Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparutions

Appelante : A. B.

Représentante de l’appelante: Caitlin Galvao

Interprète (hindi) : Harinderjeet Goel

Personne de soutien : B. B. (époux de l’appelante)

Introduction

[1] La demande de prestations d’invalidité présentée par l’appelante en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) a été estampillée par l’intimé le 5 décembre 2014. L’intimé a rejeté cette demande initialement et après révision. L’appelante a interjeté appel de la décision issue de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) le 26 octobre 2015.

[2] L’appelante avait 51 ans en décembre 2016, c’est-à-dire à la date de fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Elle a une 10e année, et a travaillé pendant environ 28 ans, plus récemment à titre d’assembleuse dans une usine. Elle s’est blessée lors d’un accident survenu au travail en juin 2008, et a par la suite été en réadaptation tout en travaillant avec des tâches modifiées. Elle a quitté son emploi le 25 octobre 2013, car son employeur n’avait pas d’emploi avec tâches adaptées à lui offrir. Ses problèmes médicaux principaux étaient de la douleur chronique dans ses épaules et son genou, de la douleur au bas du dos, des crises de panique et de l’anxiété (GD2- 100).

[3] L’audience de cet appel a été tenue par comparution pour les raisons suivantes :

  • Plus d’une partie devait assister à l’audience;
  • Ce mode d’audience est celui qui permet le mieux à plusieurs personnes de participer;
  • Les questions en appel sont complexes;
  • Ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Droit applicable

[4] L’alinéa 44(1)b) du RPC énonce les conditions d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne reçoit pas une pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la PMA.

[5] Le calcul de la PMA est important puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date ou avant la date marquant la fin de sa PMA.

[6] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du RPC, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité n’est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[7] Le litige ne concerne pas la PMA, car les parties conviennent que cette période prend fin le 31 décembre 2016, ce qu’a également conclu le Tribunal.

[8] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer s’il est plus probable qu’improbable que l’appelante ait été atteinte d’une invalidité grave et prolongée d’ici la fin de sa PMA.

Preuve

[9] Des radiographies de la colonne lombaire datées du 3 septembre 2008 révélaient des changements dégénératifs modérés dans les disques et les éléments postérieurs en L5-S1. Des radiographies de l’épaule, datant de la même journée, ont révélé des résultats normaux (GD2-115).

[10] Le 2 décembre 2008, une échographie des deux épaules n’a révélé aucune rupture complète de la coiffe des rotateurs.   Cependant, il y avait présence d’une grave tendinopathie calcifiée du muscle sus-épineux gauche prononcée, ainsi qu’une tendinopathie diffuse du muscle sus-épineux droit d’intensité légère à modérée avec tendinose plus grave (GD2- 112). Une IRM de la colonne cervicale datée du 20 janvier 2009 a révélé une discopathie dégénérative, mais aucune hernie discale centrale (GD2-116).

[11] La Dre Sangeeta Bajaj, rhumatologue, a rencontré l’appelante le 20 avril 2009. Elle a diagnostiqué chez la patiente une fibromyalgie chronique et la possibilité d’une tendinite à l’épaule gauche. La Dre Bajaj a recommandé que l’appelante prenne de l’amitriptyline ou du Lyrica pour la fibromyalgie. Elle hésitait à recevoir des injections de cortisone dans son épaule gauche, et la Dre Bajaj a reconnu que ce traitement ne serait peut-être pas bénéfique pour sa fibromyalgie. Elle a signalé que l’appelante se plaignait de troubles du sommeil et de fatigue chronique (GD2-108-109). La Dre Bajaj a vu l’appelante à nouveau le 5 novembre 2009 et lui a donné une injection de Depo-Medrol dans son épaule (GD2-117).

[12] Le 4 décembre 2009, le Dr Mark Cohen d’un centre de traitement des douleurs a écrit à la médecin de famille de l’appelante au sujet d’une consultation en raison de douleur persistante au cou et à l’épaule. L’appelante s’est plainte de graves maux de tête deux à trois fois par semaine. En juin 2008 elle s’était blessée au cou, aux épaules et au haut du dos au travail. Malgré la prise d’anti-inflammatoires et d’analgésiques, ainsi que sa participation à des séances de physiothérapie et de massothérapie, la douleur a persisté et s’est même répandue. L’appelante souffrait désormais de douleur continue qui n’était que partiellement atténuée à l’aide de Tylenol no 2 et d’Advil. Des injections de cortisone le mois précédent n’ont apporté qu’une amélioration minime. Le diagnostic était une tendinopathie grave de la coiffe des rotateurs gauches, une irritation bénigne des facettes des vertèbres cervicales et un syndrome de la douleur chronique. Le Dr Cohen a fait quelques recommandations concernant des changements à la médicamentation, la physiothérapie et la possibilité de blocs nerveux (GD2-44-48).

[13] L’appelante a reçu des anesthésies tronculaires, effectuées par le Dr Cohen le 12 mars 2010, et elle a trouvé que celles-ci ont été d’une certaine aide (GD2-125).

[14] L’appelante a eu une évaluation pour le programme de réhabilitation fonctionnelle de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) le 28 septembre 2010. Elle s’est plainte de douleur à l’épaule gauche et de douleur au cou irradiant jusqu’à sa région lombaire. Un examen a révélé qu’elle avait une amplitude de mouvements réduite dans son épaule et son coude gauches, et au niveau de la colonne cervicale et lombaire. Un examen neurologique a révélé une faiblesse au niveau de son bras et de sa jambe gauches. Elle a signalé qu’elle prenait de l’amitriptyline pour dormir, mais que cela causait des pertes de mémoire. L’intensité de ses symptômes psychologiques se situait entre légère et modérée. L’équipe d’évaluation n’a trouvé aucune raison expliquant pourquoi elle ne pourrait pas participer au PRF, et l’objectif était qu’elle retourne au travail. Elle a commencé le traitement le 8 octobre 2010 et a terminé le programme le 4 février 2011 (GD2-123 et suivants).

