Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est accueilli.

Introduction

[2] Il s’agit de l’appel d’une décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) de rejeter de façon sommaire l’appel de l’appelante relatif au versement de la prestation d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) avant la période rétroactive maximale de 15 mois après avoir conclu qu’elle n’était pas incapable de présenter une demande avant septembre 2013. La division générale a rejeté l’appel parce qu’elle n’était pas convaincue que celui-ci avait une chance raisonnable de succès.

[3] Il n’est pas nécessaire de demander la permission d’interjeter appel en vertu du paragraphe 53(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), parce qu’un rejet sommaire de la part de la division générale peut faire l’objet d’un appel de plein droit.

[4] Comme il a été établi qu’il n’est pas nécessaire d’entendre davantage les parties, une décision doit être rendue, comme l’exige l’alinéa 37a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement sur le TSS).

Aperçu

[5] L’appelante a fait une demande de prestation du RPC le 3 septembre 2013. Sa demande a été accordée par l’intimé, et la première date de versement a été fixée en juin 2012, période marquant la période rétroactive maximale de 15 mois avant la date de la demande. Le 28 janvier 2014, l’appelante a demandé à l’intimé de réviser la date du début de versement de ses prestations d’invalidité au motif que son incapacité a réellement commencé le 10 février 2011. L’intimé a rejeté cette demande à l’étape de la révision le 4 mars 2014. L’appelante a interjeté appel de la décision découlant du réexamen auprès de la division générale le 29 mai 2014. Dans ses observations, l’appelante a déclaré que les problèmes cognitifs causés par l’exposition à des produits chimiques dans son lieu de travail la rendent invalide depuis 2008. Deux rapports psychiatriques ont été joints.

[6] Conformément à l’article 22 du Règlement sur le TSS, la division générale a informé l’appelante à l’écrit de son intention de rejeter l’appel de façon sommaire. La lettre a fait état de ce qui suit :

[traduction]

Le Tribunal est lié par le Régime de pensions du Canada (RPC). Selon le paragraphe 60 du RPC, « [a]ucune prestation n’est payable à une personne sous le régime de la présente loi, sauf si demande en a été faite par elle ou en son nom et que le paiement en ait été approuvé selon la présente loi ». L’article 60 régit la période d’incapacité et prévoit ce qui suit : « Pour l’application des paragraphes (8) et (9), une période d’incapacité doit être continue à moins qu’il n’en soit prescrit autrement ». Dans votre cas, le Tribunal estime que vos prestations d’invalidité du RPC ont été approuvées en offrant la plus grande rétroactivité possible (15 mois). Le Tribunal estime qu’il n’y a pas suffisamment de preuve pour démontrer une incapacité totale qui aurait empêché vous ou une personne en votre nom de présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC à une date antérieure.

[7] Dans sa réponse à la division générale datée du 1er décembre 2015, l’appelante a déclaré souffrir d’une importante déficience pendant une très longue période et avoir cessé de travailler en février 2011. Elle a fait valoir qu’elle était incapable de former l’intention de présenter une demande à une date antérieure en raison de déficits cognitifs. L’appelante a également renvoyé à une cause de la Commission d’appel des pensions, Weisberg c. MSDNote de bas de page 1, et présenté une lettre, datée du 25 novembre 2015, de son médecin de famille qui appuyait l’allégation de l’appelante selon laquelle celle-ci souffrait d’un déficit médical important concernant sa fonction cognitive depuis février 2011.

[8] Le 31 mars 2016, la division générale a rendu sa décision. Elle comprenait un examen détaillé de la preuve médicale, et il a été conclu que l’appelante n’avait pas démontré qu’elle était inapte pendant la période suivant sa cessation de travail en février 2011 et jusqu’en septembre 2013, moment où elle a présenté sa demande de prestations d’invalidité du RPC.

