Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est refusée.

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler de la décision rendue par la division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale (TSS) le 4 mars 2016. La DG avait précédemment tenu une audience par téléconférence et a conclu que la demanderesse n'était pas admissible à une pension d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC). Elle a conclu que son invalidité n'était pas « grave » préalablement à la date de fin de sa période minimale d'admissibilité (PMA), à savoir le 31 décembre 2013.

[2] Le 6 juin 2016, dans les délais prescrits, le représentant de la demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler, invoquant de nombreux moyens d’appel et différents fondements juridiques. Pour accueillir cette demande, je dois être convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[3] Comme le prescrivent les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel (DA) sans permission, et la DA accorde ou refuse cette permission.

[4] Les seuls moyens d’appel selon le paragraphe 58(1) de la LMEDS sont les suivants :

  1. a) la DG n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence.
  2. b) la DG a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) la DG a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] Le paragraphe 58(2) de la LMEDS prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[6] Pour que la permission d’en appeler soit accordée, il faut qu’un motif susceptible de donner gain de cause à l’appel soit présenté : Kerth c. CanadaNote de bas de page 1. La Cour d’appel fédérale a statué que la question de savoir si une affaire est défendable en droit revient à se demander si l’appel a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Fancy c. CanadaNote de bas de page 2.

[7] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, il me faut être convaincu que les motifs d’appel se rattachent à l’un ou l’autre des moyens d’appel admissibles et que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Observations

[9] Dans une lettre ajoutée à la demande de permission d’en appeler, le représentant de la demanderesse a présenté les allégations suivantes :

  1. a) L'analyse de la DG, plus particulièrement les paragraphes 55 à 57 de la décision, a ignoré les renseignements médicaux portés à sa connaissance et daté d'octobre 2013 à avril 2015, à savoir une période qui coïncide avec la date de fin de la PMA et qui est pertinente à l'égard de cette date. Particulièrement, la demanderesse prétend que la DG fait abstraction de documents médicaux pertinents figurant dans la trousse d'observations nommée GD9, qui comprend ce qui suit :
    • notes cliniques de la Dre Bednarska datées du 19 novembre 2013 (GD9‑24‑25).
    • note clinique de la Dre Bednarska datée du 5 novembre 2013 (GD9-30).
    • rapport de radiographie daté du 6 décembre 2013 (GD9-37).
    • notes cliniques de la Dre Bednarska datées du 19 décembre 2013 et du 16 janvier 2014 (GD9-43-44).
    • demande de consultation de la Dre Bednarska datée du 20 janvier 2014 (GD9-44);
    • rapport du Centre de médecine sportive de Waterloo daté du 16 décembre 2014 (GD9-106).
  2. En ignorant ces documents, la DG n'a pas examiné adéquatement l'allégation de limitations au bas du dos faite par la demanderesse. Après son pontage en 2011, elle a développé un déconditionnement musculaire global, de la douleur chronique et de la détresse psychologique. Ses perspectives en matière d'emploi étaient réduites de manière importante selon un examen global de l'ensemble des troubles médicaux. Elle a épuisé toutes les pistes de traitement sans constater un effet positif important et elle a continué de souffrir d'une dégradation importante de son état.
  3. b) La DG a commis une erreur de droit en n'appliquant pas la décision Barata c. MDRHNote de bas de page 3 en mettant l'accent sur les troubles médicaux de la demanderesse de manière individuelle au lieu de tenir compte de leur effet cumulatif sur son aptitude à travailler.
  4. c) La DG a commis une erreur de droit en n'appliquant pas la décision MDRH c. BennettNote de bas de page 4 en ne tenant pas suffisamment compte du terme « régulièrement » contenu dans l'exigence prescrite par le RPC. Il n’est pas juste de s’attendre à ce qu’un requérant puisse trouver un employeur qui soit philanthrope, compréhensif et flexible et qui soit prêt à lui offrir des mesures d’adaptation.

Analyse

Omission de tenir compte de la preuve médicale datant d'octobre 2013 à avril 2015

[10] La demanderesse prétend que la DG a ignoré la preuve médicale précisant son état d'octobre 2013 à avril 2015, particulièrement les documents sélectionnés contenus dans la trousse nommée GD9 aux fins de catalogage par le TSS.

[11] Après avoir examiné la décision de la DG, je peux confirmer qu'elle ne renvoi à aucune preuve datant de la période de 18 mois mentionnée par la demanderesse. Cependant, je ne suis pas d'accord avec le fait que cela constitue un manque d'équité ou une erreur de droit ou de fait. Dans sa décision, la DG a résumé de nombreux rapports médicaux. Elle s'est fondée sur un grand nombre d'entre eux dans le cadre de son analyse des allégations de la demanderesse. Selon mon étude de la preuve au dossier, la lacune était probablement attribuable à un simple manque de rapports médicaux importants datant d'octobre 2013 à avril 2015, et non à une négligence de la part de la DG.

