Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le demandeur souhaite obtenir la permission d’en appeler de la décision de la division générale datée du 20 avril 2016, dans laquelle on déterminait que le demandeur avait cessé d’être invalide le 30 avril 2009, conformément au Régime de pensions du Canada.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Analyse

[3] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Pour accorder la permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs d’appel se rattachent aux moyens d’appel figurant au paragraphe 58(1) de la LMEDS et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale du Canada a confirmé cette approche dans Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300.

[5] Le demandeur soutient que la division générale a fondé sa décision sur trois conclusions de fait erronées, qu’elle les a tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

i. Méthodes comptables

[6] La division générale a jugé que le revenu brut et le profit brut pour l’entreprise du demandeur étaient véritablement rémunérateurs. La division générale a remis en question les méthodes comptables de l’entreprise et la façon qui expliquerait que le revenu net [traduction] « était grandement moindre que le brut », alors que l’entreprise ne comptait aucun autre employé que le demandeur, ne lui versait aucun salaire, n’employait pas de professionnels ou ne déclarait aucuns frais d’administration. La division générale a jugé qu’il aurait été raisonnable pour l’entreprise de payer le demandeur grâce aux [traduction] « importants gains bruts », puisque celui-ci en était le seul employé. La division générale a déterminé que les heures de travail de l’appelant pour une semaine importaient peu, puisque [traduction] « ce sont les revenus générés qui doivent être évalués comme considérables ou non. Un emploi à temps partiel peut être véritablement rémunérateur. » Finalement, la division générale a jugé que le demandeur détenait une occupation véritablement rémunératrice en 2009, et donc, qu’il n’était plus admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

[7] Le demandeur soutient que la division générale a erré en concluant que les méthodes comptables de son entreprise étaient douteuses.

[8] Bien que la division générale ait fait plusieurs commentaires injustifiés par rapport à l’entreprise du demandeur et à ses méthodes comptables, elle n’a finalement pas fondé sa décision sur les méthodes comptables de l’entreprise ou sur le fait que le revenu net [traduction] « était grandement moindre que le brut ». À l’évaluation de la question de savoir si le demandeur détenait une occupation véritablement rémunératrice, la division générale s’est appuyée, et sur le revenu brut de l’entreprise, et sur le revenu déclaré par le demandeur pour 2009 et pour 2010, ce qui, comme le membre l’a souligné, dépassait le revenu maximal admissible du Régime de pensions du Canada. Puisque la division générale n’a pas fondé sa décision sur ce qu’elle a perçu comme étant les méthodes comptables douteuses de l’entreprise, je ne suis pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès relativement à cette question.

ii. Revenu brut et profit brut de l’entreprise entre 2005 et 2011

[9] Au paragraphe 49, la division générale a écrit que [traduction] « chaque année, depuis 2005, le revenu brut a été bien au-delà du revenu admissible du RPC. Le Tribunal juge que le revenu brut et que le profit brut entre 2005 et 2011 étaient véritablement rémunérateurs. »

[10] Le demandeur explique qu’au moment où il a fait une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, il a non seulement informé le défendeur de l’existence de son entreprise, mais il lui a aussi mentionné qu’il continuerait de gérer l’entreprise jusqu’à ce qu’il ne puisse plus le faire. Quand le défendeur a ensuite approuvé sa demande pour une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, le demandeur a cru qu’il pourrait continuer de gérer son entreprise sans compromettre son admissibilité à la pension d’invalidité, surtout qu’il voyait son entreprise comme un simple passe-temps et qu’il ne récoltait que [traduction] « peu d’argent de cela ». Il ne savait pas qu’il pourrait être inadmissible à la pension d’invalidité en raison de son entreprise et suggère que le défendeur aurait dû l’avertir qu’il ne serait plus réputé être invalide si le revenu de son entreprise était jugé comme considérable. Le demandeur ne conteste pas autrement les conclusions de la division générale par rapport au revenu de son entreprise ou à ses propres revenus.

