Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Contexte

[2] Le demandeur souhaite obtenir la permission d’interjeter appel d’une décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) le 17 décembre 2015. Dans sa décision, la division générale a rejeté la demande de pension d’invalidité du demandeur aux termes du sous-alinéa 42(2)a)(i) du Régime de pensions du Canada (Loi). La décision de la division générale a été rendue en fonction de sa période minimale d’admissibilité (PMA), qui prenait fin le 31 décembre 2015.

Motifs de la demande

[3] Le demandeur a initialement demandé la permission d’en appeler au motif que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence. Autrement dit, la division générale a commis un manquement en vertu de l’alinéa 58(1)a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). Dans une observation présentée plus tard à la division d’appel, le demandeur a également affirmé que la division générale a commis une erreur de droit.

Droit applicable

Que doit établir le demandeur dans sa demande de permission d’en appeler?

[4] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ». Dans le cadre d’une demande de permission d’en appeler, le demandeur doit surmonter un premier obstacle; cet obstacle est cependant moins grand que celui auquel il devra faire face lors de l’instruction de l’appel sur le fond. Pour accorder la permission d’en appeler, la division d’appel doit être convaincue que les motifs d’appel présentés par le demandeur se rattachent aux moyens d’appel énoncés au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. Il lui faut également être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. Il a été établi qu’une chance raisonnable de succès revient à une cause défendableNote de bas de page 1; Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41; Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

Question en litige

[6] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès ?

Analyse

La division générale a-t-elle commis un manquement à un principe de justice naturelle?

[7] Le demandeur a allégué que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence, et ce en tirant des conclusions qui, à son avis, contredisent la preuve médicale. Il a soutenu qu’il existait une preuve et des documents à l’appui montrant qu’il était incapable de travailler et que la division générale a erré en concluant qu’il avait conservé une certaine capacité à travailler.

[8] Le demandeur a également soutenu que son état de santé, tant sur le plan physique que sur le plan mental, demeure instable, et que rien n’indique que son état s’améliorait. Pour prouver son incapacité, le demandeur a fourni une lettre datée du 15 mars 2015, dans laquelle son psychiatre traitant, le Dr Surapaneni, affirme qu’il est inapte au travail.

[9] Les principes de justice naturelle visent à assurer que les parties à une instance ont une occasion de pleinement présenter leur cause et de connaître les preuves qu’elles devront réfuter, ainsi qu’à faire en sorte que leurs causes soient instruites par un décideur impartial. En droit administratif, la « justice naturelle » relève plus précisément de l’équité, qui englobe tous les concepts susmentionnés ainsi que l’équité procédurale.

[10] Il est évident, d’après ses observations, que le demandeur n’est pas d’accord avec la décision rendue par la division générale. Cependant, il n’est pas clair, pour la division d’appel, de quelle façon la division générale a commis un manquement à la justice naturelle en parvenant à sa décision. Le demandeur n’a pas montré de quelle façon la division générale l’a empêché de présenter sa cause ou de connaître la preuve qu’il devait réfuter, ou en quoi elle a été partiale ou agi injustement à son endroit. Cet argument ne donne pas lieu à un motif qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

La division générale a commis une erreur de droit

[11] Le demandeur a soutenu que la division générale a commis une erreur de droit [traduction] « en faisant référence à d’anciennes décisions et en établissant un parallèle entre un cas rapporté et le cadre de la PMA ». (AD1B-3) Il a également soutenu que la division générale a, dans sa décision, présenté une preuve médicale qui permettait de conclure à son invalidité. Il a réitéré qu'il souffrait de multiples incapacités et a allégué que la division générale n’avait pas besoin de conclure que chacune de ses détériorations était grave avant sa PMA, mais bien que son état était grave dans son ensemble. Enfin, le demandeur a affirmé que son employeur avait considérablement modifié son travail et que le défendeur n’avait présenté aucune observation.

La division générale a erré en faisant référence à d’anciennes décisions et en établissant un parallèle entre un cas rapporté et le cadre de la PMA

[12] La PMA du demandeur se terminait le 31 décembre 2015; il s’agit de la date à laquelle ou avant laquelle il devait être réputé comme étant invalide. L’audience devant la division générale a été tenue le 26 octobre 2015. Ainsi, la division devait déterminer s’il était plus probable qu’improbable que le demandeur était atteint d’une invalidité grave et prolongée à la date de l’audience ou avant cette date. Dans sa décision, la division générale a fait référence à la jurisprudence pertinente et a énoncé les principes en découlant. La division générale a fait référence à Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248, et a indiqué que cette cause établissait le principe selon lequel les requérants doivent pouvoir démontrer qu’ils sont atteints d’une invalidité grave et prolongée par l’entremise de preuves médicales et relatives à leurs efforts à trouver un emploi. D'une façon semblable, la division générale s’est aussi référée à la cause Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117, relativement au principe voulant que s’il existe une certaine aptitude à travailler, le requérant doit montrer que ses efforts pour trouver et conserver un emploi ont été infructueux en raison de son état de santé.