[12] Il est vrai que, dans sa décision, la DG a fait un renvoi limité aux documents figurant dans GD9, mais cela doit être mis en contexte. L'ensemble de la trousse de 143 pages représente tous les rapports cliniques de la Dre Bednarska, médecin de famille de la demanderesse, d'octobre 2013 à avril 2015. À mon avis, les notes de bureau particulières soulignées par la demanderesse, bien qu'elles soient plus près de la date de fin de la PMA, n'étaient pas différentes, sur le fond, des précédents rapports abordés dans la décision, ce qui comprend les saisies du 10 octobre 2013 et du 24 octobre 2013 de la Dre Bednarska. De plus, la plainte de maux de dos de l'appelante, qui est le sujet prédominant des documents énumérés dans la demande de permission d'en appeler, a été soulignée au paragraphe 26, et les plaintes de douleur chronique généralisée ont été reconnues dans la décision. Il convient également de souligner que GD9 était seulement l'une des sept trousses de documents médicaments présentées par la demanderesse au cours d'une période de près de trois ans, ce qui comprend près de 1 100 pages au total. Étant donné cette quantité de documents, il serait manifestement déraisonnable de s'attendre à ce que la DG aborde explicitement chaque document et tous les éléments de preuve portés à sa connaissance. En l'espèce, la DG semble avoir fait le choix défendable d'inclure dans la décision ces rapports qui ont joué un rôle dans son raisonnement.

[13] Il est de jurisprudence constante, en droit administratif, qu’un tribunal n’est pas tenu de mentionner chacun des éléments de preuve qui lui ont été présentés, mais qu’il est réputé avoir tenu compte de l’ensemble de la preuveNote de bas de page 5. Il revenait également à la DG, à titre de juge des faits, de déterminer la pertinence des éléments de preuve, d’apprécier ceux-ci et, selon le cas, de déterminer ceux qu’il convient d’admettre ou d’écarter, avant de leur assigner un poids et, ultimement, de rendre une décision fondée sur son interprétation et son analyse des éléments de preuve portés à sa connaissance. Ainsi, j’estime qu’il n’existe pas de cause défendable d’après l’allégation voulant que la DG ait erré dans son examen de la preuve postérieure à la PMA, découlant du fait qu’elle a accordé moins d'importance à certains éléments que l'aurait souhaité la demanderesse.

[14] Je ne vois aucune chance raisonnable de succès pour ce moyen d'appel.

Omission de tenir compte de l'effet cumulatif des troubles

[15] La demanderesse soutient que la DG a commis une erreur de droit, puisqu’elle n’a pas tenu compte de l’ensemble de ses troubles lorsqu’elle a conclu que ses incapacités n’étaient pas tout à fait graves. Même si elle a cité Barata, décision de la Commission d’appel des pensions (CAP) qui ne lie pas la DA, la Cour d’appel fédérale a établi, dans des causes semblables telles que Bungay c. Canada (P.G.)Note de bas de page 6, qu’il faut tenir compte de tous les troubles d’un requérant ainsi que de leur effet cumulatif sur ses capacités fonctionnelles.

[16] Il est particulièrement prétendu que la DG n'a pas tenu compte de l'ensemble des troubles médicaux de la demanderesse, qui comprenait l'insuffisance coronaire, qui a nécessité un double pontage, ainsi que l'apnée du sommeil, l'essoufflement, les ulcères d'estomac, la douleur aux jambes et aux bras, et la dépression. Après avoir examiné la décision de la DG, je ne constate aucune cause défendable fondée sur ce moyen d'appel. La DG a résumé la majeure partie de la preuve médicale qui documentait les troubles de la demanderesse et les symptômes associés de façon plus ou moins approfondie, selon le cas. Comme je l’ai mentionné précédemment, il est de jurisprudence constante qu’un juge des faits n’est pas tenu de mentionner chacun des éléments de preuve portés à sa connaissance lorsqu’il énonce ses motifs de décision, et la DG avait compétence pour établir lesquelles des détériorations prétendues de la demanderesse étaient déterminantes. L'analyse de la DG contenait des discussions détaillées concernant les différents symptômes, diagnostics et traitements de la demanderesse, et le fait que la DG n'a pas mentionné explicitement les douleurs au dos ne signifient pas nécessairement qu'elle n'en a pas tenu compte au cours de l'examen.

Omission de tenir compte de la régularité

[17] La demanderesse soutient que la DG a commis une erreur de droit quand elle n’a pas tenu compte du terme « régulièrement », compris dans le critère relatif à la gravité d’une invalidité. En vertu de l’alinéa 42(2)a) du RPC, il faut déterminer si la personne est « régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice », un critère qui, je remarque, a été cité correctement par la DG, et ce à plusieurs reprises dans sa décision.

[18] Bien entendu, le fait de citer un critère ne signifie pas nécessairement que celui-ci a bien été appliqué en pratique. Si Bennett est une autre décision de la CAP qui n’a pas force exécutoire, il existe un courant jurisprudentielNote de bas de page 7 qui précise le concept exprimé par le terme « régulièrement » et qui établit un lien avec la prévisibilité, soit la capacité d’un requérant de se présenter à son lieu de travail au moment où cela est nécessaire, et aussi souvent que cela est nécessaire. La demanderesse n’a pas précisé où, dans sa décision, la DG aurait mal appliqué ce critère. Je tiens à souligner qu’il n’incombe pas à la DG de prouver qu’un demandeur est capable de régulièrement détenir une occupation; le fardeau de la preuve repose plutôt sur le demandeur, qui doit prouver qu’il est « régulièrement » incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. En l'espèce, la DG n'a pas été convaincue, après avoir apprécié la preuve dont elle disposait et souligné que la demanderesse n'avait pas tenté de trouver un emploi moins ardu, que celle-ci souffrait d'une invalidité qui l'empêchait de travailler de manière fiable en date du 31 décembre 2013.

[19] Je ne vois aucune chance raisonnable de succès pour ce moyen d'appel.

Conclusion

[20] Puisqu’aucun des motifs d’appel de la demanderesse ne soulevait de cause défendable, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

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