Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Comparutions

L. G. : Appelante

Deborah Hastings : Représentante de l’appelante

Shyla Oates-Pennell : Technicienne juridique (qui aide Mme Hastings)

Introduction

[1] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) de l’appelante le 8 octobre 2014. L’intimé a rejeté sa demande, initialement et lors du réexamen. L’appelante a interjeté appel de la décision rendue au terme du nouvel examen auprès du Tribunal de la sécurité sociale le 19 janvier 2016.

[2] Cet appel devait initialement être instruit par téléconférence.

[3] Dans une lettre datée du 20 septembre 2016 [GD6], Mme Hastings a demandé que le mode d’audience soit changé pour une audience en personne ou par vidéoconférence, car l’appelante est extrêmement dépressive.

[4] L’avis d’audience daté du 22 septembre 2016 [GDOA] indique que le mode d’audience a été changé pour une vidéoconférence pour les raisons suivantes :

  1. l’appelante sera la seule partie à assister à l’audience;
  2. cette façon de procéder est celle qui permet le mieux de répondre aux besoins d’adaptation de certaines parties ou de certains participants;
  3. le matériel nécessaire à une vidéoconférence est disponible dans la région où réside l’appelante;
  4. il manque de l’information au dossier ou il est nécessaire d’obtenir des clarifications;
  5. cette façon de procéder est conforme à l’exigence énoncée dans le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Demande d’ajournement

[5] Le 6 octobre 2016, Mme Hastings a demandé un ajournement parce que des renseignements médicaux pertinents supplémentaires avaient été reçus. [GD9]

[6] Le 7 octobre 2016, [GDOB] le Tribunal a refusé la demande d’ajournement pour les raisons suivantes :

  • Les documents que la partie souhaitait déposer tardivement étaient disponibles avant la fin de la période de dépôt, et la partie ne les a pas soumis à temps.
  • La représentante de l’appelante a déposé un avis de procéder daté du 29 août 2016, dans lequel elle a indiqué qu’elle ne souhaite pas ajouter de document au dossier. La représentante de l’appelante n’a pas demandé l’autorisation de déposer les documents additionnels et a expliqué pourquoi ils devraient être acceptés, en dépit de l’avis de procéder.
  • Si la représentante de l’appelante souhaite déposer des documents additionnels, elle doit immédiatement remettre des copies papier de ces documents au Tribunal et expliquer pourquoi ils devraient être acceptés. Si la représentante de l’appelante respecte ces conditions, elle peut demander l’autorisation de déposer les documents additionnels à l’audience.
  • L’audience aura lieu comme comme prévu.

Documents supplémentaires

[7] Le 7 octobre 2016, Mme Hastings a déposé les documents supplémentaires [GD10], comprenant 355 pages de dossiers médicaux qu’elle avait reçus sur CD le 24 mai 2016 de la part des avocats spécialisés en préjudice qui représentaient l’appelante dans un litige lié à un accident de véhicule automobile.

[8] Au début de l’audience, Mme Hastings a expliqué que c’est par inadvertance qu’elle n’a pas déposé initialement les documents supplémentaires, et qu’elle a immédiatement communiqué avec le Tribunal lorsqu’elle a appris la semaine dernière que les documents n’avaient pas été déposés.

[9] Le Tribunal a déterminé que les documents supplémentaires étaient très pertinents et que, dans l’intérêt de la justice, ils devraient être acceptés, et l’intimé devrait se voir accorder la possibilité raisonnable de déposer des observations supplémentaires.

[10] Après avoir entendu le témoignage de vive voix de l’appelante et avoir pris connaissance de ses observations, le Tribunal a procédé à l’ajournement administratif de l’audience, selon les modalités suivantes :

  1. 1. L’intimé doit avoir jusqu’au 15 novembre 2016 pour déposer des observations supplémentaires, en guise de réponse aux documents déposer tardivement.
  2. 2. Une fois les observations supplémentaires reçues, le Tribunal déterminera si une autre audience est nécessaire. Dans l’affirmative, elle sera vraisemblablement tenue par téléconférence.
  3. 3. Si une autre audience n’est pas nécessaire, le Tribunal transmettra ses motifs de décision.

[11] L’intimé a présenté ses observations supplémentaires le 14 octobre 2016 [GD12]. L’intimé a soutenu que : les rapports médicaux supplémentaires contiennent des conclusions similaires à celles qui avaient été présentées précédemment, et ils démontrent que l’appelante a subi des blessures de type entorse musculo-ligamentaire lors de son accident de la route en 2008, et que par la suite elle a eu de la douleur chronique au cou, aux épaules, au dos, et aux genoux, et a souffert de dépression; comme il est indiqué dans les observations précédentes, son traitement est demeuré conservateur, et les tests diagnostiques et rapports de consultation ne corroborent pas l’existence d’un trouble physique ou psychologique grave à la fin de sa PMA; et elle n’a fourni aucun nouveau résultat justifiant le changement de position concernant le rejet de sa demande de prestations d’invalidité du RPC.

Droit applicable

[12] L’alinéa 44(1)b) du Régime de pensions du Canada (la Loi) énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne touche pas de pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[13] Le calcul de la PMA est important, car une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au moment où sa PMA a pris fin ou avant cette date.

[14] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) de la Loi, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[15] Le Tribunal est d’avis que la date marquant la fin de la PMA est le 31 décembre 2012. [Registre des gains : GD2- 5]

[16] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer s’il est plus probable qu’improbable que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date à laquelle sa PMA a pris fin ou avant cette date.

