Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Il s’agit d’un appel de la décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (division générale) rendue le 18 novembre 2015 qui accueillait la demande de pension d’invalidité de l’intimé au motif qu’il avait été réputé invalide aux fins du Régime de pensions du Canada (RPC) pendant ou avant sa période minimale d’admissibilité (PMA) dont la date de fin a été déterminée comme étant le 31 décembre 2012. La permission d’en appeler a été accordée le 27 juin 2016 au motif que la division générale pourrait avoir commis une erreur en rendant sa décision.

[2] L’appel a été instruit selon le dossier documentaire et sans audience pour les raisons suivantes :

  1. le dossier est complet et ne nécessite aucune clarification;
  2. les observations écrites présentées par l’appelant et l’intimé étaient complètes, salutaires et claires;
  3. le mode d’audience respectait les exigences du Règlement du Tribunal de la sécurité sociale à savoir qu’il doit procéder de façon la plus informelle et expéditive que le permettent les circonstances, l’équité et la justice naturelle.

Questions en litige

[3] Les questions que je dois trancher sont les suivantes :

  1. Quelle norme de contrôle s’applique pour examiner les décisions de la division générale?
  2. La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant d’appliquer les principes établis dans l’arrêt Inclima c. Canada (P.G.), 2003 CAF 117, et a-t-elle omis d’évaluer adéquatement la question de savoir si l’intimé n’était pas parvenu à obtenir et à conserver un emploi en raison de son état de santé?
  3. La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant d’appliquer les principes établis dans l’arrêt Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248, et a-t-elle omis de porter son attention particulièrement sur la question de savoir si l’intimé, étant donné ses antécédents et son état de santé, était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice?
  4. La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant de fournir des raisons pour lesquelles elle a préféré la preuve médicale de la Dre Peacock par rapport aux rapports médicaux de spécialistes et d’autres professionnels de la santé?
  5. La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant de se fonder sur la décision A.K. c. MRHDS (2 septembre 2009), CP 25905 (CAP) en concluant que le nombre total d’heures de capacité de travailler et a-t-elle omis de tenir compte des heures de travail pour lesquelles l’intimé pourrait être disponible pour travailler et le nombre d’heures que devait prendre l’intimé pour étudier et se préparer à ses cours?

Droit applicable

[4] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur les MEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] Selon le paragraphe 59(1) de la Loi sur le MEDS, la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (division d’appel) peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

Observations

Norme de contrôle

[6] L’appelant n’a déposé aucune observation concernant cette question.

[7] L’intimé a soutenu que la norme de contrôle appropriée dans le cadre de l’appel est celle de la décision raisonnable. Il s’est fondé sur les arrêts Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 et Smith c. Alliance Pipeline Ltd., 2011 CSC 7.

[8] L’intimé a soutenu que la jurisprudence demande aux tribunaux administratifs, comme la division d’appel, d’étudier le RPC, loi constitutive du Tribunal, pour obtenir les lignes directrices concernant la norme de contrôle appropriée aux fins de contrôle de questions de fait, de questions mixtes de droit et de fait et de questions de droit. Dans tous les cas, la norme de contrôle est celle de la « décision raisonnable ».

Application des principes établis dans l’arrêt Inclima

[9] L’appelant a soutenu que la division générale avait omis d’énoncer les critères prévus par la Cour fédérale dans l’arrêt Inclima, qu’elle avait également omis d’appliquer adéquatement ces critères et qu’elle a ainsi commis une erreur de droit :

[38] [...] un demandeur qui dit répondre à la définition d’incapacité grave doit non seulement démontrer qu’il (ou elle) a de sérieux problèmes de santé, mais dans des affaires comme la présente [...] il y a des preuves de capacité de travail, il doit également démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé.

[10] L’appelant a soutenu que la division générale, en concluant que l’intimé était capable de travailler, a omis de tenir également compte de la question de savoir si les efforts déployés pour obtenir et conserver un emploi avaient été infructueux en raison de son état de santé.

[11] L’appelant a soutenu que, selon le dossier, l’intimé n’a en fait déployé aucun effort pour retourner travailler malgré une preuve médicale objective de sa capacité à le faire.

