qui suivent, la division d’appel rejette l’appel.

La division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle

[11] Le représentant de la demanderesse a fait valoir qu’en ne tenant pas compte de tous les rapports médicaux au dossier et des observations écrites et orales, la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle. Il a cité les nombreux troubles médicaux de la demanderesse ainsi que les rapports qui traitent de ces troubles, et il a soutenu que la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que la demanderesse pourrait reprendre un emploi rémunérateur compte tenu des nombreux problèmes médicaux.

[12] Selon les principes de justice naturelle, les parties doivent pouvoir défendre pleinement leur cause, savoir quelle affaire ils doivent défendre et pouvoir présenter leur affaire à un décideur impartial. Dans le contexte du droit administratif, la « justice naturelle » s’intéresse particulièrement à l’équité, ce qui inclut tous les concepts susmentionnés et comprend également l’équité procédurale.

[13] Le représentant de la demanderesse prétend que la division générale n’a pas tenu compte de l’ensemble de la preuve médicale. Il n’a pas indiqué lequel des nombreux rapports médicaux ou quelle partie du témoignage ou des observations de la demanderesse a été ignoré par la division générale. Dans l’affaire Simpson c. Canada (Procureur général),2012 CAF 82 la Cour d’appel fédérale a établi qu’« un tribunal n’est pas tenu de mentionner dans ses motifs chacun des éléments de preuve qui lui ont été présentés, mais il est présumé avoir examiné l’ensemble de la preuve ». C’est seulement si les lacunes des motifs du juge des faits, étant ici la division générale, font obstacle à un examen valable qu’une erreur de droit sera soulevée : Doucette c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2004 CAF 292 (CanLII).

[14] La décision de la division générale contient un résumé exhaustif de la preuve médicale, du témoignage oral de la demanderesse et des observations. Dans son analyse, la division générale a évalué si la demanderesse répondait aux critères relatifs à une invalidité grave et prolongée en se référant aux rapports médicaux et au témoignage oral et en fournissant des motifs clairs pour avoir tiré ses conclusions. Par conséquent, la division d’appel n’est pas convaincue que la division générale a négligé de tenir compte de l’ensemble de la preuve avant de tirer ses conclusions. La division d’appel conclut qu’un manquement à la justice naturelle n’est pas survenu. Cet argument ne présente pas de chance raisonnable de succès en appel.

La division générale a commis une erreur de droit

[15] Le représentant de la demanderesse a affirmé que la division générale avait commis une erreur de droit lorsqu’elle n’a pas tiré de conclusion à savoir si les conditions médicales de la demanderesse étaient de nature « prolongée ». La division d’appel rejette cette observation. Il est bien établi en droit que, vu la nature conjonctive de la définition du RPC d’une invalidité grave et prolongée, lorsque la division générale conclut que le critère de gravité énoncé dans la définition du RPC est respecté, l’on n’a plu besoin de déterminer si le critère au sujet de la nature prolongée a été respecté : Klabouch c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2004 CAF 377. La division d’appel est convaincue que cet argument ne présente aucune chance raisonnable de succès.

La division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée

[16] Le représentant de la demanderesse a également fait valoir que la division générale a omis de [traduction] « tenir compte des faits dans [leur] juste signification ». Le sens des propos du représentant n’est pas clair. Cependant, il a par la suite précisé en disant que la division générale a commis une erreur en tirant la conclusion selon laquelle la demanderesse pourrait bénéficier d’une chirurgie alors qu’elle a expliqué qu’en raison de son diabète, la chirurgie n’était pas une option. Ayant eu la chance d’écouter l’enregistrement audio de l’audience, il ne s’agit pas de l’appréciation du témoignage oral de la demanderesse par la division d’appel.

[17] La division d’appel comprend, après avoir écouté l’enregistrement audio, que la demanderesse a témoigné initialement qu’elle était très inquiète de devoir subir une chirurgie à l’épaule (12:24). En réponse à la question de la division générale, la demanderesse a déclaré qu’elle était sceptique à l’égard d’une chirurgie (28:22). Elle a également témoigné qu’elle a consulté deux chirurgiens orthopédiques, le deuxième en novembre 2015, et que celui-ci lui a donné trois injections de cortisone.

[18] Pour répondre davantage à la division générale, la demanderesse a déclaré que le premier chirurgien orthopédique a recommandé une chirurgie et l’a référé à un autre chirurgien pour obtenir une deuxième opinion lorsqu’elle lui a demandé. Elle est d’accord sur le fait que bien qu’elle ait dit au premier chirurgien orthopédique qu’elle était diabétique, il ne semblait pas penser que sa condition l’empêchait de subir une chirurgie (31:56). Elle a témoigné qu’elle a réitéré ses inquiétudes au deuxième chirurgien (33:00) ainsi qu’à son médecin de famille (28:22). La demanderesse a indiqué qu’on lui avait dit que les diabétiques avaient des complications à la suite d’une chirurgie et qu’ils ne guérissaient pas bien (34:22). En réponse aux questions de la division générale, la demanderesse a déclaré que bien qu’elle ait discuté de la pertinence d’une chirurgie avec son médecin de famille, le Dr Seegobin (34:30), bien qu’il était d’accord sur le fait que cela comportait des risques, il ne lui a pas dit quels étaient les risques (35:26).

[19] C’est le rôle de la division générale d’évaluer la preuve et d’en faire l’appréciation. Le représentant de la demanderesse a fait valoir que la division générale en est venue à une conclusion qui, à la lumière du témoignage de la demanderesse, a été tirée de façon abusive. Sur le fondement de ce qui précède, la division d’appel conclut que cet argument n’a pas été établi.

Conclusion

[20] Le représentant de la demanderesse a soutenu que la division générale a commis des erreurs de droit, a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées et a omis d’observer des principes de justice naturelle. Sur le fondement de ce qui précède, la division d’appel n’est pas convaincue que les observations et les arguments du représentant soulèvent des moyens d’appel qui auraient une chance raisonnable de succès.

[21] La demande est rejetée.

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