[11] Cette question ne fait pas partie des motifs d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la LMEDS. La question ne concerne pas l’une des erreurs présumées que la division générale aurait commises.

iii. État de santé du demandeur

[12] Le demandeur soutient que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée qu’elle aurait tirée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, car elle a jugé que l’état de santé du demandeur s’était amélioré depuis qu’on lui avait accordé une pension d’invalidité en 2005. Comme il a été déterminé que l’état de santé du demandeur s’était amélioré, la division générale a jugé que le demandeur n’était plus invalide. Le demandeur soutient toujours que son état ne s’est jamais amélioré.

[13] Au paragraphe 57, la division générale a souligné qu’à ce moment, le demandeur devait subir une greffe de poumon si la progression de la maladie continuait. La division générale a souligné que le demandeur a expliqué qu’en raison de ses efforts pour conserver sa santé, dont sa participation au traitement de physiothérapie pour ses poumons, la greffe n’a pas été requise. De cette information, la division générale a déterminé que le [traduction] « fait qu’il n’ait pas eu besoin d’une greffe de poumon en plus de 10 ans révèle que la progression de sa maladie, bien que permanente, n’est plus de la même gravité qu’en 2005 ». Au paragraphe 60, la division générale a souligné qu’en 2013, le Dr Brown, pneumologue, a mentionné avoir déjà formulé l’avis que le demandeur nécessiterait une greffe de poumon, mais que ce n’était plus le cas [traduction] « grâce aux avancées pharmacologiques » (GD2-287).

[14] Le demandeur déclare que s’il avait continué de travailler, il n’aurait pas pu maintenir son état de santé. Il souligne, par exemple, qu’avant son arrêt de travail en 2004, il faisait 30 minutes de physiothérapie, deux fois par jour, et qu’après son départ, il pouvait faire de trois à quatre heures de physiothérapie par jour. Il souligne que le Dr Brown a aussi écrit dans une lettre du 1er mai 2013 qu’il [traduction] « a été apte à maintenir sa santé à un niveau comparable à celui de 2005 » (GD2-287) et qu’il « doit être en traitement plusieurs heures par jour pour maintenir sa bonne santé actuelle ». Le demandeur nie avoir observé une amélioration quelconque de son état de santé et soutient que la seule amélioration est en fait le temps qu’il a pour s’occuper de lui-même.

[15] La division générale a grandement fondé ses conclusions sur l’avis médical du 1er mai 2013 du Dr Brown. Le Dr Brown a écrit [traduction] :

Heureusement, grâce aux avancées pharmacologiques et à l’accès aux médicaments, tels que le Pulmozyme, la tobramycine pour inhalation et l’aztréonam, [le demandeur] a pu maintenir sa santé à un niveau comparable à celui de 2005. C’est tout de même surprenant, car il y a 10 ans, nous avions anticipé que [le demandeur] démontrerait un déclin, comme il est infecté par la Burkholderia, une bactérie qui donne normalement lieu à un pronostic défavorable de fibrose kystique, et qu’il aurait progressivement eu besoin d’une greffe de poumon. Heureusement, cela n’a pas été le cas.

(mis en évidence par la soussignée)

[16] Le pneumologue n’a pas suggéré qu’une véritable amélioration de la santé du demandeur avait été observée. Tout au plus, il a indiqué que le demandeur [traduction] « a pu maintenir sa santé à un niveau comparable à celui de 2005 ». La division générale a toutefois déterminé que le maintien de la santé du demandeur se traduisait par un changement dans la gravité. Cependant, il existe une grande différence entre un changement dans la progression d’une maladie et le maintien d’une maladie, puisque cette dernière situation indiquerait que toute progression a cessé et que l’état aurait atteint un plateau. À cet égard, la division générale pourrait avoir mal interprété la preuve médicale.

[17] Bien que je sois prête à accorder la permission d’en appeler pour cette affaire, selon le motif que la division générale aurait basé sa décision sur la conclusion de fait erronée que la santé du demandeur s’était améliorée, le demandeur devrait se préparer à l’examen de la conclusion de la division générale quant au fait qu’il n’était plus régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. La division générale a tiré cette conclusion sur le fondement du revenu de l’entreprise et du revenu d’emploi du demandeur. Si un appelant n’est plus incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice, alors on ne peut établir qu’il souffre d’une invalidité grave aux termes du Régime de pensions du Canada.

Conclusion

[18] La demande de permission d’en appeler est accueillie. Cette décision accordant la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

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