[12] L’intimé a soutenu que, contrairement aux observations de l’appelant, les principes prévus dans l’arrêt Inclima avaient été appliqués adéquatement par la division générale. Plus particulièrement, l’intimé déclare ce qui suit :

  1. Après qu’il a été conclu qu’il avait la capacité de travailler, l’intimé a été jugé comme étant incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice.
  2. Les motifs établis dans la décision de la division générale démontrent l’examen des principes établis dans l’arrêt Inclima par le décideur.
  3. La preuve appuyant la conclusion selon laquelle l’intimé était incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice a été bien établie dans le dossier.
  4. La Dre Peacock a confirmé que l’intimé était incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.
  5. La division générale a accepté la preuve selon laquelle l’intimé est capable de travailler seulement de quatre à six heures par semaine, et, à la lumière de cette preuve, la décision correspond ultimement aux principes établis dans l’arrêt Inclima.

Application de l’arrêt Villani

[13] L’appelant a soutenu que la division générale n’a pas tenu compte du critère « réaliste » établi dans l’arrêt Villani pour déterminer si l’intimé avait souffert d’une « invalidité grave et prolongée » qui le rendait « régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice ».

[14] De plus, l’arrêt Villani prévoit également la prise en considération de la preuve médicale objective et des efforts déployés pour trouver un emploi ou des possibilités d’emploi. La division générale n’a pas appliqué ces critères pour déterminer que l’intimé était invalide.

[15] L’intimé a soutenu que la division générale n’a pas appliqué les principes juridique et technique et qu’elle n’a pas été formaliste pour rendre sa décision selon laquelle l’intimé était invalide.

[16] L’intimé a également soutenu que la division générale avait correctement adapté ses motifs à l’intimé et qu’elle avait pris une approche sensée et réaliste dans sa décision.

Omission de fournir des motifs

[17] L’appelant a soutenu qu’il y avait des contradictions dans la preuve médicale présentée au nom de l’intimé, et, lorsque la division générale avait préférence certains éléments de preuve par rapport à des rapports de spécialistes et d’autres professionnels de la santé, la division générale n’avait pas fourni de motifs pour agir ainsi.

[18] L’intimé a soutenu que les rapports médicaux présentés ne reflétaient aucune contradiction par rapport aux professionnels de la santé traitants.

[19] L’intimé a également soutenu que l’exigence de fournir des motifs était seulement dans des circonstances où la preuve médicale comprenait de multiples avis d’experts concurrents.

Conclusion de fait erronée

[20] L’appelant a soutenu que la division générale a tiré une conclusion de fait erronée en concluant que l’intimé n’était pas capable de travailler plus de 10 heures par semaine. L’appelant a soutenu que la division générale aurait dû tenir compte davantage du temps consacré au déplacement, aux études et aux cours pour déterminer le nombre maximal d’heures pendant lesquelles l’intimé pouvait travailler. Cette erreur a entraîné une erreur de fait commise de façon abusive ou arbitraire, conformément à l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS.

[21] L’intimé a soutenu qu’aucune preuve n’avait été présentée à la division générale sur laquelle celle-ci pouvait accorder une période raisonnable de temps pour les déplacements et les études, comme l’a laissé entendre l’appelant.

[22] De plus, l’intimé fait valoir que, s’il existait une preuve sur laquelle la division générale pouvait accorder du temps consacré aux études, le niveau d’activité requis pour étudier n’équivaut pas au niveau d’activité requis pour prendre part au cours ou occuper un emploi sédentaire.

Analyse

Norme de contrôle

[23] La Loi sur le MEDS, et non le RPC comme il est soutenu par l’intimé, est la loi constitutive du Tribunal de la sécurité sociale. Cependant, l’avis de l’intimé concernant la norme de contrôle est que, pour tous les moyens prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable. En tout respect, la division d’appel n’est pas d’accord avec cet avis.

