Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est refusée.

Introduction

[1] Le demandeur souhaite obtenir la permission d’en appeler relativement à la décision datée du 29 septembre 2016 rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal). La division générale avait précédemment tenu une audience par téléconférence (originalement prévue par vidéoconférence) et avait conclu que le demandeur n’était pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). Elle avait conclu que son invalidité n’était pas « grave » avant sa période minimale d’admissibilité (PMA), qui a pris fin le 31 décembre 2011.

[2] Le 28 novembre 2016, dans les délais prescrits, le représentant du demandeur a présenté une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel. À la demande de la division d’appel, le demandeur a présenté d’autres observations écrites le 21 juin 2017.

Droit applicable

[3] Conformément au paragraphe 56(1) et 58(3) de la Loi sur le Ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission. La division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[4] Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] SLe paragraphe 58(2) du RPC prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[6] Pour que la permission d’en appeler soit accordée, il faut qu’il existe un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c. CanadaNote de bas de page 1. La Cour d’appel fédérale a déterminé qu’une cause défendable en droit revient à une cause ayant une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Fancy c. CanadaNote de bas de page 2.

[7] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience sur le fond. C’est un premier obstacle que le demandeur doit franchir, mais cet obstacle est inférieur à celui auquel elle devra faire face à l’audience relative à l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, le demandeur n’a pas à prouver sa thèse.

Question en litige

[8] Le membre doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Observations

[9] La demande de permission d’en appeler du demandeur, datée du 28 novembre 2016, reflétait les observations écrites présentées précédemment à la division générale. Étant donné que la division d’appel ne tient généralement pas compte du bien-fondé de la demande de pension d’invalidité d’un demandeur, j’ai demandé des observations supplémentaires.

[10] Dans sa lettre de réponse datée du 21 juin 2017, le représentant du demandeur a soutenu que la division générale :

  1. a fait abstraction d’un principe de justice naturelle en tenant l’audience par téléconférence, au lieu d’utiliser la vidéoconférence comme il avait été prévu initialement;
  2. n’a pas tenu compte de rapports médicaux pertinents démontrant que le demandeur a eu d’importants problèmes médicaux depuis au moins 2010.

Analyse

Mode d’audience

[11] Le demandeur laisse entendre que son droit d’être entendu a été limité par une défaillance technologique. Comme il a été consigné par la division générale dans sa décision :

[traduction]

L’audience était initialement prévue par vidéoconférence. Cependant, le matin de l’audience, la technologie de la vidéoconférence ne fonctionnait pas. L’appelant et son représentant ont consenti à poursuivre l’audience par téléconférence. L’audience a donc été tenue par téléconférence.

[12] Malheureusement, l’enregistrement audio disponible de la téléconférence est manifestement incomplet et manque la discussion sur le changement du mode d’audienceNote de bas de page 3. Par conséquent, je n’ai aucun moyen de confirmer si le demandeur et son représentant ont bel et bien consenti à la poursuite de l’audience par téléconférence. Si c’est le cas, ils ne peuvent pas maintenant prétendre que la division générale a causé une injustice à leur égard. Cependant, même s’ils n’ont pas consenti et que leurs objections ont été ignorées par la division générale, cela ne signifie pas qu’il y a eu manquement au principe de justice naturelle.

[13] J’ai examiné le dossier existant et je ne constate aucune raison de douter du compte rendu de la division générale. Le 24 février 2016, le demandeur a rempli le Formulaire de renseignements en matière d’audience (FRMA), mais il n’a pas précisé un mode qui serait inacceptable selon loi. À aucun endroit dans ses observations devant la division générale a-t-il prétendu que son représentait ou lui a refusé le consentement à la poursuite de l’audience par téléconférence.

[14] Le demandeur soutient que le changement de mode à la dernière minute l’a empêché de présenter sa cause efficacement. Selon lui, le principe d’équité exigeait que le juge des faits soit capable de voir les témoins afin de mieux évaluer la crédibilité.

[15] Il est malheureux que le service de vidéoconférence au centre de Service Canada à Oshawa soit soudainement devenu non disponible, mais la transition à la téléconférence, même avec les objections du demandeur, n’était pas intrinsèquement injuste. Ce serait une tout autre chose si la crédibilité du demandeur était un facteur principal dans le raisonnement de la division générale, mais la décision a porté sur d’autres facteurs, principalement le contenu de la preuve médicale documentaire sous-jacente.

[16] Aucun élément du FRMA n’aurait raisonnablement pu laisser croire que la préférence du demandeur déterminerait le mode d’audience. L’article 21 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit que la division générale peut tenir une audience au moyen de plusieurs modes. L’utilisation du mot « peut », en l’absence d’autre qualificatif ou condition, signifie que la division générale a le pouvoir discrétionnaire de prendre cette décision. On ne signifie toutefois pas que la discrétion de la division générale à l’égard d’une telle décision n’a rien à voir avec la raison. Cependant, la Cour d’appel fédérale a confirmé que pour renverser une ordonnance discrétionnaire, un appelant doit prouver que le décideur a commis une « erreur manifeste et dominanteNote de bas de page 4 » , mais je ne constate rien de tel en l’espèce.

