Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparutions

Appelant : T. M. et Dan Edwards (adjoint/soutien)

Représentantes de l’intimé : Regina Bah (stagiaire en droit) et Jennifer Hockey (avocate)

Aperçu

[1] Il s’agit de l’appel d’une décision rendue par la division générale le 21 décembre 2015. La division générale a conclu que l’appelant était invalide au titre du Régime de pensions du Canada à partir de mai 2013 et que les versements commenceraient quatre mois plus tard, en septembre 2013, conformément à l’article 69 du Régime de pensions du Canada. L’appelant soutient que la division générale a commis une erreur en concluant qu’il est devenu invalide en mai 2013, car il prétend qu’il est devenu invalide dans les faits en 2006 ou en 2007 et que le versement d’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada aurait dû en effet commencer à ce moment-là. La période minimale d’admissibilité de l’appelant a pris fin le 31 décembre 2016.

[2] L’appel dont je suis saisie a été instruit par vidéoconférence, conformément à l’alinéa 21b) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

Contexte

[3] L’appelant a soulevé plusieurs questions relatives à l’appel dans sa demande de permission d’en appeler. Il a fait valoir, par exemple, qu’il est frappé d’incapacité de façon continue depuis juillet 2008 au point où il était incapable de présenter une demande de pension d’invalidité. Pour évaluer la demande de permission d’en appeler, je ne suis pas convaincue qu’il existe une cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur en ne concluant pas qu’il était frappé d’une incapacité, car il n’y a aucune preuve médicale à l’appui de cette conclusion. De plus, selon le relevé des gains, j’ai remarqué que l’appelant a travaillé après 2008 (pages GD3-5 du dossier d’appel). Je n’étais pas convaincu qu’il y avait une cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur en ne concluant pas qu’il aurait dû toucher une pension d’invalidité rétroactive à partir de 2006 ou 2007, car la date la plus antérieure à laquelle il aurait pu être réputé invalide au titre du Régime de pensions du Canada est juin 2012, soit 15 mois rétroactifs depuis septembre 2013, moment où il a présenté une demande de pension d’invalidité (même si l’appelant pouvait être réputé invalide en juin 2012, la réelle date de début pourrait être beaucoup plus antérieure que celle-ci). L’appelant n’a fourni aucune observation supplémentaire justifiant la révision de ces moyens dans l’appel dont je suis saisie.

[4] Néanmoins, l’appelant maintenant qu’il est invalide de façon continue depuis au moins juillet 2008, moment où il a cessé de travailler chez Steel Company of Canada, entreprise pour laquelle il a travaillé pendant 28 ans. Dans sa demande de permission d’en appel, il a fait valoir que son invalidité l’empêchait de gagner sa vie depuis juillet 2008. Il reconnaît avoir tenté de travailler après 2008, mais il prétend que ses tentatives de travail ont été infructueuses, [traduction] « car il ne s’agissait pas d’un emploi conservé ou rémunérateur ». Dans sa lettre (reçue par le Tribunal de la sécurité sociale le 18 mars 2016), l’appelant a réitéré qu’il a eu de la difficulté à essayer d’obtenir un emploi rémunérateur et qu’il est incapable de conserver un emploi [traduction] « pendant une durée quelconque ».

[5] La division générale ne disposait d’aucune preuve selon laquelle l’appelant était incapable de conserver un emploi [traduction] « pendant une durée quelconque ». Même si les nouveaux éléments de preuve ne sont généralement pas admissibles devant la division d’appelant, sauf s’il s’agit d’une exception, ces observations donnent néanmoins à penser que la division générale pourrait avoir fait abstraction d’une question essentielle lorsqu’elle a décidé du mode d’audience approprié et lorsqu’elle a évalué la gravité de l’invalidité de l’appelant.

