Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) de l’appelant le 26 juillet 2010. L’intimé a rejeté cette demande initialement et après révision. L’appelant a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal). Le 18 mars 2014, la division générale du Tribunal a rendu la décision de rejeter l’appel et a statué que les problèmes de santé de l’appelant n’étaient pas graves à la date de fin de la période minimale d’admissibilité (PMA), le 31 décembre 2011, ou avant cette date. Un appel contre la décision de la division générale a été interjeté devant la division d’appel du Tribunal. Dans une décision datée du 14 janvier 2015, la division d’appel a rejeté la demande de permission d’en appeler.

[2] L’appelant a présenté une nouvelle demande de prestations d’invalidité du RPC. Dans la seconde demande estampillée le 14 mai 2015, l’appelant a demandé que l’intimé examine à nouveau sa demande de prestations d’invalidité. Le 18 août 2015, l’intimé a rejeté la demande en concluant qu’un tribunal de révision (il s’agissait d’une erreur; l’intimé aurait dû parler de la division générale du Tribunal) avait déjà rendu une décision finale et exécutoire. L’appelant a demandé une révision, et l’intimé a déclaré, dans une décision datée du 25 janvier 2015, que la décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale était finale et exécutoire et que l’intimé ne pouvait pas la changer. Dans un avis d’appel reçu le 11 mars 2015, l’appelant a interjeté appel de la révision de l’intimé devant la division générale du Tribunal.

[3] L’appel a été tranché sur le fondement de la preuve documentaire versée au dossier.

Droit applicable

[4] L’article 68 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit ce qui suit :

La décision du Tribunal à l’égard d’une demande présentée sous le régime de la présente loi est définitive et sans appel; elle peut cependant faire l’objet d’un contrôle judiciaire aux termes de la Loi sur les Cours fédérales.

Question en litige

Le Tribunal doit déterminer si l’appel interjeté par l’appelant contre la décision découlant de la révision de l’intimé datée du 25 janvier 2016 est chose jugée.

Observations

[5] Dans son avis d’appel, l’appelant a soutenu que les moyens d’appel étaient fondés sur le fait qu’il était incapable d’obtenir un emploi avant l’année 2011 en raison de ses problèmes de santé.

[6] Le 4 octobre 2016, l’intimé a fait valoir à l’écrit qu’une décision finale a été rendue par le Tribunal le 18 mars 2014 selon laquelle l’appelant ne souffrait pas d’une invalidité grave et prolongée lorsque sa PMA a pris fin en décembre 2011. La division d’appel a rejeté la demande de permission d’en appeler relativement à cette décision. Par conséquent, la question de l’invalidité en décembre 2011 est chose jugée.

Analyse

[7] La doctrine de la chose jugée empêche que les mêmes questions soient tranchées de nouveau ou remises en litige par les parties d’une instance. L’appel de l’appelant relatif aux prestations d’invalidités à la date de fin de la PMA, le 31 décembre 2011, ou avant cette date a été tranchée par la division générale du Tribunal en mars 2014.

[8] Dans l’arrêt Danyluk c. Ainsworth Technologies Inc., 2001 CSC 44, [2001] 2 R.C.S. 460, la Cour a défini la doctrine de la chose jugée comme étant la doctrine selon laquelle, « une fois le différend tranché définitivement, il ne peut être soumis à nouveau aux tribunaux ». Dans l’affaire Alves c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1100, la Cour fédérale a conclu que la doctrine de la chose jugée s’appliquait aux décisions du Tribunal.

[9] Dans l’arrêt Danyluk, la Cour suprême du Canada a établi les trois conditions à respecter pour que la doctrine s’applique :

  1. la question doit être la même que celle qui a été tranchée dans la décision antérieure;
  2. la décision antérieure doit être définitive;
  3. que les parties soient les mêmes dans les deux instances.

