Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est refusée.

Introduction

[1] Le demandeur souhaite obtenir la permission d’appeler de la décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) le 7 juillet 2016. La division générale avait tenu une audience par téléconférence et conclu que le demandeur n’était pas admissible à une pension d’invalidité aux termes du Régime de pensions du Canada (RPC). Elle avait conclu que son invalidité n’était pas grave avant la date de fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA), le 31 décembre 2008.

[2] Le 12 septembre 2016, le demandeur a présenté à la division d’appel une demande incomplète de permission d’en appeler. À la suite d’une demande de renseignements supplémentaires, le demandeur a complété son appel le 3 octobre 2016, dans les délais prévus. Afin que la demande soit accueillie, je dois être convaincu que l'appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[3] Conformément aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission, et la division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[4] Le paragraphe 58(2) de la LMEDS prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[5] Les seuls moyens d’appel selon le paragraphe 58(1) de la LMEDS sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[6] Pour que la demande de permission d’en appeler soit accueillie, un motif défendable doit être présenté qui pourrait éventuellement donner gain de cause : Kerth c. CanadaNote de bas de page 1. La Cour d’appel fédérale a établi que la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si le défendeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Fancy c. CanadaNote de bas de page 2.

[7] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience sur le fond. C’est un premier obstacle qu’un demandeur doit franchir, mais celui-ci est inférieur à celui auquel il devra faire face à l’audition de l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, le demandeur n’a pas à prouver sa thèse.

Question en litige

[8] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Observations

[9] Dans sa demande de permission d’en appeler, le demandeur a déclaré que la division générale avait omis de reconnaître qu’il avait une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2008. Il a affirmé que son état avait atteint le seuil-limite prévu par la loi lorsqu’il avait été victime de discrimination de nature homophobe alors qu’il travaillait au Liquor Distribution Branch de la Colombie-Britannique de 1995 à 2003, et que le traumatisme psychologique qu’il a subi à cet endroit avait continué d’avoir un impact négatif sur les emplois qu’il a occupés par la suite.

[10] Il a été victime de moqueries, d’intimidation et de harcèlement depuis qu’il a commencé l’école, ce qui a entraîné chez lui des problèmes d’anxiété, de dépression et des troubles de concentration qui font de lui un danger dans tout lieu de travail. Comme l’a souligné le docteur Wodynski (GD1-10), le demandeur souffre d’insomnie, de migraines et de nausée, et ces problèmes s’aggravent lorsqu’il est victime de discrimination homophobe. Par conséquent, son relevé d’emploi reflète une série d’échecs. Il est difficile pour le demandeur de trouver un emploi rémunérateur puisque son curriculum vitæ révèle qu’il a été congédié à répétition. La région métropolitaine de Vancouver a ses limites, et peu de milieux de travail sont exempts de discrimination.

[11] Selon Villani c. CanadaNote de bas de page 3, le caractère grave de l’invalidité doit être évalué dans un contexte réaliste en fonction des antécédents personnels du demandeur. Le demandeur a déclaré que la division générale avait ignoré les renseignements présentés concernant ses antécédents professionnels et ses expériences de vie, particulièrement en ce qui a trait aux comportements homophobes auxquels il a été soumis avant la fin de sa PMA. Le sectarisme, la discrimination et le harcèlement ont rendu le demandeur craintif, anxieux et déprimé dans des milieux institutionnels, particulièrement en milieu de travail, où il a été une cible. Par exemple, pendant qu’il travaillait chez Costco, il a été victime de harcèlement de nature homophobe, ce qui a nui aux études qu’il avait entreprises à la University of British Columbia (UBC) et entraîné l’échec de son stage en 2007. Par conséquent, il n’a pas obtenu son baccalauréat en enseignement. Parallèlement, les plaintes que le demandeur a formulées auprès de la gestion du Costco ont été ignorées, et il sentait qu’il était forcé de démissionner. Aucun de ces éléments n’a été pris en considération par la division générale, qui a ignoré les preuves médicales relatives aux traitements qu’il a reçus par rapport à l’anxiété, son traumatisme psychologique, son trouble de stress post-traumatique (TSPT) et sa claustrophobie.

