Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Aperçu

[1] Le demandeur demande la permission d’en appeler de la décision de la division générale datée du 19 mai 2016. La division générale a déterminé que le demandeur n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada, ayant conclu qu’il n’était pas atteint d’une invalidité « grave » d’ici la fin de sa période minimale d’admissibilité, soit le 31 décembre 1993.

Question en litige

[2] Est-ce que l’appel a une chance raisonnable de succès?

Contexte factuel

[3] À titre d’information, le demandeur a présenté deux demandes de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, soit en mars 2011 et en décembre 2012. Cette affaire porte sur la première demande présentée en mars 2011.

Analyse

[4] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) prévoit que les seuls moyens d’appel se limitent aux suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] Pour que la permission soit accordée, le demandeur doit me convaincre que les motifs d’appel correspondent à l’un des moyens précités et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale du Canada a confirmé cette approche dans Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300. Le demandeur a présenté une demande de permission d’en appeler, affirmant que la division générale a commis plusieurs erreurs.

a. Incapacité

[6] Le demandeur soutient qu’il souffre d’une incapacité depuis le mois d’août 1987. S’il avait été capable d’établir que cela était le cas, et s’il avait été capable de prouver qu’il était invalide, le demandeur aurait peut-être été admissible à une plus longue période de versements rétroactifs de toutes prestations du Régime de pensions du Canada. Cependant, il n’a pas laissé entendre que la division générale a commis une erreur dans son évaluation de son incapacité. Je ne relève pas non plus d’erreur à la lecture du dossier. La division générale a invoqué et appliqué le critère approprié relatif à l’incapacité. La division générale a examiné les activités pertinentes du demandeur et a conclu qu’il travaillait au cours de la période pertinente, vivait de façon autonome, était financièrement responsable et avait présenté une demande de prestations régulière de l’assurance-emploi.

[7] Si le demandeur demande que l’on examine à nouveau la question portant sur sa prétendue incapacité, rien dans la LMEDS ne prévoit que la division d’appel peut apprécier à nouveau l’affaire pour déterminer si la permission d’en appeler devrait être accordée ou refusée : affaire Tracey. Les moyens d’appel sont très précis, et ils se limitent à ceux figurant au paragraphe 58(1) de la LMEDS.

b. Régularité

[8] Le demandeur soutient également qu’il souffre d’une invalidité grave et prolongée depuis le mois d’août 1987, laquelle le rend régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

[9] Même si le demandeur reconnait qu’il détient un permis de conduire de classe 3, il soutient qu’il était incapable de poursuivre [traduction] « une vie durable de 1987 à 2012 ou au cours de toute autre année. » Il soutient que la nature de sa maladie mentale fait en sorte que sa condition n’a jamais été [traduction] « stable au point d’être régulière », et par conséquent, il n’a pas été capable de travailler de façon [traduction] « continue, persistante et sans interruption ». Il soutient que la division générale n’a pas tenu compte de ces faits lorsqu’elle a évalué la gravité de son invalidité.

[10] Le demandeur soutient que la division générale n’a pas correctement évalué la gravité de son invalidité, car elle n’a pas déterminé qu’il était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice, dans le sens où il n’était pas capable de travailler sur une base continue, persistante et sans interruption.

[11] La division générale a traité de la preuve et des observations du demandeur aux paragraphes 51, 53 et 55. Il a écrit ce qui suit :

[traduction]

[51] [L]'appelant a travaillé du 20 janvier 2010 au 13 décembre 2010 en tant que chauffeur de camion à temps partiel, travaillant environ 75 heures par mois, car c’était tout ce qu’il y avait de disponible. L’on a décrit sa présence comme étant bonne, et il a été mentionné que ses seules absences étaient pour prendre soin de sa fille ou pour les rendez-vous occasionnels chez le médecin.

[...]

[53] [L] » appelant a travaillé du 3 avril 2012 au 15 mai 2012 en tant que chauffeur de camion comme travail saisonnier d’avril à mai. L’appelant travaillait 8 heures par jour. Il a été noté qu’il s’agissait d’un emploi à temps partiel, car c’était tout ce qu’il y avait de disponible. L’on a décrit sa présence au travail comme étant bonne, et aucune absence n’avait été notée.

