Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est refusée.

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’interjeter appel de la décision rendue par la division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) le 22 janvier 2016. La DG a tenu une audience par comparution en personne et a déterminé que la demanderesse n’était pas admissible à une pension d’invalidité aux termes du Régime de pensions du Canada (Loi), puisqu’elle a conclu que son invalidité n’était pas « grave » avant la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA), le 31 décembre 2014.

[2] Le 12 avril 2016, dans les délais prescrits, la demanderesse a présenté à la division d’appel (DA) une demande de permission d’en appeler précisant ses motifs d’appel.

[3] Pour accorder cette demande, je dois être convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Aperçu

[4] La demanderesse avait 46 ans lorsqu’elle a présenté sa demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC), le 6 février 2013. Dans sa demande, elle a révélé avoir une éducation équivalente à une 12e année, elle qui était allée à l’école en Guyane, son pays d’origine. Après être arrivée au Canada en 1996, elle a occupé différents emplois dans des usines. Elle a plus tard obtenu un diplôme à un programme d’un an en administration des affaires, quoiqu’elle n’ait jamais décroché un travail de bureau. Elle avait plus récemment occupé un emploi auprès d’un fabricant de fournitures d’imagerie, poste qu’elle a quitté en novembre 2012, car elle ne pouvait plus supporter le stress et le niveau bruit au travail.

[5] Durant l’audience tenue devant la DG le 11 janvier 2016, la demanderesse a déclaré qu’elle souffrait de dépression depuis de nombreuses années. Elle a indiqué qu’elle était auparavant capable de travailler en dépit de son état de santé, mais qu’elle n’était plus capable de le faire. Elle se portait bien ou moins bien, selon la journée. Les jours où elle se sentait bien, elle sortait avec son mari et se disait qu’elle aimerait encore avoir un emploi. Les jours où elle n’allait pas bien, elle n’avait pas assez de motivation pour sortir du lit. Elle prenait des antidépresseurs mais ceux-ci n’avaient qu’un effet limité.

[6] Dans sa décision, la DG a rejeté l’appel de la demanderesse après avoir conclu que, selon la  prépondérance des probabilités, elle avait conservé une certaine capacité à travailler et ne souffrait pas d’une invalidité grave à la date de la PMA. La DG a noté que son médecin de famille et son psychiatre traitant avaient tous deux insisté pour qu’elle retourne travailler. Elle a également conclu que la demanderesse n’avait pas déployé suffisamment d’efforts pour trouver un emploi de substitution qui lui convienne, compte tenu de ses limitations. En dépit de ses compétences en anglais et de son diplôme en administration des affaires, elle n’avait pas essayé de chercher un travail de bureau après avoir quitté son emploi à l’usine.

Droit applicable

[7] Comme le prescrivent les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la DA sans permission et la DA accorde ou refuse cette permission.

[8] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que la DA rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[9] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la DG n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) la DG a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) la DG a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[10] Pour que la permission d’en appeler soit accordée, il faut qu’un motif d’appel susceptible de donner gain de cause à l’appel soit présenté : Kerth c. CanadaNote de bas de page 1. La Cour d’appel fédérale a établi qu’une cause défendable en droit revient à déterminer si un appel a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique  : Fancy c. CanadaNote de bas de page 2.

[11] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une instruction de l’affaire sur le fond. C’est un premier obstacle que la demanderesse doit franchir, mais celui-ci est moins important que celui auquel elle devra faire face lors de l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, la demanderesse n’a pas à prouver sa thèse.

Question en litige

[12] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès ?

Observations

[13] La demanderesse a présenté les observations suivantes dans sa demande de permission d’en appeler :

  1. Elle souffre d’une dépression grave depuis 13 ans et a déjà précisé de quelle façon cela l’empêche de travailler;
  2. Même si elle est retournée aux études, elle ne serait pas en mesure de travailler, même un emploi à temps partiel, puisqu’elle ne parviendrait pas à répondre aux attentes d’un patron en matière d’assiduité et de productivité.