Analyse

[12] Le demandeur suggère que la division générale a rejeté son appel malgré une preuve médicale indiquant que son trouble médical était « grave et prolongé » à la fin de sa PMA selon les critères associés à la pension d'invalidité du RPC.

[13] Cependant, à l'exception de cette allégation générale, le demandeur n'a pas précisé comment, en rendant sa décision, la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, a erré en droit ou a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée. Mon examen de la décision révèle que la division générale a analysé en détail les troubles médicaux du demandeur, dont la dépression, l’anxiété, le traumatisme psychologique, le TSPT et la claustrophobie, et qu’elle a aussi analysé la façon dont ces troubles ont influencé sa capacité à détenir régulièrement un emploi véritablement rémunérateur. Plus particulièrement, la division générale a tenu compte de plusieurs facteurs comme :

  • le traumatisme psychologique dont a été victime le demandeur lors d’un vol à main armée en 2003;
  • la discrimination de nature homophobe dont a été victime le demandeur en milieu de travail, que cette discrimination soit réelle ou perçue;
  • l’incidence que le harcèlement a eue sur les études du demandeur à la UBC.

[14] La division générale appuyait sa décision grâce à une analyse qui suggère qu’elle a évalué les éléments de preuve comme il se doit et qu’elle avait un motif défendable pour appuyer sa conclusion. Finalement, elle a estimé qu’aucune preuve suffisante ne permettait de conclure que le demandeur était atteint d’une invalidité grave et prolongée, et a jugé que le revenu de plus de 30 000 $ généré par le demandeur en 2011-2012 était associé à un emploi « véritablement rémunérateur », et non à la générosité d’un « employeur bienveillant ». Je ne trouve rien qui montre que la division générale aurait ignoré l’un ou l’autre des éléments de preuve dont elle disposait ou qu’elle n’en aurait pas adéquatement tenu compte.

[15] Le demandeur prétend aussi que la division générale a omis d’appliquer ou a mal appliqué le principe associé à l’affaire Villani selon lequel une évaluation réaliste de l’employabilité des demandeurs de pension d’invalidité du RPC doit être réalisée en fonction de leurs antécédents personnels. Je ne constate cependant pas de cause défendable fondée sur ce moyen d’appel. La division générale a correctement cité Villani au paragraphe 41 de sa décision, et plus important encore, elle a tenu compte de la déclaration du demandeur selon laquelle son orientation sexuelle en faisait la cible de discrimination de nature homophobe, ce qui aurait mené à son congédiement prématuré d’une série d’emplois. Finalement, la division générale a conclu, selon moi correctement, qu’elle n’avait pas compétence pour se prononcer sur les conditions courantes associées aux milieux de travail précis ou à l’ensemble du marché du travail.

[16] Je conclus que les observations du demandeur consistent à récapituler les éléments de preuve et les arguments qui ont déjà été présentés à la division générale. La division d'appel n'a malheureusement pas le mandat de procéder à une nouvelle audience des demandes de prestations d'invalidité sur le fond. Bien que les demandeurs ne soient pas tenus de prouver les moyens d’appel qu’ils invoquent à l’étape de la demande de permission d’en appeler, ils doivent néanmoins décrire, à l’appui de leurs observations, certains fondements rationnels qui cadrent avec les moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) de la LMEDS. Il ne suffit pas à un demandeur de simplement déclarer qu’il est n’est pas d’accord avec la décision de la division générale, pas plus qu’il ne lui suffit d’exprimer sa conviction persistante que ses problèmes de santé le rendent invalide au sens du RPC.

Conclusion

[17] Le demandeur n’a pas soulevé de moyen d’appel qui, conformément au paragraphe 58(1), conférerait à l'appel une chance raisonnable de succès. La demande est donc rejetée.

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