Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparution

C. T. Appelant

Introduction

[1] La demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) présentée par l’appelant a été estampillée par l’intimé le 28 octobre 2014. L’intimé a rejeté la demande initialement et après révision. L’appelant a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès du Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Dans le questionnaire joint à la demande de pension d’invalidité, l’appelant a mentionné qu’en 2012, il a cessé de travailler en tant que X dans un X parce qu’il a été [traduction] « congédié ». Il occupait ce poste depuis 2011. Il a affirmé qu’il n’avait pas été en mesure de travailler depuis le 25 octobre 2011 en raison de son anxiété et de son trouble panique, ainsi que de tremblements, de secousses musculaires, d’essoufflements, de signes de nervosité, de problèmes de concentration, de vertiges, de phobies et de crises de panique. Il a déclaré que ses médicaments le rendaient malade et lui causaient des nausées et de la constipation. À l’époque, il prenait de l’Effexor (venlafaxine) au quotidien, de l’Ativan (lorazépam) en cas de crises de panique et de la zopiclone (Imovane) à de rares occasions (GD2-19 à GD2-24; GD2-61 à GD2-68).

[3] Cet appel a été instruit par téléconférence pour les raisons suivantes :

  1. les questions en litige ne sont pas complexes;
  2. ce mode d’instruction est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Droit applicable

[4] L’article 44(1)(b) du RPC énonce les conditions d’admissibilité à la pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne touche pas une pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[5] Le calcul de la PMA est important puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date ou avant la date marquant la fin de sa PMA.

[6] Conformément à l’article 42(2)(a) du RPC, une personne est considérée comme invalide si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[7] Le litige ne porte pas sur la PMA, car les parties ont convenu que la date de fin de la PMA était le 31 décembre 2012. Le Tribunal en convient également.

[8] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer s’il est plus probable qu’improbable que l’appelant était atteint d’une invalidité grave et prolongée à la date ou avant la date marquant la fin de sa PMA.

Preuve

Témoignage de l’appelant

[9] L’appelant est né en Colombie-Britannique en X 1968. Il y a vécu toute sa vie. Il a terminé sa 12e année et n’a pas suivi de cours ni de formation continue depuis.

[10] L’appelant a principalement occupé des emplois dans la X qu’il a décrochés par l’entremise de son syndicat. Il ressent depuis longtemps de l’anxiété qu’il est incapable de contrôler. Celle-ci le faisait travailler trop rapidement et lui faisait faire des erreurs. Il avait du mal à côtoyer d’autres personnes. Ces symptômes lui ont causé des problèmes au travail, mais il était en mesure de les gérer. Il ne se souvient pas avoir déjà manqué une journée de travail dans la X en raison de son anxiété.

[11] L’appelant a cessé de travailler en 2008, même s’il n’en connaissait pas vraiment la raison. Il pensait qu’il aurait pu être licencié en raison d’un manque de travail, mais il a affirmé qu’il était également atteint d’anxiété et de crises de panique à ce moment-là. Il a cherché d’autres emplois, mais sans succès. Il a donc obtenu l’assurance-emploi en 2009.

[12] En 2011, l’appelant était incapable de se trouver un emploi dans la X, et certains de ses amis lui avaient suggéré de présenter sa candidature à un poste de X dans un X. Il a été embauché et a commencé à travailler environ 28 heures par semaine avec un taux horaire d’environ 14 $. Il travaillait seul pendant la nuit. Lorsqu’il a commencé à travailler, son état de santé était [traduction] « normal », bien qu’il était toujours anxieux. Encore une fois, il ne se souvenait pas s’il s’était déjà absenté du travail en raison de son anxiété.

[13] L’appelant a été licencié de son emploi en mars 2012. Il n’en connaissait pas la raison, mais il pensait que cela aurait pu être à cause d’un manque de travail. Il avait l’impression que son employeur était insatisfait de son rendement au travail, mais on ne lui avait jamais rien dit. Depuis son licenciement, il n’a pas cherché à obtenir un autre emploi. Il ne pensait pas qu’il arriverait à passer un entretien ou à tenir une journée de travail en raison de son anxiété. Il n’a donc pas tenté le coup.

