Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est refusée.

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’appeler de la décision rendue le 26 février 2016 par la division générale (DG). Le 12 février 2016, la division générale a tenu une audience par téléconférence et a déterminé que la demanderesse n'était pas admissible à une pension d'invalidité aux termes du Régime de pensions du Canada (RPC). Elle a conclu que l'invalidité de l'appelante, avant la fin de sa période minimale d'admissibilité (PMA), le 31 décembre 2014, n'était pas « grave ».Le 26 avril 2016, le représentant de la demanderesse a présenté, dans les délais prescrits, une demande de permission d’en appeler invoquant de nombreux motifs d’appel et fondements législatifs. Pour accueillir cette demande, je dois être convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[2] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, (Loi sur le MESD), « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel (AD) sans permission », et la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ».

[3] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « la division d'appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

Question en litige

[5] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Observations

Erreurs de droit

‏[6] La demanderesse soutient que la division générale a commis une erreur de droit dans sa décision, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier :

  1. elle n’a pas appliqué Garrett c. CanadaNote de bas de page 1 puisqu’elle n’a pas pris en considération les facteurs énoncés dans Villani c. CanadaNote de bas de page 2 et ne les a pas appliqués;
  2. elle n'a pas appliqué E.J.B. c. CanadaNote de bas de page 3 parce qu’elle a inégalement évalué tous les aspects de l'état de santé de la demanderesse et leur incidence sur son fonctionnement dans un contexte « réaliste »;
  3. elle n’a pas appliqué Procureur général du Canada c. Dwight-St. LouisNote de bas de page 4 parce qu’elle n’a pas suffisamment tenu compte des éléments de preuve qui démontraient la gravité de l’invalidité de la demanderesse eu égard à sa situation personnelle;
  4. Elle n'a pas pris en compte le sous-alinéa 42(2)(a)(ii) du Régime de pensions du Canada (Loi) en concluant, selon le pronostic « réservé » du Dr Farooqi, que l'incapacité de la demanderesse était loin d'atteindre le seuil établi pour être considérée comme prolongée;
  5. Elle n'a pas appliqué les principes énoncés dans l'arrêt Inclima c. Procureur généralNote de bas de page 5 en concluant que la demanderesse était capable de retourner travailler à la fin de sa période minimale d'admissibilité en décembre 2014.

Conclusions de fait erronées

[7] La demanderesse fait valoir que la division générale a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées qu’elle a tirées de façon abusive et arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance :

  1. aux paragraphes 37 et 39 de sa décision, la division générale a conclu que le stress de la demanderesse était directement lié aux circonstances particulières de son emploi dans une société d'assurances – malgré le fait que sa santé mentale ne s'était pas améliorée du tout depuis qu'elle avait quitté son emploi;
  2. au paragraphe 42 de sa décision, la division générale a déclaré qu'aucune preuve médicale objective n'appuyait la réclamation de la demanderesse – malgré le rapport du 12 décembre 2013 du Dr Wlodarczyk et le rapport du 15 octobre 2014 du Dr Farooqi.

Manquement à la justice naturelle

[8] La demanderesse soutient que la division générale, en rendant sa décision, n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence. La demanderesse allègue plus particulièrement que la division générale n'a pas apprécié son témoignage portant sur la gravité de ses incapacités à la fin de sa période minimale d'admissibilité, le 31 décembre 2014.

Analyse

[9] Pour que la permission d’en appeler soit accordée, il faut qu’un motif d’appel susceptible de donner gain de cause à l’appel soit présenté : Kerth c. CanadaNote de bas de page 6. Selon la Cour d’appel fédérale, la question de savoir si une affaire est défendable en droit revient à se demander si l’appel a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Fancy c. CanadaNote de bas de page 7.

[10] Pour accorder la permission d’appeler, je dois être convaincue que les motifs d’appel correspondent à au moins un des moyens d’appel et que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Erreurs de droit

Non application de l’arrêt Garrett

[11] La demanderesse soutient que la division générale n’a pas appliqué l'arrêt Garrett en omettant, à tort, de tenir compte des facteurs énoncés dans Villani. La demanderesse reconnaît que c'est à juste titre que la division générale a cité l'arrêt Villani au paragraphe 44 de sa décision et qu'elle a noté les différents aspects de ses antécédents personnels, notamment son âge (49 ans à la fin de sa PMA), son niveau de scolarité (un diplôme d'études secondaires et quelques formations post-secondaires) et son expérience de travail (ses années d'expérience dans le domaine de l'assurance).