Contexte

[17] L’appelante avait 52 ans à la date marquant la fin de sa PMA, soit le 31 décembre 2012; elle a maintenant 56 ans. Elle est née au Sri Lanka. Elle a d’abord émigré en Grande‑Bretagne (où elle enseignait les mathématiques) et est venue au Canada en 1986. Lorsqu’elle s’est blessée dans un accident de véhicule automobile en juillet 2008, elle travaillait comme préposée aux services de soutien à la personne (PSSP) et étudiait à temps partiel pour obtenir un diplôme d’infirmière auxiliaire autorisée (IAA). Elle est retournée travailler à temps partiel durant les années 2011 et 2012, comme caissière/préposée aux marchandises dans un magasin Dollarama. Elle n’a pas travaillé depuis octobre 2012. L’appelante est séparée depuis 1990, et elle vit dans une maison avec deux de ses fils d’âge adulte.

Documents relatifs à la demande

[18] Dans son questionnaire sur les prestations d’invalidité du RPC [GD2 -73 à 79] signé le 31 juillet 2014, l’appelante a indiqué qu’elle avait une 12e année et un grade du collège Seneca. Elle a fait remarquer que le dernier emploi qu’elle a occupé était celui de caissière/préposée aux marchandises en octobre 2012; elle a déclaré qu’elle a cessé de travailler en raison de blessures subies lors d’un accident de la route. Elle a affirmé être invalide depuis juillet 2008, et a indiqué que les blessures ou incapacités qui l’ont empêchée de travailler comprenaient des blessures liées à la collision (comme le démontrent les documents médicaux ci-joints); entorse cervicale; entorse au genou droit; amplitude limitée des mouvements, et douleur chronique.

[19] Elle a décrit des difficultés/des limitations fonctionnelles quand il s’agit de s’asseoir, de rester debout, de marcher, de soulever des choses, de s’étirer pour atteindre un objet et de se pencher; des difficultés à répondre à ses besoins personnels; le besoin d’aide pour l’entretien ménager; des troubles de mémoire à court terme et d’attention; un trouble du sommeil; des phobies liées au trafic; et de la difficulté à utiliser les transports publics.

[20] Un rapport daté du 15 octobre 2014 de la Dre Dhillon, médecin de famille de l’appelante, était joint à la demande de prestations du RPC. La Dre Dhillon a diagnostiqué une douleur chronique au cou et au dos, une discopathie dégénérative en L4-5, et une dépression. Elle a noté que la douleur de l’appelante a commencé après son accident de la route en juillet 2008; qu’elle marchait lentement; qu’elle n’était pas capable de se pencher ou de changer de position sans ressentir de la douleur; que les mouvements du cou et du dos étaient limités; qu’elle se sentait dépressive en raison d’une douleur chronique; qu’elle était d’humeur morose, et qu’elle était peu motivée et concentrée; et qu’elle était incapable de faire toute activité physique soutenue. Le pronostic était mauvais en raison de la nature chronique de ses problèmes de santé. [GD2-59]

Témoignage

[21] Dans son témoignage, l’appelante a démontré qu’elle avait des problèmes de mémoire considérables, et Mme Hastings a dû faire référence aux rapports du dossier d’audience pour établir un grand nombre d’aspects de la preuve de l’appelante. Elle avait de la difficulté à se rappeler ses antécédents en matière d’études et d’emploi, sa participation à divers traitements et examens médicaux, et les détails de son emploi chez Dollarama en 2011 et 2012.

[22] En ce qui a trait à ses antécédents en matière d’études et d’emploi, on a conseillé à l’appelante de consulter l’évaluation professionnelle d’Avi Davis datée du 25 février 2013, versée au dossier en pièce GD10-45.

[23] Ce document indique que l’appelante a terminé ses études secondaires au Sri Lanka; qu’en 1995 elle s’est inscrite à un programme d’études de neuf mois en gestion des affaires; qu’en 1998 elle est retournée aux études pendant neuf mois et qu’elle a obtenu un diplôme de préposée aux services de soutien à la personne (PSSP); qu’à l’âge de 48 ans elle est retournée aux études à temps partiel pour terminer un grade d’IAA; et qu’elle a été blessée dans un accident de la route après avoir fait six mois dans ce programme.

[24] L’évaluation professionnelle indique aussi qu’avant son accident, elle a occupé divers emplois au Canada, notamment dans une compagnie de couture à Montréal de 1986 à 1987; dans une usine de 1992 à 1995 où elle effectuait de légers travaux; chez Sobeys à titre de caissière de 1996 à 1998; et dans une maison de soins infirmiers de 1998 à 2008.

[25] L’appelante a dit se souvenir de son travail comme PSSP. Elle « pense » qu’elle était en santé avant l’accident de la route de juillet 2008. Elle ne se souvient pas d’avoir été évaluée pour les rapports figurant au dossier d’audience. Elle se souvient de l’accident de la route. Elle n’arrive pas à se rappeler si elle a travaillé après l’accident de la route avant de commencer à travailler pour Dollarama. Elle a indiqué qu’elle est retournée travailler chez Dollarama parce qu’elle ne voulait pas être dépendante. Elle travaillait quatre heures par jour au Dollarama et faisait principalement des tâches de rayonnage et des travaux plus exigeants. Elle a affirmé qu’elle se souvenait d’être tombée et d’avoir dû s’absenter longtemps du travail.

[26] Mme Hastings a demandé au Tribunal de se référer au rapport d’évaluation professionnelle de février 2013 en GD10-48, qui indique qu’en raison de son désir de retourner au travail, l’appelante a tenté de travailler dans un Dollarama entre 2010 et 2011, et que durant cette période elle [traduction] « a pris beaucoup de jours de congé, on lui confiait des tâches légères, et malgré ces « accommodements », elle était incapable de continuer en raison de sa douleur ». L’appelante a dit dans son témoignage qu’elle a cessé de travailler au Dollarama parce qu’elle ne pouvait pas soulever des choses et se tenir debout. Elle n’a pas cherché un travail sédentaire plus léger, car elle a beaucoup de douleur au dos et elle « souffre » lorsqu’elle s’assoit.