[15] Des radiographies et des ultrasons de son épaule gauche, effectués le 18 décembre 2010, ont révélé la présence de modifications dégénératives légères à modérées de l’articulation acromio-claviculaire gauche et une possible tendinopathie de la coiffe des rotateurs. Il y avait une déchirure partielle importante du tendon du sus-épineux gauche (GD2-150).

[16] Un examen par IRM du genou gauche de l’appelante, daté du 14 janvier 2011, a révélé la présence d’arthrose bénigne ainsi qu’une zone hyperintense au niveau du ménisque interne qui est probablement dégénérative (GD2-151).

[17] Le rapport de décharge du FRP, daté du 4 février 2011, soulignait qu’une IRM récente de l’épaule gauche avait révélé la présence d’une déchirure sur toute l’épaisseur de la coiffe gauche des rotateurs. Des mesures de précautions ont été ajoutées à la liste de restrictions de l’appelante. Son épaule gauche lui causait de la douleur importante, affectant sa capacité à exercer les fonctions de son poste et ses activités quotidiennes. Au moment où elle a reçu son congé, l’appelante était capable d’effectuer des activités selon son niveau d’exigence physique et sédentaire (GD2-157-170). Le 11 février 2011, le rapport no 3 sur la capacité de travail du FRP signalait des précautions fonctionnelles temporaires au niveau de son épaule gauche, de son cou et du haut de son dos (GD2-154).

[18] L’appelante a été examinée le 21 avril 2011 à la clinique spécialisée de rétablissement pour épaules et coudes de la CSPAAT. Elle a continué à éprouver de la douleur au niveau de son épaule gauche, ainsi que de la douleur dans son bras, son dos, son cou et son épaule droite (GD2-172 et suivants).

[19] Le Dr Bob Karabatsos, chirurgien orthopédiste, a vu l’appelante le 19 août 2011, au sujet de son genou gauche, pour lequel elle a subi une opération le 6 juin 2011. L’appelante éprouvait toujours de la douleur à l’arrière de ses genoux. Le médecin a affirmé qu’il n’avait pas d’option chirurgicale supplémentaire à lui suggérer, et il n’a pas recommandé d’autre chirurgie orthopédique. Il s’attendait à ce que sa douleur diminue graduellement (GD2-196).

[20] Un rapport de décharge et de retour au travail a été fourni par la CSPAAT le 4 août 2011. L’appelante est retournée au travail en février 2011. Elle a arrêté de travailler du 6 juin au 1er juillet 2011 en raison de sa blessure au genou. En juin 2011, ses mesures de précaution relatives à son épaule ont été jugées permanentes (GD2-180-185).

[21] L’appelante avait une décompression par réparation de la coiffe des rotateurs du côté gauche le 2 mars 2012. Le Dr M. McKee, chirurgien orthopédiste, a signalé le 22 mars 2012 qu’elle se portait bien et qu’elle avait une excellente amplitude de mouvement au niveau de son coude et de sa main (GD2-186, 187, 221). Le 17 mai 2012, le Dr McKee a dit que l’appelante pouvait retourner travailler avec des tâches modifiées dans deux semaines, avec des restrictions relatives à son bras gauche. Il a recommandé un retour au travail graduel et des séances de physiothérapie en continu (GD2-189-190).

[22] Le 16 mai 2012, un rayon X du genou droit a révélé la présence d’arthrose légère. Le 22 juin 2012, une IRM du genou droit a révélé un épanchement de l’articulation du genou et une déchirure de la corne dorsale au niveau du ménisque interne (GD2-192-193). L’appelante a effectué une arthroscopie du genou droit le 10 octobre 2012 (GD2-198).

[23] En août 2012, le Dr Karabatsos a donné à l’appelante une injection dans son genou gauche pour soulager la douleur (GD2-194).

[24] Une scintigraphie osseuse datée du 27 novembre 2012 a révélé une [traduction] « capture osseuse grave au genou droit, et modérée au genou gauche capture osseuse aux deux pieds doutes de changement arthritique. » L’appelante a vu le Dr Karabatsos le 16 janvier 2013 au sujet de la douleur qu’elle éprouvait dans ses mains, ses pieds, son dos et sa hanche. Une scintigraphie osseuse a révélé multiple [traduction] « foyers touchés ». Le médecin a affirmé qu’elle avait de l’arthrose multifocale et qu’une chirurgie ne l’aiderait pas. Il a recommandé qu’elle consulte un rhumatologue et qu’elle prenne des analgésiques (GD2-199, 200).

[25] L’appelante avait subi une radiographie de sa cheville droite et de son pied le 29 janvier 2013. Il y avait de l’arthrose bénigne articulatio intertarseae et calcification ou ossification à l’insertion du tendon d’Achille (GD2-201).

[26] L’appelante est tombée et s’est blessée au genou et à la cheville du côté droit le 17 février 2013. En mai 2013, elle avait un problème d’enflure et de sensibilité au niveau de son genou gauche. Elle s’est fait prescrire de la Naprosyn (AINS). Son genou gauche était encore enflé et douloureux en juillet 2013 (GD2-78).

[27] L’appelante a consulté un rhumatologue, le Dr Raman Joshi, pour ses douleurs articulaires le 3 juin 2013. Elle avait commencé à ressentir de la douleur constante dans ses pieds, ses genoux et son dos, qui s’était manifestée deux ou trois ans auparavant. Au cours de l’examen, elle avait 18 sur 18 points sensibles. Le Dr Joshi a diagnostiqué provisoirement de l’arthrose et de la fibromyalgie, a exigé des analyses de sang et a apporté quelques modifications à ses médicaments (GD2-43-44).