[12] Cependant, la demanderesse soutient que la division générale a commis une erreur en concluant qu'elle avait des compétences transférables qui allaient lui permettre de travailler. Non seulement la division générale a-t-elle dénaturé certaines caractéristiques personnelles de la demanderesse relatives à ses problèmes de santé, notamment son haut niveau d'anxiété, ses étourdissements, ses maux de tête, ses palpitations cardiaques, ses troubles gastro-intestinaux, ses nausées, son insomnie et ses troubles cognitifs, mais aussi, elle a commis une erreur de droit en n’appliquant pas ces caractéristiques à un contexte réaliste comme le prévoit l'arrêt Villani.

[13] J’estime que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès sur ce motif. Premièrement, la demanderesse allègue que la division générale a dénaturé certaines de ses caractéristiques personnelles, mais ne peut soulever aucune erreur ou imprécision particulière. La demanderesse conteste la déclaration de la division générale selon laquelle la demanderesse possède « de nombreuses compétences transférables », mais fournit des éléments de preuve qui permettent de réfuter une telle déclaration. En effet, la preuve démontre que la demanderesse a travaillé dans plusieurs environnements de travail au fil des années, y compris des restaurants, des usines et des bureaux. Elle a occupé des emplois de col blanc en tant que secrétaire médicale, agente de bureau, courtière, adjointe de tarification et commis-comptable. Je ne vois pas en quoi il est déraisonnable ou incorrect de dire qu'elle possède des compétences transférables.

[14] Deuxièmement, la demanderesse allègue que la division générale a erré en n’appliquant pas ses caractéristiques personnelles à un contexte réaliste lorsqu’elle a tenu compte de ses problèmes de santé, mais l’analyse dans l'arrêt Villani vient à la suite de longues discussions sur les affections de la demanderesse, aux paragraphes 38 et 40 à 42 de la décision, après lesquelles on peut lire ce qui suit :

[traduction] L'appelante était âgée de 49 ans seulement à la fin de sa période minimale d'admissibilité. Elle parle bien et sait s'exprimer en anglais aisément. Elle est instruite et démontre une aptitude à améliorer continuellement ses compétences en acquérant des titres professionnels. Elle a déjà assumé de lourdes responsabilités dans une industrie affichant une rapide croissance.

[15] Après avoir lu l’analyse en entier, je conclus que la division générale s’est correctement acquittée de son obligation d’appliquer le critère du contexte réaliste énoncé dans l'arrêt Villani. J’estime que ce motif d’appel n'a aucune chance raisonnable de succès.

Non-application des principes de l'affaire E.J.B.

[16] L’affaire E.J.B. est une autre cause dans laquelle on réitère les principes énoncés dans l’arrêt Villani. Dans E.J.B., on met l’accent sur l’importance de tenir compte de toutes les affections d’un requérant, et non seulement de sa principale plainte. La demanderesse soutient que la division générale a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de l’ensemble de ses affections lorsqu’elle a déterminé que ses incapacités n’étaient pas tout à fait graves. Plus particulièrement, on allègue que la division générale n’a pas tenu compte des antécédents et des caractéristiques personnelles de la demanderesse par rapport aux différents aspects de son état de santé, notamment un haut niveau d'anxiété, une dépression, des étourdissements, des maux de tête, des palpitations cardiaques, des troubles gastro-intestinaux, de la nausée, de l'insomnie et des troubles cognitifs. La demanderesse a aussi allégué que la division générale n'avait pas pris en compte son témoignage au sujet de ses douleurs au bas du dos qui, selon elle, minent sa capacité à demeurer dans la même position pendant de longues périodes.

[17] J’ai déjà abordé cette question qui consistait à déterminer si la division générale avait adéquatement appliqué les facteurs énoncés dans Villani, et conclu qu’il n’existait pas de cause défendable au motif qu’elle ne les avait pas appliqués adéquatement. En l'espèce, la demanderesse suggère que la division générale a passé outre de nombreuses affections qui, selon elle, contribuent à son invalidité, ou qu’elle n’en a pas suffisamment tenu compte.