[9] Le 10 juin 2016, l’appelante a interjeté appel de la décision de rejet sommaire auprès de la division d’appel du Tribunal en prétendant que la division générale a commis une erreur. J’ai décidé qu’une audience de vive voix n’était pas nécessaire et que l’appel sera instruit sur le fondement du dossier documentaire pour les motifs suivants :

  1. le dossier est complet et ne nécessite aucune clarification;
  2. ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le TSS selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle le permettent.

Droit applicable

[10] Le paragraphe 53(1) de la LMEDS prévoit que la division générale rejette de façon sommaire l’appel si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès. En vertu du paragraphe 56(2), aucune permission d’en appeler n’est requise pour interjeter appel d’un rejet sommaire devant la DA.

[11] Le paragraphe 54(1) de la LMEDS énonce clairement que la division générale peut seulement rendre une décision qui aurait autrement été prise par le ministre :

La division générale peut rejeter l’appel ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision visée par l’appel ou rendre la décision que le ministre ou la Commission aurait dû rendre.

[12] L’article 22 du Règlement sur le TSS prévoit que, avant de rejeter un appel de façon sommaire, la division générale doit aviser l’appelante par écrit et lui donner un délai raisonnable pour présenter des observations.

[13] Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[14] Les paragraphes 60(8) à 60(10) du RPC énoncent les exigences relatives à une conclusion d’incapacité :

  1. (8) Dans le cas où il est convaincu, sur preuve présentée par le demandeur ou en son nom, que celui-ci n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande le jour où celle-ci a été faite, le ministre peut réputer cette demande de prestation avoir été faite le mois qui précède celui au cours duquel la prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon le ministre, la dernière période pertinente d’incapacité du demandeur a commencé.
  2. (9) Le ministre peut réputer une demande de prestation avoir été faite le mois qui précède le premier mois au cours duquel une prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon lui, la dernière période pertinente d’incapacité du demandeur a commencé, s’il est convaincu, sur preuve présentée par le demandeur :
    1. a) que le demandeur n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant la date à laquelle celle-ci a réellement été faite;
    2. b) que la période d’incapacité du demandeur a cessé avant cette date;
    3. c) que le demandeur n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant la date à laquelle celle-ci a réellement été faite;
      1. (i) au cours de la période — égale au nombre de jours de la période d’incapacité mais ne pouvant dépasser douze mois — débutant à la date où la période d’incapacité du demandeur a cessé,
      2. (ii) si la période décrite au sous-alinéa (i) est inférieure à trente jours, au cours du mois qui suit celui au cours duquel la période d’incapacité du demandeur a cessé.
  3. (10) Pour l’application des paragraphes (8) et (9), une période d’incapacité doit être continue à moins qu’il n’en soit prescrit autrement.

Questions en litige

[15] Les questions que je dois trancher sont les suivantes :

  1. Dans quelle mesure la division d’appel doit-elle faire preuve de déférence à l’égard des décisions de la division générale?
  2. La division générale a-t-elle commis une erreur en rejetant de façon sommaire l’allégation de l’appelante selon laquelle elle n’avait pas la capacité de présenter une demande de prestations d’invalidité avant le 3 septembre 2013?

Observations

[16] Dans sa permission d’en appeler datée du 26 juillet 2016, l’appelante a déclaré que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Plus particulièrement, elle a prétendu que la division générale a commis une erreur en ne tenant pas compte de l’affaire Weisberg à laquelle elle a été renvoyée. Elle savait qu’elle souffrait d’une déficience, mais elle était [traduction] « incertaine quant à la prise de la décision de présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC antérieurement ». Elle a demandé des versements rétroactifs de prestations d’invalidité de mai 2011 à juin 2012.

[17] L’intimé n’a présenté aucune observation.

Analyse

Degré de déférence envers la division générale

[18] Jusqu’à tout récemment, les appels à la division d’appel étaient régis par la norme de contrôle définie par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Dunsmuir c. New BrunswickNote de bas de page 2. Dans les affaires traitant d’erreurs de droit présumées ou de manquements à un principe de justice naturelle, la norme applicable était celle de la décision correcte, qui commandait un seuil inférieur de déférence envers un tribunal administratif, souvent comparé à un tribunal administratif de première instance. Dans les affaires où on prétend que des conclusions de fait erronées ont été tirées, il a été conclu que la norme à appliquer est celle de la décision raisonnable, qui correspond à une décision où on hésite à intervenir dans les conclusions tirées par l’organe responsable en entendant un témoignage factuel.

