Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] L’appelant a présenté une demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada. L’intimé a rejeté la demande initiale et, dans une lettre datée du 18 décembre 2015, a rejeté la demande au stade de la révision. L’appelante a porté en appel la décision devant le Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) le 5 juillet 2016, soit au-delà du délai de 90 jours pour interjeter appel prévu à l’alinéa 52(1)b) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).

Question en litige

[2] Le Tribunal doit décider s’il convient d’accorder à l’appelante un délai supplémentaire pour interjeter appel aux termes du paragraphe 52(2) de la Loi sur le MEDS.

Preuve

[3] L’intimé a reçu la demande de pension d'invalidité de l’appelante le 6 mars 2015. L'intimé a informé l'appelante du refus de sa demande au moyen d'une lettre datée du 21 juillet 2015.

[4] Dans une lettre du 20 octobre 2015 adressée à l'intimé, l'appelante a demandé une révision de la décision initiale qui rejetait sa demande. Elle a déclaré qu'elle avait plusieurs fois demandé à des spécialistes de présenter des rapports, mais que la préparation de ces derniers avait été retardée. Elle a déclaré : « Ils ont fixé une date pour l’imagerie par résonnance magnétique de mon épaule. Ils vous enverront aussi les rapports ». Elle a demandé à l'intimé d'attendre de recevoir ces rapports avant de rendre sa décision.

[5] Il appert de la décision découlant de la révision que celle-ci a été rendue sans attendre que l'appelante subisse son imagerie par résonnance magnétique. La décision faisait part à l'appelante de ses droits d'appel. On peut y lire :

Si vous êtes en désaccord avec la décision

[traduction] Vous avez le droit d’interjeter appel de cette décision à la section de la sécurité du revenu de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Si vous souhaitez en appeler, vous devez présenter, dans les 90 jours suivant la date à laquelle vous recevez la décision découlant de la révision, un avis d'appel contenant tous les renseignements requis. Pour obtenir une copie du formulaire d'avis d'appel, les instructions sur la façon de le remplir et les détails sur la façon d'interjeter appel d'une décision, veuillez consulter notre site web à l'adresse suivante : www.canada.gc.ca/sst-tss, ou téléphoner sans frais au 1 877 227-8577. Pour que votre avis d'appel soit accepté, vous devez fournir tous les renseignements demandés et joindre tous les documents requis, y compris une copie de la présente lettre, et poster le tout à l'adresse suivante :

Tribunal de la sécurité sociale
Attention : Division générale(SR)
CP 9812, SUCC T CSC
Ottawa ON KIO 6S3

[6] L'appelante a déclaré qu'elle n'avait pas interjeté appel dans les 90 jours parce qu'elle devait subir une imagerie par résonnance magnétique chez un spécialiste, « mais mon rendez-vous était prévu le 11 mars 2016, soit après la période de 90 jours. »

[7] Le rapport du 27 avril 2016 d'un chirurgien orthopédiste, le Dr P Yao, adressé au médecin de famille de l'appelante, le Dr Jawanda, précisait que le Dr Yao avait rencontré l'appelante ce jour-là. Le rapport faisait référence à l'imagerie par résonnance magnétique du 11 mars 2016.Le Dr Yao a fait parvenir à l'intimé le rapport accompagné de la facture et des notes d'évolution du 20 février 2014 au 17 septembre 2015. L'intimé a reçu tous ces documents le 11 mai 2016.

[8] Selon les notes de l'intimé présentes au dossier d'appel, le 19 mai 2016, l'intimé a communiqué avec l'appelante par téléphone pour l'informer qu'il pouvait tenir compte de ces nouveaux éléments et que le délai prévu pour interjeter appel devant le Tribunal était expiré. On a suggéré à l'appelante de communiquer avec le Tribunal pour connaître les modalités prévues pour présenter un appel tardif. Cette information figurait également dans une lettre du 19 mai 2016 adressée à l'appelant.

[9] Il appert du dossier d'appel que le 13 juin 2016, l'appelante a présenté une demande d'accès à l'information en vertu de la législation pertinente afin d'obtenir une copie de la décision découlant de la révision. Elle a reçu une copie de la décision le 16 juin 2016. L’appelante a déposé son appel auprès du Tribunal le 5 juillet 2016.

Analyse

[10] Le Tribunal en est arrivé à la conclusion que l’appel a été déposé après le délai de 90 jours. La décision de l’intimé découlant de la révision était datée du 18 décembre 2015. L'appelante a déclaré qu'elle avait reçu la décision découlant de la révision le 27 décembre 2015. Le Tribunal remarque qu'il s'agissait d'un dimanche et qu'il est peu probable que l'appelante ait reçu du courrier ce jour-là. Le Tribunal suppose que la décision découlant de la révision a été envoyée au cours de la semaine précédente et que l'appelante en a pris connaissance le 27 décembre 2015. Le Tribunal conclut que l’appelante a reçu communication de la décision découlant de la révision le 27 décembre 2015.

[11] Aux termes de l'alinéa 52(1)b) de la Loi sur le MEDS, l'appelante avait jusqu'au 29 mars 2016 pour faire appel. Elle a interjeté appel le 5 juillet 2016.

[12] Pour déterminer s’il fallait proroger le délai pour interjeter appel, le Tribunal a examiné et apprécié les quatre facteurs énoncés dans la décision Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Gattellaro, 2005 CF 883. Ces facteurs sont les suivants :

  1. a) l’intention constante de poursuivre l’appel;
  2. b) la cause est défendable;
  3. c) une explication raisonnable justifie le délai;
  4. d) la prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

[13] Il s'agit d'éléments souples. Le décideur attribue un poids approprié à chacun des facteurs, suivant les circonstances (Canada (Procureur général) c. Pentney, 2008 CF 96). La considération primordiale est celle de savoir si l'octroi d'une prorogation de délai serait dans l'intérêt de la justice (Canada (Procureur général) c. Larkman, 2012 CAF 204).

