Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Introduction

[1] Il s’agit d’une demande de permission d’en appeler relativement à une décision de la division générale datée du 11 décembre 2015, dans laquelle celle-ci a statué que la demanderesse n’était pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada, puisqu’elle avait conclu que son invalidité ne s’était pas manifestée entre le 31 décembre 1997 et le 31 décembre 2001.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Contexte général

[3] La demanderesse a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada en août 1996. Le défendeur a rejeté sa demande initialement et il a rejeté sa demande de révision le 10 décembre 1997. Un tribunal de révision du Régime de pensions du Canada a instruit l’appel le 19 août 1998. Il a rendu une décision le 19 octobre 1998 en rejetant l’appel. La demanderesse a demandé la permission d’en appeler relativement à la décision du tribunal de révision devant la Commission d’appel des pensions. La permission d’en appeler a été refusée le 11 août 1999.

[4] Le 31 octobre 2002, la demanderesse a présenté une demande de pension d’invalidité pour une deuxième fois. La division générale a conclu ce qui suit :

  • Au moment de l’audience devant le tribunal de révision en 1998, la période minimale d’admissibilité (PMA) de la demanderesse avait pris fin le 31 décembre 1997, c’est-à-dire qu’elle devait prouver qu’elle souffrait d’une invalidité grave et prolongée à cette date et que cette invalidité allait durer pendant une longue période, continue et indéfinie. Le membre a souligné que le tribunal de révision n’avait pas explicitement déterminé la date de fin de la PMA.
  • Le tribunal de révision n’avait pas abordé la question de savoir si l’invalidité de la demanderesse pourrait pu devenir grave et prolongée à un moment après le 31 décembre 1997.
  • À la suite d’un partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension, la PMA de la demanderesse a pris fin le 31 décembre 2001.

Analyse

[5] Selon le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[6] Avant d’accorder la permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs pour en appeler se rattachent au moins à l’un des moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) de la LMEDS et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale du Canada a récemment confirmé cette approche dans la décision Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300.

[7] La demanderesse soutient que la division générale a fondé sa décision sur plusieurs conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Section sur la preuve de la division générale

[8] Plusieurs des prétendues conclusions de fait erronées figurent dans la section sur la preuve et ne font aucunement partie de l’analyse. Par exemple, au paragraphe 11, le membre a déclaré que la demanderesse est née en 1957, alors que les documents font clairement état qu’elle est née en 1956. Malgré l’erreur évidente, il ne s’agissait pas d’un fait sur lequel la division générale avait fondé sa décision. La demanderesse cite également l’erreur au paragraphe 13 où le membre a déclaré que la demanderesse avait commencé à travailler comme infirmière auxiliaire autorisée en octobre 1991 au lieu de juillet 1991. Ces types d’erreurs ne relèvent pas du paragraphe 58(1) de la LMEDS étant donné que les conclusions de fait erronées doivent non seulement avoir été tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, mais elles doivent également être celles sur lesquelles le membre a fondé sa décision.

[9] La demanderesse a cerné plusieurs erreurs dans la section sur la preuve, des paragraphes 11 à 43, mais, sauf s’il s’agit de conclusions de fait sur lesquelles le membre a fondé sa décision, elles ne relèvent pas du paragraphe 58(1) de la LMEDS.

[10] La demanderesse fait valoir que la division générale a fait abstraction d’éléments de preuve importants qui auraient dû faire partie de son appréciation. Ceux-ci comprennent le moment où elle a suivi une formation en tant qu’infirmière auxiliaire autorisée ou le fait qu’elle avait présenté une demande de partage des crédits et qu’elle avait [traduction] « risqué de se faire battre » par son époux. Dans le cas du partage des crédits, même si la division générale n’a pas mentionné cette question au paragraphe 12, dans lequel elle a discuté des cotisations de la demanderesse au Régime de pensions du Canada, le membre en a fait mention au paragraphe 25 et une autre fois au paragraphe 54 pour déterminer la date de fin de la PMA applicable.

