Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 27 novembre 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a conclu qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) n’était pas payable. Le demandeur a présenté une demande de permission d’en appeler (Demande) à la division d’appel du Tribunal le 29 février 2016.

Question en litige

[2] Le membre doit décider si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[3] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et « [la division d’appel] accorde ou refuse cette permission ».

[4] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[5] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. (b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. (c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[6] Le demandeur doit démontrer qu'il a une chance raisonnable de succès selon l'un des moyens énoncés à l'article 58 de la Loi sur le MEDS. Il a été conclu qu'une chance raisonnable de succès équivaut à une cause défendable (voir Canada (Attorney General) v. O’keefe, 2016 FC 503Note de bas de page 1).

Observations

[7] Le demandeur a affirmé que la division générale avait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, et plus particulièrement ce qui suit :

  1. elle n'avait pas tenu adéquatement compte ou n'avait pas accordé suffisamment d'importance à certains rapports médicaux sur les problèmes de santé du demandeur.

[8] Le demandeur a affirmé que la division générale avait fondé sa décision sur une erreur de droit, et plus particulièrement ce qui suit :

  1. elle avait tiré des conclusions fondées sur l'opinion de la division générale, et non sur la preuve médicale objective à sa disposition (voir Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117, et Warren c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 377);
  2. elle n'avait pas appliqué l'approche « réaliste » établie dans Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248;
  3. elle avait mal appliqué les principes établis dans l'arrêt Inclima, précité, concernant l'exigence selon laquelle le demandeur doit démontrer qu'il suit les recommandations de traitement relativement à la consultation de médecins et d'autres professionnels de la santé.

Analyse

Erreur de fait

[9] Le demandeur laisse entendre que la division générale n'a pas tenu adéquatement compte ou n'a pas accordé un point approprié à certains rapports médicaux que le demandeur avait présentés au sujet de ses problèmes de santé. Il fait valoir qu'il existe une [traduction] « vaste preuve » dans les rapports médicaux présentés à l'appui de la demande de pension d'invalidité du demandeur selon laquelle son état est [traduction] « grave et prolongé » selon les critères régissant l'invalidité du RPC. Le demandeur fait valoir que son état de santé était [traduction] « grave et prolongé » en 2010 lorsqu'il a cessé de travailler. De plus, il fait valoir que, malgré une certaine preuve médicale de 2011 à 2013 selon laquelle son état s'était amélioré, il est demeuré invalide jusqu'à la date de fin de sa période minimale d'admissibilité (PMA) selon les critères régissant l'invalidité du RPC.

[10] Le demandeur semble demander que la division d'appel apprécie de nouveau la preuve et qu'il remplace la décision de la division générale par la sienne. Comme il est mentionné précédemment dans le paragraphe [5], les moyens selon lesquels la division d'appel peut accorder la permission d'en appeler ne comprennent pas un nouvel examen de la preuve ayant déjà fait l'objet d'un examen par la division générale. La division générale a le pouvoir discrétionnaire d'examiner la preuve dont elle dispose et, si la division générale estime qu'un élément de preuve est plus fiable qu'un autre, elle doit donner des raisons pour justifier la préférence. En l'espèce, la division générale semble avoir agi ainsi. Les paragraphes 8 à 30 de la décision donnent un résumé détaillé de la preuve médicale, de la situation personnelle et des antécédents en matière d'emploi et d'études du demandeur. La division générale examine non seulement la preuve des troubles médicaux pour lesquels le demandeur a reçu un diagnostic, mais également (et correctement) la preuve médicale inscrite dans les rapports pour juger la façon dont les troubles diagnostiqués influe sur le fonctionnement quotidien du demandeur et sa capacité de travail (voir Klabouch c. Canada (MDS), 2008 CAF, et Petrozza c. MDS (27 octobre 2004), CP 12106 (CAP)). La division d'appel ne peut imaginer la façon dont l'approche de la division générale correspond à une conclusion de fait erronée. Le demandeur peut être en désaccord avec la décision de la division générale, mais le désaccord ne constitue pas une conclusion de fait erronée prévue à l'alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS.

[11] Le désaccord du demandeur avec la conclusion de la division générale ne constitue pas un moyen d'appel prévu à l'article 58 de la Loi sur le MEDS. La division d'appel n'a pas un grand pouvoir discrétionnaire pour rendre une décision relative à la permission d'en appeler conformément à la Loi sur le MEDS. Le fait d'accorder la permission d'en appeler en fonction de moyens non prévus à l'article 58 de la Loi sur le MEDS serait un exercice inapproprié du pouvoir délégué (voir Canada (Attorney General) v. O’keefe, 2016 FC 503). Par conséquent, la permission d'en appeler ne peut pas être accordée sur ce moyen.

Erreur de droit

[12] Le demandeur soutient que la division générale a commis une erreur de droit en ne tenant pas adéquatement compte de la preuve médicale objective fournie dans un rapport daté de 2014 et produit par le Dr Klipitch dans lequel les limitations fonctionnelles du demandeur sont énoncées. Le demandeur fait également valoir que la division générale a ignoré la preuve médicale et qu'elle a conclu que les limitations fonctionnelles du demandeur n'étaient pas [traduction] « importantes ».