[10] Le Tribunal est d’accord avec l’intimé que, en l’espèce, les trois conditions établies par la Cour suprême du Canada ont été respectées. Plus particulièrement, les faits pertinents demeurent les mêmes que ceux dans la demande initiale de juillet 2010 relativement à la question de savoir si l’appelant était invalide à la date de fin de la PMA, le 31 décembre 2011, ou avant cette date. La décision du Tribunal de mars 2014 est finale, car la permission d’en appeler devant la division d’appel a été refusée. Finalement, les parties sont les mêmes que celles dans le cadre de l’appel initial.

[11] Dans la décision E.L. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2016 CanLII 59182 (TSS), qui est convaincante, mais non exécutoire, la division d’appel a déclaré que, comme il est souligné dans l’arrêt Danlyuk, les règles de la chose jugée ne doivent pas être appliquées machinalement puisque « [l]’objectif fondamental est d’établir l’équilibre entre l’intérêt public qui consiste à assurer le caractère définitif des litiges et l’autre intérêt public qui est d’assurer que, dans une affaire donnée, justice soit rendue ». Par conséquent, il faut prendre en considération une analyse en deux étapes et déterminer si la doctrine doit être appliquée dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. La Cour suprême du Canada a fourni une liste de facteurs pour et contre l’exercice du pouvoir discrétionnaire, notamment le libellé du texte de loi, l’objet du texte de la loi, l’existence d’un droit d’appel, les garanties offertes aux parties, l’expertise du décideur administratif, les circonstances ayant donné naissance à l’instance administrative initiale et le risque d’injustice. Comme il a été souligné par l’intimé, les six premiers facteurs portent sur le mandat du Tribunal, tandis que le dernier porte sur la justice naturelle en soi.

[12] En ce qui concerne les facteurs discrétionnaires, le Tribunal souligne que, si elle fait l’objet d’un contrôle judiciaire, la décision de la division générale est considérée comme étant finale conformément à l’article 68 de la LMEDS. Par conséquent, le Tribunal est convaincu que la décision rendue par la division générale en mars 2014 est finale. Le texte de loi vise, en partie, à offrir un régime d’assurance sociale aux personnes privées de gains en raison d’une invalidité. Il ne s’agit pas d’un [traduction] « régime d’aide sociale », mais plutôt d’un régime contributif avec une admissibilité et des cotisations définies. La détermination des prestations de l’appelant a été prise en considération à juste titre dans la décision de la division générale de mars 2014 selon la date de fin de sa PMA, soit décembre 2011. Même s’il existait un droit d’appel, l’appelant n’a pas satisfait aux exigences relatives à la permission d’en appeler. Les garanties offertes dans le processus comprenaient le droit à une décision découlant d’une révision et d’une nouvelle audience ultérieure devant le Tribunal de la sécurité sociale, y compris l’occasion de présenter d’autres éléments de preuve pertinents qui n’ont pas fait l’objet d’un examen par l’intimé. Le membre du Tribunal de la sécurité sociale spécialisé pour soupeser la preuve et rendre des décisions particulièrement sur les demandes de pension d’invalidité conformément au RPC. Il n’y avait aucune circonstance abusive à prendre en considération dans les décisions rendues par l’intimé. Finalement, l’appel de l’appel a été tranché selon les facteurs factuels et juridiques qui n’étaient pas arbitraires et qui ne constituaient pas un abus de procédure dans le but d’exercer le pouvoir discrétionnaire de ne pas appliquer la doctrine de la chose jugée.

[13] Même si l’appelant a essentiellement demandé que l’appel soit accueilli pour des raisons d’équité, le Tribunal souligne que, dans la décision Curto c. MDRH (9 octobre 1996), CP 3841 (CAP), la Commission d’appel des pensions a reconnu qu’elle n’était pas un tribunal d’equity et que, par conséquent, elle ne pouvait pas fondé ses principes sur l’equity ou des principes d’équité. En tant qu’organisme créé par une loi et par le gouvernement du Canada, elle est liée et limitée par les dispositions législatives. Le Tribunal est également créé par des dispositions législatives et ses pouvoirs sont limités par sa loi habilitante.

[14] La doctrine de la chose jugée est applicable en l’espèce. Le Tribunal n’examinera pas au fond l’appel de l’appelant.

Conclusion

[15] L’appel est rejeté.

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