[11] Comme certains des autres faits qui méritaient d’être pris en considération selon la demanderesse, les tribunaux ont toujours estimé qu’il était inutile qu’un décideur rédige des motifs exhaustifs traitant de tous les éléments de preuves et faits portés à sa connaissance. Le décideur a le droit d’exposer les conclusions et les justifications les plus saillants : Canada c. South Yukon Forest Corporation, 2012 CAF 165. Elles doivent tenir compte et traiter de la preuve si elle a une certaine valeur probante, mais ce n’est pas ce qui est prétendu en l’espèce, et je ne parviens pas à voir la question à savoir le moment où elle a suivi sa formation d’infirmière auxiliaire autorisée comme ayant une valeur probante.

[12] La demanderesse fait valoir que, aux paragraphes 15 et 16, la division générale aurait dû mentionner les blessures au dos qu’elle avait subies au cours d’une agression le 25 décembre 1994. Elle nie qu’elle était même au courant du fait que la décompression chirurgicale lui avait été recommandée parce que son médecin de famille n’en a pas discuté avec elle, comme on le laisse entendre au paragraphe 15. Cependant, les paragraphes 15 et 16 constituent le résumé de la décision du tribunal de révision par la division générale. Le tribunal de révision a mentionné les problèmes de douleur chronique, du syndrome du défilé thoraco-brachial et des problèmes cervicaux de la demanderesse, mais il n’a pas mentionné expressément la blessure au dos. Par conséquent, il aurait été inapproprié que la division générale tire des conclusions que le tribunal de révision n’avait pas déjà tirées.

[13] La demanderesse soutient que, au paragraphe 20, la division générale a mal interprété la preuve en laissant entendre qu’elle a seulement eu des problèmes au dos après 1996. Encore une fois, le membre s’est fondé sur les conclusions du tribunal de révision à cet égard, même s’il a néanmoins examiné la preuve médicale portée à la connaissance du tribunal de révision et que rien ne démontrait selon lui l’existence d’une preuve relative à ces plaintes concernant le dos de la demanderesse. Quoi qu’il en soit, la question de savoir si la blessure de la demanderesse au dos s’est manifestée en 1994 ou à un moment après 1996 est théorique étant donné que la question devant la division générale était de savoir si l’invalidité de la demanderesse est devenue grave et prolongée après le 31 décembre 1997.

[14] La demanderesse fait valoir que la division générale a commis une erreur au paragraphe 22 en concluant qu’elle avait déclaré que les injections soulageaient certains de ses symptôme pendant plusieurs mois alors qu’elle a déclaré que, dans le meilleur des cas, les injections étaient [traduction] « semblables à une engelure [...] [d’une durée] d’environ une heure ». Cependant, ces faits, s’ils sont erronés, n’étaient pas ceux sur lesquels le membre a fondé sa décision. Dans le même ordre d’idées, même si la demanderesse ni avoir déjà déclaré qu’elle avait été alitée lorsqu’elle ne pouvait accomplir ses fonctions de cadette de l’air, il ne s’agissait pas d’un fait sur lequel le membre a fondé sa décision.

[15] La demanderesse tente maintenant d’ajouter des éléments de preuve ou d’apporter des explications à leur égard. Par exemple, au paragraphe 39, la demanderesse tente de présenter une preuve afin de réfuter l’avis du rhumatologue selon lequel rien ne prouvait qu’un disque cause sa douleur au dos. Le membre a également souligné que la demanderesse prenait de l’Elavil et que ce médicament facilitait son sommeil. La demanderesse prétend qu’elle a cessé de prendre de l’Elvavil depuis ce moment-là en raison des effets secondaires. Ni la permission d’en appeler ni l’appel n’offre des occasions d’ajouter ou d’expliquer la preuve. En ce qui concerne la déclaration selon le manque de preuve relativement à la blessure causée par le disque, le membre a cité à juste titre l’avis du rhumatologue daté du 22 août 2012 (GD3-209), alors il est impossible d’affirmer qu’il s’agit d’une erreur à cet égard.