[27] Le registre des gains (GD2-5) indique que les revenus d’emploi de l’appelante étaient inférieurs aux montants du RPC en 2009 et en 2010, et qu’ils étaient de 9 373 $ en 2011 et de 12 657 $ en 2012. En ce qui concerne le registre des gains, l’appelante ne pouvait pas se souvenir d’où provenaient les revenus, ni de la période pendant laquelle elle travaillait pour Dollarama. Elle ne pouvait pas se rappeler de quelle façon elle avait décroché l’emploi au Dollarama.

[28] L’appelante a commencé à voir la Dre Dhillon en février 2010 [GD4-3], et elle la voit maintenant une ou deux fois par mois pour obtenir des ordonnances de médicaments. Son principal problème est sa douleur constante et intense au dos – il lui est très douloureux de s’asseoir ou de se tenir debout. Elle a aussi de la douleur dans son bras droit et au cou. Elle ne peut pas se souvenir si elle a déjà été traitée par un psychologue ou un psychiatre. Elle ne se rappelle pas que quelqu’un lui a déjà suggéré de consulter un psychiatre, et elle a déclaré qu’elle ne sait pas si elle consulterait un psychiatre. Elle n’a pas fait de demande dans le cadre du programme Ontario au travail, même si Mme Hastings lui avait conseillé vivement de le faire, car elle [traduction] « ne voulait pas le faire ». Ses fils gèrent ses finances et lui ont conseillé vivement de présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC.

[29] Elle se rappelle avoir consulté le Dr Hawass, un spécialiste de la douleur chronique, en juin 2015. Elle a déclaré que ses fils l’ont « forcée » à le consulter, car son état de santé empirait. Elle croit qu’elle a revu le Dr Hawass à quelques reprises, et ce dernier lui a fait des injections dans les épaules, les genoux et le dos. Elle a affirmé que ces injections ne l’ont soulagée que pendant une journée, et que la douleur est ensuite revenue.

[30] L’appelante a décrit une journée normale pour elle. Elle a affirmé qu’elle ne s’habille pas tous les jours et que parfois elle dort tout habillée. Elle ne peut pas dormir. Elle passe la plupart des jours à pleurer et à prier. Elle ne dîne pas et ne va nulle part. Elle sort seulement pour aller à ses rendez-vous médicaux, et elle va au centre commercial pendant une heure, une fois par semaine – ses fils l’amènent sur place et l’aident à marcher. Elle peut promener le chien de 10 à 15 minutes, après quoi elle doit s’asseoir. Ses fils s’occupent de l’entretien ménager et de l’épicerie. Elle fait parfois un peu d’époussetage, et va faire l’épicerie avec ses fils – elle leur dit quoi acheter et ils transportent tous les achats.

[31] Actuellement, elle prend les médicaments d’ordonnance suivants : Percocet (trois par jour), Cymbalta (une ou deux fois par jour), et un autre médicament contre la douleur. Elle prend aussi six Tylenol par jour. Elle ne suit aucun traitement. En ce qui a trait à la période de juillet 2011 à février 2013, durant laquelle elle n’a pas consulté la Dre Dhillon, l’appelante a affirmé qu’elle « se comportait mal » durant cette période et qu’elle buvait en raison de la douleur. Ses fils lui ont dit de retourner voir son médecin de famille, d’arrêter de boire et de prendre ses médicaments. Elle a déclaré qu’elle boit encore [traduction] « lorsqu’elle ne peut pas tolérer la douleur ». Elle n’a pas dit à la Dre Dhillon qu’elle buvait, et n’a participé à aucun programme pour régler son problème de consommation d’alcool.

Preuve médicale

[32] Le Tribunal a étudié attentivement l’ensemble de la preuve médicale figurant dans le dossier d’audience. Les extraits que le Tribunal juge les plus pertinents sont présentés ci‑dessous.

[33] Un examen d’imagerie par résonnance magnétique (IRM) effectué le 16 avril 2009 n’a rien révélé d’anormal dans la colonne cervicale, mais a révélé des changements dégénératifs relativement graves dans les articulations facettaires bilatérales L4-L5 [GD2-79].

[34] Un IRM de la colonne cervicale effectué le 25 novembre 2010 n’a révélé aucun changement spondylitique apparent et n’a démontré aucun coincement des racines nerveuses. [GD2-70]

[35] Le 11 mars 2014, le Dr John, physiatre, a indiqué que l’appelante avait des blessures de type entorse musculo-ligamentaire au cou, à la ceinture scapulaire, au bas du dos, à la ceinture pelvienne, et aux genoux en raison d’un accident de la route subi en 2008; qu’elle a une douleur myofaciale continue, une capsulite rétractile de l’épaule droite, et de l’arthrose au genou droit. Le Dr John a fait des recommandations en ce qui a trait à des exercices d’étirement, de renforcement et de correction de posture. Il a aussi suggéré l’utilisation d’un rouleau d’appui Obus Forme et d’un repose-pied, et il lui a donné une ordonnance pour une injection de Depo‑Medrol dans l’épaule droite et le genou droit [GD2-65].