[28] Des radiographies datées du 2 juillet 2013 ont révélé de l’arthrose, de légère à modérée, au niveau de l’articulation sacro-iliaque et des deux genoux, de la discopathie dégénérative, de légère à modérée, de la partie inférieure de la colonne thoracique, de la discopathie dégénérative modérée à différents endroits de la colonne lombaire, de l’arthrose légère en L4-L5 et L5-S1, de l’arthrose légère dans les premières articulations métatarsophalangiennes et de l’arthrose, de légère à modérée, au milieu du pied du côté dorsal (GD2-218-219).

[29] L’appelante a arrêté de travailler le 25 octobre 2013, après que son employeur l’ait informé qu’il n’avait plus de tâches modifiées à lui faire exécuter.

[30] Le Dr Jeffrey Karp, psychologie, a fourni un rapport d’évaluation psychoprofessionnelle le 31 janvier 2014. Il a signalé que la CSPAAT avait fourni des mesures de précaution uniquement pour l’épaule gauche de l’appelante : ne pas soulever de charge lourde, ne pas utiliser son bras gauche pour effectuer des mouvements répétitifs et violents en éloignant celui-ci loin de son corps et ne pas effectuer de tâches qui nécessitent de lever les bras plus haut qu’à la hauteur de la poitrine. L’appelante a signalé qu’elle éprouvait de la douleur constante dans son épaule gauche et au bas de son dos, laquelle irradiait jusque dans son cou. Elle éprouvait parfois de la douleur aiguë et soudaine, et devait s’assoir. La douleur était à un niveau de cinq sur six lorsqu’il s’agissait d’une bonne journée, et à un niveau de huit sur dix lorsqu’il s’agissait d’une mauvaise journée. Ses médicaments étaient du Tramadol (analgésiques opioïdes), du Ratio-Lenoltec (contenant de la codéine) et de l’élétriptan (pour les maux de tête).

[31] Le Dr Karp a jugé que les compétences en lecture de l’appelante étaient de niveau élémentaire et que ses capacités de lecture et d’écriture en anglais étaient de base. Son aptitude à s’exprimer oralement en anglais était de base. Elle n’a jamais utilisé d’ordinateur et a échoué à son cours de dactylographie à l’école. Elle a toujours occupé des emplois de main-d’œuvre, et possédait peu de compétences transférables résiduelles. Elle souhaitait se recycler. Ses capacités intellectuelles étaient de niveau extrêmement bas, ce qui signifie qu’elle pourrait mettre ses connaissances à jour pour avoir un niveau équivalent environ à la moitié d’un niveau primaire ou elle pourrait peut-être compléter son école primaire. Elle n’était pas apte à entreprendre des études postsecondaires. Elle serait une [traduction] « bonne candidate pour suivre une formation pour un emploi comportant des tâches assez routinières pour lesquelles il faut utiliser des outils simples sous supervision constante. » Elle pourrait probablement, à long terme, être capable de perfectionner ses compétences à l’aide de méthodes manuelles d’apprentissage. Un recyclage professionnel pourrait s’avérer thérapeutique. Le Dr Karp a suggéré que de simples postes de commise ou de vendeuse étaient appropriés pour elle (GD7).

[32] Les notes de bureau de la Dre Manu Dhillon, médecin de famille de l’appelante, révèlent qu’en février 2014, l’appelante avait eu des problèmes avec son épaule gauche, laquelle était douloureuse lorsqu’elle bougeait. Elle s’est plainte d’un mal de tête (GD2-82).

[33] L’appelante a vu le Dr Jagtaran Dhaliwal, psychiatre, le 30 juin 2014 au sujet de son anxiété et de ses crises de panique. Il n’a relevé [traduction] « aucune organicité grave », mais a noté un niveau élevé d’anxiété. Les diagnostics établis étaient des crises de panique, de l’anxiété et de la dépression probablement unipolaire, et la bipolarité a été écartée. Elle s’est plainte de maux de tête propres à des migraines, de légères à modérées, et de troubles de sommeil. Il a recommandé des modifications à son régime alimentaire et de l’exercice, et il a prescrit 10 mg de Cipralex à prendre en soirée. Il allait revoir la patiente dans six semaines (GD2-36). Le registre de prescriptions révèle que l’appelante a reçu des prescriptions du Dr Dhaliwal en janvier, en avril, en juillet, en septembre et en octobre 2015 (GD6-13 et suivants).

[34] Les notes de bureau de la Dre Dhillon indiquent qu’en juillet 2014, l’appelante travaillait pour un fleuriste dans le cadre d’un programme de recyclage. Elle taillait des fleurs tous les jours et devait entrer et sortir du congélateur. Elle se plaint maintenant de douleur au dos et aux épaules. La médecin a essayé un traitement à l’aide de Mobicox et a recommandé que l’appelante fasse des séances de massothérapie. En septembre, elle a signalé de la douleur dans son épaule droite qui est apparue après qu’on lui ait demandé de soulever un seau d’eau au travail. Son épaule droite était maintenant pire que son épaule gauche. Elle avait un problème de douleur constante dans ses deux épaules et ses deux genoux, ainsi que des douleurs corporelles généralisées. En octobre 2014, l’appelante a signalé de la douleur importante au niveau de son épaule gauche, du bas de son dos et de ses genoux. Elle avait de la difficulté à dormir. Elle prenait du Mobicox (AINS) et du tramadol. En novembre 2014, elle éprouvait de la douleur intense au niveau de son genou droit, et de la douleur constante dans son épaule (GD2-86).

[35] Une radiographie de son épaule droite, datant du 28 novembre 2014, a révélé une petite déchirure du tendon du sous-épineux, un kyste dégénératif et de l’arthrose modérée de l’articulation acromio-claviculaire (GD2-38).