[13] À la lecture de la décision de la division générale, je ne peux pas trouver un passage où cette décision a été rendue. Au paragraphe 35 de la décision, la division générale renvoie au rapport du Dr Klipitch et souligne l'ensemble des limitations fonctionnelles du demandeur décrites par le Dr Klipitch. Je ne vois pas le passage où la division générale a décrit ces limitations comme n'étant pas importantes. En déterminant si le demandeur respecte le critère de gravité au titre du RPC, la division générale a conclu que les limitations fonctionnelles du demandeur pourraient l'empêcher de retourner à son emploi précédent, que la preuve ne suffit pas pour appuyer une conclusion selon laquelle ses limitations fonctionnelles l'empêchent régulièrement de détenir une occupation véritablement rémunératrice dans un domaine d'emploi différent et adapté à ses limitations fonctionnelles. Il incombe au demandeur de démontrer l'existence d'un trouble médical grave et de fournir une preuve selon laquelle il a déployé des efforts pour travailler. Si des efforts ont été déployés afin de travailler, le demandeur doit démontrer que ces efforts ont été infructueux en raison du trouble médical grave (voir l'arrêt Inclima). La permission d’en appeler ne peut être accordée sur ce moyen.

[14] Le demandeur a soutenu que la division générale a commis une erreur de droit en n'appliquant pas de manière adéquate les principes établis dans l'arrêt Villani. Plus particulièrement, le demandeur fait valoir que la division générale n'a pas tenu compte de la preuve selon laquelle le demandeur était « régulièrement » incapable de détenir une occupation « véritablement » rémunératrice. Le demandeur fonde cet argument sur une mention générale aux [traduction] « renseignements » figurant dans les rapports médicaux, mais, essentiellement, l'argument du demandeur selon lequel la division générale a commis une erreur de droit concernant l'application de l'arrêt Villani est fondé sur le témoignage de vive voix du demandeur selon lequel il est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

[15] Le contexte réaliste prévu dans l'arrêt Villani ne renvoie pas à une évaluation subjective du demandeur pour savoir s'il pourrait travailler dans un contexte « réaliste ». Le contexte réaliste prévu dans l'arrêt Villani signifie qu'il faut garder à l'esprit certains facteurs lorsqu'il vient le temps de déterminer la gravité de l'invalidité d'une personne et la capacité de travailler par la suite. Ces facteurs comprennent l'âge, le niveau d'instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l'expérience de vie. En l'espèce, la division générale a examiné les facteurs pertinents. Le demandeur était relativement jeune à la date de fin de sa PMA, soit 55 ans. Il avait terminé ses études secondaires et il a travaillé bon nombre d'années au même poste. Il n'y avait aucun problème concernant ses aptitudes linguistiques. Le demandeur fait valoir qu'il n'a aucune autre formation, mais que son employabilité n'est pas limitée à son domaine d'emploi (voir Doucette c. Canada (MDRH), [2005] 2 RCF 44, 2004 CAF 292). Le critère n'est pas de savoir s'il est incapable d'occuper son emploi particulier, mais bien une occupation quelconque (Klabouch). Il incombe au demandeur de présenter la preuve selon laquelle ses efforts pour occuper un emploi ont échoué en raison de son état de santé (Inclima).

[16] Dans l'arrêt Villani, la Cour d'appel a également déclaré que, en plus de présenter la preuve d'une invalidité grave et prolongée rendant un demandeur régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice, « [u]ne preuve médicale sera toujours nécessaire, de même qu'une preuve des efforts déployés pour se trouver un emploi et de l'existence des possibilités d'emploi [...] » [mis en évidence par la soussignée]. La division générale a fondé sa décision sur le manque de preuve des efforts déployés pour se trouver un emploi et de l'existence des possibilités d'emploi, comme la jurisprudence l'exige. Par conséquent, la permission d'en appeler ne peut pas être accordée sur ce moyen.

[17] Le demandeur a également fait valoir que la division générale a incorrectement conclu qu'il avait omis de suivre le traitement prescrit par les médecins et professionnels de la santé traitants sans fournir une explication raisonnable pour justifier le non-respect. Dans l'arrêt Klabouch, la Cour fédérale a déclaré que les demandeurs doivent présenter la preuve selon laquelle ils ont déployé des efforts pour prendre en charge leur trouble médical.

[18] La division générale a cerné plusieurs circonstances dans lesquels le demandeur avait omis de fournir une preuve du respect des recommandations de traitement. Le demandeur a continué de fumer malgré les répercussions défavorables sur sa santé. Bien qu'il fasse valoir que le fait de cesser de fumer n'est pas un traitement prescrit, mais bien une dépendance, l'un de ses médecins lui avait bel et bien recommandé, et aucun effort déployé pour suivre ce conseil du médecin n'a été présenté dans la preuve du demandeur. Le demandeur n'a pas respecté les recommandations alimentaires. Le demandeur fait valoir que sa décision de ne pas subir les injections recommandées pour maîtriser la douleur était raisonnable. Il s'agit de l'évaluation subjective du demandeur sur la preuve médicale et les conseils des médecins. Par conséquent, son argument n’est pas convaincant.

[19] Je ne constate aucune cause défendable selon les moyens soulevés par le demandeur.

Conclusion

[20] La demande est rejetée.

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