[19] Dans l’affaire Canada (MCI) c. HuruglicaNote de bas de page 3, la Cour d’appel fédérale a rejeté cette approche en concluant que les tribunaux administratifs ne devraient pas avoir recours à des normes de contrôle ayant été conçues aux fins d’application dans les cours d’appel. Les tribunaux administratifs devraient plutôt se fier en premier lieu à leur loi constitutive pour déterminer leur rôle.

[20] Bien que l’arrêt Huruglica concerne une décision qui émanait de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, elle a des répercussions sur d’autres tribunaux administratifs. Dans cette affaire, la Cour d’appel fédérale a conclu que l’importation de principes de contrôle judiciaires, comme il a été mentionné dans l’arrêt Dunsmuir, vers les tribunes administratives était inappropriée, car celles-ci pourraient refléter des priorités législatives autres que l’impératif constitutionnel de préserver la primauté du droit. [traduction] « Il ne suffit pas d’assumer que la chose étant jugée comme la meilleure politique pour les cours d’appel s’applique également à des cours d’appel administratives particulières. »

[21] Cette situation mène la Cour à déterminer du critère approprié qui découle entièrement de la loi dominante d’un tribunal administratif :

[...] la détermination du rôle d’un organisme administratif d’appel spécialisé est purement et essentiellement une question d’interprétation des lois, parce que le législateur peut concevoir tout type de structure administrative à plusieurs niveaux pour répondre à n’importe quel contexte. L’interprétation de la loi appelle l’analyse des mots de la LIPR [Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés] qui doivent être lus au regard de leur contexte global, selon leur sens grammatical et ordinaire, et en harmonie avec l’économie de la LIPR et son objet [...]. L’approche textuelle, contextuelle et téléologique requise par les principes d’interprétation législative modernes nous donne tous les outils nécessaires pour déterminer l’intention du législateur en ce qui a trait aux dispositions pertinentes de la LIPR et au rôle de la SAR [Section d’appel des réfugiés].

[22] En la matière, cela implique que la norme de la décision raisonnable ou de la décision correcte ne s’applique pas à moins que ces mots ou leurs variantes figurent spécifiquement dans la législation fondatrice. Si cette approche est appliquée à la LMEDS, on doit noter que les alinéas 58(1)a) et 58(1)b) ne qualifie pas les erreurs de droit ou les manquements à la justice naturelle, ce qui laisse entendre que la division d’appel ne devrait pas faire preuve de déférence à l’égard des interprétations de la division générale.

[23] Le mot [traduction] « déraisonnable » ne se trouve nulle part dans l’alinéa 58(1)c), qui porte sur les conclusions de fait erronées. Le critère contient plutôt les qualificatifs « abusive ou arbitraire » ou « sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance ». Comme on laisse entendre dans l’arrêt Huruglica, on doit accorder à ces mots leur propre interprétation, mais la formulation donne à penser que la division d’appel doit intervenir si la division générale fonde sa décision sur une erreur qui est clairement flagrante ou opposée au dossier.

Rejet sommaire

[24] Même si l’appelante n’a pas remis en question explicitement la décision de la division générale d’effectuer un rejet sommaire, j’ai décidé d’abord la question en détail.

[25] Le paragraphe 53(1) de la LMEDS prévoit que la division générale rejette un appel de façon sommaire si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès. Si la division générale n’avait pas déterminé le critère approprié ou encore si elle avait mal énoncé le critère, cela a alors commis une erreur de droit, cela constituerait une erreur de droit, qui est tenue à une norme stricte.

