Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La permission d’en appeler est refusée.

Introduction

[1] La demanderesse a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) le 2 juin 2014. Le défendeur a rejeté la demande initialement et après révision dans une lettre datée du 29 janvier 2015 (lettre de décision de révision).

[2] Dans deux lettres séparées, marquées comme reçues par le défendeur le 21 janvier et le 26 janvier 2016 respectivement, la demanderesse a mentionné qu’elle voulait en appeler de la décision de révision afin de recevoir une pension d’invalidité. Le 13 février 2016, le défendeur a écrit à l’appelante et l’a informée du renvoi de ses lettres d’appel. Il était joint à la réponse un formulaire d’avis d’appel et les instructions pour en appeler directement au Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal).

[3] La demanderesse a dûment complété et présenté l’avis d’appel, lequel a été reçu par le Tribunal le 24 février 2016. À la quatrième page du formulaire, la demanderesse a mentionné avoir reçu la lettre de décision de révision le 29 janvier 2015.

[4] Dans une décision datée du 2 décembre 2016, la division générale du Tribunal a déterminé que la demanderesse avait déposé son appel après le délai imposé de 90 jours, prévu à l’alinéa 52(1)b) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS). La division générale a refusé de proroger le délai pour lui permettre d’interjeter appel, ayant soupesé les quatre facteurs établis dans la décision Canada c. GattellaroNote de bas de page 1.

[5] Le 15 décembre 2016, dans le délai de 90 jours prévu à l’alinéa 57(1)b) de la LMEDS, la demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler auprès de la division d’appel du Tribunal.

Question en litige

[6] Pour accorder la permission d’en appeler, la division d’appel du Tribunal doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale

[7] Conformément à l’article 23 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement sur le TSS), l’appel d’une décision devant la division générale est interjeté par le dépôt de l’appel à l’adresse, au numéro de télécopieur ou à l’adresse électronique — ou selon les modalités de dépôt électronique — fournis par le Tribunal sur son site Web.

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

[8] Aux termes de l’alinéa 52(1)b) de la LMEDS, un appel doit être interjeté devant la division générale selon le délai imposé, dans les 90 jours suivant la date à laquelle l’appelant reçoit communication de la décision de révision de l’intimé. En application du paragraphe 52(2), la division générale peut proroger le délai pour interjeter appel, mais en aucun cas un appel ne peut être interjeté plus d’un an suivant la date où l’appelant a reçu communication de la décision.

[9] Conformément aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la LMEDS, il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission, et la division d’appel accorde ou refuse cette permission. Le paragraphe 58(2) prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[10] Conformément au paragraphe 58(1), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[11] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience sur le fond de l’affaire. Il s’agit du premier obstacle que la demanderesse doit franchir, mais il est inférieur à celui auquel elle devra faire face lors de l’audience de l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, la demanderesse n’a pas à prouver sa thèse.

[12] La Cour d’appel fédérale a conclu que la question de savoir si une partie présente une cause défendable en droit revient à se demander si elle a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada c. HogervorstNote de bas de page 2 et Fancy c. CanadaNote de bas de page 3.

Observations

[13] Dans sa demande de permission d’en appeler, la demanderesse a présenté les observations suivantes :

  1. Elle reconnaît avoir été confuse par rapport au processus d’appel. Elle a passé du temps à communiquer avec des agents du gouvernement pour tenter de déposer des éléments de preuve médicale. On lui a finalement dit de présenter ses documents au Tribunal.
  2. Les médicaments qu’elle prend pour la douleur ont atteint sa mémoire et provoquent un sentiment de confusion. Elle a modifié sa médication et se sent beaucoup mieux.
  3. Elle demande compassion et compréhension. Certaines choses peuvent être laissées pour compte et passer inaperçues pendant un long moment.

[14] La demanderesse a aussi inclus un dépliant sur la thérapie cognitivo-comportementale pour le syndrome de stress post-traumatique. Le 9 juin 2017, elle a présenté un rapport médical du RPC, rédigé en mars 2017 par Pierrette Daigle, omnipraticienne.