[6] Dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler, j’ai conclu que la division générale avait conclu que l’appelant était devenu invalide en mai 2013 parce qu’il avait travaillé jusqu’au 8 mai 2013. La division générale a mentionné que l’appelant a travaillé comme mécanicien industriel du 2 avril 2013 au 8 mai 2013, date à laquelle il a cessé de travailler en raison d’une maladie. L’arrêt de travail de l’appelant en mai 2013 semble avoir été le seul facteur sur lequel la division générale s’est fondée pour conclure que l’appelant est devenu invalide en mai 2013.

Questions en litige

[7] La première question dont je suis saisie est donc celle de savoir si la division générale a commis une erreur en concluant que, étant donné qu’il a travaillé jusqu’en mai 2013, l’appelant ne pouvait pas être invalide jusqu’à ce moment-là. Autrement dit, la division générale a-t-elle commis une erreur en n’examinant pas la question de savoir si l’emploi de l’appelant avant mai 2013 constituait une occupation véritablement rémunératrice?

[8] Cela comprend l’examen de savoir si le travail de l’appelant entre le 2 avril 2013 et le 8 mai 2013 représentait une tentative infructueuse de retourner travailler. Le cas échéant, cela aurait dû déclencher une vérification afin de savoir si l’appelant est devenu invalide à une date antérieure au 8 mai 2013.

Moyens d’appel

[9] L’appelant avait demandé une audience en personne dans le cadre de l’instance devant la division générale. Il a déclaré que, en raison de son anxiété, de sa dépression, de sa dyslexie et d’autres invalidités graves, il serait incapable de prendre pleinement part à une audience sous forme écrite. Néanmoins, la division générale a tenu une audience sur la foi de la preuve documentaire dont elle disposait après avoir conclu que les renseignements au dossier sont complets et qu’ils ne nécessitent aucune clarification. Même si le Tribunal de la sécurité sociale avait avisé l’appelant au début de novembre 2015 que la division générale avait l’intention de rendre une décision sur la foi des documents et des observations qui avaient été présentés, et elle avait donné aux parties la date limite du 14 décembre 2015 pour présenter d’autres documents ou observations. L’appelant n’a fourni peu de documents, voire aucun, concernant ses antécédents en matière d’emploi, y compris pour les années 2012 et 2013.

[10] Le 14 décembre 2015, l’appelant a présenté un document intitulé [traduction] « Un court résumé », dans lequel il a souligné ses antécédents médicaux et professionnels ainsi que ses antécédents de vie depuis environ la fin de 1978 (GD5). Le document aurait été envoyé au Tribunal par télécopieur, mais il manquait une page. Le document comprenait également un historique remontant jusqu’à 2006. À la fin de la chronologie, l’appelant a écrit ce qui suit :

[traduction]
À noter : la présente chronologie n’est pas terminée. Cependant, je la présente maintenant en raison des délais actuels. Je prévois présenter des renseignements et des documents supplémentaires bientôt.

[11] L’appelant n’a pas eu l’occasion de présenter des renseignements et des documents supplémentaires, car la division générale a rendu sa décision le 16 décembre 2015 après avoir précédemment fixé la date limite au 14 décembre 2015 pour la présentation de dossiers supplémentaires.

[12] La division générale a reconnu que l’appelant a eu des problèmes de dépendance et de santé mentale qui remontent aussi loin que l’année 1990. La division générale s’est fondée sur un avis du médecin de famille de l’appelant (GD3-42 à GD3-45). La division générale a déclaré qu’elle était particulièrement impressionnée par la [traduction] « lettre convaincante » datée du 9 octobre 2014 rédigée par Jennifer Radigan, MSS/TSI, travailleuse de soutien au sein du réseau AIDS Network (GD1-11 à GD1-12), qui a souligné que l’appelant était un client depuis 2005. Cependant, la division générale a conclu qu’aucun des deux avis n’offrait une orientation concernant le début de l’invalidité.