[24] Certains tribunaux administratifs, comme les juges-arbitres en vertu de l’ancien article 115 de la Loi sur l’assurance-emploi, étaient précédemment régis par les normes de contrôle établies par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Dunsmuir. Dans des arrêts précédents de la Cour d’appel fédérale, celle-ci avait demandé que, dans les affaires concernant de prétendues erreurs de droit ou inobservation de principes de justice naturelle, la norme applicable était celle de la décision correcte. La norme de la décision correcte fait état d’un seuil inférieur de déférence devant être montré envers un tribunal administratif. Dans les affaires où on prétend que des conclusions de fait erronées ont été tirées, il a été conclu que la norme à appliquer est celle de la décision raisonnable, qui correspond à une décision où on hésite à intervenir dans les conclusions tirées par l’organe responsable en entendant un témoignage factuel.

[25] En raison de l’arrêt Dunsmuir, la Cour d’appel fédérale a conclu dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Huruglica, 2016 CAF 93, que les tribunaux administratifs, comme la Commission de l’immigration et du statut de réfugié dans cette affaire, ne devraient pas utiliser des normes de contrôles qui avaient été conçus pour être appliquées par des cours d’appel. Les tribunaux administratifs devraient plutôt se fier en premier lieu à leur loi constitutive pour déterminer leur rôle.

[26] Dans l’arrêt Canada (P.G.) c. Jean (2015 CAF 242), la Cour d’appel fédérale a précisé, dans une remarque incidente, que le Tribunal de la sécurité sociale ne devrait pas effectuer une analyse de la norme de contrôle dans les appels qu’elle tranche, mais qu’elle devrait déterminer si les appels doivent être accueillis selon les moyens prévus à l’article 58 de la Loi sur le MEDS.

[27] En plus des moyens prévus à l’article 58, l’article 59 de la Loi sur le MEDS prévoit les décisions que les membres de la division d’appel peuvent rendre. Les membres de la division d’appel peuvent rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale ou confirmer, infirmer ou modifier la décision de la division générale.

Application des principes établis dans l’arrêt Inclima

[28] Le critère pour déterminer l’invalidité au titre du RPC a été énoncé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248 :

Cette réaffirmation de la méthode à suivre pour définir l’invalidité ne signifie pas que quiconque éprouve des problèmes de santé et des difficultés à se trouver et à conserver un emploi a droit à une pension d’invalidité. Les requérants sont toujours tenus de démontrer qu’ils souffrent d’une « invalidité grave et prolongée » qui les rend « régulièrement incapables de détenir une occupation véritablement rémunératrice ». Une preuve médicale sera toujours nécessaire, de même qu’une preuve des efforts déployés pour se trouver un emploi et de l’existence des possibilités d’emploi [...] [mis en évidence par la soussignée]

[29] Dans l’arrêt Inclima, la Cour d’appel fédérale a davantage précisé les principes établis dans l’arrêt Villani en déclarant que les demandeurs qui cherchent à démontrer qu’ils souffrent d’une invalidité grave selon le RPC doivent présenter la preuve d’un problème de santé grave et démontrer que les efforts déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueux en raison de ce problème de santé. Ce n’est pas l’incapacité du demandeur à accomplir son travail particulier qui importe, mais plutôt son incapacité à détenir toute « occupation véritablement rémunératrice » (Klabouch c. Canada (Dévelopemment social), 2008 CAF 33).

[30] L’appelant a soutenu que la division générale n’a pas énoncé le bon critère, comme il est mentionné précédemment, et qu’elle n’a pas non plus appliqué le critère à la situation de l’intimé en l’espèce. La division estime que cet argument est fondé.

[31] Au paragraphe 52 de la décision, la division générale a conclu que l’intimé avait la capacité de travailler en déclarant ce qui suit :

[traduction]
[52] Le Tribunal reconnaît l’observation de l’intimé et il convient que, d’après la preuve, l’appelant avait la capacité de travailler.