[18] Après avoir examiné la section de la décision de la division générale intitulée « Analyse », j’estime qu’un appel n’aurait aucune chance raisonnable de succès sur ce motif. L'essentiel de la décision de la division générale porte sur des résumés de la plupart, sinon de la totalité, des éléments de preuve médicale qui ont documenté, à différents degrés, l'état de santé de la demanderesse et les différents symptômes s'y rapportant. Il est bien établi en droit que le juge des faits n'est pas tenu de faire référence, dans les motifs étayant sa décisionNote de bas de page 8, à chacun des éléments de preuve qui lui sont présentés. Il était de la compétence de la division générale de déterminer quelles incapacités de la demanderesse étaient importantes et lesquelles ne l'étaient pas. L'analyse de la division générale portait essentiellement sur l'influence que pouvaient avoir la dépression et l'anxiété sur la capacité à travailler de la demanderesse. Le fait que la division générale ne se soit pas exprimée explicitement sur les symptômes d'étourdissements de maux de tête, de palpitations cardiaques, de nausées, d'insomnie et de troubles cognitifs ne signifie pas qu'elle ne les a pas pris en considération. La division générale, au paragraphe 43 de sa décision, a pris en compte l'état général de la demanderesse d'un point de vue fonctionnel.

[traduction] Ce n'est pas seulement le diagnostic qui doit être pris en compte, c'est aussi l'effet de l'état pathologique sur la personne. Selon l'auto-évaluation de la demanderesse, cette dernière n'éprouve aucun problème de santé, de transport et n'a aucune difficulté dans sa vie sociale, à entretenir sa maison ou à vaquer à ses activités quotidiennes. De son propre aveu, l'effet que son état de santé a sur elle n'est pas grave. Son témoignage à l'audience n'était pas appuyé par sa propre auto-évaluation ni par les observations objectives de ses médecins traitants.

[19] Je note également que le questionnaire de la demanderesse, qui accompagnait sa demande de prestation d'invalidité de décembre 2013, mentionnait l'anxiété comme seul motif de son incapacité à travailler. Les étourdissements les maux de tête, les palpitations cardiaques, les nausées, l'insomnie et les troubles cognitifs figuraient uniquement comme des symptômes de son état psychologique sous-jacent. Dans ces circonstances, je ne reprocherais pas à la division générale de ne pas avoir tenu compte de chacun de ces symptômes individuellement puisqu'il ne reflétaient pas en soi différents états de santé, mais plutôt la manifestation d'un syndrome plus vaste.

[20] Le paragraphe 43 suggère que la division générale a sincèrement et minutieusement tenté de passer en revue les différentes affections dont se plaignait la demanderesse afin de déterminer si elles donnaient lieu à une invalidité « grave » avant la fin de la PMA. D’après moi, il n’existe pas de cause défendable au motif que la division générale a ignoré les affections secondaires dont se plaignait la demanderesse ou qu’elle n’a pas suffisamment tenu compte de son état dans son ensemble.

[21] Pour ce qui est des douleurs au dos de la demanderesse, dont la division générale n’a supposément pas tenu compte, un examen hâtif des documents présentés devant la division générale indique que ces douleurs ont joué un rôle mineur au cours de l'histoire médicale récente de la demanderesse. Également, je note que la demanderesse a signalé dans son questionnaire qu'elle avait des difficultés à soulever et transporter des objets, et des difficultés à se pencher, mais elle a aussi dit que ces problèmes s'étaient manifestés pendant seulement quelques mois après son ovariectomie, en mars 2013.

‏[22] Je ne constate pas de cause défendable fondée sur ce moyen d’appel.

Non application de l'affaire Dwight-St-Louis

[23] La demanderesse a fait référence à ce précédent en alléguant qu'il ne suffit pas au Tribunal d'admettre son obligation de prendre en compte les critères de l'arrêt Villani, il doit aussi les appliquer à l'état de la demanderesse et à sa situation personnelle. Elle a également cité un extrait qui met l’accent sur la nécessité de discuter un élément de preuve avant de l’écarter. La demanderesse a émis des critiques à l'endroit de la division générale qui n'a pas abordé la façon dont l'anxiété, les étourdissements, les maux de tête, les palpitations cardiaques, les troubles gastro-intestinaux, les nausées, l'insomnie et les troubles cognitifs influençaient sa capacité à détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice.

