Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 1er octobre 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a déterminé qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada était payable à l’intimé. L’appelant a demandé l’autorisation d’interjeter appel de cette décision au motif que la division générale n’aurait pas tenu compte de ses observations. La permission d’en appeler a été accordée à l’appelant le 13 septembre 2016.

[2] Conformément à l’article 42 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement), l’appelant et l’intimé se sont vu accorder 45 jours après le 13 septembre 2016 pour présenter des observations ou pour soumettre un avis indiquant qu’ils n’ont pas d’observation à présenter. L’appelant a présenté des observations le 28 octobre 2016, lesquelles étaient complémentaires à ses observations antérieures qu’il a présentées le 20 janvier 2016. L’intimé n’a présenté aucune observation pour cet appel.

[3] Le Tribunal a décidé de procéder sur la foi du dossier, en vertu de l’alinéa 43a) du Règlement, pour les raisons suivantes :

  1. a) Le dossier est complet et ne nécessite aucune clarification;
  2. b) Les deux parties ont eu la chance de fournir des observations écrites à la division d’appel;
  3. c) L’article 3 du Règlement exige que le Tribunal procède de la façon la plus informelle et rapide possible en ce qui a trait aux circonstances, à l’équité et à la justice naturelle.

Question en litige

[4] La question à trancher dans cet appel est la suivante : la division générale n’aurait-elle pas observé un principe de justice naturelle?

Analyse

[5] Le premier moyen d’appel prévu à l’alinéa 58(1)a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) est la suivante : « la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence ».

[6] Il est prévu dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Huruglica, 2016 CAF 93, que les normes de contrôle applicables à un contrôle judiciaire d’une décision rendue par un décideur administratif ne doivent pas être appliquées automatiquement par un organisme administratif d’appel spécialisé. Plutôt, un tel organe d’appel doit appliquer les moyens d’appel établis dans leur loi constitutive. (Veuillez consulter l’arrêt Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242) Dans ce contexte, je suis d’accord avec l’observation de l’appelant selon lequel, compte tenu du libellé très clair de l’alinéa 58(1)a) de la LMEDS, la division générale ne doit aucune déférence en ce qui a trait aux questions de justice naturelle.

[7] L’intimé a interjeté appel auprès de la division générale en juin 2013. Bien que les parties auraient normalement jusqu’en juin 2014 pour présenter leurs éléments de preuve et leurs observations, la division générale a indiqué en avril 2014 qu’en raison de délais systémiques, ces documents pouvaient continuer à être soumis [traduction] « jusqu’à nouvel ordre ». Par la suite, un avis d’appel daté du 22 mai 2015 a indiqué que les documents et les observations supplémentaires pouvaient être soumis jusqu’au 15 juillet 2015. Une audience en personne a eu lieu le 15 septembre 2015. L’appelant ne s’est pas présenté à cette audience.

[8] Dans sa décision du 1er octobre 2015, le membre de la division générale a indiqué ce qui suit au paragraphe 25 : [traduction] « L’intimé [l’appelant dans le cadre du présent appel] n’a présenté aucune observation au Tribunal ».

[9] Les documents qui sont présentement en la possession de la division d’appel comprennent les observations qui avaient été présentées à la division générale en date du 13 mars 2015, des lettres provenant de la division générale et datant du 12 janvier 2016 et un affidavit daté du 28 octobre 2016 donnant des explications concernant les notes internes de l’appelant. J’ai accepté ces documents en tant que nouveaux éléments de preuve, car ils sont pertinents à la question en litige, à savoir s’il y a eu manquement au principe de justice naturelle en ce qui concerne des observations qui avaient été présentées devant la division générale. Je note que, bien que la division d’appel ne considère normalement que les éléments qui avaient été présentés à la division générale, de nouveaux éléments de preuve peuvent être admis pour ce qui a trait à des questions de justice naturelle (pour un raisonnement analogique, veuillez consulter l’arrêt Ordre des architectes de l’Ontario c. Assn. of Architectural Technologists of Ontario, 2002 CAF 218).

[10] Ces nouveaux documents confirment que l’appelant a tenté de présenter des observations datées du 13 mars 2015 à la division générale à l’aide de voies sécuritaires le 30 mars 2015. Plus particulièrement, des documents provenant du gestionnaire des opérations de la section de la sécurité du revenu de la division générale datant du 12 janvier 2016 indiquent que la division générale a reçu [traduction] « un courriel daté du 30 mars 2015, provenant du ministre et indiquant qu’une observation avait été transférée dans le réseau d’échange de documents », mais l’observation en question n’a pas été jointe ou ajoutée au dossier d’appel.

[11] Les droits d’une partie d’être entendue est un principe essentiel de justice naturelle et comprend la révision et la prise en compte des observations écrites : Caceres c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 843. Il s’agit d’un manquement à la justice naturelle lorsque, par inadvertance, des observations ne se rendent pas du bureau d’un organisme juridictionnel jusqu’au membre qui préside l’audience : Vairavanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1996] C.F.J. No 1025 (CF).

[12] L’appelant était une partie à l’appel de l’intimé devant la division générale, conformément au paragraphe 1(1) du Règlement. La tentative de l’appelant de soumettre ses observations le 30 mars 2015 respectait largement le délai établi par la division générale. Bien qu’il se peut que le membre n’était pas au courant de cette tentative, la division générale était au courant et aurait dû prendre des mesures pour déterminer l’intention de l’appelant avant de procéder. En conséquence, le membre, sans qu’elle en soit responsable, n’a pas reçu ou tenu compte des observations écrites d’une partie avant de rendre sa décision relative à l’appel du 1er octobre 2015. Je suis d’accord avec l’appelant que la division générale n’a ainsi pas observé un principe de justice naturelle.

Conclusion

[13] L’appel est accueilli. Conformément au paragraphe 59(1) de la LMEDS, l’affaire est renvoyée à la division générale pour que la décision de l’intimé soit révisée par un membre différent. L’appel peut être instruit sur la foi du dossier, de l’enregistrement audio de l’audience devant la division générale, des observations écrites de l’appelant datant du 13 mars 2015 et toute observation en réponse que l’intimé souhaite soumettre. Toute audience supplémentaire est à la discrétion du membre de la division générale.

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