Après avoir déterminé l’existence de la capacité de travail, la division générale a appliqué les principes établis dans la décision A.K. c. MRHDS (2 septembre 2009), CP25905 (CAP) relativement au temps pendant lequel l’intimé avait déclaré être capable de travailler par semaine. Dans la décision A.K., la demanderesse a été jugée capable de travailler 12 heures par semaine, à 12,83 $ de l’heure, et cette capacité n’a pas été considérée comme une capacité régulière de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Au paragraphe 51 de la décision de la division générale, les 10 heures pendant lesquels l’intimé avait déclaré pouvoir travailler ont été comparées à celles de la demanderesse dans la décision A.K., et la division générale a par la suite conclu que le nombre d’heures n’était pas représentatif d’une occupation véritablement rémunératrice. L’approche prise par la division générale n’est pas suffisante pour plusieurs raisons. Si elle avait l’intention d’appliquer l’approche prise par la Commission d’appel des pensions dans la décision A.K. malgré le fait que cette décision n’est pas un précédent, mais qu’elle peut être convaincante, la division générale aurait d’abord dû, compte tenu de l’ensemble de la preuve médicale présentée, évaluer la crédibilité de la déclaration de l’intimé selon laquelle il pouvait seulement travailler 10 heures par semaine. La division générale aurait dû tenir compte du salaire horaire que l’intimé pouvait toucher. Finalement, pour déterminer l’existence d’une invalidité selon le RPC, rien ne démontre que la division générale a accordé un sens à chaque mot de la définition de « grave » au titre du RPC, comme il est suggéré dans l’arrêt Villani.

[32] Une application adéquate des principes jurisprudentiels pertinents imposerait à la division générale de tenir d’abord compte, selon l’ensemble de la preuve, de la question de savoir s’il existe une capacité de travailler. Puis, une fois qu’il est établi qu’il existe une capacité de travailler, la division générale devrait déterminer s’il existe une preuve selon laquelle l’intimé avait déployé des efforts pour obtenir et conserver « une occupation réellement rémunératrice » (Villani). Si l’intimé avait déployé des efforts pour obtenir et conserver un emploi, la division générale aurait dû déterminer si ces efforts ont été infructueux en raison de l’état de santé de l’intimé (Inclima).

[33] La division générale n’a pas tenu compte de la question de savoir si l’intimé avait déployé des efforts pour obtenir d’autres possibilités d’emploi qui convenaient à son état de santé. En omettant de tenir compte de cette notion, la division générale a également omis de démontrer toute application significative des principes établis dans l’arrêt Inclima, ce que la division générale devait faire. Cela constitue une erreur de droit.

Omission d’appliquer le contexte « réaliste » de l’arrêt Villani

[34] L’arrêt Villani prévoit le critère pour déterminer l’invalidité au titre du RPC. Selon Villani, le critère pour déterminer la gravité d’une invalidité n’est pas qu’une invalidité soit « totale », mais qu’elle soit évaluée dans un contexte « réaliste ». Des facteurs, comme l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents professionnels et l’expérience de vie du demandeur, doivent être pris en considération pour déterminer si un demandeur est invalide selon le RPC. Les demandeurs de pension d’invalidité au titre du RPC doivent produire une preuve médicale objective de leur invalidité (Warren c. Canada (P.G.), 2008 CAF 377).

[35] L’appelant soutient que la division générale n’a pas tenu compte de la capacité de l’intimé à travailler dans un contexte « réaliste » et qu’elle n’a pas tenu compte de la situation particulière de l’intimé. Contrairement aux observations de l’appelant, l’intimé fait valoir que [traduction] « la division générale a clairement été orientée par la situation personnelle de [l’intimé] ».

[36] D’après la preuve, l’intimé était âgé de 33 ans pendant la PMA. Il avait terminé ses études secondaires et un cours en technologie automobile d’une durée de trois et il fréquentait l’université à temps plein. Au moment de l’audience, l’intimé était marié et avoir un fils d’âge adolescent. Dans le cadre de l’examen de la décision de la division générale, la division d’appel convient que, même si ces renseignements sont cités à titre de preuve devant la division générale, rien ne démontre que la division générale a réellement tenu compte de cette preuve dans son analyse pour déterminer la gravité de l’invalidité de l’intimée et sa capacité de travailler par la suite.

[37] L’appelant fait également valoir que la preuve médicale objective faisait non seulement état que l’intimé avait la capacité d’occuper tout type d’emploi durant la PMA, mais également que l’intimé avait la capacité d’occuper son emploi choisi comme mécanicien automobile durant sa PMA. L’appelant cite plusieurs rapports médicaux, renseignements et radiographique qui n’appuient pas une conclusion d’invalidité au titre du RPC.