[13] Ni le médecin de famille ni Mme Radigan n’ont décrit le niveau de fonctionnalité ou les déficiences de l’appelant après juin 2012 jusqu’en mai 2013 ou, relativement à cette question et, comme le souligne l’intimé, Mme Radigan a fait remarquer que l’appelant avait signalé avoir passé la majorité de la dernière année [traduction] « au lit ». L’intimé soutient qu’il s’agit d’une autre preuve selon laquelle l’appelant est devenu gravement invalide à la mi-2013 ou vers ce moment. Cependant, le fait d’être cloué au lit ne constitue pas une preuve déterminante de la gravité de l’invalidité de l’appelant. Après tout, un appelant peut être atteint d’une invalidité grave sans être nécessairement alité.

[14] Après avoir conclu que l’appelant était invalide au moment de l’audience, la division générale aurait dû déterminer la date de début de l’invalidité ainsi que la date de l’invalidité réputée. Peu importe la question de savoir si l’appelant avait travaillé jusqu’en mai 2013, et, étant donné le manque de dossiers médicaux, la division générale aurait dû aborder les allégations de l’appelant selon lesquelles son emploi en 2013 (et probablement pendant l’année 2012) a été de courte durée et selon lesquelles il n’a peut-être pas détenu une ou des occupations véritablement rémunératrices au cours de cette période.

[15] La division générale a souligné qu’il y avait peu de renseignements au dossier concernant les antécédents professionnels de l’appelant. Pour autant que je puisse en juger, la division générale n’a pas enquêté sur la nature des gains d’emploi de l’appelant pour les années ultérieures à 2007, comme la durée de l’emploi, ses heures de travail, son salaire, ses tâches et responsabilités, ou sur la question de savoir s’il avait besoin de mesures d’adaptation dans son lieu de travail. Selon le registre des gains, l’appelant a déclaré des gains pour les années 2009, 2011, 2012 et 2013.

Année Gains non ajustés ouvrant droit à pension
2009 11 782 $
2011 29 940 $
2012 14 855 $
2013 13 377 $

[16] Le seul fondement sur lequel la division générale s’est fondée pour conclure que l’invalidité de l’appelant est devenue grave était le fait que l’appelant avait cessé de travailler en mai 2013. Autrement dit, la division générale a conclu que, étant donné le fait que l’appelant avait travaillé jusqu’au début de 2013, il avait dû nécessairement être régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Selon la décision de la division générale, la question de savoir si le membre a fait un lien entre le niveau des gains pour l’année 2013 et la portée de la capacité de l’appelant n’est pas claire.

[17] Cependant, cet emploi a été de courte dure, même si la raison pour laquelle l’appelant a cessé de travailler en mai 2013 n’est pas entièrement évidente selon la preuve documentaire. Aucune preuve présentée à la division générale ne décrivait la nature de l’emploi de l’appelant, les tâches et les responsabilités, la question de savoir s’il avait été capable de les assumer, ou autre. La seule preuve de l’appelant était qu’il était [traduction] « [incapable] de conserver un emploi stable » (GD5-5). Il n’y avait simplement aucun fondement probatoire concret sur lequel le membre de la division générale pourrait se fonder pour conclure que l’appelant était régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice en 2013, que l’emploi d’avril à mai 2013 constituait une occupation véritablement rémunératrice ou que l’emploi d’avril à mai 2013 ne représentait une tentative infructueuse de retour au travail.

[18] Dans le même ordre d’idées, il y avait peu ou pas de preuve concernant tout autre emploi que l’appelant aurait pu détenir entre le 1er janvier 2013 et le 2 avril 2013. Il se pourrait bien que l’appelant n’ait pas eu de gains d’emploi durant cette période, même si cela est improbable étant donné le niveau de gains pour l’année 2013. Sur le plan hypothétique, l’appelant aurait pu occuper plusieurs postes au cours du début de l’année 2013, mais être incapable de les conserver en raison de son état de santé. Le cas échéant, il pourrait avoir satisfait aux exigences établies dans l’arrêt Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117.

