Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Aperçu

[1] Le demandeur souhaite obtenir la permission d'en appeler d'une décision de la division générale datée du 16 décembre 2015, qui a conclu que le demandeur n'était pas admissible à une pension d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada, puisque le membre a jugé que l'invalidité n'était pas « grave » à la date de fin de sa période minimale d'admissibilité, le 31 décembre 2014, ou avant cette date. La demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler le 23 février 2016, faisant valoir plusieurs moyens d’appel. En réponse à une requête pour détails présentée par le Tribunal de la sécurité sociale, le demandeur a présenté des observations supplémentaires le 19 septembre 2016.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Observations

[3] Au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social (LMEDS), il est prévu que les seuls moyens d’appels sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs pour en appeler se rattachent à l’un des moyens d’appel admissibles et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale du Canada a confirmé cette approche dans l'arrêt Tracey c. Canada (Procureur général), (2015) CF 1300.

a) Admissibilité à une pension d'invalidité

[5] Dans la demande de permission d'en appeler, le demandeur soutient qu'il devrait être admissible à une pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada parce qu'il a contribué à ce régime. Il fait également valoir que la décision est injuste parce qu'il est atteint d'une invalidité et que, par conséquent, il n'a pas été capable de travail ou de diriger son entreprise depuis son accident survenu en 2010. Il subit également des pressions financières.

[6] L'alinéa 44(1)b) du Régime de pensions du Canada prévoit les exigences qu'un requérant doit satisfaire pour être admissible à une pension d'invalidité. La division générale a énoncé ces exigences au paragraphe 3 de la décision. Il ne suffit pas de satisfaire aux exigences en matière de cotisation, puisqu'un requérant doit également prouver qu'il est invalide au sens du Régime de pensions du Canada..

[7] Dans l'arrête Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248, la Cour d’appel fédérale a déclaré ce qui suit :

Cette réaffirmation de la méthode à suivre pour définir l’invalidité ne signifie pas que quiconque éprouve des problèmes de santé et des difficultés à se trouver et à conserver un emploi a droit à une pension d’invalidité. Les requérants sont toujours tenus de démontrer qu’ils souffrent d’une « invalidité grave et prolongée » qui les rend « régulièrement incapables de détenir une occupation véritablement rémunératrice ». Une preuve médicale sera toujours nécessaire, de même qu’une preuve des efforts déployés pour se trouver un emploi et de l’existence des possibilités d’emploi.

[8] Le demandeur demande essentiellement que l’on examine de nouveau la question en litige à savoir si un délai supplémentaire devrait lui être accordé afin qu’il puisse présenter son avis d’appel devant la division générale concernant son admission à une pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada. Comme la Cour fédérale l’a établi dans l'arrêt Tracey, ce n’est pas le rôle de la division d’appel d’apprécier de nouveau la preuve. Dans le cadre d'une demande de permission d'en appeler, son rôle est plutôt de déterminer si la division générale a commis une erreur de droit, si elle a rendu une conclusion de fait erronée ou si elle n'a pas observé un principe de justice naturelle, comme il est énoncé au paragraphe 58(1) de la LMEDS. Aucune compétence ne me permet d’intervenir au motif qu’une décision est injuste à l’égard du demandeur, si la décision n’est pas autrement sujette à révision.

[9] Dans l’arrêt Miceli-Riggins c. Canada (Procureur général), 2013 CAF 158, la Cour d’appel fédérale a examiné les objets du Régime de pensions du Canada.La Cour s’est exprimée en ces termes :

[69] […] Le Régime n’est pas censé satisfaire les besoins de tout le monde. C’est plutôt un régime contributif qui remplace en partie des revenus dans certaines circonstances définies de façon technique. Il est conçu pour être complété par les régimes de pension privés, l’épargne privée, ou les deux. Voir l’arrêt Granovsky c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), CSC (CanLII), [2000] 1 R.C.S. 703, au paragraphe 9, [2000] 1 R.C.S. 703).

[70] En fait, on ne peut même pas dire du Régime qu’il vise à accorder des prestations à tels ou tels groupes démographiques. Il convient plutôt de le considérer comme une assurance obligatoire basée sur des cotisations et un régime de pension conçu pour fournir une certaine aide – loin d’être complète – aux personnes qui répondent à des critères de qualification techniques.

[71] Tout comme dans un régime d’assurance, les prestations sont payables en fonction de critères d’admissibilité hautement techniques.

. . .

[74] Pour reprendre les termes de la Cour suprême :

Le [Régime] est un régime d’assurance sociale destiné aux Canadiens privés de gains en raison d’une retraite, d’une déficience ou du décès d’un conjoint ou d’un parent salarié. Il s’agit non pas d’un régime d’aide sociale, mais plutôt d’un régime contributif dans lequel le législateur a défini à la fois les avantages et les conditions d’admissibilité, y compris l’ampleur et la durée de la contribution financière d’un requérant.

(arrêt Granovsky, précité, au paragraphe 9)

(souligné par la soussignée)

[10] Les prestations d’invalidité ne sont pas payables à toute personne souffrant d’une invalidité. Il est clair qu’un requérant doit satisfaire à d’autres exigences pour être admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada. Le fait que le demandeur a versé des cotisations valides au Régime de pensions du Canada est en soi sans importance, tout comme l’incidence de la décision de la division générale sur le demandeur, puisqu’il devait répondre à des critères hautement techniques pour être admissible à une pension d’invalidité. La division générale a conclu que le demandeur n’avait pas satisfait à ces exigences. Le Régime de pensions du Canada ne permet pas à la division générale (ni à la division d’appel, en fait) de tenir compte de l’incidence de ses décisions sur les parties, et il ne lui confère pas le pouvoir discrétionnaire de tenir compte de facteurs qui sont externes au Régime de pensions du Canada lorsqu’il s’agit de déterminer si un requérant est invalide conformément à la législation.