[13] La division générale a également fait référence à Dhillon c. MDRH (16 novembre 1998), CP 5834 (CAP), relativement au principe voulant qu’il incombe aux appelants de prouver leur cause selon la prépondérance des probabilités. La division générale a également fait référence à la décision rendue dans Canada (MDRH) c. Rice, 2002 CAF 47, à l’appui de la thèse selon laquelle les conditions du marché du travail ne sont pas pertinentes lorsqu’il s’agit de déterminer si un requérant a droit ou non à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

[14] Il est de jurisprudence constante que le Tribunal mène ses activités dans le respect dans sa loi habilitante : Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300. À cet égard, la division générale et la division d’appel du Tribunal tiennent compte de la jurisprudence et des principes juridiques établis par la jurisprudence lorsqu’elles doivent statuer sur des appels. Ainsi, on ne pourrait affirmer que la division générale a commis une erreur de droit en se référant à la jurisprudence et en établissant des parallèles entre les principes juridiques qui en découlent et la cause du demandeur. La division d’appel juge que cette observation ne soulève pas un moyen d’appel qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

La division générale a présenté des preuves médicales permettant de conclure à l’invalidité du demandeur

[15] Une preuve médicale importante avait été présentée à la division générale, et celle-ci l’a énoncée aux paragraphes 8 à 26 de la décision. Elle avait également reçu des rapports médicaux des Drs Surapaneni et Segedi. Le Dr Surapaneni indiquait qu’il était d’avis que le demandeur était anxieux, déprimé, et prédisposé aux accidents. Il a recommandé qu’une pension d’invalidité du RPC soit octroyée au demandeur. (GD3-36) Dans une lettre adressée au Dr Segedi, le Dr Surapaneni a diagnostiqué un trouble anxieux associé à une dépression chez le demandeur. (GD3-48) Il lui a prescrit 20 mg de Prozac par jour et 0,5 mg de lorazépam. Dans son rapport daté du 19 juin 2015, le Dr Surapaneni a augmenté la dose de lorazépam à 1 mg. Il a également noté que c’était l’épouse du demandeur, et non le demandeur lui-même, qui avait fourni les renseignements relatifs à ses problèmes de santé. (GD4-6) Dans une lettre datée du 8 juillet 2015, le Dr Segedi a indiqué que le demandeur disait souffrir de symptômes persistants d’anxiété et de dépression que ses médicaments ne soulageaient pas. Le Dr Segedi a décrit le demandeur comme [traduction] « ayant l’air déprimé, démuni et désespéré ». (GD4-7)

[16] L’autre preuve médicale présentée à la division générale touchait les problèmes cardiaques du demandeur, son pontage coronarien et ses autres symptômes. Comme je l’ai mentionné, la division générale a résumé la preuve médicale dans sa décision. Elle a également rapporté les témoignages du demandeur et de son épouse.

[17] La division générale a évalué la totalité de la preuve pour en déterminer le poids. Elle a conclu que la preuve n’appuyait pas une conclusion voulant que le demandeur était invalide. La division générale a tenu compte de la preuve provenant des Drs Surapaneni et Segedi. Si elle a conclu que ces médecins appuyaient le demandeur, la division générale a également conclu que leurs rapports ne permettaient pas de conclure à une invalidité grave et prolongée au sens de la Loi.

La division générale aurait pu conclure que son état général était grave

[18] L’argument du demandeur soulève la question de l’effet cumulatif de multiples affections. La jurisprudence abondante de la Commission d’appel des pensions indique que, dans le cas d’un requérant qui est atteint de multiples problèmes de santé, il faut tenir compte de son état physique dans son ensemble : Taylor c. MDRH (4 juillet 1997), CP 4436. Quoique les décisions de la Commission d’appel des pensions n’ont pas force exécutoire, la division d’appel a tout de même jugé que l’affaire Taylor avait une force persuasive considérable.

[19] En l’espèce, la division générale a fait référence à l’état de santé du demandeur et l’a discuté, en plus de discuter son problème au cœur et les symptômes qui l’accompagnent. Pour ce qui est de l’état de santé mentale du demandeur, la division générale a conclu que son traitement était conservateur et qu’il semblait bien être contrôlé au moyen de médicaments et d’une thérapie. Il n’a pas dû être hospitalisé. La division générale a également conclu que la preuve et le témoignage indiquaient que son problème cardiaque et les symptômes l’accompagnant s’étaient stabilisés. À la lumière de sa discussion des affections du demandeur, la division d’appel conclut qu’on ne peut pas affirmer que la division générale a ignoré l’ensemble des symptômes du demandeur ou qu’elle n’en ait pas tenu compte. Ainsi, la division générale n’a commis aucune erreur de droit dans la manière dont elle a traité les problèmes de santé et de santé mentale du demandeur.

L’employeur du demandeur a modifié considérablement son travail

[20] Les requérants sont tenus de trouver un emploi de substitution : Villani; Klabouch. Le demandeur prétend que son employeur a apporté des changements considérables à son travail; cependant, cette allégation contredit sa preuve selon laquelle son médecin avait affirmé qu’il ne pouvait pas travailler même si son employeur lui avait offert de modifier son travail. Le demandeur n’a pas cherché un autre emploi. Étant donné les circonstances, la division d’appel n’est pas convaincue par son observation. La permission d’en appeler ne peut pas être accordée sur ce motif.

Le défendeur n’a présenté aucune observation

[21] Cette observation n’est pas corroborée puisque le défendeur a, en fait, présenté des observations écrites, dans lesquelles il a indiqué que la preuve n’appuyait pas une conclusion voulant que les problèmes de santé et de santé mentale du demandeur le rendaient régulièrement incapable de trouver et de conserver tout emploi véritablement rémunérateur. Ces observations soutenaient également que le demandeur n’avait pas essayé de réintégrer la population active. (GD5) Par conséquent, il ne s’agit pas d’un motif qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[22] Compte tenu de ce qui précède, la division d’appel conclut que les observations et les objections formulées par le demandeur lui demandent essentiellement d’apprécier la preuve de nouveau. L’affaire Tracey a établi clairement que le rôle de la division d’appel n’est pas d’apprécier la preuve de nouveau de façon à en arriver à une conclusion qui soit plus favorable au demandeur. La division d’appel n’est pas convaincue que le demandeur ait soulevé des motifs d’appel qui auraient une chance raisonnable de succès.

[23] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.