[24] À mon avis, l'affaire Dwight-St.Louis appuie le principe selon lequel le décideur doit expliquer pourquoi il écarte un élément de preuve, mais seulement si cette preuve est importante. J'ai déjà conclu que la division générale s'était acquittée de son obligation de tenir compte des antécédents et des facteurs personnels de la demanderesse. J'ai aussi conclu que la division générale avait abordé la série de symptômes de la demanderesse lorsqu'elle a examiné la question de la dépression et des troubles anxieux de la demanderesse dans un contexte général. Certes, la décision de la division générale ne présente pas de de discussion détaillée et exhaustive au sujet de l'importance qu'elle a accordée à chaque élément de preuve, mais rien dans la loi - ni rien dans l'affaire Dwight-St. Louis - n'exige de donner autant de détails. Pour cette raison, j’estime que ce motif ne confère aucune chance raisonnable de succès à l’appel.

Non application du sous-alinéa 42(2)(a)(ii) en donnant une mauvaise interprétation du pronostic du Dr Farooqi

[25] La demanderesse allègue que la division générale a commis une erreur mixte de fait et de droit en interprétant mal le pronostic « réservé » formulé par le Dr Farooqi en octobre 2014. Le sous-alinéa 42(2)a)(ii) se lit comme suit :

...une personne n’est considérée comme invalide que si elle est déclarée... atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée... pour l’application du présent alinéa... une invalidité est prolongée si elle... vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

[26] La demanderesse conteste le contenu du paragraphe 41 de la décision de la division générale, qui se lit comme suit :

[traduction] En octobre 2014, [le Dr Farooqi] a mentionné que le pronostic était réservé. Un pronostic réservé ne peut soutenir une conclusion selon laquelle l'état de la demanderesse dure pendant une période longue, continue et indéfinie. La preuve médicale ne permet pas de conclure que l'invalidité de la demanderesse est grave et prolongée.

[27] La demanderesse affirme que la division générale, en concluant que la preuve médicale ne permettait pas de conclure que l'invalidité de la demanderesse était « grave et prolongée », a mal interprété l'évaluation du Dr Farooqui qui a décrit son pronostic comme étant « réservé » . Selon le Taber’s Cyclopedic Medical Dictionary, un pronostic réservé fait référence au pronostic formulé par un médecin lorsque le cours de la maladie d'un patient est incertain, ce qui, dans le cas des affections invalidantes de la demanderesse, serait considéré comme un état prolongé.

[28] J’estime qu’il n’existe pas de cause défendable sur ce motif. La demanderesse part du principe que son psychiatre utilise l'adjectif « réservé » dans le sens médical particulier du terme plutôt que dans le sens commun d' « incertain ». Cependant, même à l'aide de la définition de « réservé » fournie par la demanderesse, je ne vois pas de quelle façon la division générale aurait mal interprété la loi. L'invalidité de la demanderesse doit non seulement être grave, mais elle doit aussi être prolongée, ce qui signifie qu'elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie. Cette définition évoque une durée qui frise la permanence, comme l'a énoncé la Cour d'appel fédérale dans Canada (MHRD) v. HendersonNote de bas de page 9. La Cour suggère qu'aucune guérison n'est prévisible dans un proche avenir du point de vue de la date de la PMA. Selon moi, un patient pour qui le pronostic est « réservé » et dont l'issue de la maladie est incertaine a le droit de croire que non seulement la guérison est possible, mais qu'elle est à portée de main. Un patient pour qui la guérison est impossible ou constitue un espoir lointain n'exige pas de son médecin traitant qu'il soit « réservé » à son égard au cas où sa situation démontrerait des signes d'amélioration. Inversement, la cause d'un patient dont le pronostic est « réservé » n'est pas perdue et son état ne peut être considéré comme « prolongé ».