[36] Le Dr John a vu l’appelante pour une autre évaluation physiatrique le 10 juillet 2014. [GD2- 52]

[37] Le 1er avril 2015, la Dre Dhillon a indiqué à Service Canada que l’appelante souffrait de douleur chronique au cou et au dos depuis son accident de la route en 2008. La Dre Dhillon a décrit la douleur constante et les limitations de l’appelante, et elle a affirmé que sa douleur était constante et que celle‑ci limitait sa capacité de travailler à la maison et à l’extérieur. Elle a aussi déclaré que bien que les médicaments contre la douleur la soulagent quelque peu, ils ne lui permettent pas de faire des activités physiques soutenues, ni de retourner travailler. [GD2‑14]

[38] Le 21 avril 2015, le Dr John a indiqué que l’appelante avait été vue pour un suivi physiatrique. Il a noté qu’elle a été impliquée dans un accident de la route en 2008; qu’il s’agissait d’une collision arrière; qu’elle a entrepris une année de physiothérapie; qu’elle avait une douleur continue dans le cou et à la ceinture scapulaire, pire du côté droit; qu’elle a des problèmes de dos irradiant dans les deux genoux; qu’elle ressent un certain engourdissement dans l’épaule; qu’elle a des problèmes continus de douleur au cou et au dos; et qu’elle fait de l’arthrite dans le pouce. [GD4-5]

[39] Le 10 juin 2015, le Dr Hawass, des centres de gestion de la douleur CPM, a indiqué qu’au cours des deux dernières années, l’appelante n’a essayé de suivre aucune physiothérapie, chiropraxie, massothérapie, thérapie par acupuncture ou thérapie en piscine. Toutefois, sept ans auparavant, elle a bel et bien fait un peu de physio et reçu des massages qui l’aidaient pendant moins d’un jour. De la douleur a été diagnostiquée dans le bas du dos, le cou et les épaules. Les traitements recommandés comprennent un suivi psychologique, une perte de poids, de l’exercice, une pharmacothérapie et une anesthésie interventionnelle par blocage nerveux. Il était prévu que le plan de traitement durerait de six à douze mois. [GD4-7]

[40] Le Dr John a vu l’appelante lors d’une autre consultation physiatrique le 7 décembre 2015. [GD4-14]

[41] Le 28 juin 2016, la Dre Dhillon a indiqué à l’avocate de l’appelante que sa cliente souffre de douleur chronique au dos, de dépression et de troubles du sommeil. La Dre Dhillon a estimé que l’appelante est physiquement invalide depuis qu’elle la connaît (février 2010) et que ses symptômes étaient peut-être graves avant, mais qu’elle n’a aucun dossier antérieur à cette date. Elle est d’avis qu’il serait approprié de lui accorder des prestations d’invalidité du RPC, puisqu’elle est invalide et que son pronostic est sombre, car ses problèmes ne datent pas d’hier et que son état se santé ne s’est jamais vraiment amélioré. [GD4-3]

Preuves médicales supplémentaires

Notes de consultation de la Dre Dhillon

[42] Il existe des notes de consultation de la Dre Dhillon couvrant la période du 10 février 2010 [GD10-10] au 27 juillet 2011 [GD10-17].

[43] La note du 10 février 2010 indique que l’appelante est inscrite à titre de nouvelle patiente; qu’elle a souffert de douleur chronique au dos pendant près de deux ans depuis son accident de la route; qu’elle a obtenu des soins dans des cliniques sans rendez-vous; qu’elle a suivi des traitements de physiothérapie; qu’elle a consulté un psychiatre dans le passé pour une dépression; et qu’elle souffre de douleur intense au dos – elle ne peut pas se pencher ou soulever quoi que ce soit, ses épaules lui font mal, mais il n’y a pas d’irradiation aux jambes, aucun fourmillement et aucun engourdissement dans les jambes.

[44] La note du 13 mars 2010 indique que l’appelante a fait l’objet d’un suivi pour sa douleur au dos; qu’elle se sent déprimée; et qu’elle n’est pas capable de faire ses tâches ménagères ou d’avoir du plaisir. La Dre Dhillon a souligné que l’appelante était triste et avait facilement envie de pleurer.

[45] La note du 28 avril 2010 fait mention d’une douleur chronique au dos.

[46] La note du 21 mai 2010 indique que l’appelante pleurait. Du Cloralex, de l’Elavil, du Flexeril, du Naprosyn et du Percocet lui ont été prescrits.

[47] La note du 28 juillet 2010 fait état d’un syndrome de douleur chronique et d’une douleur permanente au dos, et indique que l’appelante se sentait un peu mieux avec le Percocet.

[48] La note du 26 septembre 2010 indique que l’appelante faisait l’objet d’un suivi pour sa douleur au dos; qu’elle est capable d’en faire plus à la maison, mais qu’elle ressent encore de la douleur après avoir marché; qu’elle vit seule et se sent déprimée; qu’elle n’a pas d’idées suicidaires; et que sa douleur au dos est de plus en plus forte.

[49] La note du 7 décembre 2010 indique que l’appelante était suivie pour sa douleur au dos; que sa douleur ne s’atténue pas; qu’elle se sent encore très déprimée et n’a tout simplement plus le goût de vivre; qu’elle n’entretient aucune idée suicidaire active; et qu’elle a appelé les Catholic Services pour obtenir une consultation, mais qu’aucun rendez-vous n’a encore été fixé avec un de leurs représentants.

[50] La note du 16 février 2011 indique que l’appelante faisait l’objet d’un suivi pour douleur au dos; qu’elle n’avait aucun nouveau symptôme; qu’elle se sentait mieux; qu’elle n’a pas encore eu de rendez-vous avec un spécialiste de la gestion de la douleur; qu’elle a besoin d’un renouvellement d’ordonnance de ses médicaments; qu’elle a diminué sa consommation de Percocet; et qu’elle dort bien.

[51] La note du 27 juillet 2011 indique que l’appelante a arrêté de prendre ses médicaments il y a deux mois; qu’elle se sentait très triste; qu’elle a encore une douleur permanente au dos; qu’elle n’a pas de nouveaux symptômes; et qu’elle souhaite recommencer à prendre ses médicaments.