[11] Je ne suis pas convaincue qu’un appel fondé sur ce moyen a une chance raisonnable de succès.

b) Conseils de Service Canada

[12] Le demandeur soutient également que Service Canada aurait dû l'aviser de retenir les services d'un avocat, car il aurait été en mesure de mieux présenter son cas depuis le début.

[13] Comme il a été mentionné précédemment, les moyens d'appel prévus par la LMEDS sont assez limités. Cette observation particulière ne porte sur aucun des moyens d'appel prévus au paragraphe 58(1) de la LMEDS. Quoi qu'il en soit, selon la lettre du demandeur datée du 13 juillet 2015, il irait à la recherche de conseils juridiques. Il ne peut donc pas laisser entendre qu'il n'était pas au courant de son droit à une représentation par un avocat. Je ne suis pas convaincue que ce moyen a une chance raisonnable de succès.

c) Avis de cotisation

[14] Le demandeur prétend que la division générale n'a pas tenu compte de ses avis de cotisation, qui représentent en partie ses [traduction] « relevés d'emploi autonome ». Il a joint des copies de son avis de cotisation pour l'année 2015, qui fait état d'un revenu déclaré de 6 500 $ pour l'année 2015. Le dossier d'audience dont disposait la division générale comprenait des copies de ses déclarations de revenus de 1995 à 2014 (GT8), les avis de cotisation pour les années 2011 (GT1-16 et GT1-17), 2012 (GT1-48 et GT1-49) et 2014 (GT7-3 à GT7-5), et l'avis de nouvelle cotisation pour l'année 2014 (GT14-2 à GT14-5). Cependant, il est évident que la division générale a examiné les renseignements en matière d'impôt sur le revenu. Aux paragraphes 6 et 7, la division générale a souligné que le demandeur avait présenté des déclarations de revenus pour les années 2012 à 2014 et qu'il avait présenté une nouvelle déclaration de revenus pour l'année 2014 après juillet 2014, ce qui a entraîné une modification de la période minimale d'admissibilité.

[15] Le demandeur n'a fourni aucune autre explication pour justifier la raison pour laquelle il a présenté les avis de cotisation dans le cadre de la demande de permission d'en appeler. Si le demandeur se fonde sur ces documents pour prouver les cotisations au Régime de pensions du Canada, comme je l'ai mentionné précédemment, les contributions à elles seules ne suffisent pas pour prouver l'admissibilité à une pension d'invalidité.

[16] Si le demandeur se fonde sur les déclarations de revenus pour démontrer qu'il était gravement invalide, tout revenu déclaré dans les avis de cotisation ne constitueront toutefois pas une preuve déterminante relativement à la gravité, car il est impossible de considérer ces avis comme une mesure de la capacité d'un requérant de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice. Dans le même ordre d'idées, particulièrement dans une situation où les revenus d'emploi autonome sont pris en considération, ceux-ci pourraient ne pas être indicatifs du fait que les efforts déployés par le demandeur pour obtenir et conserver un emploi auraient pu être infructueux en raison de son état de santé. En effet, le demandeur a reconnu dans sa lettre du 18 juillet 2015 que tout revenu déclaré entre 2010 et 2014 représentait la vente d'articles personnels, et non des revenus d'emploi (GT11-1).

[17] Il se pourrait que ce soit parce que toute déclaration de revenus représentée ou ultérieure, comme l'avis de cotisation de 2015, pourrait avoir comme effet de modifier la période minimale d'admissibilité, mais je ne suis pas en mesure de prendre en considération les éléments de preuve dont la division générale n'a pas été saisie. Comme la Cour fédérale l'a conclu dans l'arrêt Canada (Procureur général) c. O'Keefe, 2016 CF 503, au paragraphe 28, contrairement à son prédécesseur la Commission d'appel des pensions, un appel devant la division d'appel ne permet pas la présentation de nouveaux éléments de preuve et cet appel est limité aux trois moyens énoncés au paragraphe 58 de la LMEDS.

[18] Le demandeur laisse entendre que la division générale n'a pas tenu compte de l'avis de cotisation pour l'année 2014. Toutefois, la division générale a renvoyé précisément à cet avis au paragraphe 7, ce qui a entraîné une modification de la période minimale d'admissibilité.

[19] Le demandeur laisse entendre que la division générale aurait dû prendre en considération son avis de cotisation pour 2015, mais ce document a été produit après l'audience devant la division générale, soit le 29 août 2016 (AD1A-2). Par conséquent, cette observation n'a aucune pertinence dans le cadre de la demande de permission d'en appeler.

[20] Si l'avis de cotisation pour 2015 modifie la période minimale d'admissibilité, le demandeur peut tenir compte de toute option dont il dispose, qu'il s'agisse de la présentation d'une toute nouvelle demande ou d'une tout autre option. Cependant, il serait encore tenu de produire des éléments de preuve pour établi que son invalidité était grave et prolongée à la date de fin de la période minimale d'admissibilité ou avant cette date.

Conclusion

[21] Compte tenu des considérations qui précèdent, la demande de permission d’en appeler est refusée.

Corrigendum daté du 3 octobre 2016

Dans les motifs et décision de la division d'appel datés du 28 septembre 2016, les modifications suivantes ont été apportées :

[1] À la page 3, au paragraphe 8, les mots « à savoir si un délai supplémentaire devrait lui être accordé afin qu’il puisse présenter son avis d’appel devant la division générale » doivent être remplacés par « concernant son admission à une pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada ».

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