Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler relativement à la décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) le 2 mars 2016.

[2] La division générale a tenu une audience en personne le 9 février 2016. Il n’est pas contesté que la date de fin de la période minimale d’admissibilité dans la cause de la demanderesse est le 31 décembre 2020. Étant donné que cette date est située dans l’avenir, il incombait à la demanderesse de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était invalide à la date de l’audience ou avant cette date.

[3] Dans sa décision du 2 mars 2016, la division générale a conclu que la demanderesse était inadmissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) parce qu’elle n’était pas atteinte d’une invalidité « grave » au sens de l’alinéa 42(2)a) du RPC.

[4] La demanderesse a présenté cette demande de permission d’en appeler le 24 mai 2016.

Critère relatif à la demande de permission d’en appeler

[5] Les appels à la division d’appel sont régis par la partie 5 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). Selon le paragraphe 56(1) de la LMEDS, « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission& ».

[6] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[7] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès& ».

[8] La nécessité d’obtenir la permission d’en appeler devant la division d’appel s’inscrit dans l’objectif d’éliminer les appels qui n’ont aucune chance raisonnable de succès : Bossé c. Canada (Procureur général), 2015 CF 114, au paragraphe 34, et la permission d’en appeler sera accordé seulement si le demandeur démontre que l’appel a une chance raisonnable de succès fondée sur un ou plusieurs moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS : Belo‑Alves c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1100, aux paragraphes 70 à 73. Dans ce contexte, le fait d’avoir une chance raisonnable de succès consiste à « disposer de certains motifs défendables auxquels l’appel proposé pourrait avoir gain de cause » : Osaj c. Canada (Procureur général), 2016 CF 115, au paragraphe 12.

[9] Comme la Cour fédérale l’a récemment conclu dans l’affaire Parchment v. Canada (Procureur général), 2017 CF 354, au paragraphe 23 : [traduction] « Pour examiner l’appel, la division d’appel dispose d’un mandat limité. Elle n’a pas le pouvoir de procéder à une nouvelle audience […]. De plus, elle ne tient pas compte des nouveaux éléments de preuve. » De plus, le rôle de la division d’appel n’est pas de soupeser la preuve de nouveau : Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300, au paragraphe 33. Ce principe s’applique aux étapes de la permission d’en appeler et de l’appel. Le rôle de la division d’appel consiste plutôt à déterminer si la division générale a commis l’une des erreurs susceptibles de révision prévues au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, et de fournir réparation le cas échéant. En l’absence d’une erreur de ce genre, la loi ne permet pas à la division d’appel d’intervenir.

Observations

[10] Le défendeur n’a formulé aucune observation concernant cette demande de permission d’en appeler.

[11] La demanderesse fonde sa demande sur l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS : la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée. Plus particulièrement, elle déclare ce qui suit dans sa demande :

[traduction]
[...] Je crois que le membre du tribunal a mal interprété le billet du médecin rédigé par mon spécialiste. J’ai l’impression que, si le médecin était capable de présenter une nouvelle lettre précisant quelques points essentiels, la décision pourrait certainement faire en sorte que l’appel ait une forte chance de succès. J’attends encore des nouvelles du cabinet du spécialiste où j’ai laissé quatre messages afin de demander un rendez-vous avec le médecin.

J’ai l’impression que le membre du tribunal a fondé sa décision sur un élément de preuve mal interprété. Le spécialiste n’a pas été clair dans ses rapports médicaux. J’ai l’impression que, si le médecin expliquait les faits de manière plus approfondie dans un nouveau rapport médical, le membre estimerait que je satisfais aux exigences relatives aux caractères grave et prolongé.

[12] La demanderesse n’a pas joint dans sa demande de permission d’en appeler une [traduction] « nouvelle lettre » ou un [traduction] « nouveau rapport médical » de son spécialiste. Je souligne que la demanderesse n’a pas fourni une telle lettre ou un tel rapport au Tribunal entre la date du dépôt de sa demande de permission d’en appeler et la date de la présente décision.

Analyse

[13] La demanderesse a subi une blessure neurologique (pied tombant bilatéral à la suite de l’accouchement de son premier enfant), et son médecin spécialiste est Dr K. Kimpinski.

[14] Essentiellement, la demanderesse a deux objections : tout d’abord, elle n’est pas d’accord avec l’interprétation des rapports médicaux du Dr Kimpinski par la division générale, et, ensuite, elle croit que ses rapports médicaux n’étaient pas suffisamment clairs. Elle souhaite corriger cette lacune en me présentant d’autres éléments de preuve, à savoir une nouvelle lettre ou un nouveau rapport (qu’elle n’aurait pas encore obtenu de la part de Dr Kimpinski) dont la division générale ne disposait pas.