[19] Dans les observations écrites, l’intimé soutient que la division générale a bel et bien analysé la question de savoir si les gains de l’appelant après 2008 démontraient qu’il détenait une occupation véritablement rémunératrice (AD2-6). L’intimé a cerné deux phrases où cette analyse aurait été effectuée. Les deux phrases sont les suivantes :

[traduction]
La situation a causé des problèmes émotifs et a éventuellement mené à de multiples dépendances. On doute qu’il soit employable dans une situation rémunératrice étant donné ses antécédents.

[20] À mon avis, ces deux phrases n’abordent pas la question de savoir si les gains de l’appelant après 2008 démontrent qu’il a détenu une occupation véritablement rémunératrice. Néanmoins, l’intimé convient que le registre des gains après 2008 établit que l’appelant était régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Dans les observations écrites, l’intimé fait valoir que la preuve présentée à la division générale démontre clairement que l’appelant a touché des gains véritablement rémunérateurs pour les années 2011 et 2012. Dans l’audience dont je suis saisie, l’intimé a fait valoir que les gains pour l’année 2013 démontrent clairement que l’appelant a touché des gains véritablement rémunérateurs.

[21] L’intimé m’a renvoyé à l’affaire Fancy c. Canada (Développement social), 2008 CF 1414, au paragraphe 13, où la Cour fédérale a déclaré que « le fondement de la non-admissibilité d’une personne à des prestations au titre du RPC est l’employabilité dans une occupation quelconque véritablement rémunératrice ». Cependant, cela repose sur l’hypothèse que cette personne détient une occupation véritablement rémunératrice. Il est prématuré de déterminer l’admissibilité ou la non-admissibilité, peu importe le cas, s’il n’y a eu aucune enquête sur les éléments suivants : 1) la question de savoir si cette personne est régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice; 2) la question de savoir s’il s’agit d’une occupation véritablement rémunératrice si cette personne est employée.

[22] L’intimé m’a également renvoyé à la décision Atkinson c. Ministre des Ressources humaines et du Développement social, 2014 TSSDA 6, au paragraphe 46, confirmée par l’arrêt Atkinson c. Canada (Procureur général), 2014 CAF 187. Dans cette décision, le membre de la division d’appel a déterminé si l’emploi de Mme Atkinson pouvait être considéré comme étant véritablement rémunérateur. En se fondant sur la décision Poole c. Ministre du Développement des ressources humaines (10 juillet 2003), CP20748 (CAP), le membre de la division d’appel a non seulement examiné les gains de Mme Atkinson, mais également la question de savoir s’ils correspondaient à une rémunération appropriée selon la nature du travail effectué. Le membre a également souligné que Mme Atkinson a effectué des heures de travail régulières chaque semaine, y compris le soir, et qu’elle était capable d’effectuer les tâches assignées sans obtenir de l’aide. En tenant compte de ces facteurs, le membre a conclu que Mme Atkinson avait la capacité de travailler et que son emploi était véritablement rémunérateur.

[23] Cependant, le membre de la division générale n’a pas fait cela ou tout autre type d’analyse ou d’enquête concernant l’emploi de l’appelant en 2013. Malgré la courte durée de l’emploi de l’appelant (ce qui n’est pas contesté), j’estime que la division générale n’a pas effectué une analyse ou enquête réelle ou significative concernant la question de savoir si l’emploi de l’appelant pouvait être considéré comme étant véritablement rémunérateur.

[24] Comme je l’ai mentionné précédemment, la division générale a conclu que, étant donné le fait que l’appelant avait travaillé jusqu’au début de 2013, il avait dû nécessairement être régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Il est possible de conclure de ce fait que le membre de la division générale a assumé d’emblée que le niveau des gains de l’appelant était véritablement rémunérateur, mais il n’y avait aucun fondement concret sur lequel un décideur pouvait se fonder pour mesurer la nature véritablement rémunératrice de gains avant le 29 mai 2014, date à laquelle l’article 68.1 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale est entré en vigueur et a prévu une définition statutaire de l’expression « véritablement rémunératrice ».