[36] Le questionnaire relatif aux prestations d’invalidité du RPC de l’appelante a été reçu le 9 décembre 2014. Elle avait arrêté de travailler en octobre 2013 parce que son employeur n’avait plus de tâches modifiées à lui faire exécuter. Elle se cherchait un emploi. Elle avait une demande auprès de la CSPAAT pour des blessures à l’épaule gauche et au dos qu’elle a subies en 2008, mais elle ne recevait aucune prestation de la CSPAAT. Elle avait des limitations lorsque venait le temps de s’assoir, de se tenir debout, de marcher, de soulever des objets, de transporter des objets et de se pencher. Elle avait des troubles de sommeil, de concentration et de mémoire. Elle avait de la difficulté à effectuer des tâches ménagères, à se laver les cheveux et à s’habiller. Elle pouvait conduire une voiture pendant une demi-heure (GD2-223-230).

[37] Le rapport médical du RPC provenant de la Dre Dhillon a été reçu le 24 février 2015. Elle connaît l’appelante depuis 2006, et a commencé à traiter sa condition médicale principale en mars 2008. Elle l’a vu pour la dernière fois en décembre 2014. Les diagnostics étaient les suivants : déchirure du ménisque médial au genou gauche, déchirures au niveau des deux coiffes des rotateurs, dépression, panique et anxiété, douleur chronique à l’épaule et au genou et douleur au bas du dos. L’appelante éprouve de la douleur constante à l’épaule, et son amplitude de mouvement est limitée à l’épaule gauche. Elle souffre maintenant de douleur à l’épaule droite avec une amplitude de mouvement limitée. Elle éprouvait de la douleur chronique dans ses deux genoux, et il arrivait parfois que son genou bloque. Elle avait des antécédents de dépression et d’anxiété. D’autres séances de physiothérapie étaient prévues ainsi qu’une autre consultation avec un rhumatologue. Elle prenait du Celebrex (AINS) et du Cipralex (antidépresseur) avec du Sequel (Seroquel?). Elle avait pris de l’amitriptyline dans le passé. Son pronostic était réservé (GD2-100-103).

[38] Une IRM de son genou droit, datée du 26 mars 2015, révélait un petit épanchement articulaire, plus petit qu’auparavant, et de l’arthrose médiale et fémoro-rotulienne avec une certaine progression. La déchirure du ménisque médial n’était plus visible (GD6-2). Une IRM de la colonne cervicale, datée du 28 août 2015, révélait une discopathie dégénérative multiniveau légère au centre de la colonne cervicale, avec une apparence légèrement améliorée en C5-C6 (GD6-4).

[39] Le Dr Nemer El-Batnigi, médecin de famille à la clinique antidouleur, a vu l’appelante le 5 mai 2015 au sujet de douleur au cou, à l’épaule et au genou. L’appelante a affirmé que cela avait pris au moins trois mois pour avoir un rendez-vous, et ce, après que son médecin ait fait l’ordonnance. Le médecin a signalé que la douleur de l’appelante au niveau de son cou était associée à ses maux de tête et à ses migraines. Les bienfaits d’opération à la coiffe des rotateurs ont été de courte durée, allégeant ses douleurs de seulement 20 pour cent. Elle avait 11 points sensibles sur 18 pour la fibromyalgie. La plupart du temps, son niveau de douleur était de 10 sur 10. Elle prenait du tramadol et du naproxen, et elle prenait des médicaments pour ses migraines. Elle faisait de l’insomnie et était atteinte de dépression. Un examen a révélé qu’elle était sensible au niveau de son cou et de ses épaules, et au niveau des muscles de sa colonne thoracique et lombaire. Elle avait une amplitude de mouvements limitée au niveau de sa colonne lombaire. Le médecin a recommandé des injections d’anesthésie tronculaire au niveau des facettes des vertèbres lombaires, ainsi que des blocs du nerf sciatique et du nerf honteux interne. Les injections ne se sont pas avérées utiles dans le passé, et par conséquent, elle a décidé de ne pas en avoir. Il a ajouté le Lyrica à sa liste de médicaments (GD6-6 et suivants).

[40] Le 8 septembre 2016, le Dr El-Batnigi a signalé qu’il voyait l’appelante à toutes les semaines au sujet des anesthésies tronculaires et des injections aux zones gâchettes depuis les quatre derniers mois. Elle ne tolérait pas bien les injections, et elle éprouvait encore de la douleur au bas du dos, dans ses épaules et dans son cou, irradiant jusque dans ses bras. Sa capacité à fonctionner au quotidien ne s’était pas améliorée de manière importante après avoir reçu les injections. Elle a commencé à utiliser le timbre de fentanyl, lequel atténuait sa douleur. Le diagnostic était celui de douleur neuropathique et myo-fasciale. La patiente était réticente à recevoir des injections de botox, mais il lui a donné des anesthésies tronculaires et des injections aux zones gâchettes cette journée-là (GD6-10).

[41] Une liste de médicament provenant d’une pharmacie et couvrant la période de janvier 2015 à décembre 2016 révélait que l’appelante recevait des prescriptions pour cinq antidépresseurs différents au cours de cette période, ainsi qu’une prescription de Xanax (pour les crises de panique). Elle recevait également des prescriptions pour trois analgésiques différents (tramadol, gabapentine et fentanyl), ainsi qu’une prescription de zopiclone (pour son insomnie). Elle prenait de l’élétriptan pour ses migraines (GD6-11-18).

[42] Le 9 février 2016, Dre Dhillon a écrit à la représentante de l’appelante pour l’informer que sa patiente avait pris du tramadol (2 comprimés, trois fois par jour) pour ses douleurs à l’épaule gauche, et de l’Ativan, car elle ne pouvait pas dormir la nuit à cause de ses douleurs à l’épaule (GD3-3).