[26] En l’espèce, la division générale a correctement énoncé le critère en citant le paragraphe 53(1) de la LMEDS aux paragraphes 3 et 35 de sa décision. Cependant, il ne suffit pas de simplement citer le critère relatif au rejet sommaire; il faut aussi l’appliquer adéquatement. Après avoir déterminé correctement le critère, la division générale devait ensuite appliquer la loi aux faits. La décision de rejet sommaire comprenait donc une question mixte de fait et de droit et faisait l’objet d’un degré de déférence dans les limites des paramètres prévus au paragraphe 58(1).

[27] Pour déterminer le caractère approprié d’une procédure de rejet sommaire et si un appel a une chance raisonnable de succès, un décideur doit établir s’il existe une « question litigieuse » ou si la demande est fondée. Bien que je sois lié par les décisions de mes collègues de la division d’appel, je suis convaincu par le raisonnement dans la décision A. P. c. M.E.D.S. et P.P.Note de bas de page 4, dans laquelle ma collègue a utilisé l’expression [traduction] « sans aucun espoir » pour distinguer un appel défendable d’un appel pour lequel le rejet sommaire est approprié. Dès lors qu’il existe un fondement factuel à l’appui de l’appel et que le résultat n’est pas [traduction] « manifestement clair », l’affaire ne serait pas admissible à un rejet sommaire. Une simple cause faible n’appellerait pas de décision sommaire puisqu’elle comporterait nécessairement l’évaluation du fond du litige et l’examen et l’appréciation des éléments de preuve. L’évaluation de la preuve et du bien-fondé de l’affaire signale qu’il n’y a pas lieu de rejeter la cause de façon sommaire.

[28] En l’espèce, la division générale a clairement examiné la preuve portée à sa connaissance et évalué l’affaire sur le fond. Dans son analyse, la division générale a déclaré ce qui suit :

[traduction]

[29] Il devient donc essentiel que le Tribunal détermine s’il y a suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer que l’appelante n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande en son nom avant la journée où la demande a été faite. La portée des activités de l’appelante, étant donné ses troubles médicaux, doit être prise en considération pour décider si elle était incapable de former l’intention de présenter une demande.

[30] L’appelante a fait valoir qu’elle est devenue inapte le 10 février 2011, soit le jour où elle a cessé de travail au sein de l’ARC. Il est important de comprendre la différence entre l’invalidité et l’incapacité. Une personne peut être totalement invalide sur le plan physique ou souffrir d’une fonction mentale lente, mais avoir la capacité mentale de prendre des décisions ou de former l’intention de le faire. La Cour d’appel fédérale a établi le principe régissant la question relative à l’incapacité dans l’arrêt Sedrak c. Canada (2008 CAF 86) selon lequel la capacité de former l’intention de présenter une demande de prestations n’est pas de nature différente de la capacité de former une intention relativement aux autres possibilités qui s’offrent au demandeur de prestations. Le fait que celui-ci n’ait pas l’idée d’exercer une faculté donnée en raison de sa vision du monde ne dénote pas chez lui une absence de capacité. Selon la preuve dont le Tribunal dispose, l’appelante s’est régulièrement présenté à des rendez-vous et à des traitements médicaux par elle-même pour l’ensemble de la période de prétendue incapacité. Elle a consulté le Dr Wilson et le Dr Bell en 2011 et en 2012 et elle a également subi un examen par IRM par elle-même. Rien ne prouve qu’elle dépendait de quiconque pour ses rendez-vous ou qu’elle avait besoin de l’aide de quelqu’un pour comprendre les consultations médicales. En février 2013, l’appelante a consulté la Dre Parsons et a également signé une lettre de consentement pour un examen médical.