[14] La demanderesse a également joint à ses observations une lettre non signée de la clinique CAIRN de santé et d’aide à la famille pour les femmes de Brampton, datée du 4 avril 2016. Le 18 août 2016, en réponse à la DA qui lui avait demandé de préciser ses motifs d’appel, la demanderesse a soumis une lettre dans laquelle elle a souligné ce qui suit :

  1. La DG n’a pas observé les principes de justice naturelle et d’équité. Elle avait souffert durant 20 ans d’une maladie grave et prolongée, qui entraînait chez elle des troubles de concentration, d’humeur, de mémoire, de sommeil et d’énergie;
  2. Elle était en bonne santé lorsqu’elle travaillait comme standardiste en Guyane. Au Canada, elle était retournée aux études mais elle n’avait pas été capable d’explorer la carrière qu’elle avait choisie en raison de sa maladie;
  3. Elle avait travaillé pendant de nombreuses années au Canada en dépit de sa maladie, [traduction] « se gavant de pilules » chaque jour afin de pouvoir affronter la vie quotidienne, mais elle avait fini par tomber malade constamment. Son médecin de famille l’avait recommandée à un psychiatre, mais celui-ci lui avait dit de retourner travailler. Elle avait essayé de travailler à temps partiel durant quelques heures, mais elle ne pouvait pas tolérer le travail. Les employeurs ne veulent pas d’employés qui sont régulièrement absents.

Analyse

Affection grave et prolongée

[15] La demanderesse suggère que la DG a rejeté son appel en dépit d’une preuve médicale montrant que son état général était [traduction] « grave et prolongé » conformément aux critères du RPC, et sans complètement tenir compte de ses symptômes de dépression et de ses efforts pour conserver un emploi.

[16] Mis à part ces allégations générales, la demanderesse n’a pas précisé de quelle manière la DG n’a pas observé un principe de justice naturelle, a commis une erreur de droit ou a tiré une conclusion de fait erronée dans sa décision. D’après mon examen de la décision, la DG a analysé en détail les affections (principalement la dépression) dont la demanderesse a allégué être atteinte et a cherché à déterminer si celles-ci affectaient sa capacité à régulièrement détenir une occupation véritablement rémunératrice en date de sa PMA, soit le 31 décembre 2014. Ce faisant, la DG a tenu compte de la scolarité de la demanderesse ainsi que de ses efforts (ou de son manque d’efforts) pour obtenir un emploi administratif.

[17] Quoiqu’un demandeur n’est pas tenu de prouver ses motifs d’appel au stade de la demande de permission d’en appeler, ceux-ci doivent tout de même avoir un certain fondement rationnel pour que leurs observations puissent se rattacher aux moyens d’appel admissibles. La DA ne devrait pas avoir besoin de supposer le véritable fondement d’une demande. Il ne suffit pas, pour un demandeur, d’indiquer simplement qu’il n’est pas d’accord avec la décision de la DG, ou de faire savoir qu’il a toujours été convaincu que ses problèmes de santé le rendaient invalide au sens de la Loi.

[18] Comme aucune erreur précise n’a été alléguée, je suis forcé de conclure que les motifs d’appel soulevés par la demanderesse sont tellement généraux qu’ils reviennent à me demander de statuer de nouveau sur toute l’affaire. Si la demanderesse me demande que j’examine et que j’apprécie la preuve de nouveau et que substitue ma décision à celle de la DG pour qu’elle lui soit favorable, je ne suis pas en mesure de le faire. Je n’ai compétence que pour déterminer si l’un des motifs d’appel de la demanderesse se rattache aux moyens d’appel prescrits au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS et si l’un deux a une chance raisonnable de succès.

Document supplémentaire

[19] En déposant la lettre de la clinique CAIRN de santé et d’aide à la famille pour les femmes, la demanderesse semble demander à la DA d’en tenir compte et d’infirmer la décision de la DG en sa faveur. Il m’est impossible de faire cela étant donné la portée restreinte du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. La DA n’a pas compétence pour rendre une décision sur le fond du litige. Une fois qu’une audience a eu lieu, très peu de raisons permettent de justifier de tenir compte de nouveaux renseignements ou de renseignements supplémentaires. Un demandeur pourrait envisager de présenter une demande de modification ou d’annulation de la décision à la DG. Cela dit, il faudrait que ce demandeur se conforme aux exigences prescrites à l’article 66 de laLoi sur le MEDS et aux articles 45 et 46 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.En plus de devoir respecter des délais et des exigences strictes pour obtenir gain de cause dans le cadre d’une demande d’annulation ou de modification, le demandeur doit démontrer que les faits nouveaux sont essentiels et qu’ils n’auraient pu être connus au moment de l’audience malgré l’exercice d’une diligence raisonnable.

Conclusion

[20] La demanderesse n’a soulevé aucun motif d’appel se rattachant aux moyens prescrits au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès. La demande est donc rejetée.

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