Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 18 février 2016, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a conclu qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) n’était pas payable à cette demanderesse.

[2] La demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler (demande) à la division d’appel du Tribunal le 3 mai 2016. L’article 58 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) énonce les seuls moyens d’appel pouvant être pris en considération pour accorder la permission d’en appeler d’une décision de la division générale. Le 9 mai 2016, le Tribunal a envoyé une lettre à la demanderesse pour lui mentionner que la demande était incomplète. Dans cette lettre, le Tribunal rappelait à la demanderesse l’exigence de la loi de compléter une demande de permission d’en appeler dans les 90 jours suivant la réception de la décision de la division générale, conformément à l’alinéa 57(1)b) de la Loi sur le MEDS. La lettre mentionnait aussi à la demanderesse que si l’ensemble des renseignements requis était transmis au plus tard le 9 juin 2016, le Tribunal accepterait la demande complète comme ayant été reçue le 3 mai 2016.

[3] Le 9 juin 2016, le représentant de la demanderesse a remis l’information manquante, et le Tribunal en a accusé réception le 9 juin 2016. Le 13 juin 2016, le Tribunal a écrit à la demanderesse et mentionnait que l’information requise pour compléter la demande avait été reçue, mais en raison de la date d’exécution, la demande avait été présentée plus de 90 jours après la réception de la décision de la division générale.

Question en litige

[4] Le membre doit déterminer si l’on devrait accorder une prorogation du délai pour permettre la présentation de la demande, et dans l’affirmative, si la permission d’en appeler devrait être accordée.

Dépôt tardif de l’appel

[5] Conformément à l’alinéa 57(1)b) de la Loi sur le MEDS, une demande doit être présentée à la division d’appel dans les 90 jours suivant la date à laquelle le demandeur reçoit communication de la décision. Un membre du Tribunal a le pouvoir de proroger le délai prévu pour présenter une demande de permission d’en appeler, conformément au paragraphe 57(2) de la Loi sur le MEDS. En l’espèce, la lettre du 9 mai 2016 énonçait spécifiquement que si la demanderesse transmettait toute l’information requise pour compléter sa demande au plus tard le 9 juin 2016, le Tribunal considérerait sa demande de permission d’en appeler comme ayant été présentée le 3 mai 2016. Le Tribunal a reçu l’information manquante le 9 juin 2016.

[6] Les renseignements supplémentaires ont été transmis au Tribunal selon le délai prescrit dans la lettre du Tribunal du 9 mai 2016. L’avocat de la demanderesse a fait valoir dans des observations reçues le 21 février 2017 que la lettre du 13 juin 2016 avait été envoyée par erreur. Les observations ont été reçues le 9 juin 2016, mais par la suite, le Tribunal n’a pas établi que la demande avait été reçue le 3 mai 2016. Il semble que le Tribunal a commis une erreur administrative parce que la demande n’était pas tardive.

Permission d’en appeler – Observations et analyse

[7] Puisque la demande de permission d’en appeler n’était pas tardive, nous devons maintenant évaluer si les motifs d’appel se rattachent aux moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS.

[8] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] D’après la décision de la division générale, la demanderesse n’a pas démontré selon la prépondérance des probabilités qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de sa période minimale d’admissibilité, ou avant, selon la définition d’« invalide » sous l’alinéa 42(2)a) du RPC.

[10] La demanderesse soutient que la division générale a erré en droit et a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[11] Plus précisément, la demanderesse allègue que la division générale a erré en droit parce que l’état de la demanderesse n’a pas été évalué selon l’approche « réaliste ».

[12] La demanderesse soutient aussi que la division générale a commis des erreurs de fait et de droit en faisant abstraction de certains aspects de la preuve médicale présente au dossier.

[13] Dans les observations de la demanderesse transmises le 21 février 2017, il était affirmé que la division générale n’a pas fait application de l’analyse « réaliste » dont il est question dans l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248. Cette décision de la Cour d’appel fédérale établit que le critère juridique pour déterminer la gravité doit être appliqué en conservant un certain rapport avec le « monde réel ». De plus, cette décision prévoit que le décideur doit tenir compte de la situation particulière du demandeur, notamment de son âge, de son niveau d’instruction, de ses aptitudes linguistiques, de ses antécédents de travail et de son expérience de la vie.