[43] Une IRM de la colonne thoracique datée du 5 mars 2016 a révélé la présence d’une dégénérescence à plusieurs niveaux, principalement en T10-T11, où il y avait une sténose vertébrale centrale acquise. Une IRM de la colonne thoracique datée du 6 mars 2016 a révélé la présence d’altérations dégénératives de la colonne vertébrale lombaire, plus marquées en L4-5, où il y avait une sténose du canal centrale modérée. Cela est attribuable à la discopathie dégénérative et à la dégénérescence des facettes, ainsi qu’à l’antélisthésis de niveau 1 et un canal étroit congénital.

[44] Le 2 janvier 2014, Dre Dhillon a écrit que l’appelante avait des problèmes de santé depuis longtemps, et a fait référence à sa chirurgie à l’épaule et au genou. Elle était maintenant atteinte d’arthrite aux genoux; elle a dit qu’elle avait joint une IRM datant de mars 2016, mais celle-ci ne se trouvait pas au dossier. L’appelante souffrait de douleur chronique au dos et au bas de la colonne vertébrale, comme le révélait l’IRM. Elle se fait soigner à la clinique antidouleur depuis mai 2015, et elle ne ressent pas les bienfaits des injections ou des analgésiques. Elle était suivie par le Dr Dhaliwal pour son anxiété, ses crises de panique et sa [traduction] « dépression unipolaire douteuse ». Dans le passé, elle a pris de l’alprozolam [sic], du citalopram et de la gabapentine. Le Dr Dhaliwal a fait un essai et lui a prescrit de la trazadone [sic] en avril 2013. Elle prenait du Tramacet pour ses douleurs et de l’Ativan pour son anxiété. Elle n’était pas capable de travailler à cause de la douleur qu’elle ressentait dans son épaule, son cou, son dos, et à cause de sa dépression et de son anxiété (GD5).

Témoignage de l’appelante.

[45] L’appelante a fait valoir qu’elle souffrait toujours de douleur au cou, au dos et aux épaules. Le traitement n’a pas été d’une très grande aide. L’opération a permis d’alléger ses douleurs au dos et à l’épaule de seulement 15 à 20 pour cent. Les analgésiques ont eu des conséquences défavorables sur sa mémoire et ont réduit son niveau de douleur que de manière minimale. De plus, le Dr El lui a donné des injections de son articulation sacro-iliaque jusqu’à son cou en 2016, lui donnant finalement un total de 10 injections par semaine. Cependant, ce traitement n’a pas fonctionné, et elle a arrêté d’aller voir le Dr El-Batnigi. Elle a vu son psychiatre, le Dr Dhaliwal, tous les deux mois depuis deux ans. Il lui a fait essayer plusieurs médicaments différents. Une grande difficulté était qu’elle ne dormait vraiment pas bien à cause de la douleur - seulement un total d’une à deux heures par nuit. Elle a fait une dépression à la suite de ses douleurs, et elle se demandait souvent pourquoi elle vivait ce genre de vie.

[46] Pour ce qui a trait à ses limitations fonctionnelles, l’appelante a fait valoir qu’elle pouvait s’assoir ou se tenir debout pendant seulement 20 minutes. Des membres de sa famille l’aidaient à cuisiner, à faire le ménage et à atteindre des objets. Elle ne sortait pas souvent en raison de ses niveaux de douleur, bien qu’elle ait été très sociale avant son accident. Elle ne conduisait pas seule, car elle était portée à oublier où elle s’en allait, et elle ne conduisait pas sur l’autoroute; c’est comme cela depuis les quatre dernières années. Son mari faisait l’épicerie. Sa capacité à faire quoi que ce soit autour de la maison fluctue en fonction de ses niveaux de douleur et du nombre d’heures de sommeil qu’elle a eu la nuit précédente.

[47] L’appelante a fait valoir qu’elle est arrivée au Canada en 1982, lorsqu’elle avait environ 15 ans. Elle a fait la moitié de sa 11e année, puis elle est entrée sur le marché du travail. Elle a toujours effectué un travail d’usine, normalement comme ouvrière non qualifiée. En 2008, un chariot rempli de pièces métalliques est tombé sur elle, et elle s’est blessée au cou, au bas du dos et à l’épaule gauche. Elle est retournée travailler le jour de l’accident. Deux ou trois mois plus tard, elle est allée voir sa médecin de famille, et on lui a confié des tâches modifiées. Dans le cadre de son emploi, elle doit effectuer des petites tâches comme assembler des choses à l’aide de vis ou mettre des autocollants sur des boîtes. Elle était en mesure de prendre plusieurs pauses et de faire des exercices d’étirement. Elle a continué à accomplir des tâches modifiées jusqu’à sa cessation d’emploi en octobre 2013. Elle a continué à travailler pendant le FRP, lorsqu’elle recevait un traitement pendant trois à quatre heures par jour.

[48] L’appelante a suivi une formation sous les auspices de la CSPAAT pendant environ six mois en 2014. Elle avait été formée pour des emplois en service à la clientèle, et elle avait également suivi des cours de perfectionnement en langue anglaise. Ensuite, elle avait eu un mois de formation sur la recherche d’emploi, après quoi la CSPAAT a cessé de lui verser des prestations. Elle a travaillé chez un fleuriste pendant environ trois mois, à répondre au téléphone et à chercher les fleurs dans le congélateur. Cependant, cet emploi nécessitait un certain travail physique, comme lever les seaux d’eau, et elle n’a pas été en mesure de conserver cet emploi. L’appelante n’est pas certaine à quel moment elle a arrêté d’exercer cet emploi, mais elle croyait que c’était à l’été 2014Note de bas de page 1. Elle a tenté de se trouver un autre emploi, mais lorsqu’elle a mis les employeurs potentiels au courant de ses problèmes de santé, ceux-ci ont refusé de l’embaucher. Elle ne croyait pas être en mesure de travailler en raison de ses niveaux de douleur, de son manque de sommeil, de ses pertes de mémoire et de son manque de patience.

