Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 31 mars 2016, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a conclu qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada n’était pas payable au demandeur.

[2] Le demandeur a présenté une demande de permission d’en appeler (demande) à la division d’appel du Tribunal le 11 mai 2016. L’article 58 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) établit les seuls moyens grâce auxquels la permission d’en appeler d’une décision rendue par la division générale peut être accordée :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[3] Le 16 mai 2016, le Tribunal a envoyé une lettre au demandeur pour l’aviser que sa demande était incomplète. Dans cette lettre, le Tribunal rappelait au demandeur son obligation de présenter une demande complète de permission d’en appeler dans les 90 jours suivant la date où il a reçu communication de la décision, conformément à l’alinéa 57(1)b) de la LMEDS. La lettre avisait également le demandeur que, s’il fournissait tous les renseignements requis avant le 13 juin 2016, le Tribunal accepterait sa demande et la considérerait comme ayant été complétée le 11 mai 2016. La lettre expliquait aussi que, si les renseignements manquants étaient fournis après le 13 juin 2016, la demande serait considérée comme ayant été complétée et reçue par le Tribunal à la date où le Tribunal aura reçu les renseignements manquants.

[4] Le demandeur a fourni au Tribunal les documents manquants par télécopieur le 29 juillet 2016.

[5] Dans une lettre datée du 2 août 2016, le Tribunal a accusé réception des renseignements manquants et a expliqué que, bien que la demande était maintenant complète, elle avait été complétée après le délai de 90 jours prévu à l’alinéa 57(1)b) de la LMEDS. La lettre expliquait également que, puisque la demande avait été soumise après le délai de 90 jours, un examen devrait maintenant être effectué pour déterminer si une prorogation du délai devrait être accordée. Le demandeur a répondu par l’entremise d’une lettre que le Tribunal a reçue le 27 janvier 2017.

Question en litige

[6] Le membre doit déterminer si une prorogation du délai devrait être accordée pour permettre la présentation de la demande.

Droit applicable

[7] Aux termes de l’alinéa 57(1)b) de la LMEDS, une demande de permission d’en appeler doit être présentée à la division d’appel dans les 90 jours suivant la date à laquelle le demandeur reçoit communication de la décision. Un membre du Tribunal dispose de l’autorité de proroger le délai pour la présentation de la demande de permission d’en appeler en vertu du paragraphe 57(2) de la LMEDS. En l’espèce, la lettre du 11 mai 2016 énonçait formellement que, si le demandeur était en mesure de fournir les renseignements requis pour compléter sa demande avant le 13 juin 2016, le Tribunal considérerait sa demande comme ayant été complétée le 11 mai 2016. Cependant, si les renseignements manquants étaient fournis après le 13 juin 2016, la demande serait considérée comme ayant été complétée et reçue par le Tribunal à la date où le Tribunal aura reçu tous les renseignements manquants.

[8] Les renseignements manquants ont été reçus le 29 juillet 2016, et la demande a donc été considérée comme ayant été soumise en retard.

[9] Pour déterminer si une prorogation du délai devrait être accordée, le membre doit évaluer les critères établis dans la jurisprudence. Dans la décision Canada (Ministre du Développement des Ressources Humaines) c. Gattellaro, 2005 CF 883, la Cour fédérale a indiqué que les critères à prendre en considération sont les suivants :

  1. a) il y a intention persistante de poursuivre la demande ou l’appel;
  2. b) la cause est défendable;
  3. c) le retard a été raisonnablement expliqué;
  4. d) la prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

[10] Le poids qu’il faut accorder à chacun des facteurs énoncés dans l’affaire Gattellaro variera selon les circonstances et, dans certains cas, d’autres facteurs aussi seront pertinents. La considération primordiale est celle de savoir si l’octroi d’une prorogation de délai serait dans l’intérêt de la justice – Canada (Procureur général) c. Larkman, 2012 CAF 204.

Observations

[11] Le demandeur a fait valoir qu’il interjetait appel parce qu’il avait besoin de deux autres prothèses de jambes.

[12] Lorsqu’il a appris que le Tribunal avait besoin d’autres renseignements, le demandeur a répondu par écrit et expliqué que, à ce moment, il avait besoin d’une autre prothèse de jambe, et il a fait valoir que ce motif correspondait au troisième moyen prévu à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS, c’est-à-dire que la division générale avait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[13] Le 2 août 2016, le Tribunal a envoyé au demandeur une lettre pour l’aviser que les renseignements manquants avaient été reçus en retard. Le demandeur n’a cependant pas répondu avant le 27 janvier 2017, la date à laquelle le Tribunal a reçu sa lettre. Dans cette lettre, le demandeur expliquait qu’il avait envoyé tous les renseignements requis et que le moment était venu de prendre une décision.

[14] Il devrait être souligné que le demandeur avait justifié son retard dans la demande originale incomplète qu’il avait présentée avant la fin du délai de 90 jours. Il a expliqué qu’il était à l’hôpital. Mais puisque ce document accompagné de cette note avait été soumis le 11 mai 2016, il est évident qu’il n’était pas lié à la question de la demande présentée en retard, puisque le retard n’avait été signalé que le 29 juillet 2016, au moment où les documents ont été fournis.

Analyse

[15] Pour déterminer si une prorogation du délai devrait être accordée, chacun des critères relatifs à Gattellaro sera analysé indépendamment.

