Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Aperçu

[1] Essentiellement, cette affaire concerne le caractère approprié d’accorder une prorogation du délai pour interjeter appel auprès de la division générale, quand le délai prévu par la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) est dépassé.

[2] Le défendeur a rendu sa décision découlant de la révision le 14 octobre 2010. Le 12 septembre 2014, la demanderesse a présenté un appel de la décision découlant de la révision du défendeur. La division générale a conclu que la demanderesse a présenté un appel tardif, malgré le fait qu’elle avait une cause défendable et que l’autre partie ne subirait aucun préjudice si une prorogation du délai était accordée ou refusée. La demanderesse cherche à faire appel de la décision de la division générale. Pour accueillir la demande de la demanderesse, je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[3] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Contexte

[4] Le défendeur a rendu sa décision initiale le 5 février 2010 (GD2-11 à GD2-13). Selon la lettre, si la demanderesse était en désaccord avec la décision, elle avait le droit de demander une révision et elle devait écrire dans les 90 jours suivant la date à laquelle elle a reçu la lettre. La demanderesse a présenté une demande de révision le 6 mai 2010 (GD2-124).

[5] Le 11 mai 2010, le défendeur a reconnu avoir reçu la lettre de la demanderesse et il l’a informée qu’il communiquerait avec elle s’il avait besoin de renseignements supplémentaires (GD2-123). Autrement, elle serait informée dès qu’une décision sera rendue. Le défendeur a rendu sa décision découlant de la révision le 14 octobre 2010 (GD2-119 à GD2-122) que la demanderesse ne se souvient pas d’avoir reçue.

[6] En novembre 2010, la demanderesse a présenté au défendeur la copie d’une procuration souscrite en août 2009, mais la raison pour laquelle ce document a été présenté n’était pas claire (GD2-112 à GD2-115).

[7] Le 7 février 2011, le représentant de la demanderesse a écrit au défendeur pour demander une copie du dossier de la demanderesse (GD2-109).

[8] Le 19 juillet 2013, le représentant de la demanderesse a écrit au défendeur pour demander une révision de la décision du 5 février 2010, malgré le fait que, en mai 2010, la demanderesse avait déjà demandé une révision. Le représentant de la demanderesse a joint huit rapports médicaux (GD2-9 et GD2-10). Les rapports sont datés du 20 octobre 2010 au 14 juin 2012 et ils figurent aux pages GD2-15 au GD2-101 du dossier d’audience devant la division générale. Le 25 juillet 2013, le défendeur a écrit à la demanderesse pour lui demander qu’elle remplisse et signe une demande de révision d’une décision du Régime de pensions du Canada qui accompagnait la lettre (GD2-102).

[9] Le 7 octobre 2013, le représentant de la demanderesse a présenté au défendeur une demande de révision remplie et signée par la demanderesse (GD2-107). La demanderesse a déclaré qu’elle demandait une révision de la décision du 5 février 2010 (GD2-108).

[10] Le représentant de la demanderesse a écrit au défendeur le 2 juin 2014. Il a souligné qu’il avait reçu la lettre du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) pour l’informer qu’elle ne pourrait pas instruire un appel avant de recevoir une décision découlant de la révision et que, par conséquent, le dossier de la demanderesse était clos. En conséquence, le représentant de la demanderesse a demandé au défendeur l’état de la demande de révision (GD2-104 et GD2-105).

[11] Le défendeur a écrit au représentant de la demanderesse le 11 juin 2014 pour l’informer qu’elle avait rendu une décision découlant de la révision le 14 octobre 2010 (GD2-103).

[12] Le représentant de la demanderesse a écrit au défendeur le 24 juin 2014 (GD2‑5 et GD23-6) pour confirmer la réception de la lettre du 11 juin 2014 accompagnée de la décision découlant de la révision datée du 14 octobre 2010. Le représentant de la demanderesse a confirmé que, le 25 juillet 2013 [sic], il avait envoyé des rapports médicaux au défendeur et qu’il avait demandé une révision de la décision initiale du 5 février 2010. Il a confirmé que la demanderesse et lui savaient maintenant qu’il existait une décision datée du 14 octobre 2010 et elle a demandé les mesures qui doivent être prises afin que la demanderesse interjette appel de la décision du 14 octobre 2010.

[13] Le défendeur a écrit au représentant de la demanderesse le 3 juillet 2014 (GD2‑7). La demanderesse a interjeté appel devant le Tribunal le 8 septembre 2014 (GD1). Voici l’avis d’appel :

[traduction]

L’appelante a reçu la décision du 5 février 2010, puis a envoyé une lettre écrite à la main pour demander une révision. À ce moment-là, elle était représentée par un avocat relativement à un accident de motocyclette survenu le 29 mai 2007. Au cours de cette période, l’appelante était invalide au pont où elle n’a pas pu sortir du lit pendant un grand nombre de jours. Elle n’a jamais avisé [son avocat] de la décision relative à la pension d’invalidité du RPC rendue le 14 octobre 2010. [L’avocat] a seulement appris cela dans la récente correspondance avec RHDSC.