[16] La demanderesse maintient que la division générale aurait dû mentionner sa blessure au dos et sa douleur continue aux paragraphes 36, 38 et 39. En fait, le membre a parlé de la douleur au dos aux paragraphes 38 et 39. Au paragraphe 36, il s’est concentré sur les changements de l’état de la demanderesse après décembre 1997. La demanderesse prétend que ses problèmes de dos se sont manifestés en décembre 1994, mais, puisque le membre a limité le paragraphe 36 à une discussion sur les changements de l’état de santé de la demanderesse après décembre 1997, le membre n’a évidemment pas discuté de ses douleurs au dos non plus.

Section sur les observations de la division générale

[17] La demanderesse soutient que la division générale a commis une erreur aux paragraphes 44 et 45, mais ceux-ci constituent un résumé des observations des parties, et non de réelles conclusions de fait. La demanderesse fait valoir que le membre a fait une présentation erronée de son avis. Bien que cela ne puisse pas représenter une conclusion de fait erronée en soi, il est essentiel que le membre comprenne bien l’avis d’un demandeur afin qu’il puisse apprécier l’appel adéquatement. Le membre a déclaré que la demanderesse avait soutenu être admissible à une pension d’invalidité parce qu’elle souffrait d’une invalidité grave et prolongée avant le 31 décembre 2001. Par contre, la demanderesse prétend qu’elle est invalide depuis une agression survenue le 25 décembre 1994 et elle souligne qu’elle n’a pas connu de problèmes avant cela. Je ne constate aucune erreur ou de mauvaise compréhension de la part du membre à cet égard.

Section sur l’analyse de la division générale

[18] La demanderesse fait valoir que le membre a commis une erreur au paragraphe 47. Elle soutient qu’elle souffre d’une invalidité grave et prolongée, car elle souffre de symptômes depuis environ 22 ans et elle a subi une chirurgie ou elle s’est fait offrir d’en subir une. Je ne suis pas convaincue que cela soulève une cause défendable, car le membre a bien énoncé le critère relatif à une invalidité grave et prolongée au paragraphe 8. Même si le membre a négligé de tenir compte de la question de savoir si l’invalidité de la demanderesse était prolongée, le critère relatif à l’invalidité possède deux éléments, et, si un demandeur ne parvient pas à satisfaire au critère relatif à la gravité, il sera donc impossible de satisfaire aux exigences en matière d’invalidité selon les dispositions législatives. Comme le membre l’a déclaré avec justesse, il n’était alors pas nécessaire, dans les circonstances du cas du demandeur, de procéder à une analyse sous l’angle de l’aspect du critère relatif au caractère prolongé.

[19] Au paragraphe 57, le membre a déclaré que la demanderesse n’avait reçu aucune aide de la Worker’s Compensation Board [commission d’indemnisation des accidentés du travail]. La demanderesse prétend que le membre n’a pas consigné adéquatement son témoignage à cet égard. Même si c’était le cas, le membre a déclaré que la preuve concernant cette question n’était pas pertinente dans le cadre de l’examen. Par conséquent, je ne suis pas prête à statuer que cela soulève une cause défendable.

[20] Au paragraphe 65, la division générale a déclaré que la demanderesse occupait des emplois bénévoles et rémunérés qui faisaient état d’une capacité régulière de détenir un emploi véritablement rémunérateur. La demanderesse remet en question cette conclusion en déclarant qu’elle a occupé des emplois bénévoles non rémunérés et qu’elle vit dans un très petit village et qu’elle n’a aucun moyen de transport ou l’argent [traduction] « pour en avoir un ». Cependant, il existe une preuve documentaire et un témoignage de vive voix selon lesquels Shoppers Drug Mart a employé la demanderesse à deux succursales différentes.