Analyse

[15] J’ai examiné les observations de la demanderesse, de même que l’ensemble du dossier qui a été présenté à la division générale, et cet appel ne semble présenter aucune chance raisonnable de succès. La division générale a déterminé que la demanderesse a présenté l’avis d’appel au Tribunal plus d’un an après avoir reçu la lettre de décision de révision. Je ne constate pas de cause défendable à l’égard qu’une erreur a été commise en tirant cette conclusion.

[16] La division générale a souligné qu’il était peu probable que la demanderesse ait reçu la lettre de décision de révision, comme elle l’a indiqué, le 29 janvier 2015, le jour où la lettre a été envoyée. La division générale a choisi d’admettre d’office que le courrier au Canada est généralement reçu dans les 10 jours suivant la mise à la poste, et il en a découlé que la lettre a été communiquée à la demanderesse au plus tard le 8 février 2015. À mon avis, cette supposition était raisonnable et cohérente avec des dispositions analogues dans la loi, particulièrement à l’article 19 du Règlement sur le TSS (lequel régit les communications réputées).

[17] Je ne doute pas que la demanderesse ait été confuse par rapport au processus d’appel, et d’après ce que je vois au dossier, il est possible que les agissements du défendeur aient contribué, légèrement, au délai dans la présentation de sa demande au Tribunal. Cependant, le fait est que la demanderesse n’a pas déposé son appel avant le 24 février 2016, soit 381 jours après la date de réception réputée de la lettre de décision de révision.

[18] Le droit est clair et ne laisse aucune discrétion. Le paragraphe 52(2) de la LMEDS prévoit qu’aucun appel ne peut être présenté plus d’un an après la date où l’appelant reçoit communication de la décision. Malheureusement, le libellé de cette disposition est si strict qu’il n’offre aucune marge de manœuvre, même pas pour une personne, comme pour la demanderesse, pour qui les circonstances suscitent la compassion.

[19] Je souligne que la division générale a conduit une analyse sur les quatre facteurs établis dans Gattellaro et a jugé que, certes la demanderesse présentait une cause défendable qui renfermait un faible risque de préjudice pour le défendeur, mais elle a omis de présenter une explication raisonnable pour le retard, ou de démontrer une intention persistante de poursuivre l’appel. Toutefois, le rôle joué par ces facteurs dans l’issue n’est pas clair, parce que la division générale a finalement conclu que la prorogation du délai était prescrite par le paragraphe 52(2) de la LMEDS. À mon avis, compte tenu du libellé absolu du paragraphe 52(2), en association à la conclusion de la division générale que plus d’une année s’était écoulée avant que la demanderesse ne présente son appel, l’analyse de Gattellaro était superflue.

[20] Il est malheureux que la demanderesse ne puisse pas en appeler en raison de l’expiration d’un délai de dépôt. Cependant, la division générale était tenue d’appliquer le droit à la lettre, tout comme je le suis. La simple démonstration de l’intention constante de poursuivre l’appel n’est pas pertinente lorsque plus d’un an s’est écoulé depuis la révision. Si la demanderesse me demande d’appliquer le critère d’équité et d’infirmer la décision de la division générale, je dois souligner que je ne peux pas le faire, car je ne dispose pas de ce pouvoir discrétionnaire. Je ne peux qu’exercer les compétences qui me sont conférées par la loi constitutive de la division d’appel. L’arrêt Pincombe c. CanadaNote de bas de page 4 appuie cette position. Il prévoit qu’un tribunal administratif n’est pas une cour, mais un décideur prévu par la loi, et qu’il n’a pas la compétence d’accorder une quelconque forme de réparation équitable.

[21] La teneur du reste des observations de la demanderesse représente essentiellement une demande pour que la division d’appel examine et évalue sur le fond la preuve à l’appui de sa demande d’invalidité. Une telle demande dépasse les limites de la LMEDS, dont le paragraphe 58(1) prévoit des moyens d’appel très restreints. La division d’appel est seulement autorisée à déterminer si l’un des motifs de la demanderesse pour en appeler de la décision de la division générale se rattache à l’un des moyens d’appel mentionnés, et si l’un d’entre eux a une chance raisonnable de succès.

Décision

[22] À mon avis, la division générale n’a pas fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments figurant au dossier. Elle n’a d’ailleurs pas commis d’erreur de droit ou manqué à un principe de justice naturelle. Puisque les moyens d’appel soulevés par la demanderesse ne confèrent à l’appel aucune chance raisonnable de succès, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

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