Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 24 juin 2016, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a accueilli l’appel formé par le défendeur contre une décision du ministre de l’Emploi et du Développement social (demandeur). Le défendeur s’était auparavant vu refuser une pension d’invalidité qu’il avait demandée au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). Le demandeur a interjeté appel devant la division générale.

[2] La division générale a tenu une audience par téléconférence et conclu ce qui suit :

  1. Le défendeur était atteint d’une invalidité « grave » et « prolongée » en décembre 2010.
  2. Le demandeur avait reçu la demande de pension d’invalidité du RPC du défendeur en octobre 2012.
  3. Le défendeur est donc réputé être devenu invalide en juillet 2011.
  4. Les prestations du RPC sont payables à compter de novembre 2011.

[3] D’après ces conclusions, la division générale a accueilli l’appel.

[4] Le demandeur a présenté une demande de permission d’en appeler (demande) à la division d’appel du Tribunal le 21 septembre 2016, dans le délai prescrit de 90 jours.

[5] Le demandeur avait demandé à la division générale de publier un corrigendum de sa décision, mais la division générale ne s’est pas exécutée.

Question en litige

[6] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable et analyse

[7] Conformément à l’alinéa 57(1)b) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), la demande est présentée à la division d’appel dans les 90 jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision.

[8] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS, « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ».

[9] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[10] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[11] Le demandeur fait valoir, à titre de moyens d’appel, que la division générale a commis une erreur de droit et tiré une conclusion de fait erronée dans sa décision. Les arguments du demandeur peuvent être résumés comme suit :

  1. Le défendeur a présenté sa première demande de pension d’invalidité du RPC en octobre 2012. Le demandeur a rejeté sa demande en février 2013.
  2. Le défendeur est réputé avoir soumis une deuxième demande de pension d’invalidité du RPC le 13 septembre 2013. Le demandeur a rejeté cette demande au départ et après révision.
  3. C’est la deuxième demande du défendeur qui faisait l’objet de l’appel devant la division générale.
  4. La division générale a commis une erreur de droit en concluant que la demande avait été présentée le 4 octobre 2012, ce qui a conduit à une erreur dans l’application de l’alinéa 42(2)b) du RPC, et l’a amenée à conclure, à tort, que le défendeur était réputé être devenu invalide en juillet 2011.
  5. La date de présentation de la seconde demande, à savoir le 13 septembre 2013, est la date qui devrait être utilisée pour établir la date réputée de l’invalidité et du versement des prestations.
  6. La division générale a conclu que le défendeur était atteint d’une invalidité grave et prolongée en décembre 2010, et le demandeur ne conteste pas la conclusion qu’il était atteint d’une « invalidité grave et prolongée ».
  7. La date réputée du début de l’invalidité devrait être juin 2012, en fonction de la date de présentation de la deuxième demande.
  8. La division générale a commis une erreur de droit en concluant que la pension devait être versée à compter de novembre 2011, conformément à l’article 69 du RPC.
  9. La date de prise d’effet du versement, légalement, survient quatre mois après la date réputée de l’invalidité, et serait donc octobre 2012 en l’espèce.

[12] La division générale a résumé comme suit les documents relatifs à la demande de pension d’invalidité du RPC :

  1. Une demande de pension d’invalidité du RPC estampillée le 4 octobre 2012.
  2. Un rapport médical du RPC estampillé le 13 septembre 2013.

[13] La division générale n’a pas fait référence à la lettre de la décision initiale du défendeur (datée du 17 janvier 2014) ni à la lettre de sa décision de révision (datée du 5 août 2014).

[14] Dans la lettre portant sur la décision initiale, il est écrit que la demande est considérée comme ayant été reçue le 13 septembre 2013.

[15] Le dossier de révision figure au dossier d’appel. En plus des lettres relatives aux décisions rendues quant à la demande présentée le 13 septembre 2013, il contient aussi une lettre de la décision initiale rendue relativement à la demande de pension d’invalidité présentée par le défendeur le 4 octobre 2012.

Erreurs alléguées

[16] Les erreurs alléguées par le demandeur découlent de la conclusion de la division générale quant à la date de la demande de pension du RPC. Aucune allégation d’erreur ne porte sur la période minimale d’admissibilité (PMA) ou sur la conclusion voulant que le défendeur était atteint d’une invalidité grave et prolongée en date de décembre 2010, avant l’expiration de sa PMA.

[17] Comme le défendeur a présenté deux demandes de pension d’invalidité du RPC, il est essentiel de déterminer la demande sur laquelle porte cet appel. Ceci est particulièrement important dans ce cas-ci étant donné que le défendeur doit se fier aux dispositions du RPC relatives à la date réputée de l’invalidité afin de pouvoir commencer à toucher ses prestations d’invalidité à une date antérieure à celle où il a présenté sa demande.

[18] Comme le dossier contient deux demandes du RPC, la division générale devait expliquer pourquoi elle a conclu que la demande d’octobre 2012 — plutôt que celle de septembre 2013 — était celle qui était portée en appel.

[19] Dans Oberde Bellefleur OP Clinique dentaire O. Bellefleur c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 13, la Cour d’appel fédérale a affirmé qu’un conseil arbitral (ou un tribunal) doit, s’il décide qu’il y a lieu d’écarter des éléments de preuve contradictoires ou de ne leur attribuer que peu de poids ou pas de poids du tout, en expliquer les raisons, au risque, en cas de défaut de le faire, de voir sa décision entachée d’une erreur de droit ou taxée d’arbitraire.

[20] Comme la division générale n’a pas abordé le fait que le dossier contenait deux demandes du RPC, on pourrait dire que sa conclusion relativement à la date de la demande est arbitraire.

[21] La Cour d’appel fédérale a affirmé, dans l’arrêt Mette v. Canada (Procureur général), 2016 CAF 276, qu’il n’est pas nécessaire que la division d’appel traite de tous les motifs d’appel invoqués par un demandeur. En réponse au défendeur qui avançait que la division d’appel devait rejeter la demande de permission d’en appeler si elle jugeait que l’un des moyens invoqués n’était pas fondé, le juge Dawson a soutenu que le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS [traduction] « ne repose pas sur le rejet des moyens d’appel individuellement [...] les différents moyens d’appel peuvent être interdépendants à un point tel qu’il devient impossible de les analyser distinctement et un motif défendable peut donc suffire à accorder la permission d’en appeler. » Nous avons affaire à une telle situation en l’espèce.

[22] Puisque les erreurs de droit reprochées pourraient être solidaires de l’analyse servant à déterminer si la date de la demande est octobre 2012 ou septembre 2013, je ne m’appliquerai pas à décortiquer davantage les moyens d’appel au stade actuel de l’instance.

Permission d’en appeler accordée

[23] Au motif qu’une erreur dans les conclusions de fait ou une erreur de droit pourraient avoir été commises, je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[24] La demande est accueillie en vertu des alinéas 58(1)b) et 58(1)c) de la Loi sur le MEDS.

[25] Cette décision accordant la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

[26] J’invite les parties à présenter des observations écrites sur la pertinence de tenir une audience et, si celle-ci s’avère nécessaire, sur le mode d’audience qui convient, ainsi qu’à présenter leurs observations sur le fond de l’appel.

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