Observations

[49] En réponse au rejet de sa demande au stade initial, l’appelante a fait valoir dans de la correspondance datée du 20 juillet 2015 (GD2-13-14) qu’elle était admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Elle est atteinte de plusieurs conditions médicales qui la rendent [traduction] « totalement incapable d’exercer tout type d’occupation rémunératrice à l’heure actuelle et indéfiniment »;
  2. Son syndrome de douleur et ses conditions psychologiques sont permanents;
  3. Elle n’a pas réussi à se trouver un autre emploi en raison de la gravité de sa condition médicale.

[50] Au cours de l’audience, l’appelante a fait valoir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée depuis environ le mois de décembre 2014, moment auquel elle n’était plus en mesure de travailler. D’ailleurs :

  1. Comme le révèle la lettre de la Dre Dhillon datée de février 2017, l’appelante souffre de douleurs au dos et au genou, et elle a suivi des traitements qui n’ont pas apporté de bienfaits considérables;
  2. Ses problèmes de santé physique et mentale la rendent inemployable;
  3. Malgré avoir fréquenté une clinique de gestion de la douleur et s’être conformée aux modalités de traitements recommandés, elle est toujours atteinte de douleur chronique et de dépression;
  4. Elle a déployé des efforts considérables pour continuer à travailler, elle a essayé d’effectuer des tâches modifiées et d’exercer d’autres emplois, mais sa condition physique s’est détériorée au point où elle ne pouvait plus travailler;
  5. L’appelante a toujours exercé des emplois exigeants sur le plan physique. Son éducation et des compétences de la langue anglaise limitées, de concert avec ses problèmes de santé physique et mentale, la rendent inemployable.

[51] Dans des observations reçues le 3 février 2017 (GD8), l’intimé a fait valoir que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Elle a subi une opération aux genoux en 2011 et une réparation de la coiffe des rotateurs en mars 2012;
  2. Le Dr Karabatsos a signalé que sa douleur avait beaucoup diminué à la suite d’une arthroscopie de son genou gauche;
  3. Lorsque le Dr Joshi l’a examinée en juin 2013, les résultats de son examen étaient sensiblement normaux;
  4. Les résultats de son examen à la clinique antidouleur en 2015 n’ont pas révélé de limitation ou de déficience grave;
  5. L’appelante ne voulait plus recevoir d’injection, et il n’y a pas eu de suivi concernant l’augmentation de ses médicaments contre la douleur;
  6. Ses médicaments étaient conservateurs et constants tout au long de 2016;
  7. Ses maux de tête sont gérés à l’aide de médicaments;
  8. En juin 2014, les résultats de son examen de son état mental n’ont révélé aucune déficience grave;
  9. Des rapports d’imagerie n’ont révélé aucune pathologie grave;
  10. Un médecin du programme de réhabilitation fonctionnelle a affirmé en 2011 que l’appelante pourrait, d’un point de vue physique, effectuer des activités sédentaires avec des précautions fonctionnelles;
  11. Rien n’indique qu’elle a tenté de retourner exercer un emploi comportant des tâches modifiées, même si elle a suivi un traitement depuis qu’elle a arrêté de travailler.

[52] Dans un addenda aux observations du ministre reçu le 27 février 2017 (GD9), l’intimé a affirmé que l’information supplémentaire reçue ne mentionnait pas le fait que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée d’ici la date de fin de sa PMA. Plus particulièrement, l’évaluation psychoprofessionnelle révélait que l’appelante était une bonne candidate pour la formation en cours d’emploi, ainsi que pour le perfectionnement à long terme de ses compétences en utilisant des méthodes manuelles d’apprentissage.

Analyse

[53] Le témoignage de l’appelante semblait être franc et concordait, dans son ensemble, avec la preuve médicale. Lorsqu’elle ne se souvenait pas de quelque chose, elle le disait. Le Tribunal a jugé que son témoignage était crédible.

[54] La position de l’appelante était que sa condition s’était considérablement détériorée en 2014, et ce, à compter de décembre 2014. Par conséquent, la décision portera principalement sur la condition de l’appelante après 2012.

[55] La Cour d’appel fédérale a fait valoir que : « [l]es requérants sont toujours tenus de démontrer qu’ils souffrent d’une “invalidité grave et prolongée” qui les rend “régulièrement incapables de détenir une occupation véritablement rémunératrice”. Une preuve médicale sera toujours nécessaire [...] » (Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248 [Villani], au para. 50). Le Tribunal note qu’il y a des éléments de preuve objective à l’appui des conditions physiques de l’appelante. Une scintigraphie osseuse datée de novembre 2013, à la suite de la chirurgie des genoux de l’appelante, révèle la présence probable d’arthrite dans les deux genoux, sévère au genou droit et modérée à celui de gauche. Une IRM effectuée en mars 2015 a révélé la progression de l’arthrite dans son genou droit. Une IRM de la colonne cervicale, effectuée en août 2015, a révélé une discopathie dégénérative légère. En mars 2016, une IRM a révélé une sténose du canal central au niveau de la colonne thoracique et une sténose modérée du canal en L4-5 au niveau de la colonne lombaire. Même si l’appelante a subi une chirurgie à son épaule gauche en octobre 2011, la CSPAAT a adopté un certain nombre de précautions lorsqu’elle a renseigné le Dr Karp avant son évaluation de janvier 2014. Une radiographie en novembre 2014 a révélé une déchirure d’un tendon et de l’arthrose modérée dans son épaule droite.