[52] Dans son rapport à Service Canada daté du 1er avril 2015 (voir paragraphe 37, précité), la Dre Dhillon a indiqué qu’elle n’a pas vu l’appelante entre juillet 2011 et février 2013.

Évaluations

[53] Le 5 janvier 2009, le Dr Osinga, chirurgien orthopédiste, a rédigé un rapport à la suite de son évaluation médicale indépendante de l’appelante. Le Dr Osinga a indiqué qu’après l’accident de la route de juillet 2008, l’appelante avait été dirigée par son médecin de famille vers une clinique de soins de réadaptation multimodale; qu’elle s’y rendait trois jours par semaine; qu’elle avait reçu des massages ainsi qu’une thérapie physique; qu’elle a fait des exercices et respecté certaines modalités à la maison, et qu’elle croit que les traitements ont été utiles. Le Dr Osinga a conclu que l’appelante a subi d’importantes blessures à la suite d son accident de la route, y compris une entorse lombaire, des lésions myofasciales au cou et une douleur permanente aux genoux. Il croyait que l’appelante risquait de souffrir de douleur chronique et a recommandé de poursuivre le traitement. [GD10-148]

[54] Le 13 avril 2009, lr Dr Ali, chirurgien orthopédiste, a produit un rapport à la State Farm à la suite de son examen orthopédique indépendant de l’appelante. Il a fait observer que l’appelante était toujours en attente pour suivre une thérapie de réadaptation. Elle se plaignait principalement de douleur au cou, au bas du dos, au genou droit, et à l’épaule droite. Durant l’examen, l’appelante semblait légèrement déprimée. Le Dr Ali était d’avis qu’il y avait un élément comportemental dans la douleur de l’appelante, et qu’elle développait vraisemblablement un syndrome de douleur chronique. Il a recommandé un traitement avec une équipe multidisciplinaire de gestion de la douleur chronique. Il était d’avis qu’elle était incapable d’effectuer les tâches essentielles de son emploi à cette époque. [GD10-155]

[55] Le 28 avril 2009, le Dr Seon, psychologue, a fait rapport à la State Farm en ce qui a trait à l’évaluation psychologique indépendante de l’appelante. Le rapport fait état d’un diagnostic de trouble d’adaptation et indique qu’en raison de la gravité des symptômes de dépression signalés, son pronostic se situe entre réservé à satisfaisant. Le Dr Seon conclut ainsi :

[traduction]

Les données probantes de l’évaluation psychologique appuient la conclusion selon laquelle l’état psychologique de Mme L. G. correspond aux critères diagnostiques d’un trouble d’adaptation. En ce moment, Mme L. G. pense uniquement à sa douleur et aux limitations qui en découlent. Elle évite systématiquement de participer à des activités, de peur d’avoir plus de douleur. Ce comportement d’évitement est lié à ses symptômes de dépression. Elle se sent dévalorisée et démotivée, mais elle ne participe pas à des activités qui lui permettraient de se sentir plus utile. Pour avoir du soutien, Mme L. G. compte sur ses enfants qui habitent avec elle, mais elle se sent coupable et a honte de cela.

À la lumière des résultats de l’évaluation et de l’examen des dossiers cliniques, et bien qu’il soit apparent que Mme L. G. soit aux prises avec des symptômes de dépression, je suis d’avis que ces symptômes ne reflètent pas une incapacité substantielle de participer aux activités de la maison, y compris l’entretien et le nettoyage du domicile. Il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour conclure qu’elle est incapable d’effectuer les tâches essentielles de son emploi de préposée aux services de soutien à la personne. Il sera très important que l’équipe chargée du traitement de Mme L. G. surveille et encourage une augmentation graduelle d’activités productives et enrichissantes. Cela facilitera l’amélioration de sa santé mentale. [GD10- 119]

[56] Le 9 juin 2009, le Dr Fern, chirurgien orthopédiste, a présenté son rapport de contre‑évaluation orthopédique de l’appelante. Il est d’avis que l’appelante a développé un syndrome de douleur chronique, que son pronostic global est extrêmement réservé, et que la possibilité de rétablissement complet est fort peu probable. Il a ajouté qu’en ce moment, elle est pratiquement incapable d’accomplir les tâches d’entretien et de nettoyage du domicile qu’elle faisait avant son accident de la route, et qu’elle est incapable d’assumer les tâches essentielles de son emploi de préposée aux services de soutien à la personne. Il a indiqué qu’elle aurait des difficultés avec les activités qui nécessitent de se pencher, de soulever des choses et de tourner le bas du dos et le cou de façon répétitive; qu’elle aurait de la difficulté avec les activités nécessitant de maintenir des postures statiques de manière prolongée; et qu’elle aurait particulièrement de la difficulté avec les tâches plus exigeantes d’entretien et de nettoyage de la maison. Il a ajouté que ses problèmes actuels avec son épaule droite et son genou droit auraient aussi une incidence sur sa capacité à mener des activités dans lesquelles elle doit pousser, tirer, soulever et transporter des choses. [GD10-81]

[57] Le 23 juillet 2009, le Dr Shnek, psychologue, a fait état de son évaluation psychologique de l’appelante. Le Dr Shnek a conclu que l’appelante présente actuellement un niveau considérable de détresse psychologique et de difficultés d’adaptation liées à l’accident de la route, et il a recommandé 12 séances de consultation psychologique. Le Dr Shnek a diagnostiqué un trouble anxieux et dépressif mixte, de même qu’un trouble de stress post‑traumatique. [GD10-75]