[14] Depuis qu’il a cessé de travailler en 2008, l’appelant a des crises de panique sévères environ une fois par mois. Elles sont imprévisibles et déclenchées par toutes sortes de choses, comme le fait de voir un panneau de signalisation. Lorsqu’elles surviennent, l’appelant a l’impression qu’il va mourir et il doit immédiatement rentrer chez lui. Il lui faut d’un à trois jours pour récupérer. Il a des crises de panique moins sévères environ une fois par semaine. Lorsque celles-ci surviennent, il s’allonge et regarde la télévision.

[15] Vers janvier 2011, l’anxiété de l’appelant a graduellement commencé à prendre le dessus. L’appelant a commencé à se sentir anxieux tous les jours, et ce problème persiste depuis. Cela survient notamment lorsqu’il est en public ou lorsqu’il essaie une activité. Il tente donc d’éviter ces situations. Il est seulement calme lorsqu’il mange. Il ne dort pas bien et lorsqu’il se réveille, il se sent déprimé et somnolent. Il prend de la mélatonine pour se sentir mieux.

[16] L’appelant ne savait pas pourquoi il avait choisi le 25 octobre 2011 comme date où il était incapable de travailler. Il a déclaré qu’il avait fait de son mieux pour travailler après cette date.

[17] L’appelant a consulté son médecin de famille, Dr Dang, à plusieurs reprises au sujet de sa santé mentale. Il a évité de se rendre trop souvent chez son médecin en raison de son anxiété. Le Dr Dang lui a dit qu’il était atteint d’anxiété et de dépression, mais il n’a pas laissé entendre que l’appelant devait consulter un spécialiste. Le Dr Dang a fourni des services de psychothérapie, comme précisés dans son rapport médical. Il a également recommandé à l’appelant de faire de l’exercice pour améliorer son humeur. L’appelant ne va pas à la salle d’entraînement en raison de son anxiété et il a dû mal à faire de l’exercice à la maison à cause de sa dépression et de ses maux de dos.

[18] Le Dr Dang lui a prescrit de l’Ativan que l’appelant prend en cas de crises de panique sévères. Ce médicament l’incite à [traduction] « rester coucher pendant deux jours » et le rend malade. Il a également essayé le Prozac pendant environ six mois, mais il a cessé d’en prendre à cause des effets secondaires, comme la nausée, la déshydratation et la constipation. Il a eu des effets secondaires semblables avec la venlafaxine, le Zoloft (sertraline), le Cipralex (escitalopram) et l’Abilify (aripiprazole). Il n’arrivait pas à se rappeler le nom des autres médicaments qu’il avait essayés. Il ne prend que du Tylenol ou d’autres médicaments en vente libre, ainsi que de l’Ativan.

[19] En plus de son anxiété et de sa dépression, l’appelant a des maux de dos depuis plusieurs années. Il arrivait à gérer la douleur en faisant de l’exercice, mais en raison de son anxiété, il évite la salle d’entraînement. Il prend des comprimés de Tylenol régulier ou des anti-inflammatoires pour la douleur. Il croyait que ces médicaments avaient des effets sur sa capacité de travailler. C’est lorsqu’il est assis dans une voiture que cela le dérange le plus.

[20] L’appelant vivait seul, mais depuis 2009, il vit dans le sous-sol de la maison de ses parents parce qu’il n’a pas d’argent. Il a sa propre chambre, il nettoie son espace, il fait des travaux dans le jardin et il aide son père à cuisiner, à conduire et à faire la lessive. Sa mère sort dans la journée pour garder les nièces de l’appelant à temps partiel. L’appelant va magasiner au besoin, mais essaie de s’y rendre tôt avant que les magasins ne soient bondés de monde. Il est capable de conduire, mais après quelques heures derrière le volant, son dos commence à lui faire mal. Il n’est pas autorisé à utiliser un ordinateur et il a refusé d’expliquer pourquoi. Lorsqu’il ne donne pas un coup de main à son père, il regarde la télévision. Il n’a pas de passe-temps et il a cessé de rendre visite à des amis ou de sortir vers 2008.