Intention constante de poursuivre l’appel

[14] Selon le dossier du Tribunal, l'appelante n'a pris aucune mesure en vue d'un appel entre le 27 décembre 2015 et le 29 mars 2016. Il n'y a aucune trace d'une communication verbale ou écrite, de sa part ou en son nom, qui aurait été adressée à l'intimé ou au Tribunal. L'appelante savait qu'elle devait passer une imagerie par résonnance magnétique et elle souhaitait qu'on tienne compte de cette information. Pourtant, elle ne s’est pas enquise de savoir si le moment de l’examen aurait un quelconque effet sur l’exercice de son droit d’appel.

[15] Le Tribunal estime que l’appelante n'a pas démontré d’intention persistante de poursuivre l’appel.

Cause défendable

[16] L'appelante prétend qu'elle ne peut plus travailler en raison de ses douleurs continues au bras et à l'épaule. En appel, elle aurait à établir qu’elle était atteinte, à la fin de la période minimale d'admissibilité mentionnée au dossier, au 31 décembre 2017 ou avant cette date, d’une invalidité grave et prolongée au sens du RPC. Le Tribunal est convaincu de l'existence d'une preuve médicale de l'état de santé de l'appelante. Il s'agit donc d'une cause défendable appel.

Explication raisonnable du retard

[17] L'appelante soutient que son appel a été introduit en retard parce qu'elle attendait le rapport d'imagerie par résonnance magnétique. Le Dr Yao a transmis au Tribunal les renseignements médicaux relatifs à l'imagerie par résonnance magnétique seulement six semaines après l'expiration du délai d'appel.

[18] La décision découlant de la révision faisait état du droit d'appel de l'appelante. Cette dernière était au courant de l'existence du délai de 90 jours. Elle savait que l'examen d'imagerie par résonnance magnétique n'aurait pas lieu avant l'approche de l'expiration du délai. Elle n'a fourni aucune explication raisonnable relativement au fait de ne pas avoir déposé d'avis d'appel dans le délai requis, ou de ne pas avoir communiqué avec le Tribunal pour faire part de son dilemme ou obtenir des conseils afin de pouvoir maintenir son droit d'appel.

[19] En outre, rien n'indique que l'appelante a informé le Dr Yao de l'existence du délai. Bien qu'il n'ait pas été en mesure de transmettre son rapport de consultation concernant l'appelante avant le 29 mars 2016, rien ne démontre qu'il n'aurait pas été en mesure d'envoyer les résultats de l'imagerie par résonnance magnétique. Il appert aussi que l'appelante n'a pas donné l'adresse du Tribunal au Dr Yao et les instructions pour y envoyer des documents plutôt que les envoyer à l'intimé.

[20] Le 19 mai 2016, l'appelante a appris par téléphone que les rapports du Dr Yao avaient été envoyés à l'intimé par erreur. Elle a été informée que le délai d'appel était expiré. On lui a suggéré de communiquer avec le Tribunal. Il n'y a aucune trace au dossier d'une telle démarche jusqu'à ce que l'appelante dépose son avis d'appel, sept semaines plus tard. Entre-temps, elle a mis plus de trois semaines après avoir parlé à l'intimé pour tenter d'obtenir une copie de la décision découlant de la révision.

[21] Bien que l'appelante ait justifié son retard, son explication n'était pas raisonnable. Elle a reçu des consignes claires dans la lettre de décision et lorsqu'elle a parlé à l'intimé en mai 2016. Rien ne prouve qu'elle n’ait pas saisi ces consignes. La preuve démontre qu'elle leur a accordé peu d'attention et qu'elle ne s'est pas préoccupée des délais jusqu'à ce qu'elle décide de déposer son avis d'appel au début juillet 2016. Elle n'a pas expliqué de façon raisonnable pourquoi elle n'avait pas suivi les consignes, ou pourquoi elle n'avait pas agi en temps opportun même après que ces consignes lui aient été précisées.

[22] Le Tribunal estime que l’appelante n'a pas fourni d'explication raisonnable du retard dans l'introduction de son appel.

Préjudice à l’autre partie

[23] Étant donné la courte période de temps qui s'est écoulé depuis que la décision découlant de la révision a été rendue, l'intimé ne semble pas avoir été lésé. La capacité du ministre à se défendre, compte tenu de ses ressources, ne serait pas indûment amoindrie advenant la prorogation du délai d'appel.

Conclusion

[24] Bien que l'appelante ait une cause défendable et que la prorogation du délai ne cause aucun préjudice à l’autre partie, le Tribunal accorde plus d'importance aux conclusions selon lesquelles l'appelante n’avait pas d’intention persistante de poursuivre l’appel ni d’explication raisonnable de son retard. La Loi sur le MEDS prévoit un délai de prescription assez court. Cependant, les exigences relatives à l'introduction d'un appel sont minimales, et sont très bien expliquées dans la décision découlant de la révision et sur le site Internet du Tribunal. Le Tribunal ne trouve aucune raison impérieuse permettant à l'appelante de ne pas prendre en compte les délais dans ses circonstances particulières.

[25] Compte tenu des facteurs de la décision Gattellaro et dans l’intérêt de la justice, le Tribunal refuse la prorogation du délai pour interjeter appel aux termes du paragraphe 52(2) de la Loi sur le MEDS.

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