[58] Le 24 octobre 2009, le Dr Esmail, chirurgien orthopédiste, a présenté son rapport d’évaluation orthopédique indépendante de l’appelante. Il a diagnostiqué un dysfonctionnement post‑traumatique du rachis cervical avec blessures musculoligamentaires; un dysfonctionnement post‑traumatique du rachis lombaire avec possiblement une blessure d’origine discale; et une chondromalacie fémoro-rotulienne traumatique du genou droit. Il a indiqué que l’appelante continuait de fonctionner, mais n’était pas capable de retourner travailler. Il était d’avis qu’en ce moment, l’appelante aurait de la difficulté à occuper un emploi rémunérateur, compte tenu de l’intensité de sa douleur et de l’ampleur de son invalidité. [GD10-187]

[59] Le 25 février 2013, Avi Davis, travailleur social hospitalier, travailleur social autorisé, MA, a fait état de son évaluation professionnelle de l’appelante. Il a noté dès son arrivée au bureau qu’elle avait évidemment beaucoup de difficulté à marcher, et qu’elle a essayé de s’asseoir sur le divan, mais qu’après quelques minutes elle s’est levée en raison de la douleur. monsieur Davis a examiné en détail les antécédents scolaires de l’appelante; son emploi avant l’accident; la nature de ses tâches de PSSP dans le cadre de l’emploi qu’elle occupait avant l’accident; et les résultats du test. Il a conclu qu’en se fondant sur la documentation examinée et ses observations [traduction] « il est évident que les déficiences physiques de Mme L. G. constituent une barrière considérable à un travail sécuritaire et productif. L’invalidité (les aspects fonctionnels) qui résulte de ces déficiences se traduit par des restrictions fonctionnelles, notamment une tolérance réduite aux postures statiques, et par de la difficulté à s’asseoir, à se tenir debout, à marcher, à monter des marches, à se pencher, à s’agenouiller, et à soulever et transporter des choses. » Il est d’avis que ses problèmes de douleur et sa faible tolérance à l’activité physique l’on empêchée d’accomplir les tâches essentielles et les activités physiques liées au travail, qui correspondent à sa formation, à son expérience et à ses études.

[60] Monsieur Davis a fait référence au rapport du Dr Ali d’avril 2009 (voir le paragraphe 54, précité), qui fait mention du syndrome de douleur chronique de l’appelante retardant son rétablissement, ainsi que de son incapacité à réaliser les tâches essentielles de son emploi à cette époque, et a déclaré ceci : [traduction] « Bien que ces rapports soient effectivement désuets, l’état de la cliente, selon ce qui a été observé durant plusieurs heures de tests, semble ne pas avoir changé ou s’être amélioré un peu, mais pas au point d’être capable de retourner au travail ». Dans sa conclusion, monsieur Davis soutient que l’appelante [traduction] « présente une incapacité importante qui l’empêche de s’acquitter des tâches essentielles de l’emploi qu’elle occupait avant l’accident, et qu’en ce moment, elle ne semble aucunement prête à retourner à l’emploi qu’elle occupait avant l’accident. De plus, tant que les symptômes de Mme L. G. demeurent inchangés, il lui sera très difficile d’occuper un emploi rémunérateur. Il n’y a pas d’autres objectifs professionnels réalistes. » [GD10-44]

Observations

[61] Mme Hastings soutient que l’appelante est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Les rapports médicaux de la Dre Dhillon confirment que l’appelante souffre d’une douleur constante et grave au dos depuis son accident de la route de juillet 2008.
  2. Elle est invalide en raison de sa douleur chronique au cou et au dos, de sa dépression et de son incapacité à dormir.
  3. Le rapport d’évaluation professionnelle rédigé par Avi Davis en février 2013 confirme ses limitations à la date de fin de la PMA, soit en décembre 2012.
  4. Elle manque de motivation en raison de sa dépression, et elle boit pour masquer la douleur.
  5. Le pronostic de la Dre Dhillon confirme que l’appelante est incapable d’occuper un emploi rémunérateur, quel qu’il soit.

[62] L’intimé soutient que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Elle a reçu des prestations régulières d’assurance-emploi de mars à décembre 2013, et a indiqué dans ses déclarations qu’elle était prête, disposée et apte à travailler après la fin de sa PMA.
  2. Il se peut que l’appelante ne puisse pas être capable de retourner à son ancien travail de préposée aux marchandises et de caissière, qui était exigeant, mais elle n’a pas essayé de retourner faire des travaux plus légers.
  3. Elle n’a pas été vue par son médecin de famille à l’époque de l’expiration de sa PMA, entre juillet 2011 et février 2013, ce qui indique une certaine stabilité, et son traitement a été très conservateur et sous-utilisé jusqu’à maintenant.

Analyse

[63] L’appelante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2012 ou avant cette date.

Invalidité grave

[64] Les exigences législatives auxquelles il faut satisfaire pour obtenir une pension d’invalidité sont décrites au paragraphe 42(2) de la Loi qui dit essentiellement que, pour être déclarée invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité « grave » et « prolongée ». Une invalidité n’est « grave » que si elle rend la personne concernée régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Non seulement une personne doit être incapable d’occuper son emploi habituel, mais elle doit aussi être incapable d’occuper tout emploi que l’on s’attendrait raisonnablement à la voir occuper. Une invalidité n’est « prolongée » que si elle est déclarée devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès.

Principes directeurs

[65] Les décisions mentionnées ci-après ont guidé le Tribunal pour trancher les questions relatives au présent appel.

[66] Le fardeau de la preuve incombe à l’appelante qui doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que le 31 décembre 2012 ou avant cette date, elle était invalide conformément à la définition établie. Le critère de gravité doit être évalué dans un contexte « réaliste » (Villani 2001 CAF 248). Le Tribunal doit prendre en compte des facteurs comme l’âge de la personne, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie au moment de déterminer « l’employabilité » de cette personne compte tenu de son invalidité.

