Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est accueilli.

Introduction

[2] Il s’agit d’un appel de la décision de la division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) rendue le 10 février 2016 et qui a rejeté la demande de pension d’invalidité de l’appelant au motif que ce dernier n’avait pas prouvé que son invalidité était grave au sens du Régime de pensions du Canada (RPC), au moment où sa période minimale d’admissibilité (PMA) a pris fin, c’est-à-dire, au 31 décembre 2011. La permission d’en appeler a été accordée le 12 septembre 2016 au motif que la DG pourrait avoir commis une erreur en rendant sa décision.

Aperçu

[3] L’appelant a présenté une demande de prestations d’invalidité aux termes du RPC le 30 septembre 2013. Il a indiqué qu’il avait 58 ans et avait terminé sa dixième année en Inde, son pays d’origine. Après avoir immigré au Canada en 1990, il a travaillé dans une usine de produits plastiques pendant 14 ans, puis il a occupé plusieurs emplois manuels temporaires. Il venait d’être mis à pied de l’un de ces empois en octobre 2010 lorsqu’il a été impliqué dans un accident de la route, ce qui lui a causé des lésions aux tissus mous et des douleurs constantes au bas du dos, au cou, aux épaules et aux genoux.

[4] L’intimé a refusé sa demande initiale et la demande de révision au motif que son invalidité n’était ni grave ni prolongée à la date de fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Le 15 juillet 2014, l’appelant a interjeté appel de ces refus devant la DG.

[5] Le 6 janvier 2016, à l’audience tenue par téléconférence devant la DG, l’appelant a déclaré que ses troubles l’avaient empêché d’exercer des activités physiques routinières. Il a indiqué qu’il avait aggravé l’état de son dos en décembre 2011 lorsqu’il a glissé et est tombé accidentellement, et que depuis, il a eu un accident vasculaire cérébral et s’est fracturé la hanche.

[6] Dans sa décision, la DG a conclu que l’invalidité de l’appelant ne respectait pas la norme applicable quant à la gravité, soulignant qu’aucun de ses spécialistes n’avait conclu à une invalidité grave. Bien que la DG ait reconnu que l’appelant souffrait de certains troubles, elle n’était pas convaincue que cela l’empêchait d’occuper toute occupation véritablement rémunératrice. Elle a également conclu que, malgré sa capacité de travail résiduelle, l’appelant n’avait pas déployé suffisamment d’efforts pour se trouver un emploi non physique qui répondrait mieux à ses limitations.

[7] Le 4 mai 2016, le représentant de l’appelant a présenté une demande de permission d’en appeler auprès de la division d’appel (DA) du Tribunal de la sécurité sociale, soutenant que la DG avait commis des erreurs de fait et de droit. Le 12 septembre 2016, la DA a accordé la demande de permission d’en appeler au motif que la DG pourrait avoir commis une erreur en n’appliquant pas les principes énoncés dans l’affaire Villani c. CanadaNote de bas de page 1.

[8] J’ai décidé qu’une audience de vive voix n’était pas nécessaire et que l’appel pouvait être instruit sur le fondement du dossier documentaire pour les motifs suivants :

  1. Le dossier est complet et ne nécessite aucune clarification ;
  2. Le mode d’audience respectait les exigences du Règlement du Tribunal de la sécurité sociale à savoir qu’il doit procéder de façon la plus informelle et expéditive que le permettent les circonstances, l’équité et la justice naturelle.

[9] Les observations de l’appelant ont été énoncées dans sa demande de permission d’en appeler. Le 30 septembre 2016, l’intimé a présenté une lettre dans laquelle il indiquait qu’il consentait à ce que l’appel soit accueilli.

Droit applicable

[10] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence ;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier ;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[11] Selon le paragraphe 59(1) de la LMEDS, la DA doit déterminer s’il convient de rejeter l’appel, de rendre la décision que la DG aurait dû rendre, de renvoyer l’affaire à la DG pour révision conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou de confirmer, d’infirmer ou de modifier totalement ou partiellement la décision de la DA.

[12] L’alinéa 44(1)b) du RPC énonce les conditions d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans ;
  2. b) ne touche pas une pension de retraite du RPC ;
  3. c) est invalide ;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[13] Le calcul de la PMA est important puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date ou avant la date marquant la fin de sa PMA.

[14] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) de la Loi, l’invalidité est définie comme une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée comme atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[15] Les questions dont je suis saisie sont les suivantes :

  1. Est-ce que la DG a commis une erreur en n’appliquant pas l’affaire Villani ?
  2. Si tel est le cas, quel redressement est approprié en l’espèce ?

Observations

[16] L’appelant soutient que la DG a commis une erreur parce qu’elle n’a pas appliqué les principes énoncés dans l’affaire Villani, lesquels prévoient que le critère du caractère grave de l’invalidité doit être évalué dans un contexte réaliste en tenant compte de facteurs comme l’âge, le niveau de scolarité, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[17] Comme il a été mentionné précédemment, l’intimé a accepté cette opinion et a recommandé que l’affaire soit renvoyée à la DG.

Analyse

[18] Après examen de la preuve et du droit applicable, je dois souscrire à l’avis des parties selon lequel la DG a commis une erreur de droit en rendant sa décision. Bien que la DG ait dûment résumé le raisonnement de l’affaire Villani au début de son analyse, je n’ai relevé aucune tentative pour réellement appliquer ces principes aux circonstances particulières de l’appelant. Comme indiqué dans le résumé de la preuve, la DG était bien au courant du fait que l’appelant était un immigrant dans ce pays, qu’il maîtrisait mal l’anglais et qui était dans la mi-cinquantaine au cours de sa PMA. Elle a également noté que sa vie professionnelle a consisté à occuper des emplois manuels et qu’il avait des connaissances limitées des ordinateurs. Malgré cela, l’analyse de la DG, hormis la citation pro forma de l’affaire Villani, était entièrement composée d’une discussion sur les incapacités médicales prétendues de l’appelant et sur ce qui était prétendument ses efforts insuffisants pour retourner au travail. Bien qu’il s’agissait là de facteurs importants, ils auraient dû être abordés dans le contexte global de l’appelant. Autrement dit, il incombait à la DG d’examiner de près l’employabilité d’une personne en situation réelle et avec le profil de cet appelant.

Conclusion

[19] Pour les motifs discutés précédemment, l’appel est accueilli d’après le moyen d’appel qui avait précédemment justifié d’octroyer la permission d’en appeler.

[20] L’article 59 de la LMEDS énonce la réparation que la DA peut accorder pour un appel. Pour éviter tout risque de crainte de partialité, il convient en l’espèce de renvoyer l’affaire à la DG pour une nouvelle audience devant un membre différent.

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