[15] Ma tâche est de déterminer si, sur le fondement de la preuve portée à la connaissance de la division générale, celle-ci a commis une erreur correspondant à la portée du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Comme il a été souligné ci-dessus, un appel devant la division d’appel n’est pas une occasion pour un demandeur de subir un nouveau procès. De plus, les nouveaux éléments de preuve ne sont pas admissibles dans le cadre d’une demande de permission d’en appel ou d’un appel. Il existe des exceptions limitées à cette règle, comme lorsqu’il existe une allégation de manquement au principe de justice naturelle, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Par conséquent, même si la demanderesse avait produit une nouvelle lettre provenant de son spécialiste médical, elle serait soit inadmissible dans le cadre de cette demande ou non pertinent relativement à la question de savoir si l’appel a une chance raisonnable de succès.

[16] Dans l’instance devant la division générale, il incombait à la demanderesse d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était invalide au sens du paragraphe 42(2) du RPC. Si la demanderesse croyait que les rapports de Dr Kimpinski n’étaient pas suffisamment clairs et si elle croyait qu’il fallait plus de documents pour présenter sa cause, il lui était loisible d’obtenir des rapports supplémentaires et approfondis, puis de les présenter à la division générale. Elle ne l’a pas fait, et il est maintenant trop tard pour prétendre que la division générale aurait rendu une décision différente si elle avait disposé d’éléments de preuve différents.

[17] Dans la décision Hideq v. Canada (Procureur général), 2017 CF 439, la Cour fédérale a souligné que, dans une demande de permission d’en appeler, la division d’appel [traduction] « doit examiner le dossier sous-jacent et déterminer si la DG-TSS [division générale] a omis de tenir compte d’un élément de preuve ou si elle a mal interprété ou ignorer des éléments de preuve. La permission d’en appeler devrait être normalement accordée si cet examen du dossier sous-jacent démontre que la preuve n’a pas fait l’objet d’un examen adéquat » (au paragraphe 14).

[18] J’ai examiné le dossier documentaire et l’enregistrement de l’audience en personne. Mon examen de la preuve dont disposait la division générale ne me mène pas à conclure qu’elle a ignoré ou mal interprété la preuve.

[19] Dans ses motifs, la décision de la division générale a examiné la preuve médicale ainsi que le témoignage fait par la demanderesse à l’audience. Plus particulièrement, elle a examiné attentivement les rapports du Dr Kimpinski (paragraphes 11, 12, 15 et 19). La division générale a mentionné au paragraphe 38 un rapport de janvier 2014 du Dr Kimpinski en soulignant que celui-ci a déclaré que le trouble dont était atteinte la demanderesse [traduction] « l’empêcherait d’occuper certains types d’emplois » (GD3-46). Au paragraphe 38, la division générale a déclaré ce qui suit :

[traduction]
[La demanderesse] était atteinte de la douleur et de la décoloration mentionnée par le Dr Davies et le Dr Greensmith lorsqu’elle consultait Dr Kimpinski et avant que celui-ci produise sa lettre du 30 janvier 2014. Si les problèmes de circulation causant la douleur de l’appelante [la demanderesse] et la décoloration avaient été un motif pour lequel elle ne pourrait occuper aucun poste, le Tribunal est confiant que Dr Kimpinski aurait tenu compte de ce point.

Étant donné que, comme il a été souligné dans les motifs au paragraphe 11, Dr Kimpinski traitait la demanderesse depuis juillet 2012, il ne s’agissait pas d’une conclusion déraisonnable.

[20] La division générale a continué en déclarant qu’elle préférait [traduction] « la preuve du neurologue spécialiste à celle de l’interniste et le médecin de famille de [la demanderesse]. Dr Kimpinski a une expérience et une connaissance de spécialiste relativement à l’état de [la demanderesse] que son médecin de famille ou son interniste ne possédait pas. » Les conclusions quant à la crédibilité et l’appréciation de la preuve sont des fonctions qui relèvent strictement de la division générale, à titre de juge des faits. Je ne constate aucun fondement me justifiant d’intervenir relativement à ces conclusions.

[21] La division générale a énoncé le bon critère juridique de l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général), [2002] 1 RCF 130, 2001 CAF 248, selon lequel le critère de la gravité doit être évalué dans un contexte réaliste en tenant compte de facteurs comme l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents professionnels et l’expérience de vie de la demanderesse. La décision de la division générale à savoir que la demanderesse n’avait pas établi que son invalidité respecte la définition de « grave » selon le RPC était fondée sur la preuve concernant ces facteurs et elle y était associée (paragraphes 42 à 44).

[22] Étant donné ce qui précède, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès et je dois donc refuser la demande au titre du paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS.

Conclusion

[23] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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