Omission de prendre en considération l’arrêt Inclima

[29] La demanderesse soutient que la division générale n’a pas respecté la directive suivante de la Cour d’appel fédérale en ce qui concerne l'atténuation des pertes :

[…] un demandeur qui dit répondre à la définition d’incapacité grave doit non seulement démontrer qu’il (ou elle) a de sérieux problèmes de santé, mais dans des affaires comme la présente, où il y a des preuves de capacité de travail, il doit également démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé.

[30] La demanderesse allègue que la division générale a conclu, à tort, qu'elle avait la capacité de travailler au moment où sa PMA a pris fin. Elle soutient qu'aucune preuve n'a démontré qu'elle avait, en décembre 2014, la capacité de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice. Elle soutient également que son diagnostic de dépression, d'anxiété et de syndrome du stress post-traumatique a fait l'objet de cinq rapports médicaux, y compris l'évaluation du Dr Wlodarczyk qui a mentionné qu'elle ne pouvait pas travailler.

[31] Je ne suis pas convaincu que le demandeur ait une cause défendable en se fondant sur ce moyen. Au soutien de sa demande selon laquelle la division générale a commis une erreur au sujet de sa capacité de travailler, la demanderesse renvoie au paragraphe 39 de la décision, que je cite en entier :

[traduction] Lorsqu’il existe des preuves de capacité au travail, l’appelant doit démontrer que ses efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé (Inclima c. Canada [P.G]), 2003 CAF 117). La preuve démontre que la demanderesse n'a pas tenté de trouver un emploi ailleurs que dans un service de tarification. Elle a témoigné qu'elle était déprimée et fâchée de ne plus pouvoir poursuivre ses objectifs de carrière. Le Dr Scott a remarqué que la demanderesse décrivait des épisodes et des réactions physiques qui semblaient être liés au stress, et que ces événements se produisaient au travail, et jamais à la maison. On s'attendrait à ce que ses symptômes s'apaisent si l'appelante se libérait du stress de son environnement de travail. Le médecin de famille et le Dr Scott, neurologue, ont tous les deux indiqué que le stress de l'appelante était concentré dans son travail. Elle a indiqué qu'elle était déprimée et fâchée de ne plus pouvoir poursuivre ses objectifs de carrière. L'appelante n'a ni rajusté ses objectifs de carrière ni occupé un emploi adapté à ses limitations. Le Dr Wlodarczyk a noté en décembre 2013 que l'état de santé de l'appelante s'était amélioré après qu'elle eut quitté son travail, et qu'elle allait bientôt recouvrer la santé. Cependant, retourner dans l'emploi qu'elle occupait avant d'être malade n'est pas conseillé. Ces notes ne reflètent pas une invalidité grave et prolongé au sens du RPC. Le Tribunal est d'avis que les efforts déployés par l'appelante pour trouver et conserver un emploi n'ont pas été infructueux en raison de son état de santé, mais plutôt en raison du fait que les efforts pour trouver un autre emploi convenable étaient inexistants.

[32] Je reconnais que le simple fait de citer Inclima ne suffit pas. Il doit aussi y avoir des indices que le décideur a bien appliqué les principes aux faits. La demanderesse soutient que la preuve ne démontre pas qu'elle avait la capacité de travailler. Elle soutient également que la division générale a commis une erreur en concluant qu'elle était capable de travailler au cours de sa période minimale d'admissibilité. Bien sûr, le seul but de l'audience était de déterminer si la demanderesse avait une telle capacité. Il était de la compétence de la division générale d'apprécier la preuve et d'en tirer des conclusions dans les limites de la loi. L'arrêt Inclima exige qu'en cas de preuve d’une certaine capacité à travailler (contrairement à aucune capacité du tout), le Tribunal doit chercher à savoir si un demandeur a effectué des démarches pour trouver un emploi qui convient à son état de santé. Si la demanderesse n'a pas effectué de telles démarches ou a cessé de travailler pour des raisons autres que son état de santé, le tribunal peut être justifié de tirer une conclusion défavorable à son égard.

