Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 29 novembre 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a conclu qu’une pension d’invalidité n’était pas payable en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC). La demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler (demande) à la division d’appel du Tribunal le 4 mars 2016.

Question en litige

[2] Le membre doit décider si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[3] Selon les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission », et la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ».

[4] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] La Cour fédérale a mentionné que, lorsque je dois déterminer s’il y a lieu d’accueillir une demande de permission d’en appeler, je dois être convaincue que les motifs présentés par la demanderesse se rattachent au moins à l’un des moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, et que l’appel a une chance raisonnable de succès. (Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300 (CanLII))

Observations

[6] La demanderesse a fait valoir ce qui suit :

  1. La division générale a commis une erreur en tenant compte d’éléments de preuve médicale datant d’après la période minimale d’admissibilité (après la PMA);
  2. La division générale a commis une erreur en ne tenant pas compte de l’ensemble de la preuve médicale se trouvant dans le dossier qui lui avait été présenté;
  3. Il n’y avait aucun élément de preuve à l’appui d’une capacité de travail, et la division générale a commis une erreur en appliquant l’arrêt Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117.

Analyse

Examen de la preuve médicale datant d’après la PMA

[7] La demanderesse a soutenu que la division générale a commis une erreur de droit en se référant et en se fondant sur des éléments de preuve datant d’après la PMA. Plus précisément, la demanderesse a soutenu que la division générale a eu tort de tenir compte du rapport datant du 20 août 2014 provenant du Dr Ho, médecin de famille, dans lequel il a constaté que l’un des problèmes de santé de la demanderesse s’était amélioré. La date de fin de la PMA de la demanderesse a été déterminée comme étant le 31 décembre 2013, ou au plus tard le 31 janvier 2014 si un calcul au prorata est appliqué.

[8] La division générale devait déterminer si elle pouvait conclure que la demanderesse était invalide à la date de fin de sa PMA, c’est-à-dire le 31 décembre 2013 ou le 31 janvier 2014. La division d’appel est d’accord que des éléments de preuve de la détérioration de l’état de santé ou des éléments de preuve d’une amélioration, qui datent d’après la PMA d’un demandeur, peuvent ne pas être pertinents pour déterminer la « gravité » d’une invalidité à la date de fin de la PMA ou avant cette date, dans certaines situations. Cependant, selon le RPC, dans tous les cas, l’invalidité doit être jugée à la fois « grave » et « prolongée » à la date de fin de la PMA ou avant cette date. De plus, puisque la gravité de l’invalidité doit être prolongée, la division générale peut tenir compte d’éléments de preuve datant d’après la PMA afin de déterminer si la demanderesse est atteinte d’une invalidité grave à la date de fin de sa PMA et de façon continue par la suite. Par conséquent, le rapport du Dr Ho datant d’août 2014 n’est pas nécessairement un rapport non pertinent pour déterminer une invalidité en vertu du RPC. Ce rapport révèle que la gravité de l’invalidité de la demanderesse, à la suite d’une chirurgie en 2014, s’était dissipée, et que la demanderesse était capable d’effectuer [traduction] « un emploi comportant des tâches légères et modifiées ». La division générale a estimé que ce rapport était un élément de preuve que, en évaluant la gravité de l’état de santé de la demanderesse, il n’y avait pas suffisamment d’indices permettant de conclure que la condition était grave à la date de fin de la PMA et de façon continue par la suite.

[9] Il est également attendu de la division générale qu’elle examine la capacité de travail de la demanderesse dans un contexte réaliste, et ce, en tenant compte de facteurs comme l’âge, l’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie (Villani c. Canada (Procureur général), [2002] 1 RCF 130, 2001 CAF 248). Au paragraphe 38, la division générale a tenu compte du fait que la demanderesse était âgée de 53 ans au cours de sa PMA, et qu’elle avait terminé sa 7e année en Chine. Elle n’a pas fait d’autres études ou suivi d’autre formation depuis son arrivée au Canada en 1985, mais elle a suivi des cours d’anglais pendant deux sessions très peu de temps après son arrivée au pays. Même si elle possède des aptitudes linguistiques limitées, la demanderesse n’a pas profité de ses possibilités pour améliorer ses aptitudes linguistiques, car elle n’aimait pas se faire enseigner par des professeurs dont la langue maternelle est l’anglais. Elle a également été capable, pendant plusieurs années, de se trouver un emploi dans le cadre duquel elle pouvait parler cantonais, ce qui peut se traduire par le fait que ses compétences en anglais n’a pas joué un rôle dans son incapacité à se trouver un emploi. Elle a occupé des emplois en couture et des emplois d’emballage depuis son arrivée au Canada. La division générale n’a pas tenu compte du fait que tous ses facteurs venaient appuyer l’allégation selon laquelle [traduction] « [il] n’y a aucun emploi sur le marché du travail actuel qui permet [à la demanderesse] de touché un salaire véritablement rémunérateur », comme il a été avancé par la demanderesse.