[67] Une loi réparatrice comme le Régime de pensions du Canada doit faire l’objet d’une interprétation libérale qui cadre avec ses objectifs de réparation, et il faut donner un sens et donner effet à chacun des termes du sous-alinéa 42(2)a)(i). Cette disposition, lue de cette façon, indique que le législateur a jugé qu’une invalidité est grave si elle rend le requérant incapable de détenir pendant une période durable une occupation réellement rémunératrice (Villani 2001 CAF 248).

[68] Non seulement doit-on disposer de preuves médicales pour soutenir l’affirmation selon laquelle une invalidité est « grave » et « prolongée », mais il faut aussi une preuve étayant les efforts de l’appelante pour obtenir du travail et améliorer son état de santé (Klabouch 2008 CAF 33; Angheloni 2003 CAF 140).

[69] L’état du demandeur doit être évalué dans son ensemble. Toutes les détériorations doivent être examinées, pas seulement les détériorations les plus importantes ou la détérioration principale (Bungay 2011 CAF 47).

[70] L’appelante doit non seulement démontrer qu’elle a un sérieux problème de santé, mais dans les affaires où il y a des preuves de capacité de travail, elle doit également démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé : Inclima 2003 CAF 117.

Application des principes directeurs

[71] La présente affaire a posé problème au Tribunal. Au cours de son témoignage, l’appelante a démontré qu’elle avait des problèmes de mémoire considérables, et par conséquent le Tribunal doit s’appuyer en grande partie sur les documents et les rapports du dossier d’audience.

[72] Le Tribunal était convaincu que ses problèmes de mémoire étaient authentiques et que l’appelante tentait de fournir, au mieux de ses capacités, des éléments de preuve exacts. Toutefois, le Tribunal doit se concentrer sur l’état de santé de l’appelante à la date de fin de sa PMA, en décembre 2012. Après avoir examiné les documents du dossier d’appel, le Tribunal est convaincu que les graves troubles de mémoires affichés par l’appelante durant l’audience ont commencé après la date de fin de sa PMA.

[73] Le Tribunal a souligné que l’appelante a été capable de fournir à Avi Davis des renseignements détaillés concernant ses antécédents personnels et ses limitations en février 2013 (voir les paragraphes 59 et 60, précités), lorsque son évaluation professionnelle a été effectuée; que l’appelante a aussi été en mesure de fournir des renseignements détaillés au Dr John et au Dr Hawass, qui l’on traitée de mars 2014 à juin 2015 (voir les paragraphes 35 à 40, précités) et que rien d’indique l’existence de troubles importants de mémoire dans l’un ou l’autre de leurs rapports; et que bien que la Dre Dhillon fasse mention d’une dépression, de déficits de la mémoire à court terme et de l’attention (voir les paragraphes 20, 37 et 41, précités), elle ne fait pas mention de troubles graves de la mémoire dans ses rapports, y compris dans son dernier rapport daté du 28 juin 2016 (environ quatre mois avant l’audience).

[74] Pour établir l’état de santé de l’appelante à la date de fin de sa PMA en décembre 2012, le Tribunal a pris en considération l’ensemble de ses problèmes de santé à cette date (voir l’arrêt Bungay, précité). À cet égard, la preuve médicale établit que durant 2008 et 2009 (voir les paragraphes 53 à 59, précités), l’appelante souffrait de douleur chronique au dos, au cou, à l’épaule droite et au genou droit; que ces problèmes de santé se sont aggravés au point de devenir un syndrome de douleur chronique; et qu’on lui avait diagnostiqué un trouble d’adaptation, une dépression et un trouble de stress post-traumatique. Les notes de consultation de la Dre Dhillon confirment que sa douleur chronique et ses symptômes dépressifs se sont poursuivis durant la période de février 2010 au 27 juillet 2011(voir les paragraphes 42 à 52, précités).

[75] L’intimé a noté qu’il existe une lacune dans les renseignements médicaux pour la période de juillet 2001 à février 2013. Il semble qu’il y aurait eu certaines améliorations dans l’état de santé de l’appelante, car elle a été capable d’occuper un emploi à temps partiel au Dollarama en 2011 et 2012; toutefois, elle n’a pas été en mesure de continuer à travailler après octobre 2012 en raison de sa douleur intense, et la période qui intéresse le Tribunal est la date de fin de la PMA, soit en décembre 2012.

[76] Pour déterminer l’état de santé de l’appelante à la date de fin de sa PMA, le Tribunal a accordé une attention particulière à l’évaluation professionnelle préparée par Avi Davis en février 2013, soit six semaines seulement après la date de fin de la PMA (voir les paragraphes 59 et 60, précités), et il est convaincu que cela témoigne de son état de santé à la date de fin de sa PMA. Dans ce rapport, monsieur Davis décrit les nombreuses déficiences physiques de l’appelante ainsi que son syndrome de douleur chronique. Il est d’avis qu’elle est incapable de retourner à son emploi précédent de PSSP, mais que [traduction] « il n’y a pas d’autres objectifs professionnels réalistes ». Le Tribunal a aussi accordé une attention particulière aux rapports de la Dre Dhillon (voir les paragraphes 20, 37 et 41, précités). La Dre Dhillon est le médecin de famille de l’appelante depuis février 2010 et, dans son rapport du 28 juin 2016, elle a indiqué que l’appelante souffre de douleur chronique au dos, de dépression et de troubles du sommeil, et elle est d’avis que l’appelante est physiquement invalide depuis sa première consultation lorsqu’elle a commencé à la traiter.

[77] Le Tribunal est convaincu qu’en raison de son syndrome de douleur chronique, de ses troubles du sommeil et de sa dépression, l’appelante était incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice à la date de fin de sa PMA. Le Tribunal a fait remarquer que l’appelante est retournée, et c’est tout à son honneur, travailler à temps partiel en 2011 et 2012, mais qu’elle n’a pas été capable de continuer après octobre 2012, en raison d’une douleur intense. L’appelante a satisfait au critère établi dans l’arrêt Inclima (précité).