[33] En l'espèce, après avoir examiné les éléments de preuve, la division générale a conclu que la demanderesse avait une capacité résiduelle de fonctionner même si elle était aux prises avec une dépression et de l'anxiété, ce qui justifiait une enquête du même type que celui énoncé dans l'arrêt Inclima. Le paragraphe 39 indique que la division générale n'a pas tenu compte du témoignage de la demanderesse pour déterminer si les efforts qu'elle a déployés pour trouver un autre emploi convenable étaient suffisants - elle n'a pas cherché de travail ailleurs que dans un service de tarification.

[34] Enfin, la demanderesse allègue que la division générale n’a pas tenu compte des rapports du Dr Wlodarczyk (4 avril 2013, 12 décembre 2013 et 13 juillet 2015) et du Dr Farooqi (26 juin 2014 et 27 août 2014). Cependant, tous ces documents, à l'exception d'un seul, ont été mentionnés explicitement dans la décision de la division générale, et la déclaration d'avril 2013 du Dr Wlodarczyk, médecin traitant, contenait des évaluations faisant l'objet de certains de ses autres rapports. Dans tous les cas, comme le souligne Simpson c. CanadaNote de bas de page 10, un tribunal administratif est présumé avoir examiné l’ensemble de la preuve, mais n’est pas tenu de mentionner chacun des éléments de preuve dans les motifs de sa décision.

Conclusions de fait erronées

Lien entre le stress et l'emploi transitoire

[traduction] Son stress semblait directement lié aux circonstances particulières de son emploi dans une société d'assurances. Ses tentatives de trouver un autre emploi indiquent qu'elle se croyait capable de travailler dans un autre emploi...

On s'attend à ce que ses symptômes s'apaisent si l'appelante se libère du stress de son environnement de travail.

[36] La demanderesse affirme que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance en ne tenant pas compte de son témoignage selon lequel son état ne s'était pas amélioré malgré le fait qu'elle ait cessé de travailler en juin 2012. Elle a aussi affirmé que la division générale avait commis une erreur en supposant que son état devrait s’améliorer si elle se libérait du stress de son environnement de travail.

[37] À mon avis, ce motif n'offre aucune chance raisonnable de succès en appel. Il est manifeste que la division générale a accordé un poids considérable au témoignage de la demanderesse portant sur les événements qui l'ont incitée à quitter son dernier emploi à la Mutuelle Economical :

[traduction] Elle a affirmé qu’elle était très heureuse en tant que adjointe de tarification. Des changements dans la société ont mené à la suppression de son poste, mais en raison de l'excellence de son dossier, on lui a offert un poste en comptabilité. Elle n’était pas heureuse dans cet emploi et avait l’impression qu’il interférait avec son désir de devenir tarificatrice. Elle a continué à occuper cet emploi jusqu'à ce qu'elle puisse obtenir un emploi en tarification.

L'appelante a indiqué que son nouveau poste exigeait qu'elle travaille avec un chef d'équipe qui causait beaucoup de stress aux employés. Il avait des problèmes avec le groupe, ce qui suscitait anxiété et inquiétude chez l'appelante. Selon l'appelante, le chef d'équipe pratiquait le harcèlement.

Puisqu'elle ne se plaisait pas dans le service de comptabilité, l'appelante a décidé de suivre des cours et de postuler dans d'autres entreprises. Elle a affirmé qu'elle avait aussi tenté d'obtenir différents emplois au sein de la société. Elle a mentionné qu'il y avait beaucoup de postulants pour un nombre déterminé de postes et qu'elle n'avait pas réussi à obtenir un emploi. Elle a déclaré que les exigences de son emploi étaient excessives, ce qui lui mettait beaucoup de pression sur les épaules. Elle a déclaré, en outre, qu'elle « avait l'impression que son cerveau tremblait ».