[10] En conséquence, ce moyen d’appel n’en est pas un qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Défaut de tenir compte de l’ensemble de la preuve médicale

[11] La demanderesse a soutenu que la division générale a commis une erreur en ne tenant pas compte de manière appropriée de l’ensemble de la preuve se trouvant dans le dossier qui lui avait été présenté. La majorité des éléments de preuve faisant référence aux observations de la demanderesse sur lesquelles elle s’était appuyée pour étayer son argument sur cette question, aux paragraphes 24 et 25, dataient d’après la PMA. J’ai déjà traité de la question des éléments de preuve datant d’après la PMA, et j’ai déterminé que la division générale n’a pas commis d’erreur en tenant compte d’éléments de preuve qui révélaient à la fois que l’état de santé de la demanderesse s’était amélioré et qu’elle avait une certaine capacité de travail. La question soulevée par la demanderesse est que la division générale aurait tenu compte des éléments de preuve médicale datant d’avant et d’après la PMA, et ce, de « façon sélective » pour déterminer l’invalidité et la capacité de travail.

[12] La demanderesse se fonde sur l’argument selon lequel la preuve médicale, dans son ensemble, démontre que les traitements prescrits n’ont pas corrigé les problèmes de santé de la demanderesse et que la division générale aurait dû avoir accordé plus de poids à ces éléments de preuve.

[13] La demanderesse demande que la division d’appel apprécie de nouveau la preuve et qu’elle remplace la décision de la division générale par la sienne. Comme il est mentionné précédemment au paragraphe 5, les moyens selon lesquels la division d’appel peut accorder la permission d’en appeler ne comprennent pas un nouvel examen de la preuve ayant déjà fait l’objet d’un examen par la division générale. La division d’appel n’a pas un grand pouvoir discrétionnaire pour rendre une décision relative à la permission d’en appeler conformément à la Loi sur le MEDS. Le fait d’accorder la permission d’en appeler en fonction de moyens non prévus à l’article 58 de la Loi sur le MEDS serait un exercice inapproprié du pouvoir délégué (voir Canada (Procureur général) v. O’keefe, 2016 CF 503). Il ne s’agit pas là d’un moyen d’appel conférant à l’appel une chance raisonnable de succès pour lequel je suis prête à accorder la permission d’en appeler.

Application erronée de l’arrêt Inclima

[14] La demanderesse a cité la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Inclima, lequel prévoit que lorsqu’il a été déterminé qu’un demandeur a conservé une capacité de travail, il incombe au demandeur de fournir des éléments de preuve des efforts qu’il a déployés pour trouver et conserver un emploi. Si des efforts ont été déployés afin de travailler, le demandeur doit démontrer que ces efforts ont été infructueux en raison du trouble médical grave.

[15] La demanderesse a fait valoir que la division générale a commis une erreur en concluant qu’elle n’avait pas satisfait aux exigences prévues dans l’arrêt Inclima. Plus particulièrement, elle soutient que la division générale n’aurait pas dû avoir exigé des éléments de preuve à l’appui de ses efforts pour se trouver et conserver un emploi, car la conclusion selon laquelle il y avait des éléments de preuve à l’appui d’une capacité de travailler était une conclusion erronée tirée par la division générale. Il est à noter qu’au paragraphe 42, la division générale a conclu que la demanderesse n’avait pas prouvé qu’elle avait essayé de trouver un autre emploi adapté à ses limitations physiques et qu’elle ne pouvait pas conserver en emploi en raison de ses conditions médicales :

[traduction]
[42] […] En l’espèce, l’appelante a tenté de se trouver un autre emploi dans le domaine de l’emballage ou de la restauration, mais on lui a dit qu’ils n’embauchaient pas. Elle n’a pas continué à se chercher un emploi après ces tentatives, et elle n’a pas tenté de se recycler ou d’améliorer ses aptitudes en anglais. Le Tribunal n’est pas convaincu qu’elle a déployé des efforts raisonnables pour trouver et conserver un emploi, et que ces efforts ont été infructueux en raison de son état de santé.

[16] Cependant, la division générale a déterminé que la demanderesse avait conservé une capacité de travail et que, pour ce motif, la division générale était en droit d’exiger qu’elle continue de prouver qu’elle déploie des efforts pour trouver et conserver un emploi adapté à ses limitations, autres que les quelques demandes d’emploi qu’elle a faites pour des emplois dans le domaine de l’emballage et de la restauration. La division générale était également en droit de déterminer que la décision de la demanderesse de renoncer à se recycler ou à améliorer ses compétences linguistiques (à moins d’être enseignée par un enseignant de prédilection) ne suffisait pas pour satisfaire, à la fois, à l’exigence en matière d’efforts déployés pour se trouver un emploi, comme l’avait prévu la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Inclima, et à l’exigence selon laquelle la demanderesse doit démontrer que son incapacité à se trouver un emploi est due à son problème de santé et non à d’autres raisons.

[17] Je ne suis pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès s’il est fondé sur ce motif particulier.

Conclusion

[18] La demande est rejetée.

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