[25] Si la division générale avait enquêté sur la question de savoir si l’appelant était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice pendant l’année 2013 et qu’elle avait conclu qu’il l’était, la division générale aurait donc pu trancher la question de savoir si l’appelant pouvait être déclaré invalide avant 2013 en remontant au moins jusqu’en juin 2012 (cette date est primordiale parce qu’elle représente la date la plus hâtive à laquelle l’appelant aurait pu être réputé invalide, même si la vraie date de début pourrait être beaucoup plus tôt bien entendu). Même s’il était tentant de conclure que l’appelant détenait nécessairement une occupation véritablement rémunératrice pendant l’année 2012 étant donné le niveau de ses gains, il se pourrait bien que les gains de l’appelant pour l’année 2012 proviennent d’un emploi antérieur à juin 2012, c’est-à-dire que l’appelant pourrait ne pas avoir travaillé après juin 2012.

[26] La division générale a commis une erreur en concluant nécessairement que l’espèce que les gains de l’appelant reflètent l’existence d’une occupation véritablement rémunératrice sans avoir faire une enquête approfondie sur la nature de l’emploi de l’appelant. La durée de l’emploi de l’appelant d’avril à mai 2013 aurait dû signaler au membre que cela pourrait représenter une tentative infructueuse de travail. Au lieu de déclarer que l’emploi d’avril à mai 2013 ne pourrait pas avoir été véritablement rémunérateur sans avoir examiné l’emploi dans la première instance, il s’agissait d’une conclusion précipitée.

[27] Étant donné les faits en l’espèce, le membre de la division générale a commis une erreur en se fondant exclusivement sur le fait que l’appelant était employé pour conclure qu’il était régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. La division générale pourrait également s’être fondée sur le fait que l’appelant touchait certains gains, mais, étant donné les faits en l’espèce, cela pourrait également avoir été une erreur. Il pourrait y avoir des occasions où les gains importants demandent pratiquement une telle conclusion, mais l’espèce méritait une enquête étant donné la nature des déficiences de l’appelant. Il a souffert de problèmes de santé mentale qui ont eu des répercussions sur son milieu de travail. Même si le membre de la division générale n’a pas remarqué qu’il manquait une des pages du court résumé de l’appelant, il est évident selon le document [traduction] « Un court résumé » de l’appelant que ses problèmes de santé mentale et de dépendance étaient envahissants depuis longtemps.

[28] Je reconnais que l’appelant a fourni des renseignements et présenté des observations devant moi qui s’ajoutent aux éléments de preuve présentés devant la division générale, mais un appel devant la division d’appel ne permet généralement pas la présentation de nouveaux éléments de preuve, à moins qu’ils soient visés par les exceptions.

[29] Cependant, je ne me fonde pas sur les nouveaux éléments de preuve en l’espèce. Après tout, il y avait des éléments de preuve présentés à la division générale qui insinuaient ou laissaient entendre que l’emploi de l’appelant après le début de l’année 2012 pourrait ne pas avoir été véritablement rémunérateur. Dans son document [traduction] « Un bref aperçu » (GD5-5), l’appelant a écrit ce qui suit :

[traduction]
Au fur et à mesure que je développais de la force et une capacité mentale, j’ai essayé de retomber sur mes pieds aussitôt que je le pouvais en travaillant pendant de courtes périodes. J’ai un sens de l’éthique très développé, et il était important pour moi de rétablir cette structure dès que possible. It was all I could see at that time. Le fait d’être capable de travailler a toujours amélioré mon humeur; j’aimais mon emploi, mais pas la discrimination et le harcèlement constants dont j’ai souffert au fil des ans. Je n’ai pas été capable de conserver un emploi stable et j’ai dû refuser des offres d’emploi. J’ai été victime de harcèlement et de discrimination en raison de mon homosexualité et en raison de ma séropositivité dans la plupart des lieux de travail, ce qui n’a aidé en rien mon état de santé mentale/émotionnelle, qui était déjà mauvais. Je n’ai pas été du tout capable de travailler depuis, selon moi, quelque part au début de 2012.

