Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est accordée.

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler de la décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) le 26 mai 2016. La division générale avait précédemment tenu une audience par téléconférence et avait conclu que le demandeur n’était pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). Elle avait conclu que son invalidité n’était pas « grave » au cours de la période minimale d’admissibilité (PMA), qui a pris fin le 31 décembre 2014.

[2] Le 25 août 2016, la demanderesse a présenté à la division d’appel, dans les délais prescrits, une demande de permission d’en appeler. Pour accueillir cette demande, je dois être convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[3] Selon les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission », et la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ».

[4] Le paragraphe 58(2) de la LMEDS prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[5] Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[6] Il reste que la demande doit soulever un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c. CanadaNote de bas de page 1. Selon la Cour d’appel fédérale, la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si l’appel a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Fancy c. CanadaNote de bas de page 2.

[7] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience au fond de l’affaire. C’est un premier obstacle qu’un demandeur doit franchir, mais celui-ci est inférieur à celui auquel il devra faire face à l’audience relative à l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, le demandeur n’a pas à prouver sa thèse.

Question en litige

[8] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Observations

[9] La demande de permission d’en appeler de la demanderesse est axée sur le paragraphe 17 de la décision, dans lequel la division générale a déclaré ce qui suit :

[traduction]
[...]  Aucune preuve fournie ne laisse entendre qu’un des troubles physiques soulignés nécessitait un traitement continu ou était incapacitant de manière individuelle ou en combinaison avec l’ensemble de son état de santé. Le Tribunal estime qu’aucune conclusion des médecins ne correspond à un diagnostic grave. [mis en évidence par le soussigné]

Le représentant autorisé de la demanderesse a soutenu que la division générale a fondé sa décision sur les conclusions de fait erronées suivantes :

  1. Dans le paragraphe 17, on nie l’existence d’une preuve selon laquelle la demanderesse avait besoin d’un traitement continu, et, au paragraphe 20, il est conclu qu’elle n’avait pas [traduction] « fait tout ce qu’elle pouvait pour obtenir une aide médicale et traiter ses troubles médicaux ». Ces conclusions ont été tirées sans tenir compte de l’observation de la demanderesse, soulignée au paragraphe 12b) de la décision, selon laquelle elle consomme sa prescription et des médicaments en vente libre. Cela était également appuyé par le rapport médical du Dr Boyrazian daté du 4 septembre 2012 (GD2-50) selon lequel le traitement médical de la demanderesse était [traduction] « continu » et qui énumère les médicaments sur ordonnance qu’elle prenait à l’époque, malgré la mauvaise réponse. Le médecin de famille de la demanderesse a ensuite conclu que son pronostic était [traduction] « faible ». La probabilité que les blessures de la demanderesse s’aggravent progressivement est appuyée par l’examen par IRM du genou effectué en mai 2012, qui décrit l’état comme étant dégénératif. En résumé, il est déroutant de constater la façon dont la division générale a pu conclure que (i) la demanderesse ne suivait aucun traitement; (ii) si elle avait subi un traitement, son état se serait probablement amélioré. La preuve dont disposait la division générale soulignait l’exact opposé de ces deux conclusions.
  2. Dans le paragraphe 17, il est également conclu que l’invalidité de la demanderesse n’était pas grave. Cette conclusion de fait a été tirée sans tenir compte du rapport médical du Dr Boyrazian dans lequel il est souligné que la combinaison d’une déchirure et d’arthrose au ligament croisé antérieur du genou droit, la dépression chronique et l’obésité de la patiente a entraîné des [traduction] « déficiences prolongées et sévères ». Le Dr Boyrazian a également déclaré qu’elle était [traduction] « incapable de reprendre tout type d’emploi rémunérateur à l’heure actuelle ». Cette conclusion, conjointement avec les observations du représentant de la demanderesse selon lesquelles celle-ci souffrait d’un sérieux manque de capacité fonctionnelle, a laissé entendre de façon convaincante que l’état de la demanderesse était bel et bien incapacitant à la date de fin de la PMA.