[56] Même si l’appelante avait subi une opération des deux genoux, ainsi qu’une chirurgie à l’épaule gauche, la Dre Dhillon a signalé en février 2015, et ce, en se fondant sur sa rencontre de décembre 2014 avec l’appelante, qu’elle souffrait de douleur chronique aux deux genoux et aux deux épaules, accompagnées de douleurs au bas du dos. L’intimé a fait valoir qu’un examen effectué à la clinique antidouleur en 2015 n’avait pas révélé de limitation grave. Cependant, le Tribunal note qu’en 2015, le Dr El-Batnigi a signalé que l’appelante avait une amplitude de mouvement limitée au niveau de sa colonne lombaire, et que les muscles de son cou, de son dos, de sa colonne thoracique et de sa colonne lombaire étaient sensibles. Il lui a donné des injections pendant plusieurs mois l’année suivante, et il lui a prescrit le timbre de fentanyl.

[57] Un certain nombre de spécialistes ont fourni des diagnostics portant sur la condition de l’appelante. En janvier 2013, le Dr Karabatsos a signalé qu’une scintigraphie osseuse avait révélé de l’arthrose à plusieurs endroits. Aucune chirurgie n’était indiquée, et il a recommandé qu’elle consulte un rhumatologue. En juin 2013, le Dr Joshi a diagnostiqué chez l’appelante de la fibromyalgie et de l’arthrose. L’appelante a reçu un diagnostic de syndrome de douleur chronique dès 2009, une conclusion qui a été confirmée plus récemment par sa médecin de famille. De plus, le Dr El-Batnigi a écrit qu’elle avait des douleurs neuropathiques et myo-fasciale. Il est bien connu que la fibromyalgie, la douleur chronique et la douleur myo-fasciale ne peuvent pas être détectées sur des rapports d’imagerie. L’appelante s’est également plainte de maux de tête associés à ses problèmes de cou et d’épaules, d’autres problèmes de santé qui ne sont pas visibles sur des rapports d’imagerie. Aucun médecin n’a exprimé de doute au sujet de la gravité de ses symptômes.

[58] Pour ce qui est de sa santé mentale, le Dr Dhaliwal a signalé en juillet 2014 que les diagnostics étaient les suivants : panique, anxiété et dépression. En 2017, la Dre Dhillon a signalé que l’appelante voyait le Dr Dhaliwal pour son traitement qui était en cours. Selon l’appelante, depuis deux ans au moment de l’audience. Le psychiatre lui a fait essayer plusieurs médicaments différents, selon son témoignage, ce qui a été confirmé à l’aide de son registre de prescriptions pour l’année 2015-2016.

[59] L’appelante a suivi de nombreux traitements pour sa condition médicale. Elle a consulté un certain nombre de spécialistes de la douleur, deux rhumatologues et un psychiatre. Elle a reçu des injections dans sa colonne vertébrale en juillet 2009, dans son épaule en novembre 2009, des injections d’anesthésie tronculaire en mars 2010, des injections dans son genou gauche en août 2012, ainsi que des anesthésies tronculaires et des injections aux zones gâchettes dans l’ensemble de sa colonne en 2016. elle a consulté deux cliniques antidouleur et a participé au FRP. En 2009, il a été signalé qu’elle avait essayé des anti-inflammatoires et des analgésiques, de concert avec des séances de physiothérapie et de massothérapie. Elle a essayé plusieurs types de médicaments, y compris des analgésiques, des antidépresseurs, des médicaments pour ses maux de tête et une prescription pour l’aider à dormir. L’on a signalé que le traitement avait été peu bénéfique.

[60] Selon la Cour d’appel fédérale, un appelant doit suivre les traitements raisonnables qui lui sont recommandés ou fournir une explication plausible pour ne pas l’avoir fait (Lalonde c. MDRH, 2002 CAF 211). L’intimé a fait valoir qu’en 2015, l’appelante ne voulait plus recevoir d’injections, et qu’il n’y a pas eu de suivi concernant l’augmentation de ses analgésiques. Cependant, le Tribunal constate que, comme il a été noté précédemment, l’appelante avait déjà reçu de nombreuses injections, et avait reçu une autre série d’injections en 2016. De plus, le Dr El- Batnigi lui avait prescrit du Lyrica et le timbre de fentanyl en 2015-2016. Par conséquent, le Tribunal n’est pas convaincu par les observations de l’intimé à ce sujet. De plus, le Tribunal estime que, de façon plus générale, l’appelante a démontré qu’elle était prête, en toute bonne foi, à suivre les conseils médicaux manifestement appropriés.

[61] En tenant compte des multiples conditions physiques de l’appelante, de ses problèmes de santé mentale ainsi que des nombreux traitements qu’elle a suivis sans que ceux-ci lui apportent des bienfaits notables, le Tribunal conclut qu’elle était atteinte d’une condition médicale grave.

[62] Cependant, la Cour d’appel fédérale a fait valoir que ce n’était pas le diagnostic de la maladie de l’appelante, mais plutôt sa capacité à travailler qui « détermine la gravité de l’invalidité en vertu du RPC » (Klabouch c. Canada (Développement social), 2008 CAF 33, au para. 14). De plus, lorsqu’il y a des éléments de preuve à l’appui d’une capacité de travail, une personne doit montrer que les efforts qu’elle a déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été vains en raison de son état de santé (Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117 [Inclima]).

[63] Le seul élément de preuve formelle à l’appui d’une capacité de travail était le rapport du FRP datant du début de 2011, dans lequel il était écrit que l’appelante était capable, d’un point de vue physique, d’effectuer des activités sédentaires avec des mesures de précaution. Au moment du rapport, l’appelante travaillait toujours, et elle a travaillé pendant près de deux ans après cela. Sa condition s’est aggravée par la suite, comme cela a été documenté dans la preuve médicale. Le Tribunal n’accepte pas l’observation de l’intimé selon laquelle le rapport de 2011 reflétait fidèlement la capacité à travailler de l’appelante trois ans plus tard.

