Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est refusée.

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’appeler de la décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale le 3 mai 2016. La division générale avait auparavant tenu une audience en personne et déterminé que la demanderesse n'était pas admissible à une pension d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC), puisqu'il avait été déterminé que son invalidité était « grave » au cours de sa période minimale d'admissibilité (PMA) qui a pris fin le 31 décembre 2014, mais qu'elle n'était pas « prolongée ».

[2] Le 21 juillet 2016, dans le délai prévu, la demanderesse a présenté à la division d'appel une demande incomplète de permission d'en appeler. Après avoir reçu une demande de renseignements additionnels, la demanderesse a modifié son appel le 25 août 2016, et sa demande a été déclarée complète. Afin que la demande soit accueillie, je dois être convaincu que l'appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[3] Tel qu’il est stipulé aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission, et la division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[4] Le paragraphe 58(2) de la LMEDS prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[5] Les seuls moyens d’appel selon le paragraphe 58(1) de la LMEDS sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[6] Pour que la permission d’en appeler soit accordée, la demande doit soulever un motif défendable qui pourrait donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c. Canada.Note de bas de page 1 La Cour d’appel fédérale a établi qu’une cause défendable en droit revient à se demander si un appel a une chance raisonnable de succès : Fancy c. Canada.Note de bas de page 2

[7] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience sur le fond. C'est un premier obstacle que la demanderesse doit franchir, mais celui-ci est inférieur à celui auquel elle devra faire face à l'audition de l'appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, la demanderesse n’a pas à prouver sa thèse.

Question en litige

[8] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Observations

[9] Dans une lettre qui accompagnait sa demande de permission d'en appeler, la demanderesse a écrit qu'elle n'était pas d'accord avec la décision rendue par la division générale. Sa vie avait changé de manière drastique cinq ans plus tôt, lorsqu'elle a contracté un virus qui avait entraîné des symptômes débilitants. Sa tête fait mal et elle ne peut sortir du lit. Lorsqu'elle est devenue incapable de fonctionner à la maison, et encore moins dans un environnement de travail, elle a fait l'objet d'examens et a reçu des traitements de dysfonctionnement vestibulaire, bien que son état ne se soit que très peu amélioré malgré ses meilleurs efforts. Ses problèmes ne mettent pas sa vie en danger, mais il y a des jours où elle se demande si la vie en vaut la peine.

[10] Son appel à la division générale a été rejeté en raison de l'accès à un autre programme de traitement. Il est important de rappeler que ce traitement s'adresse aux personnes qui ont été victimes de traumatismes cérébraux et d'accidents vasculaires cérébraux. Bien que sa qualité de vie pourrait être améliorée, une année ou plus pourrait s'écouler avant que des améliorations surviennent, et elle n'a pas les moyens de suivre le traitement. Le programme coûte 7 000 $ pour une année, et le traitement nécessaire pourrait être plus long. Ni l'assurance maladie publique ni son assurance privée ne couvrirait les coûts. La demanderesse soutient qu'elle a fait tout ce qu'on lui avait demandé, mais qu'elle est encore malade. La demande et le processus d'appel sont difficiles pour elle, et elle est complètement dépassée par l'idée de recommencer depuis le début.

[11] Dans une lettre datée du 25 juillet 2016, le Tribunal a rappelé à la demanderesse les moyens d'appel précis autorisés en vertu du paragraphe 58(1), et lui a demandé de fournir des justifications plus précises pour sa demande de permission d'en appeler. Le 25 août 2016, la demanderesse a présenté une lettre selon laquelle la division générale aurait commis une erreur importante par rapport aux faits. Elle a fait référence au diagnostic du docteur Burbine concernant un syndrome post-traumatique de la vision (SPTV). Elle a affirmé que les prestations lui avaient été refusées parce qu'il existait un traitement pour ce trouble médical, mais que le traitement ne guérissait que les troubles aux yeux entraînés par le virus, et non les problèmes qu'elle a à l’oreille interne et au système nerveux. Le SPTV est un dysfonctionnement du traitement visuel qui se manifeste à la suite d’une blessure traumatique à la tête. Le traitement recommandé pourrait corriger les dysfonctions visuelles, mais il n'améliorera pas ou ne guérira pas son oreille interne ou son système nerveux. La demanderesse a aussi fait référence à des rapports particuliers des docteurs Henderson, MacLean et Lister, qui étaient tous inclus dans les preuves documentaires présentées à la division générale à l’audience.

Analyse

[12] La demanderesse suggère que la division générale a rejeté son appel malgré une preuve médicale indiquant que son trouble médical était « grave et prolongé » selon les critères de la pension d'invalidité du RPC. Cependant, à l'exception de cette allégation générale, la demanderesse n'a pas précisé comment, en rendant sa décision, la division générale n’avait pas observé un principe de justice naturelle, avait erré en droit ou a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée. J'ai examiné attentivement les observations de la demanderesse, et à part une exception potentielle, elle n'a décrit aucune lacune dans la manière dont la division générale a traité l'appel, et n'a ciblé aucune erreur importante ou omission par rapport à la décision. Les observations de la demanderesse se résument plutôt à une récapitulation des éléments de preuve et des arguments qui ont déjà été présentés à la division générale.