[14] La demanderesse a fait valoir que mise à part la mention du critère « réaliste » au paragraphe 37 de la décision de la division générale, l’analyse n’a pas été effectuée.

[15] À la lecture de la décision de la division générale, il est clair que les paragraphes suivant le paragraphe 37 traitent des facteurs de Villani. Dans le paragraphe 37 et dans les suivants, le membre de la division générale a tenu compte de l’âge, des aptitudes linguistiques et des antécédents de travail de la demanderesse. Après avoir cité l’arrêt Villani, la décision de la division générale traite de la manière dont les caractéristiques personnelles de la demanderesse influençaient sa capacité de régulièrement détenir une occupation véritablement rémunératrice (sous-alinéa 42(2)a)(i) du RPC). Être en désaccord avec le résultat de l’analyse ne représente pas une erreur de droit.

[16] En ce qui concerne l’erreur alléguée commise par la division générale quant à l’examen des renseignements médicaux, le représentant de la demanderesse soutient que la division générale [traduction] « a ignoré ou banalisé la plupart des éléments de preuve médicale pertinents au dossier, de même que le témoignage sous serment de la demanderesse » (paragraphe 9 des observations du 21 février 2017).

[17] La division générale est le juge des faits, et un tribunal administratif est présumé avoir tenu compte de l’ensemble de la preuve qui lui est présentée. Le membre de la division générale avait le mandat de soupeser la preuve, d’établir les faits et de tirer une conclusion par rapport à l’affaire sur le fondement d’une analyse impartiale du dossier et de la preuve orale présentée lors de l’audience. Dans la décision Parchment v. Canada (Procureur général), 2017 CF 354, la Cour fédérale a expliqué une fois de plus le rôle de la division d’appel au paragraphe 23 de sa décision [traduction] :

À l’examen de l’appel, le mandat de la division d’appel est limité. Elle ne possède pas la compétence de tenir une nouvelle audience pour la cause de monsieur Parchment. De plus, elle n’examine pas de nouveaux éléments de preuve. La compétence de la division d’appel est limitée à déterminer si la division générale a commis une erreur (al. 58(1)a) à c) de la LMEDS) et la division d’appel est convaincue qu’un appel a une chance raisonnable de succès (58(2) de la LMEDS). La division d’appel accorde donc la permission d’en appeler seulement si les critères des paragr. 58(1) et (2) sont respectés.

[18] La division générale a soupesé la preuve, et un simple désaccord avec sa décision d’avoir accordé plus d’importance à certains éléments de preuve qu’à d’autres ne représente pas un moyen permettant d’interjeter appel.

[19] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, la division d’appel a comme fonction de déterminer si les motifs d’appel se rattachent à l’un ou l’autre des moyens d’appel énumérés et s’ils confèrent à l’appel une chance raisonnable de succès, sans aborder directement le jugement sur le fond de l’affaire. La demanderesse demande une audience de novo et souhaite obtenir une décision différente qui serait fondée sur l’ensemble des faits et sur le droit applicable qui sont les mêmes. Ces motifs ne se rattachent à aucun des moyens énumérés et donc, ne font pas montre d’une cause défendable.

[20] La division d’appel n’a pas la compétence pour tenir une audience de novo. Qu’un demandeur soit en désaccord avec la décision de la division générale ne représente pas un manquement à la justice naturelle ni une erreur de droit ou de fait.

Conclusion

Le Tribunal a commis une erreur dans sa lettre du 13 juin 2016. Le Tribunal a reçu l’information demandée le 9 juin 2016, et a donc daté la demande comme ayant été complétée le 3 mai 2016. La demande n’était pas tardive. Toutefois, comme la demanderesse n’a pas présenté de moyens d’appel qui confèrent à l’appel une chance raisonnable de succès, la permission d’en appeler est refusée.

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