[...]

[55] L’appelant a fait valoir que ses emplois, depuis 1987, ne sont pas durables et qu’il n’était pas capable de travailler régulièrement. Cependant, les tribunaux ont déterminé (Canada (MDRH) c. Scott, 2003, CAF 34) que le terme « régulièrement » qualifie l’invalidité plutôt que l’occupation. De plus, le Tribunal s’est appuyé sur l’affaire Chandler c. MDRH (25 novembre 1996), CP 4040 (CAP) aux fins de référence, laquelle précisait que le terme « régulièrement » signifie que l’appelant doit être capable de se présenter au travail aussi souvent qu’il le doit. La prévisibilité est essentielle. Les éléments de preuve à l’appui des employeurs de l’appelant en 2010 et en 2012 démontrent que la présence au travail de l’appelant était bonne, qu’il a été capable de se présenter au travail lorsqu’il le fallait et qu’il a été capable de répondre aux exigences de l’emploi. [Mis en évidence par le soussigné]

[12] La division générale a conclu que le demandeur était capable de travailler régulièrement et qu’il était capable de se présenter au travail lorsque cela est nécessaire. Il est donc impossible d’affirmer que la division générale ne s’est pas penchée sur la question à savoir s’il était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. En effet, la division générale a conclu, en se fondant sur la preuve qui lui avait été présentée, que le demandeur était capable de travailler de manière fiable et sur une base régulière. Elle a conclu que sa présence au travail était bonne, qu’il était capable de se présenter au travail lorsque cela était nécessaire et qu’il était capable de répondre aux exigences de l’emploi. Je ne suis pas convaincue qu’un appel fondé sur cet argument ait une chance raisonnable de succès.

c. Employeur bienveillant

[13] Le demandeur soutient que la division générale a également omis de tenir compte du fait qu’il a travaillé pour un employeur bienveillant après la date de fin de sa période minimale d’admissibilité et que son emploi ne devrait donc pas être considéré comme étant une « occupation véritablement rémunératrice ». Il soutient également que la division générale a commis une erreur en déterminant que son revenu de 2010 excédait tous les seuils pour être considéré comme étant « véritablement rémunérateur » (GD4-2).

[14] La division générale a mis l’accent sur les emplois de 2010 et de 2012 du demandeur lorsqu’elle a déterminé s’il était capable de régulièrement détenir une occupation véritablement rémunératrice. La division générale a résumé les éléments de preuve concernant les emplois du demandeur en 2010, et ce, au paragraphe 34, notant que le demandeur a travaillé comme chauffeur à temps partiel du 20 janvier 2010 au 13 décembre 2010. La division générale a fait référence au questionnaire de l’employeur, notant que l’employeur a décrit la présence du demandeur comme étant bonne, et que ses seules absences étaient pour prendre soin de sa fille. Le demandeur a travaillé environ 75 heures par mois, car c’était tout ce qu’il y avait de disponible. La division générale a également écrit ce qui suit :

[traduction]

La qualité de son travail a été décrite comme étant bonne, et il n’avait besoin d’aucune mesure particulière ou aucune aide de la part de ses collègues. L’employeur a également noté que l’appelant avait la capacité de répondre aux demandes de l’emploi et qu’il a quitté son emploi [...]. [L]'appelant a affirmé qu’il a arrêté de travailler le 13 décembre 2010, car il devait prendre soin de sa fille et cet employeur ne voulait pas lui accorder un congé.

[15] La division générale a résumé les éléments de preuve concernant les emplois du demandeur en 2012, et ce, aux paragraphes 26 et 37, notant que le demandeur était un employé saisonnier pour lequel il a conduit des camions du 3 avril 2012 au 15 mai 2012. Il travaillait huit heures par jour. Il a été noté qu’il s’agissait d’un emploi à temps partiel, car c’était tout ce qu’il y avait de disponible. L’employeur a décrit le travail du demandeur comme étant bon, et a mentionné qu’aucune absence n’avait été notée. La division générale a également écrit que le demandeur [traduction] « avait la capacité de faire le travail, son travail était satisfaisant et il n’avait pas besoin de l’aide de ses collègues ou de mesures particulières » (GT 5-21 – GT 5-23).