[64] Bien que l’intimé ait fait valoir que l’appelante n’avait pas occupé un autre emploi, les notes de bureau du Dr Dhillon, datant de juillet et de septembre 2014, révèlent qu’elle s’était trouvé un autre emploi en 2014, ce que le témoignage de l’appelante confirme. L’appelante a affirmé de façon crédible qu’elle avait participé à un programme de recyclage parrainé par la CSPAAT, en même temps que sa formation portant sur la recherche d’emploi. Elle a réussi à obtenir un emploi chez un fleuriste, et a essayé cet emploi pendant trois mois. Elle n’a pas pu continuer, car dans le cadre de cet emploi, elle devait soulever des charges lourdes et travailler dans un environnement froid, ce qui a aggravé sa condition. Le Tribunal estime qu’il s’agit là d’une tentative ratée de retour au travail. L’appelante a signalé qu’elle s’est cherché un autre emploi, et qu’elle n’a pas été capable de s’en trouver un à cause de sa condition physique. Elle n’a fourni aucun élément de preuve documentaire à l’appui d’autres tentatives de travail, mais son explication paraît juste. L’appelante a clairement une solide éthique de travail, elle travaille depuis l’âge de 16 ans, et elle a conservé son emploi en effectuant des tâches modifiées malgré ses nombreuses chirurgies et un FRP. Elle était intéressée par la possibilité de se recycler. Le Tribunal est convaincu que l’appelante aurait continué à travailler si elle avait été capable de se trouver un emploi adapté à sa condition physique et à ses limitations relatives à sa scolarité. Le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas été capable de conserver un emploi à cause de sa condition médicale, et par conséquent, elle satisfait au critère prévu dans l’arrêt Inclima.

[65] La Cour d’appel fédérale a souscrit à la déclaration selon laquelle « la prévisibilité est essentielle pour déterminer si une personne travaille régulièrement au sens du [RPC] [...] » (Atkinson c. Canada (Procureur général), 2014 CAF 187, aux paras. 37-8). En l’espèce, le Tribunal n’est pas convaincu que l’appelante aurait été une employée fiable en raison du caractère imprévisible de ses niveaux de douleur et de son insomnie.

[66] La gravité de l’invalidité doit être évaluée dans un contexte réaliste (Villani, au para. 38). Cela signifie que pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau de scolarité, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie. Le Tribunal note que l’appelante était dans la cinquantaine au cours de sa PMA et qu’elle avait toujours exercé des emplois exigeants sur le plan physique. L’évaluation psychoprofessionnelle datant de janvier 2014 portait sur plusieurs des facteurs prévus dans l’arrêt Villani. L’intimé a mis l’accent sur l’opinion du Dr Karp, selon laquelle l’appelante était une candidate pour la formation manuelle. Cependant, le Tribunal a accordé plus de poids aux conclusions du Dr Karp selon lesquelles l’appelante ne possédait que des compétences rudimentaires en anglais, qu’elle n’avait pas de connaissances en informatique et qu’elle aurait besoin d’une mise à niveau pour accomplir quelque moindre que des études primaires. Elle possédait de faibles compétences transférables après deux décennies à exercer des emplois manuels. Compte tenu de ces facteurs, de concert avec ses conditions de santé physique et mentale, le Tribunal conclut que l’appelante respecte le critère de gravité prévu dans l’arrêt Villani.

[67] Le Tribunal est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave d’ici la date de fin de sa PMA ou avant cette date.

Caractère prolongé

[68] L’appelante a souffert de douleurs aux genoux, aux épaules et au dos pendant plusieurs années, et de dépression, d’anxiété et de crises de panique depuis au moins 2014. Par conséquent, son invalidité est continue. Aucun professionnel de la santé n’a fait valoir que sa condition allait s’améliorer, et en fait, la preuve médicale révèle que sa condition s’est détériorée. Par conséquent, son invalidité est de durée indéfinie.

[69] Par conséquent, le Tribunal conclut que l’invalidité de l’appelante est prolongée.

Conclusion

[70] Le Tribunal a attentivement examiné le moment où l’invalidité de l’appelante est devenue grave. En décembre 2014, la Dre Dhillon a signalé que l’appelante souffrait de douleur et que son amplitude de mouvement était limitée dans ses deux épaules, et qu’elle souffrait de douleur chronique dans ses deux genoux et le bas de son dos. Elle n’a pas dit à quel point ces problèmes physiques étaient graves. Cependant, en juillet 2013, des radiographies ont révélé la présence d’arthrose d’intensité légère à modérée à plusieurs endroits. L’appelante s’est également plainte pendant longtemps d’insomnie, de maux de tête, de troubles de la mémoire, et deux rhumatologues ont diagnostiqué des signes de fibromyalgie. D’ici janvier 2014, elle prenait deux analgésiques opioïdes, un somnifère et des médicaments pour ses maux de tête. En novembre 2014, une radiographie a révélé une déchirure dans un tendon de son épaule droite. En juin 2014, un psychiatre a diagnostiqué ce qui suit : panique, anxiété et dépression, et l’a mise sous médicaments qu’il ajustait souvent, du moins jusqu’à la fin de 2015. D’ici décembre 2014, elle avait arrêté de travailler. Le Tribunal est convaincu que d’ici décembre 2014, l’appelante n’était pas capable d’effectuer un travail physique à cause de ses problèmes de santé. De plus, le rapport du Dr Karp vient appuyer une conclusion selon laquelle elle n’avait pas les aptitudes nécessaires pour exercer un emploi sédentaire à cause de ses limitations en ce qui concerne la scolarité, la langue et les aptitudes. Le Tribunal; est convaincu que l’invalidité de l’appelante était grave d’ici décembre 2014.

[71] Le Tribunal conclut que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée en décembre 2014, moment où elle n’a plus été capable d’exercer un emploi physique. En vertu de l’article 69 du RPC, les versements commencent à compter du quatrième mois qui suit la date du début de l’invalidité. Les versements commencent donc en avril 2015.

[72] L’appel est accueilli.

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