Rapports médicaux et autres

[21] Selon son relevé d’emploi, l’appelant a travaillé au X du 16 avril 2011 au 5 mars 2012, date à laquelle il a été congédié (GD2-52).

[22] Le Dr N. Dang a soumis un rapport médical daté du 28 octobre 2014. Il a précisé qu’il connaissait l’appelant depuis 18 ans et qu’il avait commencé à le traiter en janvier 2011 pour un trouble anxieux généralisé, des crises de panique et de l’arthrose au niveau thoracique et lombaire. Il a noté que l’appelant était atteint d’anxiété progressive depuis son adolescence et qu’elle était devenue de plus en plus invalidante avec le temps, de même que de douleurs mécaniques au dos qui s’étaient aggravées en soulevant des charges et en se penchant. Le Dr Dang a précisé que l’appelant semblait très nerveux, agité et anxieux et qu’il avait des secousses musculaires. Il avait des symptômes récurrents d’anxiété et de crises de panique, dont des vertiges, des étourdissements, une sensation de constriction du pharynx, de l’insomnie, des palpitations, des inquiétudes, de la peur, de la dysthymie et des problèmes de concentration et de mémoire. Il avait peur de se retrouver dans une foule ou dans une file d’attente. Ses médicaments étaient de l’Effexor, de l’Ativan et de l’Imovane (zopiclone). Les médicaments et la psychothérapie ont eu peu d’effets sur lui. Aucune consultation ni aucun examen médical supplémentaires n’ont été planifiés, et aucune amélioration n’était prévue (GD2-55 à GD2-58).

[23] Les notes cliniques du Dr Dang couvrant la période de septembre 2011 à octobre 2014 précisaient que l’appelant avait eu des rendez-vous en septembre et en octobre 2011, au cours desquels ils avaient discuté de ses médicaments et des effets secondaires. L’appelant a par la suite consulté le Dr Dang en septembre et en octobre 2012 pour des maux de dos qui s’étaient aggravés en raison de l’exercice en salle d’entraînement. Les notes indiquaient que [traduction] « le Zoloft aide [l’appelant] ». En janvier 2013, l’appelant a déclaré que son humeur était stable, mais qu’il ressentait le besoin de prendre une plus grande dose de Zoloft pour son anxiété. Toutefois, la semaine suivante, il a déclaré que le dosage était trop élevé et qu’il avait des crises de panique et d’autres effets secondaires. L’appelant a par la suite consulté le Dr Dang en octobre 2014, car il se sentait incapable de travailler et qu’il était admissible à une invalidité. Deux semaines plus tard, il a fait état de [traduction] « certaines améliorations avec la prise d’IRSN » (GD2-37 à GD2-45).

[24] Une radiographie de la colonne thoracique de l’appelant, datée du 19 septembre 2012, a révélé un rétrécissement léger à sévère de l’espace entre les disques, ainsi qu’un empiètement modéré sur le canal rachidien (GD2-59).

Observations

[25] L’appelant a soutenu qu’il est admissible à une pension d’invalidité parce qu’il est atteint de douleurs sévères à la colonne vertébrale la plupart du temps, ainsi que d’anxiété et de dépression profondes, y compris des phobies et une peur des espaces communs.

[26] L’intimé a soutenu que l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité, car bien qu’il puisse avoir du mal à retourner à son emploi précédent, la preuve n’appuie pas la conclusion selon laquelle il était incapable de détenir tout type de travail.

Analyse

[27] L’appelant doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2012 ou avant cette date.