[13] La division d'appel n'a pas le mandat de procéder à une nouvelle audience des demandes de prestations d'invalidité sur le fond. Bien qu’un demandeur ne soit pas tenu de prouver les moyens d’appels invoqués aux fins d’une demande de permission d’en appeler, il doit à tout le moins décrire les fondements de ses observations et ceux-ci doivent cadrer avec l’un ou l’autre des moyens d’appels énumérés. Il ne suffit pas qu’un demandeur affirme son désaccord avec la décision rendue par la division générale et exprime qu’il est toujours convaincu que son état de santé le rend invalide au sens du RPC.

[14] Selon moi, la demanderesse n'a clairement ciblé qu'une erreur potentielle. La division générale a rejeté l'appel parce qu'elle a conclu que, bien que la demanderesse ait eu une invalidité « grave » que l'empêchait de travailler au cours de sa PMA, l'invalidité n'était pas « prolongée », étant donné qu'il existait un traitement pour remédier à ses problèmes de vision et d'équilibre, et que la demanderesse n'avait pas encore suivi ce traitement.

[15] En vertu d'une tendance jurisprudentielleNote de bas de page 3, les demandeurs d'une pension d'invalidité du RPC doivent suivre des conseils médicaux raisonnables. La division générale a conclu qu'il y avait une chance raisonnable de rétablissement en raison de l'évaluation du docteur Burbine du 22 février 2016 selon laquelle :

[Traduction]
Le SPTV réagit aux traitements et les meilleurs résultats sont obtenus quand le patient est impliqué et appuyé par la thérapie. Comme vous savez, une approche multidisciplinaire impliquant tous les médecins et thérapeutes est fortement recommandée. Le rétablissement de l’appareil visuel fonctionnel prend généralement 6 à 14 mois de séances hebdomadaires, et chaque patient progresse à son propre rythme. Si possible, des séances de thérapie hebdomadaires ou bihebdomadaires sont prévues. Je m’attends à ce que Valerie s’en tire bien parce qu’elle a encore plusieurs forces dans son appareil visuel et qu’elle est motivée à guérir. Je recommande un programme de thérapie visuelle.

Je crois qu’il serait possible que Valerie retrouve certaines, possiblement la majorité, de ses aptitudes visuelles et que les symptômes qui y sont associés s’estompent de manière importante grâce à une thérapie adéquate de réadaptation visuelle. Sans thérapie visuelle, la qualité de vie de Valerie continuera de se détériorer en raison de la détérioration de ses aptitudes visuelles.

La demanderesse soutient maintenant que le traitement recommandé par docteur Burbine est trop dispendieux pour elle, et que, de toute manière, il ne guérirait pas complètement son trouble médical.

[16] Je ne vois aucune chance raisonnable de succès sur ce motif. J’ai écouté les parties pertinentes de l’enregistrement sonore de l’audience, qui confirment que la division générale a discuté des implications du rapport du docteur Burbine avec la demanderesse et lui a demandé si elle avait l’intention de suivre la thérapie recommandée. À 1:11:29 de l’enregistrement, elle a répondu :

[Traduction]
Je ne sais pas. Je viens juste de recevoir le rapport… Elle [docteur Burbine] a dit que le traitement coûterait probablement 6 000 $ à 7 000 $, peut-être 1 000 $ par mois. Oui, je veux aller, mais il pourrait durer plus de six à quatorze mois si je dois moi-même en payer les frais.

[17] La demanderesse a également affirmé qu'elle n'avait pas eu la chance de consulter la Croix-Bleue.

[18] Tous ces renseignements ont été reflétés avec précision par la division générale au paragraphe 42 de sa décision, ce qui suggère qu’elle a dûment tenu compte du témoignage de la demanderesse à ce sujet. La situation aurait été différente si la division générale avait ignoré ou déformé les preuves présentées par la demanderesse concernant le coût ou l’efficacité du traitement, mais ce n’est pas le cas. Dans son témoignage, la demanderesse a indiqué qu’elle était prête à payer pour le traitement recommandé, même si ces coûts n’étaient pas couverts par la Croix-Bleue, et la seule question touchait la période sur laquelle le coût estimé pourrait être réparti. La division générale n’a aucunement outrepassé sa compétence en tant que juge des faits lorsqu’elle a tenu compte de cette déclaration et y a fondé ses conclusions. Dans le même ordre d’idée, étant donné que la demanderesse n’a rien présenté dans son témoignage pour réfuter le pronostic résolument positif contenu dans le rapport du docteur Burbine, il était raisonnable de la part de la division générale de conclure que les chances de guérison étaient bonnes, dans la mesure où les traitements recommandés étaient suivis.

[19] La question visant à déterminer s’il est raisonnable pour un demandeur d’accepter ou de refuser des recommandations relatives à un traitement revient au juge des faits. Selon moi, les observations de la demanderesse sur ces motifs ne consistent qu’à répéter les éléments de preuves qui ont déjà été présentés à la division générale, ou à contredire ce qu’elle a déclaré lors de l’audience. Comme il a été mentionné, la division d’appel n’est pas un forum où l’on peut présenter de nouveaux éléments de preuve ou plaider à nouveau sa cause sur son fond. Je devrais ajouter que, même si la demanderesse avait présenté une preuve claire selon laquelle la thérapie visuelle était trop dispendieuse pour elle, la division générale aurait eu le droit de l’ignorer. Les difficultés financières ne représentent pas un élément pertinent à prendre en considération dans la détermination de l’admissibilité à une pension d’invalidité.

Conclusion

[20] La demanderesse n’a pas présenté de moyens d’appel conformément au paragraphe 58(1) qui auraient eu une chance raisonnable de succès. Par conséquent, la demande de permission d'en appeler est rejetée.

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