[16] Le demandeur a également travaillé comme camionneur du 26 juin 2012 au 31 août 2012. Un questionnaire d’employeur pour cette période révèle qu’il a travail de 7 à 10 heures par jour, et de 35 à 50 heures par semaine. La division générale a noté que [traduction] « la présence [du demandeur] a été décrite comme étant bonne, il n’avait aucune absence et il avait la capacité de faire le travail ».

[17] La division générale a accepté les éléments de preuve concernant les emplois du demandeur en 2010 et en 2012, comme cela a été formulé aux paragraphes 51 et 53. Même si la division générale n’a pas précisément utilisé l’expression « employeur bienveillant » dans son analyse, il est clair que la division générale s’est penchée sur cette question lorsqu’elle a tenu compte de la nature de l’emploi du demandeur, des demandes qui lui ont été imposées et lorsqu’elle a tenté de déterminer s’il était capable de s’acquitter de ses tâches et de ses responsabilités sans avoir besoin de mesures d’adaptation spéciales ou d’arrangements spéciaux.

[18] Je ne suis pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès selon l’argument que la division générale aurait omis de tenir compte du fait que les employeurs du demandeur étaient bienveillants.

d. Revenu de 2010

[19] Le demandeur soutient que la division générale a commis une erreur en déterminant que son revenu de 2010 excédait tous les seuils pour être considéré comme étant « véritablement rémunérateur ».

[20] La division générale a noté que le demandeur avait des revenus sur un T4 totalisant 14 271 $ (paragraphe 34). Ce montant reflète principalement le revenu pour son emploi chez KRW Enterprises Inc. Le demandeur avait un revenu nominal provenant de son emploi pour GBW Auto Services Inc. (GD18-4 et GD18-5).

[21] Cependant, la division générale n’a pas effectué d’analyse afin de suggérer qu’il y avait un lien entre le revenu d’emploi et le fait d’occuper une occupation véritablement rémunératrice. Plutôt, elle a effectué son analyse sur la question à savoir si l’emploi du demandeur constituait une occupation véritablement rémunératrice en examinant la nature de son emploi, les heures qu’il a travaillé, les dates auxquelles il a travaillé et si plus de travail lui était disponible, les tâches qu’il a accomplies et s’il était capable de s’acquitter de ses responsabilités sans mesures d’adaptation spéciales ou arrangements spéciaux. Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès selon l’argument voulant que la division générale ait utilisé son revenu de façon inappropriée afin de déterminer si son emploi constituait une occupation véritablement rémunératrice.

e. Lacunes dans les dossiers médicaux

[22] Le demandeur reconnait qu’il y a des lacunes dans les dossiers médicaux, notamment pour les années au cours de la période minimale d’admissibilité ou vers la fin de la période minimale d’admissibilité, mais il soutient que l’on ne devrait pas lui tenir rigueur. Néanmoins, le demandeur soutient que les documents qui avaient été présentés à la division générale suffisaient pour prouver qu’il souffrait d’une invalidité grave d’ici la fin de sa période minimale d’admissibilité et qu’il continue à être invalide depuis ce temps.

[23] Le fait qu’il y ait des lacunes dans les rapports médicaux ne constitue pas un moyen d’appel, conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS. La division générale doit se fonder sur la preuve documentaire qui lui a été présentée.

[24] Le demandeur soutient que le dossier documentaire qui avait été présenté à la division générale est suffisant pour prouver qu’il souffrait d’une invalidité grave et qu’il souffre d’une incapacité depuis 1987. Essentiellement, cette observation exige une nouvelle évaluation. Cependant, comme je l’ai noté précédemment, un réexamen et une réévaluation de la preuve ne se rattachent à aucun des moyens d’appel prescrits au paragraphe 58(1) de la LMEDS. Le rôle de la division d’appel n’est pas d’apprécier de nouveau l’affaire pour déterminer si la permission d’en appeler devrait être accordée ou refusée. Je ne suis pas convaincue que le demandeur ait une chance raisonnable de succès et réussisse à prouver qu’une révision est appropriée.

Conclusion

[25] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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