[…]

En résumé, l’appel est tardif parce que l’invalidité grave de l’appelante l’empêchait d’aviser [l’avocat] de la décision du 14 octobre 2010 et de lui demander de prendre les mesures nécessaires pour interjeter appel de façon opportune (si on suppose que l’appelant a même reçu la décision du 14 octobre, ce dont elle ne se souvient pas).

[14] Le Tribunal a écrit à la demanderesse le 15 septembre 2014 pour l’informer que son avis d’appel était incomplet et qu’elle devait fournir une copie de la décision découlant de la révision faisant l’objet de l’appel [traduction] « dans les plus brefs délais ». Le Tribunal a également déclaré qu’un avis d’appel complet devait être reçu dans les 90 jours suivant la date à laquelle la décision découlant de la révision du défendeur a été communiquée à la demanderesse. Le Tribunal a informé la demanderesse que, si elle désirait aller de l’avant sans avoir fourni les renseignements demandés dans le délai prévu, elle doit demander une prorogation du délai pour remplir un avis d’appel complet en abordant notamment la question de savoir s’il y a eu une intention constante de poursuivre l’appel et s’il existe une explication raisonnable pour justifier le retard.

[15] Le 24 octobre 2014, la demanderesse a présenté une copie de la décision découlant de la révision au Tribunal. Elle n’a pas abordé les questions de savoir s’il y avait une intention constante de poursuivre l’appel et s’il existait une explication raisonnable pour justifier le retard.

Analyse

[16] Selon le paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[17] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs pour en appeler se rattachent au moins à l’un des moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale du Canada a confirmé cette approche dans Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300.

[18] La demanderesse soutient que la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a apprécié les décisions GattellaroNote de bas de page 1 et LarkmanNote de bas de page 2. Cependant, il existe la question de savoir s’il était même nécessaire pour la division générale d’effectuer cette appréciation et de déterminer s’il était dans l’intérêt de la justice de proroger le délai pour interjeter appel étant donné que la demanderesse a visiblement interjeté appel en retard. Après tout, s’il est conclu que la demanderesse a interjeté appel plus d’un an après la journée où elle a reçu communication de la décision découlant de la révision, la division générale n’a aucun pouvoir discrétionnaire ni aucune compétence au titre du paragraphe 52(2) de la LMEDS pour autoriser la prorogation du délai pour interjeter appel.

[19] La division générale a conclu que la demanderesse avait reçu la décision découlant de la révision le 24 octobre 2010 et qu’elle avait jusqu’au 22 janvier 2011 pour interjeter appel. La demanderesse n’a pas contesté cette conclusion, sauf en laissant entendre qu’elle ne se souvient pas d’avoir reçu une copie de la décision découlant de la révision en ou vers octobre 2010. Cependant, je souligne que la demanderesse ne se souvient pas d’avoir demandé une révision en mai 2010, mais qu’elle a clairement demandé une révision à ce moment-là. Je suis donc prêt à conclure qu’elle n’aurait pas pu recevoir la décision découlant de la révision avant juin 2015 simplement parce qu’elle ne se souvient pas de l’avoir reçu avant ce moment-là. Quoi qu’il en soit, la division générale était au courant de l’argument de la demanderesse selon lequel, étant donné qu’elle ne se souvenait pas d’avoir reçu la décision découlant de la révision le 24 octobre 2010 ou vers cette date, il serait possible qu’elle ne l’ait pas reçu à ce moment-là. Dans les circonstances en l’espèce, il est inapproprié d’apprécier à nouveau la preuve relative à cette question et d’ébranler la décision de la division générale quant au moment où la demanderesse a reçu la décision découlant de la révision.

[20] La division générale a conclu que la décision découlant de la révision avait été communiquée à la demanderesse en ou vers octobre 2010. Par conséquent, au moment où elle a interjeté appel le 20 octobre 2014, trois années et demie s’étaient écoulées depuis l’expiration du délai prévu (même si le délai d’un an avait commencé le 1er avril 2013, soit le moment où les appels ont généralement été transférés du Bureau du commissaire des tribunaux de révision à la division générale du Tribunal, la demanderesse aurait encore dépassé ce délai au moment où elle a déposé l’avis d’appel).

[21] Le paragraphe 52(2) de la LMEDS prévoit que la division générale peut proroger d’au plus un an le délai pour interjeter appel, suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision.

[22] Étant donné la conclusion selon laquelle la décision découlant de la révision avait été communiquée à la demanderesse le 24 octobre 2010, la division générale n’avait pas la compétence ou le pouvoir discrétionnaire de proroger le délai pour interjeter appel. Il n’était pas nécessaire pour la division générale de tenir compte des quatre facteurs établis dans l’arrêt Gattellaro relativement à l’intérêt de la justice.

[23] En effet, dans l’affaire Fazal (alias Mahmood) c. Canada (Procureur général), 2016 CF 487, la Cour fédérale a statué que la Loi sur le MEDS ne permet pas l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire dans le cas d’une demande de permission d’en appeler déposée plus d’un an après la date où l’appelant a reçu communication de la décision découlant de la révision.

Conclusion

[24] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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