[38] La division d’appel souligne que, au paragraphe 49 de la décision de la division générale, celle-ci déclare ce qui suit : [traduction] « Le Tribunal a examiné attentivement les arguments de l’intimé et la preuve versée au dossier, y compris les rapports particuliers énoncés par l’intimé. »

[39] Il ne suffit pas de simplement déclarer que la preuve a été examinée attentivement. L’examen attentif de la preuve pertinente doit être évident à la lecture de la décision. La détermination de l’employabilité d’une personne doit être évaluée à la lumière de l’ensemble des circonstances, y compris les principes établis dans l’arrêt Villani et l’état de santé du demandeur évalué dans son ensemble (voir Bungay c. Canada (P.G.), 2011 CAF 47). Rien ne démontre que la division générale a évalué l’employabilité de l’intimé à la lumière de l’ensemble des circonstances. Cela constitue une erreur de droit.

Omission de fournir des motifs

[40] L’appelant a soutenu que la division générale a fondé la conclusion d’une invalidité grave sur la preuve de la Dre Peacock et le témoignage de vive voix de l’intimé. Dans les motifs de la division générale pour accueillir la demande de l’intimé, il n’y a aucune mention des autres rapports médicaux, renseignements ou radiographies présentés par d’autres professionnels de la santé traitants.

[41] L’intimé fait valoir qu’il n’existe aucun rapport médical contradictoire. La division générale n’a donc pas commis une erreur en se fondant sur l’avis de la Dre Peacock. L’intimé fournit également un résumé détaillé des avis médicaux découlant des documents présentés. L’intimé a également fait valoir que personne ne devrait tirer des conclusions à partir d’examens médicaux, sauf les professionnels de la santé formés pour le faire.

[42] En ce qui concerne la question des motifs fournis dans les décisions de la division générale ou de la division d’appel, il est souligné que les membres de la division générale et les membres de la division d’appel doivent, selon la loi, fournir des motifs pour les décisions rendues (voir paragraphes 54(2) et 59(2) de la Loi sur le MEDS).

[43] De plus, la Cour d’appel fédérale a déclaré ce qui suit dans l’arrêt Canada (P.G.) c. Fink, 2006 CAF 354 :

[6] Dans ses motifs, la Commission semble énumérer un résumé sélectif de la preuve, puis tire une conclusion. Contrairement à ce qu’elle est tenue de faire, la Commission n’analyse pas, n’accepte pas, ne rejette pas ou n’explique pas pourquoi elle préfère l’une ou l’autre opinion médicale ou opinion d’expert de préférence à une autre, ce qu’elle est tenue de faire […]

[7] Dans mon analyse, la Commission a commis une erreur justifiant l’intervention de la Cour parce qu’elle a conclu sans aucune analyse que Mme Fink satisfaisait au critère de l’invalidité prévu à l’alinéa 42(2)a) du RPC.

[44] La division générale semble avoir fait la même erreur. Il ne suffit pas de qualifier la preuve d’acceptable et de fiable sans prouver de motifs adéquats pour rendre cette conclusion. La division générale est autorisée à préférer certains éléments de preuve, mais elle doit motiver sa raison d’agir ainsi.

[45] La division générale n’a pas fourni de motifs pour préférer la preuve de la Dre Peacock par rapport à celle d’autres professionnels de la santé qui contredisait la preuve de la Dre Peacock. De plus, il n’y a aucun motif pour la conclusion selon laquelle l’intimé travaillait à sa capacité maximale en 2012. La division générale déclare simplement que c’était le cas. La division d’appel estime qu’il s’agit d’une erreur de droit.

Conclusion de fait erronée

[46] L’appelant a soulevé la question de la fréquentation scolaire de l’intimé et a fait valoir que la division générale aurait dû assimiler la fréquentation scolaire, y compris le déplacement et le temps consacré à l’étude, à la capacité de travailler. Rien ne démontre que la division générale a tenu compte de la fréquentation scolaire pour déterminer la capacité de travailler, mais elle estimait seulement que c’était à partir du moment où l’intimé était retourné à l’école qu’il existait une preuve de capacité réduite de travailler.