[78] Le Tribunal a aussi souligné que l’appelante avait des antécédents professionnels stables depuis son immigration au Canada en 1986 jusqu’à son accident de la route en juillet 2008. De plus, elle a parfait son éducation et ses compétences professionnelles en obtenant un diplôme de gestion des affaires et un diplôme de PSSP, et elle est retournée aux études à temps partiel à l’âge de 48 ans, pour obtenir un diplôme d’IAA. Le Tribunal est convaincu que l’appelante avait une solide éthique de travail et qu’elle est le genre de personne qui continuerait à travailler si elle en était capable.

Atténuation

[79] Le Tribunal a aussi examiné avec attention la question de l’atténuation. À cet égard, il y a une lacune importante quant au traitement de l’appelante entre juillet 2011 et février 2013; elle ne semble pas avoir suivi de traitement significatif pour sa dépression grave; elle a participé de façon limitée aux séances de gestion de la douleur; et elle ne semble pas souhaiter régler son apparent problème de dépendance à l’alcool.

[80] L’appelante doit se montrer prête, en toute bonne foi, à suivre les conseils médicaux appropriés et, lorsqu’il paraît évident qu’elle ne pourra reprendre son emploi précédent, à participer à des programmes de recyclage et d’études pour trouver un autre emploi : Lombardo c. MDRH, (23 juillet 2001), CP 12731 (CAP).

[81] Le Tribunal doit évaluer si le refus de l’appelante de subir les traitements recommandés est une décision raisonnable et quelle sera l’incidence d’un tel refus sur l’état d’invalidité dans le cas où le refus est jugé déraisonnable : Lalonde c. Canada (MDRH), 2002 CAF 211.

[82] Chaque affaire doit être appréciée en fonction des faits qui lui sont propres, et le critère dans chaque affaire est celui de savoir si l’appelant a agi raisonnablement au regard de ses circonstances particulières et capacités : Bulger c. MDRH, (18 mai 2000), CP 9164 (CAP). La question à trancher consiste à déterminer s’il était raisonnable, dans les circonstances particulières de l’appelante, que celle-ci ne suive aucun des types de traitement décrits en détail au paragraphe 79, précité. L’extrait suivant de la décision Bulger est utile à cet égard :

Même si la Commission est d’accord avec l’allégation du Ministre selon laquelle l’appelante n’a pas toujours suivi les divers programmes de traitement recommandés, elle juge néanmoins que cette décision n’a pas toujours été déraisonnable, compte tenu de sa situation. On ne peut pas s’attendre à ce que les personnes qui souffrent de fibromyalgie et de douleurs diffuses constantes, qui manquent de sommeil et d’énergie et qui se sentent désespérées et déprimées suivent des programmes de traitement avec le même enthousiasme et la même régularité que les personnes qui se remettent d’une fracture ou d’une blessure infligée dans un accident.

[83] Le Tribunal a tranché la question de la conformité en faveur de l’appelante. Il est clair, à la lumière des rapports, qu’elle a initialement suivi des traitements poussés pour ses problèmes physiques, et bien qu’il y ait eu des intervalles, elle reçoit, depuis février 2010, un traitement continu de la part de la Dre Dhillon et des spécialistes de la douleur chronique vers lesquels elle a été dirigée.

[84] Le Tribunal s’est inspiré de la décision Bulger, précitée, et il a pris en considération les circonstances et capacités particulières de l’appelante. En raison de sa grave dépression, de son syndrome de douleur chronique et de son insomnie, l’appelante manque de motivation et d’énergie. Il semblerait qu’elle prend des mesures seulement à la demande de ses fils, comme l’indiquent sa déclaration selon laquelle ses fils l’ont « forcée » à consulter le Dr Hawass, un spécialiste de la douleur chronique, le fait qu’elle n’ait pas fait de demande pour le programme Ontario au travail même si Mme Hastings l’a incitée à le faire, et sa déclaration selon laquelle elle ne sait pas si elle consulterait un psychiatre si son médecin le lui recommandait. Le Tribunal a aussi tenu compte du témoignage de l’appelante décrivant une journée normale pour elle (voir le paragraphe 30, précité), dans lequel elle dit ne pas s’habiller tous les jours... que parfois elle dort tout habillée... qu’elle passe la majeure partie de la journée à pleurer et à prier... qu’elle sort seulement pour aller à des rendez-vous médicaux. Cela cadre avec une grave dépression, ainsi qu’avec le manque d’énergie et de motivation qui en résulte.

Décision

[85] Le Tribunal a déterminé que l’appelante a établi, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave, conformément aux critères de la Loi.

Invalidité prolongée

[86] Ayant conclu que l’invalidité de l’appelante est grave, le Tribunal doit aussi déterminer si elle est prolongée.

[87] Les multiples conditions invalidantes de l’appelante existent depuis de nombreuses années, et elles semblent s’aggraver.

[88] L’invalidité de l’appelante dure depuis longtemps et aucune amélioration n’est à prévoir dans le futur prévisible.

Conclusion

[89] Le Tribunal conclut que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée en octobre 2012, lorsqu’elle a cessé de travailler. Aux fins du paiement, une personne ne peut être réputée invalide plus de quinze mois avant que l’intimé ait reçu la demande de pension d’invalidité (alinéa 42(2)b) de la Loi). La demande a été reçue en octobre 2014; par conséquent, l’appelante est réputée être devenue invalide en juillet 2013. En vertu de l’article 69 de la Loi, la pension d’invalidité est payable à compter du quatrième mois qui suit la date du début de l’invalidité. Les paiements commenceront en date de novembre 2013.

[90] L’appel est accueilli.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.