Analyse

Aucun traitement continu

[10] La demanderesse soutient que la division générale a commis une erreur en déclarant catégoriquement qu’il n’existe aucune preuve de [traduction] « traitement continu » en soulignant sa consommation de médicaments sur ordonnance et en vente libre ainsi que la description par le médecin de famille du traitement de la demanderesse comme étant [traduction] « continu ».

[11] Je constate ‏une cause défendable fondée sur ce moyen. Selon le rapport médical du Dr Boyrazian, la demanderesse avait une prescription d’antidépresseurs et d’analgésiques plus de deux ans avant la fin de sa PMA. Une grande partie du litige dépend de la question de savoir s’il existait une preuve selon laquelle elle continue de prendre des médicaments et si l’utilisation des mots [traduction] « traitement continu » par la division générale pourrait raisonnablement englober la consommation de médicaments, contrairement à des interventions plus actives comme la physiothérapie ou la chirurgie. Les parties devraient également garder à l’esprit que l’erreur de la division générale, s’il s’agissait bel et bien d’une, est présentable seulement s’il s’agit d’un facteur important dans l’issue de la décision et en ce qui concerne les aspects concernant les conclusions tirées « de façon abusive ou arbitraire » ou « sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance ».

[12] La demanderesse se trouve en terrain plus houleux dans son allégation selon laquelle la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu qu’elle n’avait pas poursuivi le traitement. Il y avait une preuve selon laquelle la demanderesse avait refusé de subir une chirurgie arthroscopique, et la division générale a consacré le paragraphe 20 à une analyse sur la question de savoir s’il s’agissait d’un choix raisonnable pour finalement conclure, après avoir apprécié la preuve, que ce n’était pas le cas. La division générale a cité la jurisprudence à l’appui de sa décision de tirer une conclusion défavorable du fait que la demanderesse ne s’est pas aidée, et je ne constate aucune erreur, donc aucune cause défendable, pour ce moyen. Le simple fait qu’un docteur a jugé le pronostic comme étant [traduction] « faible » ou son état comme étant [traduction] « dégénératif » ne libérait pas la demanderesse de son obligation d’atténuer sa déficience en cherchant un traitement approprié.

Conclusion d’absence de gravité

[13] La demanderesse prétend également que la division générale a commis une erreur au paragraphe 17 lorsqu’elle a conclu n’avoir constaté aucune preuve selon laquelle le trouble était « grave ».

[14] Je ne constate aucune chance raisonnable de succès pour ce moyen d’appel. La question de savoir si les déficiences de la demanderesse ont franchi le seuil en matière de gravité, comme il est défini au sous-alinéa 42(2)a)(i) du RPC est, bien sûr, l’une des questions centrales des appels de ce genre. Le simple fait d’exprimer un désaccord avec la décision de la division générale ne constitue pas un moyen d’appel valide, et j’estime que les observations de l’appelante à cet égard sont si vastes qu’ils reviennent à me demander d’examiner à nouveau la preuve sur le fond. Un appel devant la division d’appel n’est pas là pour permettre à un demandeur de plaider à nouveau sa cause et de demander un résultat différent. Je n’ai compétence que pour déterminer si l’un de ses motifs d’appel se rattache aux moyens d’appel admissibles du paragraphe 58(1) et si l’un d’eux confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[15] La demanderesse prétend que la division générale a fait abstraction du rapport médical du Dr Boyrazian, mais je ne constate rien qui démontre cela dans la décision, qui a résumé et apprécié de manière significative la preuve médicale dont elle disposait avant de conclure que la demanderesse ne répondait pas aux critères législatifs applicables. Le fait que le Dr Boyrazian a déclaré la demanderesse inapte à travailler parce que les déficiences de celle-ci étaient « prolongées et graves » ne permet pas à lui seul de trancher la question. Seule la division générale a la compétence d’appliquer le droit aux faits et de déterminer si la demanderesse est admissible à la pension d’invalidité du RPC.

Conclusion

[16] J’accorde la permission d’en appeler sur le fondement unique que la division générale pourrait avoir fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, particulièrement celle selon laquelle rien ne prouvait que la demanderesse recevait un traitement [traduction] « continu ».

[17] J’invite aussi les parties à déposer leurs observations sur la pertinence de tenir une nouvelle audience et, si une audience s’avère nécessaire, sur le type d’audience qui convient.

[18] La présente décision qui accorde la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.