[44] Le contexte « réaliste » énoncé dans l’arrêt Villani prévoit que les circonstances particulières de chaque demandeur de pension d’invalidité au titre du RPC fassent l’objet d’un examen. La Cour d’appel fédérale se penche sur la situation particulière de chaque demandeur, comme son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie pour rendre des décisions relatives à l’invalidité.

[45] En examinant la capacité globale de l’intimé, il semble que la division générale n’ait pas tenu compte des demandes ou des détails particuliers dont l’intimé auraient pu faire l’expérience en étudiant et en se préparant pour ses cours, ou en se rendant à l’école au besoin. La fréquentation scolaire n’est pas toujours assimilée à la capacité de travailler, mais, à l’inverse, on ne saurait conclure d’emblée que la poursuite d’études ne peut jamais être interprétée comme démontrant une capacité. Cela dépend toujours des faits propres à chaque cas (McDonald c. Canada (Ressources humaines et Développement des compétences), 2009 CF 1074).

[46] La division générale n’a pas considéré la scolarité du demandeur isolément ou comme un facteur déterminant pour mesurer la gravité. L’appelant fait valoir que, en fait, la division générale aurait dû tenir compte du fait que l’intimé avait été capable d’assister aux cours sans mesure d’adaptation jusqu’à l’année scolaire de 2013. La division d’appel souligne que, selon la preuve présentée, la fréquentation des cours de l’intimé a diminué depuis septembre 21012, lorsque l’intimé s’est initialement inscrit. En 2013, l’intimé était toujours considéré comme un étudiant à temps plein, mais le nombre de cours auxquels il était inscrit avait diminué de cinq à trois et, en 2013, l’intimé a eu droit à plusieurs mesures d’adaptation afin de fréquenter l’école également. La question de savoir si ces facteurs ont été pris en considération et soupesés par la division générale n’est pas évidente dans la décision. La question de savoir si les heures consacrées à la préparation aux cours et au déplacement vers les cours a été une question de fond pour la division générale, car elle est soulignée au paragraphe 48 de la décision. Cependant, la simple reconnaissance d’une question pertinente tout en omettant de fournir les motifs justifiant la façon dont la question est finalement tranchée constitue une erreur de droit.

[47] L’intimé a soutenu qu’il n’y avait aucune preuve présentée devant la division générale au sujet de facteurs tels que les déplacements de l’intimé et le temps qu’il consacrait à ses études en plus du temps passé aux cours. La seule preuve présentée devant la division générale a été le nombre d’heures pendant lesquelles l’intimée devait assister aux cours. La division d’appel est d’accord avec cette observation. Si l’appelant désire se fonder sur la preuve de la capacité de travailler, cette preuve doit être présentée à la division générale aux fins d’examen. L’observation relative à la nouvelle preuve, qu’elle soit réelle ou spéculative, ne constitue pas un moyen d’appel prévu à l’article 58 de la Loi sur le MEDS.

Conclusion

[48] La division d’appel conclut que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de citer et d’appliquer réellement les principes établis dans l’arrêt Inclima. La division générale a également commis une erreur en omettant de citer et d’appliquer adéquatement les principes établis dans l’arrêt Villani. La division générale a commis une erreur relativement à la façon dont elle a appliqué la décision A.K. aux circonstances de l’espèce et elle a ensuite omis d’appliquer les arrêts Villani et Inclima dans le contexte de la détermination de la question de savoir si l’intimé était capable de détenir une « occupation réellement rémunératrice ».

[49] La division d’appel conclut que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de tenir compte de facteurs associés à la fréquentation scolaire de l’intimé et de fournir des motifs pour décider que le temps supplémentaire consacré à la préparation et au déplacement, comme l’a laissé entendre le demandeur, ne représentait pas une capacité de travailler.

Décision

[50] L’appel est accueilli.

[51] Compte tenu du fondement pour accueillir l’appeler, conformément à l’article 59 de la Loi sur le MEDS, la division d’appel renvoie l’appel à la division générale aux fins de réexamen par un différent membre de la division générale.

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