[21] La demanderesse conteste la conclusion du membre au paragraphe 66 selon laquelle elle avait omis de présenter une preuve pour appuyer le fait qu’elle avait subi une crise cardiaque ou qu’elle était incapable de continuer sur le plan médical. La demanderesse prétend avoir obtenu une lettre d’un docteur de l’Université Mount Royal selon laquelle elle devait se retirer pour des raisons médicales en raison d’une légère crise cardiaque. Elle a mentionné qu’elle devait également transporter un vaporisateur de nitroglycérine. Cependant, cette preuve a été produite après l’audience devant la division générale (AD1-13). Étant donné que la lettre de l’Université Mount Royal est datée du 30 mars 2010 et que le médecin déclare que la demanderesse était sa patiente depuis février 2010, elle aurait peu importé dans le cadre de l’examen de la division générale parce qu’elle a évalué si la demanderesse était devenue invalide entre le 31 décembre 1997 et le 31 décembre 2001. Le médecin de l’Université Mount Royal n’a donné aucun avis sur l’état de la demanderesse au cours de cette période.

[22] Au paragraphe 67, la division générale a conclu que la demanderesse ne souffrait pas de fibromyalgie, d’acouphène, d’allergies à la poussière et à la moisissure, de difficultés de compréhension, de mauvais genoux ou de tout autre symptôme connexe, ou qu’elle avait cherché à obtenir un traitement médical pour l’un de ces troubles entre le 31 décembre 1997 et le 31 décembre 2001. La demanderesse fait valoir que la division générale a commis une erreur parce qu’elle était [traduction] « constamment au cabinet de médecins pour obtenir de l’aide ». J’ai examiné les dossiers médicaux et je ne constate aucun dossier médical mentionnant des plaintes d’acouphène, de difficultés de compréhension ou d’allergies à la poussière et à la moisissure. La seule mention d’allergies figure dans le questionnaire relatif aux prestations d’invalidité (GD3-218), mais rien ne démontre autrement qu’elle avait subi d’autres examens ou un traitement concernant des allergies.

[23] En ce qui concerne les mauvais genoux dont se plaignait la demanderesse, ses antécédents comprennent des arthroscopies au genou, et on y fait mention dans les rapports de consultation du neurologue de mai 1996, mais il n’y a autrement aucune mention à des problèmes de genou avant août 2012 lorsqu’un rhumatologue a reçu la demanderesse en consultation pour de l’arthrose et de la fibromyalgie. Il s’agit également de la seule mention dans la preuve documentaire concernant la fibromyalgie de la demanderesse. À la suite de cette consultation avec le rhumatologue, la demanderesse a subi une radiographie des deux genoux (GD3-208 à GD3-210). Cependant, rien dans la preuve documentaire ne démontre que la demanderesse s’était plainte à propos de ses genoux ou de ses symptômes concernant la fibromyalgie pour la période du 31 décembre 1997 au 31 décembre 2001.

[24] Au paragraphe 68, la division générale a déclaré qu’il n’y avait aucune preuve démontrait que l’état de la demanderesse avait changé [traduction] « de façon importante ». La demanderesse souligne le fait qu’elle a développé une fibromyalgie pour prouver que son état a changé de façon importante. En l’espèce, le membre a déclaré avoir mis l’accent sur la période du 31 décembre 1997 au 31 décembre 2001 et après cette période. La demanderesse souligne à juste titre qu’elle avait développé la fibromyalgie (probablement quelque temps après cette période), mais étant donné qu’elle devait prouver qu’elle était devenue invalide entre le 31 décembre 1997 et le 31 décembre 2001, le fait qu’elle ait développé la fibromyalgie après cette période n’importait pas dans le cadre de l’examen.

[25] Dans une certaine mesure, la demanderesse demande une nouvelle appréciation. Cependant, comme l’a confirmé récemment la Cour fédérale dans l’arrêt Tracey , le rôle de la division d’appel ne consiste pas à apprécier de nouveau la preuve pour déterminer si la permission d’en appeler devrait être acceptée ou refusée, car une nouvelle appréciation de la preuve ne correspond à aucun des moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la LMEDS.

Conclusion

[26] La demande de permission d’en appeler est refusée.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.