Intention constante de poursuivre l’appel

[16] La demande initiale incomplète a été présentée dans le respect du délai de 90 jours. Le Tribunal a demandé des renseignements additionnels et a fourni des instructions claires par rapport au respect de la date à laquelle les renseignements devaient être reçus afin que la demande soit considérée comme ayant été soumise le 11 mai 2016. Le demandeur n’a pas fourni les renseignements en temps opportun, et il n’a pas fourni les documents manquants dans les 90 jours. Le demandeur a répondu, mais en retard.

[17] Bien qu’une grande partie de l’analyse du dossier soit réalisée grâce aux observations écrites, ce demandeur particulier a régulièrement communiqué avec le Tribunal par téléphone.

[18] Le demandeur a communiqué avec le Tribunal par rapport à son appel devant la division d’appel aux dates suivantes : 20 mai 2016; 22 juin 2016; 28 juillet 2016; 29 juillet 2016; 2 août 2016; 3 août 2016; 4 août 2016; 9 août 2016; 30 août 2016; 23 septembre 2016; 4 novembre 2016; 22 novembre 2016; 7 décembre 2016; 20 décembre 2016; 16 janvier 2017; 19 janvier 2017; 26 janvier 2017; 30 janvier 2017; 7 février 2017; 21 février 2017; 9 mars 2017; et 11 avril 2017. Le bureau du député du demandeur a également téléphoné deux fois en son nom, le 25 mai 2016 et le 7 juin 2016.

[19] Étant donné que le demandeur continue de communiquer avec le Tribunal pour connaître le statut de sa demande, il est évident qu’il démontre une intention constante de poursuivre l’appel.

Cause défendable

[20] La Cour d’appel fédérale a conclu que la question de savoir si une partie présente une cause défendable en droit revient à se demander si l’appel a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada (Développement des Ressources Humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41; Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

[21] La division générale a conclu que la période minimale d’admissibilité (PMA) du demandeur était le 31 décembre 1996, et que le trouble médical important en question était associé à sa chute à l’automne 2008. Cela signifie que sa chute a eu lieu après la fin de la PMA et que le demandeur n’était pas invalide avant la fin de sa PMA le 31 décembre 1996.

[22] La décision rendue par la division générale a aussi confirmé que le demandeur avait déclaré à l’audience que « tous les documents qui se trouvaient au dossier relatifs à sa rémunération étaient probablement exacts ».

[23] Dans ses observations, le demandeur a fait valoir que, puisqu’il avait désormais besoin de nouvelles prothèses de jambe, la décision rendue par la division générale était incorrecte.

[24] La division générale n’a pas commis d’erreur grave concernant les faits au dossier d’appel. Au paragraphe 16 de la division générale, il est souligné que le demandeur a reconnu être tombé d’une échelle en 2008, et qu’avant cette chute, aucun trouble médical ne l’empêchait de travailler. De plus, dans sa demande de permission d’en appeler, le demandeur a même précisé que l’accident avait eu lieu le 15 août 2008.

[25] Le demandeur n’avait pas d’invalidité grave et prolongée à la fin de sa PMA ou avant cette date, le 31 décembre 1996. Par conséquent, il n’est pas admissible à la prestation d’invalidité du RPC. Je ne constate en l’espèce aucune cause défendable.

Explication raisonnable du retard

[26] Aucune explication écrite n’a été fournie pour justifier le retard. Cependant, dans une conversation téléphonique avec le Tribunal enregistrée le 30 août 2016, le demandeur a précisé qu’il était resté à l’hôpital pendant longtemps. Aucune raison n’a été fournie pour expliquer son hospitalisation, et aucune date n’a été précisée. L’hospitalisation avait également été mentionnée dans la demande originale incomplète qui avait été fournie, même si cette demande avait été présentée à temps. Le demandeur n’a pas fourni au Tribunal de raison complète et claire par rapport au retard une fois qu’il a été avisé que sa demande avait été présentée en retard. Je reconnais que le demandeur était à l’hôpital, mais faute d’autres détails comme les dates de son hospitalisation, j’estime que le demandeur n’a fourni au Tribunal aucune explication raisonnable par rapport à son retard.

Préjudice à l’autre partie

[27] La prorogation du délai pour interjeter appel ne causerait pas préjudice aux intérêts du défendeur étant donné la courte période qui s’est écoulée depuis l’expiration du délai prévu par la loi. La capacité du défendeur à se défendre ne serait pas indûment amoindrie si la prorogation du délai était accordée.

Conclusion

[28] Après avoir examiné les facteurs susmentionnés, j’en conclus que la demande de prorogation du délai pour présenter la demande de permission d’en appeler aurait pu être accordée selon deux des quatre moyens établis dans Gattellaro : le demandeur a démontré une intention constante de poursuivre l’appel, et aucun préjudice n’aurait été causé au défendeur en accordant une prorogation d’une période aussi courte, bien que l’explication du retard soit incomplète. Cependant, l’analyse ne permet pas de déterminer si le demandeur présentait une cause défendable ou invoquait des moyens qui auraient pu conférer à l’appel une chance raisonnable de succès. Le demandeur a admis qu’il n’avait pas d’invalidité grave et prolongée le 31 décembre 1996 ou avant cette date. Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, la division d’appel ne peut accorder la permission d’en appeler que si le demandeur invoque des motifs qui correspondent aux moyens d’appel prévus, et uniquement si l’appel a une chance raisonnable de succès. Le trouble médical du demandeur s’est manifesté en 2008, et donc après la PMA. La division générale n’a pas fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. La division générale a évalué les renseignements au dossier et a correctement appliqué la loi.

[29] Selon les facteurs associés à l’affaire Gattellaro et dans l’intérêt de la justice, je refuse d’accorder une prorogation du délai pour présenter la demande de permission d’en appeler.

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