[17] Il se trouve que la division générale a utilisé son pouvoir discrétionnaire pour choisir le mode d’audience qui lui semblait être le plus approprié dans les circonstances. Dans sa décision, elle a expliqué qu’elle poursuivait l’audience par téléconférence étant donné l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle elle doit procéder de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[18] Dans l’arrêt Baker c. CanadaNote de bas de page 5, la Cour suprême du Canada a établi que le concept d’équité procédurale est variable et qu’il est tributaire du contexte particulier de chaque cas. L’arrêt Baker énumérait un certain nombre de facteurs dont on peut tenir compte pour décider de la nature de l’obligation d’équité qui s’applique dans un cas en particulier, y compris l’importance de la décision pour la personne visée, les attentes légitimes de la personne qui conteste la décision et les choix de procédure que l’organisme fait lui-même, particulièrement quand la loi laisse au décideur la possibilité de choisir ses propres procédures.

[19] Je reconnais que les points en litige sont importants pour le demandeur, mais j’accorde aussi une grande importance à la nature du régime législatif qui régit la division générale. Le Tribunal a été établi pour régler les différends dont il est saisi de la manière la plus expéditive et économique possible. Pour ce faire, le législateur a adopté une loi qui donne au Tribunal un pouvoir discrétionnaire quant au choix du mode d’audience, soit par comparution en personnes, par vidéoconférence, par téléconférence ou au moyen de questions et réponses écrites. Ce pouvoir discrétionnaire de choisir le mode d’audience ne doit pas être restreint indûment.

Même si la division générale disposait d’un vaste pouvoir discrétionnaire pour se prononcer sur l’affaire, sa décision d’instruire l’appel par téléconférence au lieu de la vidéoconférence n’a pas été prise à la hâte, mais bien pour les motifs précisés, bien que sommairement, dans sa décision.

[20] À mon avis, ces arguments n’offrent aucune chance raisonnable de succès en appel.

Examen de la preuve

[21] Le demandeur prétend que la division générale n’a pas tenu compte de la preuve médicale pertinente, particulière des rapports selon lesquels il avait d’importants troubles psychologiques, y compris la dépression, l’anxiété et la preuve de mémoire, depuis la perte de son emploi en 2009.

[22] J’estime qu’il n’existe pas de cause défendable relativement à ce point. Comme il a été conclu dans l’arrêt Simpson c. CanadaNote de bas de page 6, un tribunal administratif chargé de tirer des conclusions de fait est présumé avoir tenu compte de tous les éléments de preuve dont il est saisi et n’est pas tenu de mentionner chacune des observations déposées par les parties. Cela dit, j’ai examiné la décision de la division générale, et rien ne me porte à croire qu’elle ait ignoré un aspect important du dossier probant présenté ou qu’elle n’en ait pas adéquatement tenu compte.

[23] À titre d’exemples d’éléments de preuve dont la division générale aurait fait abstraction, le demandeur a cité les rapports neurologiques de Dr Kim datés du 18 mai 2010 et du 7 septembre 2011, mais je souligne que les deux documents, comme beaucoup d’autres éléments de preuve, ont fait l’objet d’un résumé approfondi et équitable dans la décision. La division générale a ensuite abordé en détail les deux rapports dans le cadre de son analyse (aux paragraphes 78 et 79) pour finalement conclure que, en l’absence de résultats anormaux d’examens, rien ne prouvait que les problèmes de mémoire du demandeur étaient graves.

[24] Un tribunal administratif est libre d’examiner les renseignements pertinents, d’évaluer la qualité des éléments de preuve et de déterminer, le cas échéant, ceux qu’il convient d’admettre ou d’écarter. Comme la Cour d’appel fédérale l’a souligné dans l’arrêt Simpson :

[...] le poids accordé à la preuve, qu’elle soit orale ou écrite, relève du juge des faits. Ainsi, une cour qui entend un appel ou une demande de contrôle judiciaire ne peut pas en règle générale substituer son appréciation de la valeur probante de la preuve à celle du tribunal qui a tiré la conclusion de fait contestée.

[25] En tant que juge des faits, la division générale avait la compétence de soupeser la preuve comme il lui convient, pourvu que la conclusion soit défendable. Un appel auprès de la division d’appel n’est pas une occasion de présenter sa cause à nouveau sur le fond. Je suis autorisé à intervenir seulement si la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait qui est « abusive », « arbitraire » ou « tirée sans tenir compte des éléments ». En l’espèce, selon mon examen, la division générale a effectué une analyse détaillée et significative de la preuve sous-jacente aux troubles médicaux du demandeur et de la mesure dans laquelle ceux-ci ont influencé sa capacité de détenir régulièrement un emploi véritablement rémunérateur à partir du 31 décembre 2011.

Conclusion

[26] Comme le demandeur n’a invoqué aucun des moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la LMEDS qui auraient une chance raisonnable de succès, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

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