[38] Comme il fut mentionné précédemment, la division générale, en tant que juge des faits, a le pouvoir d'apprécier la preuve qui lui est présentée et d'en tirer des conclusions raisonnables. À mon avis, ce que la demanderesse considère comme des « erreurs » devrait plutôt être qualifié de conclusions auxquelles elle n'adhère pas. La demanderesse a déclaré qu'elle était heureuse dans son travail avant d'être transférée au service de la comptabilité, ce qui l'avait fait dévier de son parcours professionnel en plus de l'amener à travailler sous les ordres d'un « tyran ». La décision indique que la division générale a entendu le témoignage de la demanderesse et a conclu que les différentes sources de stress reliées à son dernier emploi ont provoqué de l'anxiété chez la demanderesse et l'ont forcée à quitter son emploi. Je ne m'immiscerais pas dans ces conclusions, qui me semblent raisonnables, tout comme la déduction selon laquelle l'élimination des sources de stress pourrait permettre une certaine amélioration de la situation. Justement, le Dr. Wlodarczyk a remarqué, en décembre 2013, que l’état de la demanderesse s'était réellement amélioré, après qu’elle eut quitté son emploi. Le fait que la demanderesse prétende qu'elle ne s'est pas remise n'est pas nécessairement probant, et ce, particulièrement si la division générale est d'avis, comme en l'espèce, que les troubles de la demanderesse n'ont jamais été considérés comme graves en premier lieu.

Ne pas tenir compte des rapports du Dr Wlodarczyk et du Dr Farooqi

[39] La demanderesse soutient que la division générale a commis une erreur en déclarant, au paragraphe 42 de sa décision, qu'aucun des rapports présentés en preuve ne reposait sur les résultats de tests objectifs. Elle allègue que la division générale n'a pas tenu compte du rapport du 12 décembre 2013 du Dr Wlodarczyk, dans lequel le médecin mentionne que la patiente souffrait de problèmes médicaux et que son pronostic était réservé, ni du rapport du 15 octobre 2014 du Dr Farooqi, dans lequel il rend compte d'un diagnostic de dépression pour l'appelante.

[40] J’estime que ce point ne soulève pas de cause défendable. Les deux rapports font l'objet d'un résumé précis dans la décision de la division générale. Contrairement à ce que prétend la demanderesse, je ne constate aucune preuve selon laquelle les rapports contenaient de prétendues conclusions objectives, provenant habituellement de résultats d'imagerie photographique, de tests en laboratoire ou d'autres moyens technologiques, plutôt que des évaluations « subjectives »ou qualitatives produites grâce à l'intervention humaine. En effet, il est très surprenant qu'on n'y retrouve aucun résultat objectif, alors que les pathologies qui ont un fondement purement psychologique - comme la dépression et l'anxiété chez l'appelante - sont habituellement évaluées, par des professionnels chevronnés, grâce à des critères subjectifs.

Omission de prendre en considération un témoignage

[41] La demanderesse soutient que la division générale n’a pas tenu compte de la preuve testimoniale, dans laquelle la demanderesse a décrit ses différentes affections, toutes présentes avant la fin de sa PMA le 31 décembre 2014, et leurs effets néfastes sur sa vie. Plus précisément, la demanderesse a fait valoir que la division générale n'a pas pris en compte son haut niveau d’anxiété, ses étourdissements, ses maux de tête, ses palpitations cardiaques, ses problèmes gastro-intestinaux, ses nausées, son insomnie et ses troubles cognitifs et ses troubles de la vue, qui selon elle ont entraîné de fréquents clignements de yeux et maux de tête.

[42] À mon avis, cette observation est si large qu’elle revient à me demander de réévaluer la preuve. Comme je l’ai dit, la division générale a déjà amplement discuté les faits et les arguments résumés précédemment. En effet, la demanderesse récapitule sa demande et me demande de statuer en sa faveur, ce que je ne suis pas en mesure de faire puisque je n’ai compétence que pour déterminer si la division générale a commis des erreurs qui se rattachent aux moyens d’appel prescrits et si l’un deux confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Un appel devant la division d'appel n’est pas une occasion pour un demandeur de plaider sa cause de nouveau, et j’estime qu’il n’existe aucune chance raisonnable de succès sur ce motif.

[43] Bien que la discussion de la division générale ne l’ait pas amenée à tirer les conclusions que la demanderesse aurait préférées, mon rôle n’est pas de réévaluer la preuve, mais bien de déterminer si le résultat se justifie et se défend au regard des faits et du droit. On ne peut pas affirmer que la division générale n’a pas expliqué pourquoi elle croyait que la demanderesse était toujours capable de travailler, et, pour cette raison, j’estime qu’un appel sur ce motif n’aurait aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[44] Comme la demanderesse n'a pas présenté de cause défendable pour quelque motif que ce soit, la demande de permission d’en appeler est refusée.

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