Caractère grave

[28] Pour déterminer si une invalidité est « grave », il ne faut pas se demander si la personne a de graves détériorations, mais plutôt si elle est atteinte d’une invalidité qui l’empêche de gagner sa vie. La détermination de la gravité de l’invalidité d’une personne ne dépend pas de son incapacité d’occuper son emploi régulier, mais plutôt de son incapacité d’exécuter quelque travail que ce soit (Klabouch c Canada (Développement social), 2008 CAF 33).

[29] Une personne présentant une demande de pension d’invalidité doit démontrer qu’elle a déployé des efforts pour améliorer sa situation. Elle doit se conformer aux recommandations de traitements raisonnables et suivre les conseils médicaux appropriés (Lombardo c MDRH,2001 CP 12731 (CAP)).

[30] Le Tribunal a jugé que le témoignage de l’appelant était vague et que sa mémoire était défaillante. L’appelant n’arrivait pas à se remémorer des détails sur la façon dont ses problèmes de santé avaient eu une incidence sur son travail. Par conséquent, son témoignage n’a pas été particulièrement utile pour déterminer la raison pour laquelle il avait réussi à travailler régulièrement jusqu’en mars 2012, mais qu’il n’avait pas été en mesure de le faire en décembre 2012.

[31] Les antécédents professionnels et le style de vie actuel de l’appelant donnent à penser que celui-ci doit bel et bien surmonter des défis sur le marché du travail. Comme il vit dans une région du pays où l’économie est dynamique et le travail dans la X est abondant, le Tribunal reconnaît que les conditions socio-économiques ne constituent pas un facteur et que les difficultés de l’appelant à trouver et à conserver un emploi sont au moins partiellement associées à son trouble anxieux. Il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve à l’appui du fait que ses maux de dos l’empêchent d’occuper certains types d’emplois.

[32] La difficulté en l’espèce est que très peu de choses sont accomplies pour traiter l’appelant. Cela révèle soit un manque de gravité ou un échec de sa part à trouver et à suivre des options de traitements raisonnables. Il a essayé divers médicaments, mais il n’est pas satisfait à cause de leurs effets secondaires. Cependant, il consulte rarement son médecin de famille. Il a suivi une psychothérapie offerte par son médecin de famille plutôt que par un spécialiste, et rien ne prouve que l’appelant a suivi ce type de traitement au moins depuis septembre 2011. On ne l’a pas orienté vers les services d’un psychiatre ou vers une thérapie de groupe.

[33] Il n’y a rien dans les notes cliniques du Dr Dang qui montre qu’un traitement plus intensif est nécessaire et que l’appelant est incapable de le suivre à cause de son état de santé ou pour toute autre raison indépendante de sa volonté. Le Dr Dang n’a pas précisé que l’appelant devait le consulter plus souvent. Bien que le rapport du Dr Dang comprenait le diagnostic de l’appelant, il ne révélait pas que l’appelant était incapable de travailler à cause de ses problèmes de santé. De plus, le Dr Dang n’a pas décrit les détériorations qui empêcheraient nécessairement l’appelant de détenir un certain type d’occupation véritablement rémunératrice. D’ailleurs, l’appelant a été capable de travailler pendant près d’un an après que son anxiété a empiré, et rien ne prouve qu’il a cessé de travailler à cause de son état de santé.

[34] S’il y a des éléments de preuve concernant la capacité de travail, une personne doit démontrer que ses efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé (Inclima c Canada (PG), 2003 CAF 117). Le Tribunal n’est pas convaincu que l’appelant n’a aucune capacité de travail. Comme mentionné ci-dessus, rien ne prouve que son état de santé se soit détérioré après qu’il a quitté son dernier emploi pour des raisons apparemment indépendantes de sa santé. Il lui incombe de prouver qu’il a essayé de travailler et qu’il a été incapable de le faire.

[35] L’appelant n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice en date du 31 décembre 2012 et qu’il continue de l’être. Son état de santé n’est donc pas « grave » selon le RPC.

Caractère prolongé

[36] Comme le Tribunal a conclu que l’invalidité n’était pas grave, il n’est pas nécessaire de déterminer si elle était de nature prolongée.

Conclusion

[37] L’appel est rejeté.

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