[31] Le rapport du Dr Stein produit le 24 mai 2013 fournit un résumé des capacités cognitives de l’appelante. Le rapport démontre clairement sa capacité à gérer ses tâches au quotidien et la capacité de conduire une voiture, ce qui nécessite une vivacité d’esprit. Même si elle a beaucoup ralenti le rythme par rapport à sa capacité de polyvalence avant d’être invalide, l’appelante possède encore la capacité d’effectuer des tâches de travail à domicile à son propre rythme. L’extrait suivant du rapport du Dr Stein résume amplement les capacités cognitives de l’appelante : [traduction] « Elle interagissait facilement, elle avait un souvenir raisonnable d’événements historiques et elle était capable de présenter ses symptômes d’une manière organisée au cours de l’entrevue.Elle a exprimé de la tristesse, de la colère et de l’anxiété par rapport à des événements précis, mais elle n’a fait preuve d’aucun affect important au cours de l’entrevue. Elle a nié souffrir d’importants symptômes de dépression, d’idées suicidaires ou d’idées de meurtre. Son évaluation de sa maladie, l’aide qu’elle a reçue jusqu’à maintenant et le plaidoyer qu’elle a fait pour elle-même donnent à penser que son introspection et son jugement ne sont pas déficients. Sa fonction cognitive était largement intacte au cours de l’entrevue. On n’a souligné aucune anormalité concernant l’expression de sa pensée ou le contenu de celle-ci. »

[32] Dans la décision Morrison c. MDRH (1997), CP 4182 (CAP), la Commission a déclaré ce qui suit : L’article soixante est précis et circonscrit.Il n’exige pas de prendre en compte la capacité de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de prestations d’invalidité, mais seulement la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande [...] »

[33] Le Tribunal ne peut également pas ignorer que l’appelante est mère monoparentale chargée d’élever deux adolescents. Cela démontre qu’elle avait la capacité de prendre des décisions importantes et n’évoque aucune incapacité.

[29] Le fait que la division générale était tenue d’évaluer et d’apprécier la preuve en détail dénote qu’il y avait des questions à trancher. Bien que la division générale fût en droit de tirer des conclusions de fait sur la question de savoir si l’appelante était incapable de faire une demande de prestation, cela allait au-delà de l’application du critère relatif aux rejets sommaires. Si la division générale a dû analyser la preuve, lui assigner un poids et déterminer si elle pouvait étayer une conclusion d’incapacité, on ne peut pas dire qu’il n’y avait aucune chance raisonnable de succès ni aucune question litigieuse, ou que l’appel n’était pas fondé.

[30] Bien que la division générale ait énoncé correctement le critère pour un rejet sommaire, cela ne signifie pas nécessairement que les dispositions législatives pertinentes ont de facto été appliquées. En l’espèce, la division générale a mal fait la distinction entre une affaire [traduction] « sans aucun espoir » non fondée et une affaire dont le fondement est possiblement faible ou très faible, et elle a par conséquent incorrectement qualifié le rejet de l’appel comme étant un rejet sommaire. En agissant ainsi, la division générale a non seulement mal appliqué la loi, mais elle a aussi potentiellement empêché l’appelante d’avoir l’occasion d’être entendue. Lorsqu’elle a choisi de rejeter l’appel de façon sommaire, la division générale s’est fermée à l’idée d’examiner l’affaire de l’appelante qui, aussi faible qu’il ait pu être, aurait pu profiter de l’admission de la preuve de vive voix concernant la nature et l’étendue de sa prétendue incapacité.

[31] Après avoir décidé que la division générale a mal employé le processus de rejet sommaire pour rejeter l’espèce, j’estime qu’il n’est pas nécessaire d’enquêter sur la question de savoir si la division générale a commis une erreur dans son analyse de la prétendue incapacité de l’appelante. Il n’est pas pertinent de savoir si la décision de la division générale était justifiable sur le fond, car la considération primordiale doit être si la bonne procédure a été suivie conformément à la LMEDS.

Conclusion

[32] Je conclus que la division générale a mal qualifié la disposition en l’espèce comme étant un rejet sommaire. Pour les motifs susmentionnés, l’appel est accueilli, et l’affaire est renvoyée à la division générale en vue d’une nouvelle audience.

[33] Afin d’éviter toute crainte éventuelle de partialité, l’affaire devrait être attribuée à un membre différent de la division générale et la décision de cette dernière devrait être retirée du dossier.

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