(mis en évidence par la soussignée)

[30] Même si je remettais généralement à la division générale le choix du moment pour tenir une audience et du mode de celle-ci, il y a des lacunes évidentes dans le dossier d’audience en l’espèce, ce qui fait en sorte que l’instruction fondée sur le dossier documentaire dont le membre était saisi à ce moment-là ne leur permettait pas de prendre une décision pleinement éclairée concernant la situation de l’appelant en matière d’emploi. En grande partie comme dans l’affaire Murphy v. Canada (Procureur général), 2016 CF 1208, dans laquelle la Cour fédérale, dans les circonstances de l’affaire, doutait qu’une appréciation adéquate puisse avoir lieu sans une nouvelle audience devant la division générale, une audience approfondie au titre de l’alinéa 21b) ou 21c) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, dans l’instance devant la division générale, était probablement plus appropriée pour offrir à l’appelant une occasion de rendre un témoignage de vive voix, particulièrement étant donné que l’appelant avait informé le Tribunal des obstacles auxquels il se heurtait en ce qui concerne les autres modes d’audience.

[31] De plus, il est évident selon le document [traduction] « Un court résumé » de l’appelant qu’il avait l’intention de fournir des renseignements et des dossiers supplémentaires. La division générale aurait dû déterminer si tout renseignement ou dossier supplémentaire proposé et en attente de réception aurait eu une valeur probante relativement aux questions en litige et, le cas échéant, examiner le caractère approprié d’un ajournement (même si l’appelant ne l’avait pas demandé), au lieu d’adhérer avec acharnement à une date limite stricte pour la présentation de dossier (étant donné la proximité entre la date limite de présentation et la publication de la décision de la division générale, il est possible que le membre n’était pas au courant du document [traduction] « Un court résumé » de l’appelant avant de rendre sa décision).

[32] En résumé, la division générale a commis une erreur en assimilant le fait que l’appelant a travaillé jusqu’en mai 2013 avec une capacité régulière de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

[33] La division générale aurait plutôt dû se concentrer sur la question de savoir si l’appelant était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice et, le cas échéant, le moment où l’invalidité grave est survenue ainsi que la question de savoir si elle va vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. Cela aurait mené la division générale à examiner la question de savoir si l’emploi de l’appelant pourrait être considéré comme étant véritablement rémunérateur. Pour cette raison, j’accueille l’appel et je renvoie l’affaire à la division générale.

[34] Finalement, si l’appelant est incapable de fournir des éléments de preuve supplémentaires, y compris une preuve de témoins ou une preuve documentaire d’appui pour attester que son emploi, y compris l’emploi après juin 2012, représentait des tentatives infructueuses de retour au travail ou une incapacité de conserver un emploi en raison de ses problèmes de santé, sa demande de rétroactivité accrue d’une pension d’invalidité pourrait se voir refuser. Sans témoignage de vive voix ou preuve documentaire à l’appui, le membre de la division générale pourrait ne pas avoir d’autre choix que celui de conclure que les gains de l’appelant, y compris ceux pour les années 2012 et 2013, ont établi qu’il détenait un emploi véritablement rémunérateur jusqu’en mai 2013. Cependant, il serait précipité de tirer ces conclusions sans une appréciation appropriée.

Conclusion

[35] Étant donné ce qui précède, l’appel est accueilli. L’intimé ne conteste pas la conclusion d’invalidité de la division générale et il convient que sa décision concernant la date de début de l’invalidité en mai 2013 est correcte. Par conséquent, l’affaire sera renvoyée à un membre différent de la division générale afin que celui-ci tranche seulement la question de savoir si l’appelant a droit à des versements d’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada ayant une plus grande rétroactivité allant possiblement jusqu’en juin 2012, à savoir la date la plus antérieure à laquelle il peut être réputé invalide. Cela exigera nécessairement un examen de la question de savoir si l’emploi de l’appelant doit être considéré comme étant véritablement rémunérateur ou s’il représente une ou des tentatives infructueuses de travail.

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